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18/09/2020 | FRANCE | N°17/08445

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 18 septembre 2020, 17/08445


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°276



N° RG 17/08445 (et 17/08352 joint) -

N° Portalis DBVL-V-B7B-ON6E













SAS BATEAUX NANTAIS



C/



Mme [U] [V]

















Infirmation partielle













Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES
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br>ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2020





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Conseillère,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé







DÉBATS :


...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°276

N° RG 17/08445 (et 17/08352 joint) -

N° Portalis DBVL-V-B7B-ON6E

SAS BATEAUX NANTAIS

C/

Mme [U] [V]

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Conseillère,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

En chambre du Conseil sanitaire du 03 Juillet 2020 en application des dispositions de l'article 6 alinéa 3 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, devant Madame Isabelle LECOQ-CARON, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Madame Natacha BONNEAU, médiatrice judiciaire,

ARRÊT :

Contradictoire, a prononcé publiquement le 18 Septembre 2020 par mise à disposition au greffe l'arrêt dont la teneur suit :

****

APPELANTE et intimée à titre incident :

La SAS BATEAUX NANTAIS prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Jocelyn ROBIN de la SELARL CHEVALLIER ET ASSOCIES, Avocat au Barreau de BREST

INTIMÉE :

Madame [U] [V]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 3] (44)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Viviane ROY, Avocat au Barreau de NANTES

FAITS et PROCÉDURE

La SAS Bateaux Nantais assure l'exploitation d'une activité de navigation fluviale de bateaux de promenade à partir de laquelle a été développée une activité de déjeuner et de dîner croisière dont la prestation de restauration est assurée par la société Evenday SRN.

Mme [U] [V] a été engagée le 20 janvier 1995 par la SARL SORECO par contrat à durée indéterminée en qualité de responsable activité. En application de plusieurs avenants successifs au contrat de travail, Mme [V] a occupé les fonctions de Maître d'hôtel pour l'entreprise SRN (nom commercial Le Jardin des Gourmets) à compter du 1er janvier 1998, de Chargée d'affaire pour la SA SECN-Le Jardin des Gourmets et la SAS Bateaux Nantais à compter de 2001, de Chargée de recrutement personnel exploitation pour la SAS Bateaux Nantais à compter du 1er septembre 2009, puis d'assistante ressources humaines à compter de juin 2012.

Dans le dernier état des relations contractuelles régi par la Convention collective nationale de la navigation intérieure et transports de passager, elle exerçait les fonctions de responsable de l'administration du personnel et paie, statut cadre niveau IV à compter du 1er avril 2013.

Le 4 mars 2011, Mme [V] a été reconnue travailleur handicapé à compter de cette date et ce jusqu'au 31 mars 2021.

En février 2014, les sociétés composant l'unité économique et sociale (UES) des filiales du Groupe GB, les SARL Evenday-SRN, SAS Bateaux Nantais et SAS Evenday Agence, ont été cédées au Groupe CONVIVIO.

Le 31 octobre 2014, lors d'une réunion extraordinaire, le Comité d'entreprise de l'UES a été informé d'un projet de licenciement économique pour huit salariés du Groupe GB. Le 17 novembre 2014, le Comité d'entreprise a été informé du licenciement de sept personnes dont deux au service ressources humaines où travaille Mme [V].

Le 3 décembre 2014, Mme [V] a eu connaissance de la suppression de son poste de travail et lui a été proposé un poste au sein d'une société RESTECO à [Localité 7], qu'elle a refusé le 10 décembre 2014. Le même jour, Mme [V] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 17 décembre 2014. La salariée a été licenciée pour motif économique par lettre du 29 décembre 2014. Mme [V] a adhéré au dispositif de congé de reclassement. La relation de travail a pris fin le 30 juin 2015.

