1ère Chambre
ARRÊT N°82/2019
N° RG 17/02196 - N° Portalis DBVL-V-B7B-NZ2X
Etablissement Public POLE EMPLOI
C/
M. [S] [V]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 19 FÉVRIER 2019
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,
Assesseur : Madame Isabelle LECOQ-CARON, Conseillère,
Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 11 Décembre 2018, tenue en double rapporteur avec l'accord des parties, par Mme Françoise COCCHIELLO, Présidente de chambre et Mme Christine GROS, Conseillère, entendue en son rapport
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 19 Février 2019 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré initialement annoncé au 12 février 2019 à l'issue des débats
****
APPELANTE :
POLE EMPLOI, établissement public ayant son siège social
'[Adresse 1]',
[Adresse 1]
[Adresse 1],
agissant pour le compte de l'UNEDIC représenté par le Directeur Régional DES PAYS DE LA LOIRE et faisant élection de domicile au
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Bertrand GAUVAIN de la SCP GAUVAIN-DEMIDOFF, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Matthieu CAOUS-POCREAU de la SCP IPSO FACTO AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉ :
Monsieur [S] [V]
né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 1] (Maroc)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Benoît GEORGE de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Séverine LE ROUX-COULON de la SCP QUINIOU MARCHAND LE ROUX-COULON, BENACEUR-PETIT, Plaidant, avocat au barreau d'ANGERS
Monsieur [S] [V] a été embauché au mois de septembre 1975 dans la société d'exploitation des établissements [K] [V].
Au mois de juin 1980, cette société est devenue la SARL [V]. Le 27 décembre 1997, Monsieur [S] [V] a été nommé gérant de la société. Le 7 janvier 2006, il est devenu associé majoritaire de la SARL, après avoir démissionné de son mandat social.
Par un jugement du 12 janvier 2011, le tribunal de commerce d'Angers a prononcé la liquidation judiciaire de la société. Maître [T] [Q] a été désigné comme liquidateur judiciaire.
Par courrier du 11 février 2011, Maître [T] [Q], liquidateur de la société, a notifié à Monsieur [S] [V] son licenciement pour cause économique, sous la réserve expresse de la reconnaissance de son statut de salarié par l'AGS.
Le mandataire liquidateur a sollicité de la délégation UNEDIC-AGS (association pour la gestion du régime des créances des salariés) la prise en charge sous forme d'avances des salaires impayés de décembre 2010, janvier et févier 2011 et l'indemnité compensatrice de préavis.
Par courrier du 14 février 2011, la délégation UNEDIC-AGS a informé Maître [Q] du refus de prise en charge des salaires et indemnités au motif de l'absence de lien de subordination entre la SARL [V] et Monsieur [V] et par suite de l'absence d'un contrat de travail. Monsieur [V] a alors saisi le conseil des Prud'hommes d'Angers.
Par jugement du 10 septembre 2012, le conseil de prud'hommes d'Angers, saisi par Monsieur [V], s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce d'Angers. Monsieur [V] a formé un contredit.
Par arrêt du 26 mars 2013, la cour d'appel d'Angers a reçu le contredit de Monsieur [V] et infirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions, fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société [V] la créance de M. [V] consistant en rappel de salaires du 1er décembre 2010 au 11 février 2011, en congés payés y afférent, en indemnités de licenciement et en indemnités pour irrégularité de la procédure de licenciement, et ordonne la délivrance à M. [V] d'une attestation destinée à Pole Emploi et d'un certificat de travail.
Dans les motifs de son arrêt, la cour d'appel a retenu l'existence d'un contrat de travail au bénéfice de Monsieur [V].
Le 12 juillet 2013, le liquidateur a délivré l'attestation destinée à Pole Emploi.
Le 23 juillet 2013, Monsieur [V] s'est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi de Pole Emploi. Le 1er août 2013, il a demandé le bénéfice des allocations d'assurances chômage.
Par courrier du 11 décembre 2013, l'Etablissement Public Le Pole emploi, a rejeté sa demande au motif de la tardiveté de sa demande, retenant que plus de douze mois s'étaient écoulés entre la fin de son contrat de travail et son inscription.
Par acte du 14 janvier 2015, Monsieur [V] a assigné l'Etablissement Public Le Pole Emploi devant le tribunal de grande instance de Nantes aux fins de voir l'établissement public condamné à lui payer ses indemnités d'aide au retour à l'emploi.
Par jugement assorti de l'exécution provisoire, du 2 mars 2017, le tribunal a :
-déclaré recevable Monsieur [S] [V] en ses demandes,
-ordonné à Pole Emploi Pays de la Loire de procéder au calcul des droits de M. [S] [V] à l'assurance chômage suite à son licenciement du 11 février 2011,
-l'a condamné à lui payer le montant des indemnités d'aide au retour à l'emploi auquel il a droit,
-débouté les parties du surplus de leurs demandes,
-condamné Pole Emploi Pays de la Loire à payer à Monsieur [S] [V] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
-condamné Pole Emploi Pays de la Loire aux entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'Etablissement Public Le Pole Emploi a interjeté appel de ce jugement.
