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24/06/2022 | FRANCE | N°19/02635

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 24 juin 2022, 19/02635


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°323



N° RG 19/02635 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-PWVC













M. [W] [B]



C/



SAS SODI-OSIS (aux droits de la SAS SUEZ RV OSIS INDUSTRIAL CLEANING)

















Infirmation partielle













Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


r>COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 JUIN 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°323

N° RG 19/02635 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-PWVC

M. [W] [B]

C/

SAS SODI-OSIS (aux droits de la SAS SUEZ RV OSIS INDUSTRIAL CLEANING)

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 JUIN 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 31 Mars 2022

devant Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Madame [K] [E], Médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 24 Juin 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [W] [B]

né le 30 Mars 1968 à NANTES (44)

demeurant 33 La Savinais

44160 BESNE

Représenté par Me Pierre-Henri MARTERET, Avocat au Barreau de SAINT-NAZAIRE

INTIMÉE :

La SAS SODI OSIS venant aux droits de la SAS SUEZ RV OSIS INDUSTRIAL CLEANING anciennement dénommée SANINORD prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

Zone Industrielle La Palunette

13165 CHATEAUNEUF-LES-MARTIGUES CEDEX

Représentée à l'audience par Me Yann BONNAUDEAU-FURIC, Avocat postulant du Barreau de RENNES et ayant Me Arnaud LEBIGRE, Avocat au Barreau de ROUEN, pour conseil

Sur la période du 29 mars au 20 mai 2016, M. [B] a été embauché selon contrat à durée déterminée par la société SANINORD, devenue la SAS SUEZ RV OSIS INDUSTRIAL CLEANING, en qualité de chef d'équipe, niveau III, échelon 3, coefficient 225 de la convention collective de l'assainissement et de la maintenance industrielle.

La SAS SUEZ RV OSIS INDUSTRIAL CLEANING a pour activité principale la collecte et le traitement des eaux usées.

Le 29 mai 2018, M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Nazaire aux fins de :

' Le dire recevable en toutes ses demandes,

' Dire que la société SANINORD a eu recours du 21 mars 2016 au 20 mai 2016 à M. [B], sous contrat à durée déterminée, en méconnaissance des dispositions du code du travail, et que ce recours est discriminatoire,

' Requalifier son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à temps plein,

' Dire qu'il aurait dû être classé au niveau IV, échelon 1, coefficient 260 de la classification des emplois de la convention collective de l'assainissement et de la maintenance industrielle du 21 mai 2002 et recevoir une rémunération calculée sur la base du salaire minimal correspondant à ce coefficient,

' Qualifier la rupture du contrat requalifié intervenue le 20 mai 2016 de licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse,

' Condamner la société anciennement dénommée SANINORD à lui régler les sommes de:

- 1.812,28 € à titre d'indemnité spéciale de requalification,

- 271,64 € à titre de rappel de salaire,

- 27,16 € au titre des congés payés,

- 996,75 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis avec congés payés,

- 1.812,28 € à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure,

- 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour est saisie de l'appel formé le 18 avril 2019 par M. [B] contre le jugement du18 mars 2019, par lequel le conseil de prud'hommes de Saint-Nazaire a :

' Déclaré les demandes de M. [B] au titre de la requalification du contrat à durée déterminée prescrites,

' Déclaré les demandes au titre de la classification de M. [B] prescrites,

' Dit ne pas faire droit à l'ensemble de ses demandes,

' Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SAS SUEZ RV OSIS INDUSTRIAL CLEANING venant aux droits de la société SANINORD,

' Condamné M. [B] aux entiers dépens.

Par ordonnance du 4 mars 2022, le conseiller de la mise en état a :

' Prononcé l'irrecevabilité des conclusions et pièces remises et notifiées le 2 décembre 2019, par l'intimée, la société SODI-OSIS,

' Condamné la société SODI-OSIS à payer à M. [B] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'incident.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 16 mars 2022, suivant lesquelles M. [B] demande à la cour de :

' Dire n'y avoir lieu à prescription,

' Le dire recevable en toutes ses demandes,

' Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a refusé la demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Dire que la société SANINORD, désormais dénommée SASU SARP-OSIS OUEST, a eu recours du 21 mars 2016 au 20 mai 2016 à M. [B], sous contrat à durée déterminée, en méconnaissance des dispositions du code du travail et que ce recours est discriminatoire,

' Requalifier son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à temps plein,

' Dire qu'il aurait dû être classé à compter du mois de mars 2015 au niveau IV échelon 1 coefficient 260 de la classification des emplois de la convention collective de l'assainissement et de la maintenance industrielle du 21 mai 2002 et recevoir une rémunération calculée sur la base du salaire minimal correspondant à ce coefficient,

' Qualifier la rupture du contrat requalifié intervenue le 20 mai 2016 de licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse,

' Condamner la SASU SODI-OSIS, venant aux droits de SAS SUEZ RV OSIS INDUSTRIAL CLEANING, à lui régler les sommes suivantes :

- 1.812,28 € à titre d'indemnité spéciale de requalification,

- 271,64 € à titre de rappel de salaire,

- 27,16 € au titre des congés payés,

- 996,75 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis avec congés payés,

- 1.812,28 € à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure,

- 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 22 mars 2022.

Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prescription de la demande de requalition du contrat à duréé déterminée en contrat à durée indéterminée

M. [B] soutient que sa demande de requalification n'est pas prescrite en l'absence de prescription réduite exceptionnelle concernant les actions portant sur la conclusion du contrat de travail, de sorte que son action est soumise à la prescription quinquennale de droit commun. Il avance également que la prescription quinquennale est applicable aux actions exercées en application de l'article L. 1132-1 du code du travail en ce qu' il a 'été maintenu dans une situation de précarité et non embauché sous contrat à durée indéterminée, manifestement en raison de son nom de famille'. Subsidiairement, il fait valoir que la prescription biennale a commencé à courir qu'à compter du 29 mai 2016.

Il sera rappelé que la durée de la prescription des actions dépend de la nature de la créance objet du litige.

Il importe donc préalablement de déterminer la nature de la demande formulée par M. [B].

En l'espèce, la demande présentée par M. [B] devant les premiers juges était relative à une demande de requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et non en une action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrivant par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination au sens de l'article L. 1134-5 du code du travail.

D'ailleurs, il sera relevé que M. [B] ne formule aucune demande de dommages et intérêts au titre de la discrimination.

Il en résulte donc que la demande du salarié est relative exclusivement à une action en requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.

A cet égard, il convient alors de déterminer la prescription applicable à l'action en requalification d'un contrat à durée déterminée.

Selon l'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Par l'effet de la requalification des contrats à durée déterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée irrégulier.

Le contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

L'action en requalification du contrat à durée déterminée est une action relative à l'exécution du contrat soumise au délai de prescription de deux ans.

Il en résulte que le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au contrat à durée déterminée énoncé au contrat a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats à durée déterminée, le terme du dernier contrat et que le salarié est en droit, lorsque la demande en requalification est reconnue fondée, de se prévaloir d'une ancienneté remontant au premier contrat irrégulier

En l'espèce, le terme du contrat à durée déterminée de M. [B] est fixé au 20 mai 2016 tel qu'il résulte du bulletin de salaire du produit par le salarié (pièce n°4 dernière page).

M. [B] a introduit, le 29 mai 2018, une action en requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.

Il en résulte que le dernier jour de travail de M. [B] étant le 20 mai 2016, le délai de prescription de deux ans en matière de requalification court à partir de ce jour et le conseil des prud'hommes en a exactement déduit que cette action était prescrite lors de la saisine le 29 mai 2018.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le rappel de salaire lié à la reclassification

Pour infirmation à ce titre, M. [B] soutient essentiellement que son emploi relevait de la classification niveau IV échelon 3 coefficient 260, en raison de son statut de chef d'équipe.

Pour confirmation à ce titre, l'employeur rétorque qu'indépendamment de la question de la prescription qui se pose, il ressort de tant de l'examen de la reconstitution de carrière que de l'examen des différents contrats de mission de M. [B], qu'il a été employé en qualité de nettoyeur ou d'opérateur de nettoyage, aucune qualification de chef d'équipe ne lui ayant été accordée.

***

Sur la prescription

Suivant l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

En l'espèce, la créance objet de la demande de M. [B] a une nature salariale en ce qu'il s'agit d'une demande de rappel de salaire lié à la reclassification de son emploi.

En effet, la demande de rappel de salaire au titre de la reclassification de M. [B] est une demande à part entière et non un moyen au soutien de son action en requalification de son contrat à durée déterminée.

Il en résulte que le conseil des prud'hommes aurait dû retenir la prescription triennale de l'article L 3245-1 du code du travail. Le jugement sera infirmé de ce chef et la prescription triennale a commencé à courir qu'à compter du 20 mai 2015.

Sur le bien fondé de la demande

En droit, il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle prévue par son contrat de travail, de démontrer qu'il assurait de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification revendiquée.

En l'espèce, force est de constater que si M. [B] revendique une classification de chef d'équipe il ne s'appuie dans ses écritures sur aucune pièce pour étayer sa revendication se contentant seulement d'affirmer qu'il occupait un tel emploi.

M. [B] sera donc débouté de ce chef de demande.

Sur les frais et les dépens

Compte tenu de l'issue du litige, il convient d'ordonner le partage par moitié entre les parties des dépens d'appel.

L'équité commande de ne pas prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qui concerne la prescription relative à la demande de rappel de salaire au titre de la classification ;

Statuant à nouveau du chef infirmé,

DÉCLARE recevable la demande de M. [W] [B] au titre du rappel de salaire au titre de la classification mais l'en DÉBOUTE ;

et y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE le partage par moitié entre les parties des dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/02635
Date de la décision : 24/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-24;19.02635 ?
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