Le 17 septembre 2015, Mme [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Nantes, aux fins de juger son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et obtenir les sommes suivantes:

'' 51.246 € net à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'' 51.246 € net de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de recherche de reclassement, à titre subsidiaire,

'' 51.246 € net de dommages-intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements,

'' 5.694 € net à titre d'indemnité pour non-respect des dispositions relatives à la notification des critères retenus pour l'ordre des licenciements,

'' 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La cour est saisie des appels formés les 28 novembre et 1er décembre 2017 par la SAS Bateaux Nantais contre le jugement du 6 novembre 2017, par lequel le conseil de prud'hommes a :

- Dit que la SAS Bateaux Nantais n'a pas satisfait à son obligation de recherche de reclassement,

- Dit que le licenciement de Mme [V] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- Fixé le salaire moyen de Mme [V] à la somme brute de 2.847 €,

- Condamné la SAS Bateaux Nantais à lui verser les sommes de :

'' 17.500 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'' 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- Débouté Mme [V] du surplus de ses demandes,

- Débouté la SAS Bateaux Nantais de ses demandes reconventionnelles,

- Condamné d'office la SAS Bateaux Nantais à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à Mme [V] dans la limite de deux mois d'indemnité,

- Condamné la SAS Bateaux Nantais aux dépens éventuels.

Les deux procédures ont été jointes par ordonnance en date du 28 septembre 2018.

Vu les écritures notifiées le 28 février 2018 par voie électronique par lesquelles la SAS Bateaux Nantais demande à la cour de :

- Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- Dire et juger que le licenciement pour motif économique de Mme [V] est justifié par une cause réelle et sérieuse,

- Dire et juger qu'elle n'a pas manqué à ses obligations en relation avec des règles afférentes aux critères d'ordre des licenciements,

- Débouter Mme [V] de l'ensemble de ses demandes,

- Condamner Mme [V] au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Vu les écritures notifiées le 4 juin 2018 par voie électronique par lesquelles Mme [V] demande à la cour de :

- Confirmer la position du Conseil des prud'hommes,

- Infirmer le jugement sur le quantum des sommes allouées,

A titre principal,

- Dire que son licenciement pour motif économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- Condamner la SAS Bateaux Nantais à lui verser la somme de 51.246 € net de dommages-intérêts pour rupture du contrat de travail sans cause réelle et sérieuse,

Subsidiairement,

- Dire que la SAS Bateaux Nantais n'a pas satisfait à son obligation de reclassement,

- Condamner la SAS Bateaux Nantais à lui verser la somme de 51.246 € net de dommages-intérêts pour non-respect de son obligation de recherche de reclassement,

- Condamner la SAS Bateaux Nantais à lui verser les sommes de':

'' 51.246 € net de dommages-intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements,

'' 5.694 € net pour non-respect des dispositions relative à la notification des critères retenus pour l'ordre des licenciements, |

- Dire que la moyenne mensuelle des salaires s'élève à la somme de 2.847 € brut en vertu de l'article R. 1454-28 du Code du travail,

- Ordonner à la SAS Bateaux Nantais de lui remettre un certificat de travail, une attestation employeur destinée à Pôle emploi, un reçu pour solde de tout compte et des bulletins de salaire, tous documents conformes à la décision, et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 10 ème jour suivant la notification de la décision à intervenir,

- Condamner la SAS Bateaux Nantais à lui payer la somme de 2.500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 25 juin 2020

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées par voie électronique.

***

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

Pour infirmation de la décision entreprise, la SAS Bateaux Nantais soutient en substance que le motif économique doit donc s'apprécier au sein du secteur d'activité propre au groupe GB'; que la restructuration des sociétés du groupe GB était nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité'; que l'emploi de Mme [V] a été supprimé'; que la lettre de licenciement est précise'; que la proposition de reclassement a été sérieuse et individualisée dans le cadre du groupe CONVIVIO'; que l'obligation de reclassement n'impose pas à l'employeur de proposer des postes ne correspondant pas à la qualification du salarié.

