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06/07/2022 | FRANCE | N°20/00445

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 06 juillet 2022, 20/00445


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 20/00445 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QND3













CPAM DU FINISTERE



C/



Société [5]

































Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM D

U PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 06 JUILLET 2022



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des débats et...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 20/00445 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QND3

CPAM DU FINISTERE

C/

Société [5]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 06 JUILLET 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 11 Mai 2022

devant Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, magistrat rapporteur, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 06 Juillet 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 22 Novembre 2019

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal de Grande Instance de QUIMPER - Pôle Social

Références : 18/00480

****

APPELANTE :

LA CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE

[Adresse 1]

[Localité 3]

non comparante, non représentée, dispensée de comparution

INTIMÉE :

LA SOCIÉTÉ [5]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Marine ADAM, avocat au barreau de BREST

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 14 décembre 2016, Mme [N] [L], salariée en tant que téléconseillère au sein de la société [5] (la société), a déclaré une maladie professionnelle en raison d'un état de stress post-traumatique chronique sur traumatisme de type 2 (complexe).

Le certificat médical initial établi le 6 décembre 2016 est rédigé dans les mêmes termes, sans prescription de soins ou d'un arrêt de travail.

Par décision du 1er mars 2018, après instruction et suivant avis du 15 février 2018 du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Bretagne (CRRMP), la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère (la caisse) a pris en charge la maladie déclarée par Mme [L] le 14 décembre 2016 au titre de la législation professionnelle.

Par lettre recommandée du 30 avril 2018, la société a saisi la commission de recours amiable de l'organisme, laquelle, par décision du 25 octobre 2018, a rejeté ses demandes et confirmé l'opposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge du 1er mars 2018.

Le 27 novembre 2018, la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Quimper (recours RG n°18-00480).

La date de consolidation de l'état de santé de Mme [L] a été fixée au 5 mars 2018 et un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 15% lui a été reconnu.

Le 8 janvier 2019, la société a saisi le même tribunal, devenu pôle social du tribunal de grande instance de Quimper, contestant le taux d'IPP fixé par la caisse (recours RG n°19-00017).

Les dossiers n°18-00480 et n°19-00017 ont été joints à l'audience du 27 mai 2019, l'affaire se poursuivant sous le n°18-00480.

Par jugement du 22 novembre 2019, ce tribunal a :

- dit recevable et bien fondé le recours de la société ;

- déclaré inopposable à la société la décision du 1er mars 2018 de la caisse de reconnaître le caractère professionnel de la pathologie déclarée par Mme [L] le 14 décembre 2016 ;

- déclaré inopposable à la société la décision de la caisse de fixer le taux d'IPP de Mme [L] à 15% ;

- débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la caisse aux dépens.

Par déclaration adressée le 19 décembre 2019, la caisse a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 25 novembre 2019.

La caisse a été dispensée de comparution à l'audience, avec l'accord exprès de la société.

Par ses écritures parvenues au greffe le 19 février 2021, la caisse demande à la cour, au visa des articles R.441-11 et suivants, L.461-1, D.461-29 et D.461-30 du code de la sécurité sociale, de :

A titre principal,

- infirmer le jugement du pôle social du tribunal de grande instance de Quimper en ce qu'il a déclaré inopposable, à l'égard de la société, la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de Mme [L] ;

- constater que l'instruction de la demande de prise en charge de la maladie professionnelle de Mme [L] a été menée de manière contradictoire à l'égard de la société et que la caisse a pleinement satisfait à son devoir d'information préalable, conformément aux dispositions des articles R.441-11 et suivants du code de la sécurité sociale et à la jurisprudence ;

- constater que, par avis du 15 février 2018, le CRRMP a établi l'existence d'un rapport de causalité entre la maladie soumise à instruction et les expositions incriminées ;

- confirmer l'opposabilité de la décision de prise en charge de cette maladie professionnelle à l'égard de la société ;

A titre subsidiaire,

- confirmer l'opposabilité de la notification du taux d'IPP du 26 décembre 2018 à l'égard de la société ;

- rejeter, en tout état de cause, sa demande de paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société aux dépens.

Par ses écritures parvenues par le RPVA le 28 mai 2021, auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société demande à la cour de :

A titre principal,

Confirmer le jugement rendu le 22 novembre 2019 par le pôle social tribunal de grande instance de Quimper en ce qu'il a :

- dit recevable et bien fondé son recours ;

- déclaré inopposable à son égard la décision du 1er mars 2018 de la caisse de reconnaître le caractère professionnel de la pathologie déclarée par Mme [L] le 14 décembre 2016 ;

- déclaré inopposable à son égard la décision de la caisse de fixer le taux d'incapacité permanente partielle de Mme [L] à 15 % ;

- condamné la caisse aux dépens ;

A titre subsidiaire,

Ordonner la saisine d'un second CRRMP en application des dispositions susvisées ;

En tout état de cause,

- déclarer inopposable à la société la notification de taux d'IPP en date du 26 décembre 2018 ;

- condamner la caisse au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la caisse aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur le caractère contradictoire de l'instruction :

Par lettre du 16 juin 2017, la société a été informée de ce que la demande de Mme [L] était examinée dans le cadre du quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la maladie n'étant pas désignée dans un tableau de maladie professionnelle.

