COUR D'APPEL DE RENNES
No 22/211
No RG 22/00504 - No Portalis DBVL-V-B7G-TC2M
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
article L 3211-12-4 du code de la santé publique
Nous, Philippe BRICOGNE, Président de Chambre à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Eric LOISELEUR, greffier placé,
Statuant sur l'appel formé le 05 Septembre 2022 à 15H40 par :
Mme [H] [N]
née le [Date naissance 2] 1988 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 3],
représentée par Me Franziska MOSIMANN, avocat au barreau de RENNES
Actuellement hospitalisée au [Adresse 4]
ayant pour avocat Me Franziska MOSIMANN, avocat au barreau de RENNES
d'une ordonnance rendue le 29 Août 2022 par le Juge des libertés et de la détention de LORIENT qui a ordonné le maintien de son hospitalisation complète ;
En l'absence de [H] [N], régulièrement avisée de la date de l'audience, représentée par Me Franziska MOSIMANN, avocat
En l'absence du tiers demandeur, régulièrement avisé,
En l'absence du procureur général régulièrement avisé, (avis du 05/09/2022)
En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé,
Après avoir entendu en audience publique le 12 Septembre 2022 à 11H15 l'avocat en ses observations,
Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE
Mme [H] [N] a été admise le 19 août 2022 en soins psychiatriques à la demande de Mme [K] [N], sa soeur aînée, au centre hospitalier de [Localité 5] sur la base d'un certificat médical du Dr. [F] du même jour décrivant notamment "un état de décompensation aigu sur un mode délirant et dissociatif majeur dans un contexte de rupture thérapeutique", ainsi qu'une opposition aux soins.
Le certificat médical des 24 heures du Dr. [I] fait état d' "une psychose chronique", avec un comportement très altéré et une "opposition aux soins (...) totale". Le certificat médical des 72 heures établi par le Dr. [L] constate que "la patiente reste dissociée, délirante", avec la persistance d'une opposition aux soins.
Mme [H] [N] a donc été maintenue au centre hospitalier de Caudan en soins psychiatriques en hospitalisation complète le 21 août 2022 et, le 25 août 2022, le directeur du centre hospitalier a, sur la foi d'un certificat médical du Dr. [G] mentionnant notamment un "parasitage de l'esprit par des idées délirantes de persécution et de toute puissance, non critiquée, associé à une désorganisation psychique avec opposition aux soins", saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lorient qui, par ordonnance du 29 août 2022, a maintenu le régime d'hospitalisation complète de Mme [H] [N].
Dans son certificat médical du 6 septembre 2022, le Dr. [G] note la "persistance d'un parasitage de l'esprit par des idées délirantes de persécution et de toute puissance", un "déni du caractère psychopathologique des troubles avec opposition aux traitements médicamenteux" et des "antécédents de passage à l'acte, souvent sur un mode défensif" ainsi que "des troubles cognitifs".
[K] [N], bien qu'en route pour l'audience, n'a finalement pas comparu malgré un léger report pour lui permettre d'y assister. Elle y était toutefois représentée par son avocat qui a soulevé l'irrégularité de la procédure d'urgence à la demande d'un tiers faute de caractérisation, dans le certificat médical initial, du risque d'atteinte à la personne. Le choix procédural est mauvais et aurait dû donner lieu à deux certificats médicaux. Par ailleurs, selon l'avocate, [K] [N] est maintenant consentante aux soins, de sorte que toute contrainte ne s'avère plus nécessaire.
DISCUSSION
Sur la recevabilité de l'appel
Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.
Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.
En l'espèce, Mme [H] [N] a formé le 5 septembre 2022 un appel motivé de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lorient l'ayant maintenue sous le régime de l'hospitalisation psychiatrique complète.
Cet appel, régulier en la forme, sera déclaré recevable.
Sur le fond
L'article L. 3212-3 du code de la santé publique dispose en son 1er alinéa que, "en cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts".
En l'espèce, Mme [H] [N] a été admise le 19 août 2022 en soins psychiatriques à la demande de Mme [K] [N], sa soeur aînée, au centre hospitalier de [Localité 5] sur la base d'un certificat médical du Dr. [F] du même jour décrivant notamment "un état de décompensation aigu sur un mode délirant et dissociatif majeur dans un contexte de rupture thérapeutique. L'entretien est rendu compliqué car le contact est mauvais, teinté de maniérisme. La patiente se montre extrêmement méfiante, réticente à livrer un contenu intra-psychique probablement délirant dont on a difficilement accès. Le discours est totalement hermétique, à tonalité interprétative. On retrouve un trouble du cours de la pensée, des barrages, des coqs à l'âne. L'alliance thérapeutique est fragile. Elle se montre opposée aux soins".
Si le praticien "certifie que son état de santé présente un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade", ce constat ne repose sur aucun motif particulier, comme un passage à l'acte ou un comportement agressif.
Il s'ensuit que c'est à tort que la procédure d'urgence a été utilisée à l'égard de [K] [N].
La procédure n'étant pas régulière, il conviendra d'ordonner la mainlevée de l'hospitalisation sous contrainte de [K] [N].
PAR CES MOTIFS
Nous, Philippe BRICOGNE, président de chambre, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,
Recevons Mme [H] [N] en son appel,
Infirmons l'ordonnance entreprise ,
Statuant à nouveau,
Ordonnons la mainlevée de l'hospitalisation sous contrainte de [K] [N],
Laissons les dépens à la charge du Trésor public.
Fait à Rennes, le 14 Septembre 2022 à 10H00
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, Philippe BRICOGNE, Président de Chambre
Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [H] [N] , à son avocat, au CH et ARS/tiers demandeur/curateur-tuteur
Le greffier,
Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD
Le greffier