Pour confirmation de la décision dans son principe et réformation du montant de l'indemnité allouée, Mme [V] réplique essentiellement que les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise concernée'; que la société Bateaux Nantais appartient au groupe CONVIVIO; qu'aucun élément produit ne permet d'établir l'existence de difficultés économiques au niveau du groupe'; que la société Bateaux Nantais n'a proposé, au titre du reclassement, qu'un seul poste de chargée de recrutement et emploi en Ile de France, de qualification inférieure'; que la proposition n'était ni sérieuse, ni individualisée'; que les recherches de reclassement n'ont pas été réalisées sur l'ensemble du groupe CONVIVIO.

Aux termes de l'article'L.1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Une réorganisation de l'entreprise, lorsqu'elle n'est pas liée à des difficultés économiques ou des mutations technologiques, peut constituer une cause économique de licenciement à condition qu'elle soit effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou pour prévenir des difficultés économiques liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l'emploi. La sauvegarde de la compétitivité ne se confond pas avec la recherche de l'amélioration des résultats et dans une économie fondée sur la concurrence, la seule existence de la concurrence ne caractérise pas une cause économique de licenciement.

Lorsqu'une entreprise fait partie d'un groupe, les difficultés économiques de l'employeur doivent s'apprécier tant au sein de la société, qu'au regard de la situation économique du groupe de sociétés exerçant dans le même secteur d'activité, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux sociétés ou entreprises situées sur le territoire national.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 29 décembre 2014 est ainsi rédigée':

«' Nous faisons suite à votre entretien préalable du 17 décembre 20141, au cours duquel vous étiez accompagné par un représentant du personnel. Nous vous avons exposé les raisons qui nous conduisaient à envisager votre licenciement pour motif économique et vous avons informé être contraints de poursuivre la procédure vous concernant. Ainsi qu'il vous l'a été indiqué, notre société est contrainte de se réorganiser, afin de sauvegarder sa compétitivité et celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient. En effet, le secteur d'activité «Traiteur Organisateur de Réception» sur lequel nous intervenons est en effet fortement impacté par la crise économique qui sévit depuis 2009.

Plus précisément, ce contexte est à l'origine d'un ralentissement au sein de l'activité des prestations de restauration dans le domaine de l'événementiel, conséquence d'un environnement économique tendu plus difficile et qui se traduit notamment par la réduction ou la disparition chez nos clients des budgets clients consacrés a des manifestations, le développement recours à des appels d'offres conduisant à l'amplification du niveau d'exigence et l'orientation générale du niveau des prix à la baisse. Cette situation impacte gravement la situation économique de l'entreprise et a fortiori du secteur d'activité du groupe auquel nous appartenons et entraînent une forte pression sur les marges résultats et conduisant å des pertes importantes à partir de 2011. L'activité compte tenue du déséquilibre de son compte d'exploitation ne dégage plus la trésorerie nécessaire pour faire face à ses principales échéances tant pour les règlements de ses de ses collaborateurs, ni pour faire face à la gestion de sa dette et réduire son passif social cumulé.

