9ème Ch Sécurité Sociale
ARRÊT N°
N° RG 18/03099 - N° Portalis DBVL-V-B7C-O2PS
Société [5]
C/
URSSAF PROVENCE ALPES CÔTE D'AZUR
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Copie certifiée conforme délivrée
le:
à:
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,
Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 21 Septembre 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 23 Novembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;
DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:
Date de la décision attaquée : 12 Avril 2018
Décision attaquée : Jugement
Juridiction : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTES
Références : 21500988
****
APPELANTE :
La Société [5]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Alexandra L'HERMINE, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE,
( et par Me Christophe LHERMITTE, avocat au barreau de RENNES )
INTIMÉE :
L'UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PROVENCE ALPES CÔTE D'AZUR
Recouvrement C3S
sise [Adresse 7]
[Localité 1]
représentée par Me Lionel ASSOUS-LEGRAND, avocat au barreau de PARIS
EXPOSÉ DU LITIGE
Par lettre du 6 avril 2009 portant notification de la vérification de l'assiette déclarée, la Caisse nationale du régime social des indépendants (RSI), aux droits de laquelle vient l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Provence-Alpes-Côte-d'Azur (l'URSSAF), a demandé à la société [5] (la société) de lui fournir toute explication utile quant à la distorsion constatée entre le chiffre d'affaires hors taxes 2007 déclaré à l'administration fiscale (1 368 052 293 euros) et celui déclaré à l'organisme (436 305 475 euros) pour le calcul de la contribution sociale de solidarité des sociétés due en 2008, au visa notamment de l'article L. 651-5 du code de la sécurité sociale.
Puis, par lettre du 22 avril 2010, l'URSSAF a indiqué à la société que les centrales régionales Leclerc ne peuvent pas bénéficier de l'assiette de contribution réservée aux commissionnaires et l'a invitée à déclarer son chiffre d'affaires global hors taxes 2009 tel qu'il ressort des imprimés fiscaux.
La société s'est acquittée de la contribution sociale de solidarité des sociétés due en 2011 au titre de l'exercice 2010 pour un montant total de 1 697 492 euros, puis par lettre du 12 mai 2014, elle a demandé à l'URSSAF la restitution de cette contribution qu'elle estimait avoir versée à tort à hauteur de 1 037 745 euros.
Le 13 juillet 2015, elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes à l'encontre de la décision de rejet de sa demande.
Par jugement du 12 avril 2018, ce tribunal a :
- débouté la société de l'ensemble de ses demandes ;
- débouté la [4] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rappelé que la procédure est sans frais ni dépens.
Par déclaration faite par communication électronique au greffe le 9 mai 2018, la société a interjeté appel de ce jugement, soit dans le délai légal.
Par ses écritures parvenues au greffe le 12 septembre 2022 auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, en les complétant oralement pour répondre aux dernières conclusions de l'URSSAF déposées à l'audience, la société demande à la cour de :
- constater le bien-fondé de la demande de la société ;
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il déboute la société de sa demande en remboursement de la somme de 1 037 745 euros ;
- ordonner le remboursement de la contribution sociale de solidarité des sociétés d'un montant de 1 037 745 euros versée à tort à la Caisse nationale du régime social des indépendants (désormais URSSAF PACA) au titre de l'exercice 2010 (versée en 2011), augmenté des intérêts de retard au taux légal à compter de la date de la demande initiale (le 12 mai 2014) et capitalisation des intérêts ;
- en tout état de cause, condamner l'URSSAF PACA à verser à la société la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses écritures parvenues et visées à l'audience du 21 septembre 2022 auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de :
- juger mal fondé l'appel de la société et l'en débouter ;
- confirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes entrepris en toutes ses dispositions ;
En conséquence :
- condamner la société à verser à la l'URSSAF la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.
La société a été autorisée à déposer une note en délibéré sur le traitement comptable de l'activité de commissionnaire pour le 28 septembre 2022 avec réponse de l'URSSAF pour le 15 octobre 2022.
La première a fait parvenir cette note le 28 septembre 2022 et l'URSSAF y a répondu par note parvenue au greffe le 10 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La société [5] est une société coopérative. Il n'est pas contesté qu'à ce titre elle a été assujettie à la contribution sociale de solidarité des sociétés, instituée par la loi du 3 janvier 1970 (articles L.651-1 à L.651-9 du code de la sécurité sociale) par application des dispositions de l'article L.651-1 précité, englobant les sociétés régies par la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération.
Chaque assujetti doit déclarer annuellement à l'organisme de recouvrement le montant de son chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale, calculé hors taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées (article L.651-5 du code de la sécurité sociale).
Etaient à l'époque des faits calculées sur cette assiette une contribution au taux de 0,16 % (contribution sociale de solidarité) et une contribution additionnelle de 0,03 %.
Dans sa rédaction issue de la loi 2010-1594 du 20 décembre 2010 applicable à la date d'exigibilité de la contribution litigieuse, l'alinéa 2 de l'article L. 651-5 du code de la sécurité sociale dispose : « le chiffre d'affaires des intermédiaires mentionnés au V de l'article 256 et au III de l'article 256 bis du code général des impôts, et qui bénéficient des dispositions de l'article 273 octies du même code, est diminué de la valeur des biens ou des services qu'ils sont réputés acquérir ou recevoir.
Dans le cas d'entremise à la vente, les commettants des intermédiaires auxquels cette disposition s'applique majorent leur chiffre d'affaires du montant des commissions versées ».
Cet alinéa résulte de l'article 28 II de la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 destiné à neutraliser, pour la détermination de l'assiette de la contribution sociale de solidarité des sociétés, les effets de l'article 256 V du code général des impôts dans sa rédaction issue de la loi n° 92-677 du 17 juillet 1992, selon lequel l'intermédiaire agissant en nom propre est «réputé avoir personnellement reçu et livré le bien, reçu et fourni les services considérés ».