Il était encore précisé que le dossier serait transmis au comité régional de reconnaissance de maladie professionnelle (CRRMP) et qu'un délai ouvert jusqu'au 3 juillet 2017 lui était réservé pour venir consulter les pièces constitutives dossier, ce qu'elle a fait par l'intermédiaire d'un de ses représentants le 28 juin 2017, et formuler des observations.

Il ressort de l'avis du CRRMP que le dossier a été réceptionné par ses soins le 4 juillet 2017.

Par lettre du 6 juillet 2017, la caisse a transmis à la société des documents complémentaires adressés par Mme [L] « au moment de la période contradictoire » et a précisé que « ces documents n'étaient pas visibles lorsque vous êtes venu consulter le dossier à l'accueil, c'est pourquoi je vous les transmets ce jour ».

La société fait valoir que la caisse doit délivrer à l'employeur des informations de manière loyale.

Elle ne fait pas grief à la caisse d'avoir adressé au CRRMP l'avis du médecin du travail daté du 2 juillet 2017, soit postérieurement à sa consultation du dossier.

Elle fait valoir que ce n'est que le 6 juillet 2017, soit postérieurement à la date de transmission au CRRMP et à la réception effective des documents par ledit comité, que la caisse lui a adressé des éléments complémentaires apportés par la salariée ; que la caisse ne lui a pas permis d'avoir une information loyale pour la formulation de ses observations avant la transmission du dossier au CRRMP alors que le délai qui lui était imparti expirait le 3 juillet 2017.

La caisse réplique que la société a été en mesure de prendre connaissance de l'ensemble des éléments susceptibles de lui faire grief, celle-ci ayant été informée des pièces transmises tardivement par Mme [L] ; que le CRRMP n'a rendu sa décision que le 15 février 2018 de sorte que la société avait la possibilité de formuler des observations jusqu'à cette date, ce qu'elle n'a pas fait ; que le réception de ces nouveaux documents n'a eu aucune incidence sur l'instruction du dossier.

Sur ce :

Pour transmission au CRRMP, il résulte de l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale que le dossier constitué par la caisse primaire doit comprendre :

« 1° Une demande motivée de reconnaissance signée par la victime ou ses ayants droit et un questionnaire rempli par un médecin choisi par la victime dont les modèles sont fixés par arrêté ;

2° Un avis motivé du médecin du travail de la ou des entreprises où la victime a été employée portant notamment sur la maladie et la réalité de l'exposition de celle-ci à un risque professionnel présent dans cette ou ces entreprises ;

3° Un rapport circonstancié du ou des employeurs de la victime décrivant notamment chaque poste de travail détenu par celle-ci depuis son entrée dans l'entreprise et permettant d'apprécier les conditions d'exposition de la victime à un risque professionnel ;

4° Le cas échéant les conclusions des enquêtes conduites par les caisses compétentes, dans les conditions du présent livre ;

5° Le rapport établi par les services du contrôle médical de la caisse primaire d'assurance maladie qui comporte, le cas échéant, le rapport d'évaluation du taux d'incapacité permanente de la victime.

Les pièces demandées par la caisse au deuxième et troisième paragraphes doivent être fournies dans un délai d'un mois.

La communication du dossier s'effectue dans les conditions définies à l'article R. 441-13 en ce qui concerne les pièces mentionnées aux 1°, 3° et 4° du présent article.

L'avis motivé du médecin du travail et le rapport établi par les services du contrôle médical mentionnés aux 2° et 5° du présent article ne sont communicables à la victime, ses ayants droit et son employeur que par l'intermédiaire d'un praticien désigné à cet effet par la victime ou, à défaut, par ses ayants droit. Ce praticien prend connaissance du contenu de ces documents et ne peut en faire état, avec l'accord de la victime ou, à défaut, de ses ayants droit, que dans le respect des règles de déontologie.

Seules les conclusions administratives auxquelles ces documents ont pu aboutir sont communicables de plein droit à la victime, ses ayants droit et son employeur.

La victime, ses ayants droit et son employeur peuvent déposer des observations qui sont annexées au dossier».

En cas de saisine d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dont l'avis s'impose à la caisse, l'information du salarié, de ses ayants droit et de l'employeur sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief s'effectue avant la transmission du dossier audit comité régional. (2e Civ., 9 septembre 2021, pourvoi n° 20-17.256)

Les pièces complémentaires adressées par Mme [L] à la caisse par lettre datée du 25 juin 2017 ne figuraient pas dans le dossier constitué et mis à la disposition de l'employeur lorsque celui-ci est venu consulter le dossier.

Quand bien même la caisse a transmis à la société le double de ces pièces, elle ne lui a pas laissé la possibilité de présenter des observations dans un délai déterminé.

Dès lors, la caisse a manifestement manqué à son obligation d'information à l'égard de la société et partant au respect du contradictoire.

Dans ces conditions, la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de Mme [L] doit être déclarée inopposable à la société, le jugement étant confirmé en toutes ses dispositions.

2 - Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de la société ses frais irrépétibles.

La caisse sera en conséquence condamnée à lui verser à ce titre la somme de 1 000 euros.

S'agissant des dépens, l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la caisse qui succombe à l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement dans toutes ses dispositions ;

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère à verser à la société [5] une indemnité de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 20/00445
Date de la décision : 06/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-06;20.00445 ?
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