La dégradation de l'activité au terme de l'exercice 2012/2013 s'élevait à - 527. 343 € pour un chiffre d'affaires de 9.274.352 € (consolidé, estimé), après déjà 2 exercices déficitaires sur les 3 années précédentes. Sur 4 ans, le montant cumulé des pertes s'élève à de 1.624.974 € soit une perte moyenne de 406.244 € par an. Au titre du dernier exercice clos, le résultat courant avant impôt consolidé s'élève à - 3 77 860€. Or, le résultat des actions que nous menons depuis plusieurs années, et notamment depuis février 2014, ne nous permet malheureusement pas d'espérer renverser cette tendance. En effet l'organisation n'a pas été adaptée assez rapidement à ce contexte. Les démarches de réorganisation initiées fin 2011 et surtout en 2012/2013 n'ont porté que très partiellement leurs fruits et les pertes perdurent. L'année 2012/2013 est une année de fusion de différentes entités de l'activité, et l'année de départ du Directeur comptable. Dans ce contexte un certain nombre de données ont pu être constatées comme erronées. Dans le contexte précité, notre situation devrait à nouveau se dégrader en 2015. L'activité économique générale tant sur le marché de la restauration événementielle que touristique n'est pas tournée vers la croissance. Ainsi si les services navigation et salons se maintiennent par rapport à l'exercice précédent, le service traiteur endure une forte baisse de l'ordre de -20% de son activité. La restauration sur sites est également mal orientée avec plusieurs sites très déficitaire': Cocotte en Verre, Parc de Procé à [Localité 3] et Cafétéria des Plantes à [Localité 5]. La réduction des budgets consacrés aux événements, la pression sur les prix se poursuivent et la diminution de l'importance des manifestations ne dégagent pas les moyens économiques permettant la poursuite de l'activité sur les mêmes bases sans la prise de nouvelles dispositions en complément des mesures de gestions engagées depuis le mois de février 2014. La situation actuelle ne nous laisse pas entrevoir d'améliorations. Nous nous trouvons dans l'absolue nécessité, afin de prévenir des difficultés plus importantes au sein de l'entreprise et du secteur d'activité du groupe auquel nous appartenons, de limiter leurs conséquences sur l'emploi et d'espérer retrouver une certaine compétitivité, d'adapter notre organisation à notre activité, à notre marché et à nos moyens.

A cet effet, nous avons décidé de'la nécessité de rechercher des mesures et solutions supplémentaires par la mise en place d'une organisation différente avec pour effet une restructuration qui s'accompagne des décisions suivantes :

La recherche de l'amélioration des marges par une meilleure maîtrise des coûts de production (matière première, fluides) et la mise en place de fiches techniques, la mise en place d'une analyse économique des prestations, la poursuite de la renégociation de contrats, l'arrêt du recours à certains prestataires extérieurs, pour assurer la pleine maîtrise des charges et leur proportionnalité à l'activité, une répartition et une redistribution des tâches d'administration et de gestion en interne permettant l'adaptation de la structure et des emplois à l'activité.

Cette réorganisation n'est malheureusement pas sans conséquence sur l'emploi et entraîne la suppression de sept postes dans les services administratifs et d'encadrement d'exploitation dont deux au sein de la catégorie professionnelle à laquelle vous appartenez.

Bien évidemment et conformément à nos obligations, nous avons étudié les possibilités de vous reclasser, tant en interne, qu'au sein du groupe auquel nous appartenons.

Ainsi nous vous avons proposé en date du 3 décembre une offre': Un poste de chargé de recrutement dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps complet au sein de notre société Resteco situé à [Localité 7]. Vous n'avez pas donné une suite favorable à cette proposition.

A ce jour, nous ne disposons pas d'autres solutions de reclassement.

Nous sommes donc contraints de vous notifier la rupture de votre contrat de travail après respect du délai de réflexion de 7 jours ouvrables applicable au licenciement collectif... '' (sic).

Il appert que le groupe CONVIVIO est devenu l'actionnaire unique du groupe GB le 2 février 2014'; que selon le compte rendu de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise de l'UES du groupe GB en date du 27 janvier 2014 relative au projet de cession des sociétés du groupe, ledit projet est motivé par «'la volonté du dirigeant de partir à la retraite, une situation économique ne permettant plus au dirigeant de rester seul et le souhait de cession du groupe à un acquéreur en lien avec la profession'». Au titre des conséquences sociales du projet de cession, il est précisé que la structure juridique du groupe GB est maintenue s'agissant d'une cession des titres sans impact sur la poursuite de l'activité commerciale sous les marques commerciales de chaque société ; que les contrats de travail des salariés sont maintenus.