Vu les conclusions du 16 novembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et arguments de l'établissement public Le Pole Emploi qui demande à la cour de :
-réformer le jugement du 2 mars 2017 dont appel en l'ensemble de ses dispositions,
-débouter Monsieur [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de Pole Emploi,
-condamner Monsieur [V] à verser à Pole Emploi une somme de 3.000,00 € sur le fondement des dispositions de I'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
-condamner Monsieur [V] aux entiers dépens tant de première instance que d'appel, avec application des dispositions de I'article 699 du code de procédure civile.
Vu les conclusions du 19 novembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et Monsieur [V] qui demande à la cour de
-rejeter l'appel de Pole Emploi et le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
-confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf sur l'application de l'article 700 du Code de procédure civile,
-condamner Pole Emploi à payer à M. [S] [V] la somme de 3 000,00 € au titre de ses frais irrépétibles en première instance et celle de 3 500,00 € au titre des frais de même nature en appel,
-condamner Pole Emploi aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture était rendue le 20 novembre 2018.
MOTIFS DE LA DÉCISION:
L'Etablissement Public Le Pole Emploi, dans sa lettre du 11 décembre 2013, a refusé d'admettre Monsieur [V] au bénéfice de l'assurance chômage au motif que : « Il résulte de l'article 7§1er du règlement général annexé à la convention du 19 février 2009 relative à l'assurance chômage (applicable à toutes les fins de contrat de travail compris entre le 1er avril 2009 et le 31 mai 2011) que « la fin de contrat de travail prise en considération pour l'ouverture des droits à l'allocation d'aide au retour à l'emploi doit se situer dans un délai de 12 mois dont le terme et l'inscription comme demandeur d'emploi. »
Votre licenciement économique est intervenu le 11 février 2011, soit près de deux ans et demi avant votre inscription sur la liste des demandeurs d'emploi, il ne peut donner lieu à ouverture de droit au titre du régime d'assurance chômage. »
Ce motif ne fait pas obstacle à ce que dans le cadre d'un recours judiciaire, l'établissement public fasse valoir d'autres moyens pour refuser l'admission de Monsieur [V] au régime de l'assurance chômage.
Aux termes de l'article L5421-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date du licenciement de Monsieur [V] : «En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les travailleurs involontairement privés d'emploi ou dont le contrat de travail a été rompu conventionnellement selon les modalités prévues aux articles L5421-1 et suivants, aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre. »
Aux termes de l'article L5421-3 du même code dans sa rédaction alors applicable : «La condition de recherche d'emploi requise pour bénéficier d'un revenu de remplacement est satisfaite dès lors que les intéressés sont inscrits comme demandeurs d'emploi ('.) »
Aux termes de l'article L5422-20 de ce code dans sa rédaction alors applicable : «Les mesures d'application des dispositions du présent chapitre, à l'exception des articles L. 5422-14 à L. 5422-16, font l'objet d'accords conclus entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. »
Il résulte des dispositions de l'article 1er du règlement général annexé à la convention du 19 février 2009 relative à l'indemnisation du chômage, qu'un revenu de remplacement dénommé « aide au retour à l'emploi » est assuré aux salariés involontairement privés d'emploi qui remplissent les conditions d'inscription comme demandeur d'emploi. Il résulte de l'article 7 du même règlement que la fin du contrat de travail prise en considération pour l'ouverture des droits doit se situer dans un délai de 12 mois dont le terme est l'inscription comme demandeur d'emploi.
Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, si l'aide au retour à l'emploi est réservée aux salariés, l'inscription comme demandeur d'emploi n'est pas ouverte aux seuls salariés.
La circonstance que le 14 février 2011 le Centre de Gestion et d'Etude AGS ait refusé à Monsieur [V] une avance à défaut de lien de subordination avec l'employeur ne faisait pas obstacle à ce que Monsieur [V] demande son inscription comme demandeur d'emploi.
Dès lors que Monsieur [V] ne justifie d'aucune démarche d'inscription dans le délai de 12 mois à compter de son licenciement intervenu le 11 février 2011, il ne peut prétendre à un revenu de remplacement, même si la qualité de salarié ne lui a été reconnue que le 26 mars 2013.
Il résulte de tout ceci que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions et que Monsieur [V] sera débouté de l'ensemble de ses demandes.
PAR CES MOTIFS:
La cour, statuant par arrêt contradictoire;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions;
Statuant à nouveau:
Déboute Monsieur [V] de l'ensemble de ses demandes;
Y ajoutant;
Déboute l'établissement Public Pole Emploi de sa demande au titre des frais irrépétibles;
Condamne Monsieur [S] [V] aux dépens de première instance et en cause d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT