La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/09/2022 | FRANCE | N°19/04360

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 30 septembre 2022, 19/04360


2ème Chambre





ARRÊT N°485



N° RG 19/04360

N° Portalis DBVL-V-B7D-P4TD





(1)







Caisse de Crédit Mutuel CREDIT MUTUEL [Adresse 6]



C/



Mme [Y] Née [R] [H]



















Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée



le :



à :



- Me DAOULAS

- Me GAONAC'H







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, ...

2ème Chambre

ARRÊT N°485

N° RG 19/04360

N° Portalis DBVL-V-B7D-P4TD

(1)

Caisse de Crédit Mutuel CREDIT MUTUEL [Adresse 6]

C/

Mme [Y] Née [R] [H]

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me DAOULAS

- Me GAONAC'H

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 21 Juin 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 30 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

CREDIT MUTUEL [Adresse 6]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Hélène DAOULAS de la SELARL DAOULAS-HERVE ET ASS., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de QUIMPER

INTIMÉE :

Madame [Y] Née [R] [H]

née le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Arnaud GAONAC'H, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de QUIMPER

2

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre préalable de crédit immobilier acceptée le 2 juillet 2006, la caisse de Crédit mutuel de [Adresse 6] (le Crédit mutuel) a, en vue de financer des travaux d'amélioration de l'habitat, consenti à M. [I] [H] et Mme [Y] [R] épouse [H]) un prêt de 100 000 euros au taux de 3,65 % l'an, remboursable en 180 mensualités de 776,77 euros, assurance emprunteur comprise.

Ce prêt était garanti par le cautionnement de la société Generali Proximité Assurances (GPA).

Par jugement du 14 octobre 2008, le tribunal de grande instance de Quimper a prononcé la liquidation judiciaire de M. [H], exerçant une activité d'architecte, la procédure ayant été clôturée pour insuffisance d'actif le 3 mai 2022.

Le Crédit mutuel a déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire le 23 décembre 2008 pour un montant de 88 899,03 euros outre les intérêts contractuels de retard, et, prétendant que les échéances de remboursement n'étaient plus honorées depuis novembre 2008, il s'est, par lettre recommandée du 30 décembre 2008, prévalu de la déchéance du terme à l'égard de Mme [H].

Selon quittance subrogative du 16 juin 2009 et courrier de même date, la caution a réglé au prêteur, au titre de trois prêts, une somme globale de 253 669,21 euros, dont 72 082,58 euros imputés sur le prêt litigieux du 2 juillet 2008.

Après avoir mis Mme [H] en demeure de régler le solde résiduel de sa créance par lettre recommandée du 18 avril 2018, le Crédit mutuel l'a, par acte du 14 août 2018, fait assigner en paiement devant le tribunal de grande instance de Quimper.

Par jugement du 25 juin 2019, les premiers juges ont :

rejeté la demande de rabat de l'ordonnance de clôture,

déclaré la demande du Crédit mutuel irrecevable comme prescrite,

condamné le Crédit mutuel à payer à Mme [H] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné le Crédit mutuel aux dépens,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le Crédit mutuel a relevé appel de cette décision le 1er juillet 2019, pour demander à la cour de la réformer et de :

débouter Mme [H] de sa demande de prescription,

condamner Mme [H] au paiement des sommes de 18 646,29 euros au titre du capital, de 802,42 euros au titre des intérêts normaux impayés, de 526,50 euros au titre des primes d'assurance impayées et de 14 388,91euros au titre des intérêts de retard échus au 20 avril 2022, outre les intérêts postérieurs au taux de 3,65 %,

condamner Mme [H] à payer 'solidairement' la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme [H] conclut quant à elle à titre principal à la confirmation du jugement attaqué.

Subsidiairement, elle demande à la cour de :

enjoindre au Crédit mutuel de produire un décompte rectificatif tenant compte de l'ensemble des acomptes versés par les débiteurs depuis la déchéance du terme en respectant les règles d'imputation légale,

à titre infiniment subsidiaire, constater que seuls les intérêts échus cinq ans avant le 14 août 2018, soit à partir du 14 août 2013, peuvent être réclamés,

enjoindre au Crédit mutuel de produire un décompte rectificatif tenant compte de la prescription des intérêts échus avant le 14 août 2013,

à défaut, dire que la banque ne justifie pas du montant de sa créance et la débouter de sa demande.

En tout état de cause, elle sollicite la confirmation du chef du jugement attaqué lui ayant alloué une indemnité de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel et ayant condamné le Crédit mutuel aux dépens de première instance, et elle réclame en outre la condamnation de ce dernier aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3 000 euros au titre de ses

frais irrépétibles d'appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour le Crédit mutuel le 26 avril 2022 et pour Mme [H] le 11 mai 2022, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 9 juin 2022.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Sur la prescription

Il résulte de l'article L. 137-2 devenu L. 218-2 du code de la consommation que l'action en paiement du prêteur contre un emprunteur au titre des sommes dues en exécution d'un contrat de prêt immobilier doit être exercée dans le délai de deux ans courant, s'agissant des échéances de remboursement impayées, à compter de la date d'exigibilité de chacune d'elles, et, s'agissant du capital restant dû, de la date de la déchéance du terme.

En l'occurrence, les échéances échues impayées sont celles du 15 novembre et du 15 décembre 2008, et la déchéance du terme a été prononcée le 30 décembre 2008.

Cependant, il résulte des articles 2241, 2242 et 2245 du code civil que la demande en justice formée contre l'un des débiteurs solidaires interrompt la prescription à l'égard des autres, un nouveau délai ne recommençant à courir qu'après l'extinction de l'instance, et il est de principe que la déclaration de créance au passif d'une liquidation judiciaire équivaut à une demande en justice interrompant la prescription jusqu'à l'extinction de la procédure collective par le jugement de clôture.

Dès lors, comme le fait à juste titre observer le Crédit mutuel, sa déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire de M. [H] en date du 23 décembre 2008 a interrompu le délai de la prescription biennale tant à l'égard du débiteur en procédure collective que de son épouse, coemprunteuse solidaire, de sorte que l'action qu'il exerce contre cette dernière est nécessairement recevable puisque la clôture de la liquidation judiciaire du mari n'était toujours pas prononcée lorsqu'il l'a assignée par acte du 14 août 2018.

Mme [H] prétend à cet égard à tort que, la déchéance du terme procédant de la liquidation judiciaire n'ayant eu d'effet qu'à l'égard du débiteur en procédure collective, l'effet interruptif de prescription de la déclaration de créance n'aurait pu jouer que contre le mari, l'épouse bénéficiant d'un 'délai de prescription distinct' venu à expiration, à défaut d'acte interruptif à son égard, le 30 décembre 2010 pour la totalité des composantes de la créance de la banque.

En effet, la déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire de M. [H] du 23 décembre 2008 équivalait à une demande judiciaire en paiement de la totalité des sommes dues au titre du prêt, et avait donc la même cause et le même objet que la demande formée contre Mme [H] par assignation du 14 août 2018, de sorte que, conformément aux dispositions de l'article 2245 du code civil, elle a interrompu la prescription à l'égard de chacun des époux [H], coemprunteurs solidaires.

Mme [H] soutient par ailleurs que les intérêts échus depuis plus de cinq ans avant l'assignation en paiement seraient prescrits en application de l'article 2224 du code civil.

Cependant, le prêt consenti étant d'une durée de plus d'un an, le Crédit mutuel a déclaré sa créance en principal et intérêts contractuels à échoir au taux de 3,65 %.

Au surplus, il est de principe que l'effet interruptif d'une action s'étend à toutes celles qui procèdent de l'exécution du même contrat et portent sur des accessoires ou des compléments de la demande initiale.

Il s'en évince que la déclaration de créance du 23 décembre 2008 a interrompu le délai de prescription tant en ce qui concerne le principal que les intérêts de retard.

Il convient donc d'infirmer le jugement attaqué et de déclarer les demandes du Crédit mutuel recevables.

Sur la créance de la banque

Mme [H] demande à la cour d'enjoindre, avant dire droit, au Crédit mutuel de produire un décompte tenant compte de l'ensemble des versements effectués par les débiteurs depuis la déchéance du terme et des règles légales d'imputation, notamment du versement de la société de caution de 253 669,21 euros qui aurait dû, selon elle, être imputé en totalité sur le prêt du 2 juillet 2008 qui était le plus ancien.

Cependant, le prêteur a produit un historique détaillé des mouvements du prêt qui permet de vérifier ses demandes et les règles d'imputation des paiements appliquées.

À cet égard, il doit être observé que la caution a elle-même, dans son courrier du 16 juin 2008 accompagnant la quittance subrogative, expressément imputé celui-ci au prêt du 2 juillet 2006 dans la limite de 72 082,58 euros, ce qui s'imposait au créancier en application de l'article 1253 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause.

Au surplus, la répartition des fonds versés entre les différents prêts cautionnés procédait nécessairement des conditions des garanties consenties par la caution, laquelle s'était engagée, en ce qui concerne le prêt litigieux du 2 juillet 2008, dans la limite du principal en capital et intérêts contractuels échus au jour de la déchéance du terme.

Il ressort par ailleurs de l'offre, du tableau d'amortissement et de l'historique des mouvements du prêt qu'il reste dû au prêteur:

1 553,54 euros (776,77 x 2) au titre des échéances échues impayées des 15 novembre et 15 décembre 2008, primes d'assurance emprunteur comprises,

87 344,26 euros au titre du capital restant dû au jour de la déchéance du terme du 30 décembre 2008,

- 72 082,58 euros à déduire au titre du versement du 17 juin 2009,

soit, au total, 16 815,55 euros, avec intérêts au taux de 3,65 % sur la somme de 88 897,80 euros du 30 décembre 2008 au 16 juin 2009, puis sur la somme résiduelle de 16 815,55 euros à compter du 17 juin 2009.

Mme [H] sera donc condamnée au paiement de cette somme, le surplus des demandes, notamment celle relative aux primes d'assurance dont le maintien des garanties après la déchéance du terme n'est pas établi, étant rejeté.

Il n'y a enfin pas matière à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque, tant en première instance qu'en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 25 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Quimper en toutes ses dispositions ;

Déclare les demandes de la caisse de Crédit mutuel de [Adresse 6] recevables ;

Condamne Mme [R] épouse [H] à payer à la caisse de Crédit mutuel de [Adresse 6] la somme de 16 815,55 euros, avec intérêts au taux de 3,65 %, sur la somme de 88 897,80 euros du 30 décembre 2008 au 16 juin 2009, puis sur la somme de 16 815,55 euros à compter du 17 juin 2009 ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque, tant en première instance qu'en cause d'appel ;

Condamne Mme [R] épouse [H] aux dépens de première instance et d'appel ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/04360
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;19.04360 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award