Si le groupe CONVIVIO est exclusivement composé de sociétés intervenant dans le domaine de la restauration pour le compte de collectivités, tandis que la société Bateaux Nantais a une activité événementielle et/ou de restauration sur les bateaux, il n'en demeure pas moins que les sociétés du groupe CONVIVIO interviennent dans le même secteur d'activité que celle du groupe GB, à savoir la restauration. Il s'ensuit que le périmètre à prendre en considération pour examiner le motif économique du licenciement est celui du groupe CONVIVIO. De surcroît, il convient de relever que dans la lettre de licenciement du 29 décembre 2014 signée par M [D], directeur des relations humaines de la société Bateaux Nantais mais également du groupe CONVIVIO, précise que «'notre société est contrainte de se réorganiser afin de sauvegarder sa compétitivité et celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient'» (sic). Or à cette date, la société Bateaux Nantais appartient au groupe CONVIVIO. L'employeur ne verse au débat aucune pièce établissant que la compétitivité du groupe CONVIVIO était menacée et que le licenciement de Mme [V] était nécessaire pour la sauvegarder, étant observé que M [H], directeur général du groupe CONVIVIO affirmait en mai 2015 que «'présent sur les marchés de la restauration collective et commerciale, le groupe breton affiche 20% de croissance annuelle depuis sept ans, aussi bien par croissance externe qu'organique'» (sic).

Il s'ensuit que faute d'établir que le licenciement de Mme [V] était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du groupe CONVIVIO dont les sociétés exercent dans le même secteur d'activité que la société Bateaux Nantais, son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence il convient de confirmer la décision entreprise.

En application de l'article L1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé à celui-ci, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

A la date du licenciement, Mme [V], âgée de plus de 49 ans, travailleur handicapé depuis mars 2011 (hypoacousie), bénéficiait d'une ancienneté de 19 ans et son salaire était d'un montant de 2.847,52 € brut. Elle a perçu les allocations chômage à compter du 30 juin 2015 à hauteur de 1.519 € net par mois. Elle justifie d'un emploi de technicien qualifié auprès de ADAPEI 44 de mars à mai 2017 pour un salaire mensuel de 898,07 € brut. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, du préjudice causé par la perte injustifiée de son emploi et de la faible employabilité de Mme [V], il convient de lui allouer la somme de 45.000 € net à titre d'indemnisation. La décision sera infirmée de ce chef.

Sur l'ordre des licenciements

Lorsque le licenciement d'un salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse, il ne peut cumuler des indemnités pour perte injustifiée de son emploi et pour inobservation de l'ordre des licenciements.

Il n'y a donc pas lieu, après avoir retenu l'absence de cause réelle et sérieuse, d'examiner le moyen relatif aux critères d'ordre de licenciement.

Sur les indemnités chômage

En application de l'article L1235-4 du Code du travail, dans les cas prévus aux articles L1235-3 et L1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

En l'espèce, il convient d'ordonner le remboursement par la SAS Bateaux Nantais des indemnités chômage versées à Mme [V] dans la limite de 6 mois.

La décision entreprise sera infirmée de ce chef.

Sur la remise des documents

La SA Bateaux Nantais devra remettre à Mme [V] un bulletin de paye rectifié, un certificat de travail, une attestation Pôle Emploi et tout document utile sans qu'il y ait lieu à astreinte.

Sur les frais irrépétibles

La SA Bateaux Nantais sera condamnée aux entiers dépens et devra verser à Mme [V] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

INFIRME partiellement le jugement,

Statuant à nouveau

CONDAMNE la SA Bateaux Nantais à verser à Mme [V] une indemnité de 45.000 € net au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ORDONNE le remboursement à Pôle Emploi des indemnités chômage versées à Mme [V] dans la limite de 6 mois,

ORDONNE à la SA Bateaux Nantais de remettre à Mme [V] un bulletin de paye rectifié, un certificat de travail, une attestation Pôle Emploi et tout document utile sans qu'il y ait lieu à astreinte,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

CONDAMNE la SA Bateaux Nantais aux entiers dépens,

CONDAMNE la SA Bateaux Nantais à verser à Mme [V] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 17/08445
Date de la décision : 18/09/2020

Références :

Cour d'appel de Rennes 08, arrêt n°17/08445 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-18;17.08445 ?
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