L'article 256 V dont l'objet était de faciliter le commerce intra-communataire, avait pour effet d'assujettir l'intermédiaire en nom propre, dans tous les cas, au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur ces biens et services et, par voie de conséquence, d'élargir l'assiette de la contribution, laquelle n'était jusqu'alors assise que sur les commissions qu'il percevait.
Diverses mesures ont été adoptées pour neutraliser ou amoindrir les effets de cette réforme sur la situation de ces intermédiaires en nom propre.
Sur le plan fiscal, et dans le but de soulager leur trésorerie, le législateur avait prévu à leur profit, sous certaines conditions, une exception à la règle dite du décalage d'un mois alors applicable en matière de TVA en vertu de l'article 217 de l'annexe II au code général des impôts et l'article 24 de la loi du 17 juillet 1992 en insérant dans le code général des impôts l'article 273 octies.
Cet article 273 octies, auquel le code de la sécurité sociale a continué à renvoyer jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013, énonçait dans sa version applicable que les intermédiaires mentionnés au V de l'article 256 et au III de l'article 256 du code général des impôts devaient satisfaire aux conditions suivantes, simultanément remplies :
1. l'opération d'entremise est rémunérée exclusivement par une commission dont le taux est fixé au préalable d'après le prix, la quantité ou la nature des biens ou des services ;
2. il est rendu compte au commettant du prix auquel l'intermédiaire a traité l'opération avec l'autre contractant ;
3. l'intermédiaire qui réalise ces opérations d'entremise doit agir en vertu d'un mandat préalable et ne jamais devenir propriétaire des biens.
Ces conditions avaient pour objet de s'assurer que l'activité professionnelle de l'entreprise assujettie à la TVA et à la contribution de solidarité relevait effectivement d'une véritable activité d'entremise opaque - donc de commissionnaire - et non d'une activité commerciale d'achats de marchandises suivis de reventes, sous couvert d'une activité prétendue d'entremise, pour obtenir indûment le bénéfice d'un avantage fiscal ou d'un avantage social.
Comme l'a jugé la Cour de cassation, il appartient au cotisant de démontrer qu'il remplit les conditions lui permettant de bénéficier de cette diminution d'assiette (2e Civ, 8 juillet 2021, pourvoi n°20-13.499), laquelle n'est pas subordonnée à la perception d'une rémunération par l'intermédiaire en nom propre. (2e Civ., 18 décembre 2014, pourvoi n° 13-22.921).
Son bénéfice est subordonné à la démonstration de l'existence d'un mandat préalablement conclu (2e Civ, 24 juin 2021, pourvoi n°19.26.093).
Par décision du 28 novembre 1996, la caisse [6] a accordé aux centrales d'achat du groupe Leclerc, dont la [5], le bénéfice de l'assiette réduite de la contribution de solidarité prévue pour les commissionnaires fiscaux.
Aux termes d'une correspondance adressée à leur conseil de l'époque, la caisse indiquait :
« Maître,
Vos courriers du 24 octobre et du 25 novembre 1996 ont retenu toute notre attention.
Vous avez pu ainsi exposer la situation des coopératives régionales d'achat du mouvement Leclerc au regard de la contribution sociale de solidarité 1996.
Il apparaît que l'assiette déclarée pour la régularisation de la contribution précitée ne prenait en compte que l'activité d'intermédiaire à l'achat, alors même qu'une activité de grossiste était effectuée.
La question dominante qui nous est malgré tout posée par votre intermédiaire est de savoir si les centrales d'achat de statut coopératif peuvent bénéficier des dispositions de l'article L. 651-5, 2e alinéa, qui prévoit une imposition sur la seule commission perçue pour les sociétés qui ont une activité de commissionnaire au sens fiscal du terme.
Il est vrai que les conditions définies pour reconnaître les commissionnaires fiscaux (article 273 octies du code général des impôts et article 266-1 ancienne rédaction du même code) ne se retrouvent pas strictement accomplies pour les centrales d'achat coopératives.
Leur rattachement à la loi du 10 septembre 1947 et du 11 juillet 1972 implique des spécificités de fonctionnement et d'activité qui imposent de procéder à de nombreuses assimilations.
Sur la base des éléments communiqués et de notre entretien téléphonique du 27 novembre, nous pouvons toutefois vous faire part des observations suivantes.
Les caractéristiques essentielles des commissionnaires opaques (à l'achat, en ce qui vous concerne) peuvent se retrouver chez ces coopératives Leclerc.
Au demeurant, la doctrine accorde le plus souvent aux centrales d'achat, quelle que soit leur forme juridique, la qualité de commissionnaire.
En l'espèce :
- La coopérative régionale agit bien en son nom propre pour le compte d'autrui, le mandat étant implicitement contenu dans l'objet social, lequel impose une exclusivité de commerce avec les adhérents, selon leur demande et à leur seul profit. Il est par ailleurs explicitement constaté par la formalisation de pré-commandes.
- Les biens achetés aux fournisseurs sont livrés directement à la coopérative et non aux sociétaires.
- L'établissement d'une facturation au commettant est effective (règlement intérieur de la [8] consulté à titre de référence).
- La reddition des comptes s'opère au vu des comptes-rendus hebdomadaires qui se tiennent en présence des sociétaires.
- La marchandise livrée au commettant demeure sa propriété dans la mesure où aucun stock n'est constitué par la coopérative et la marchandise est le plus généralement payée au fournisseur après la vente au commettant (confer vos indications téléphoniques du 27 novembre).
- La rétrocession des marchandises aux commettants est effectuée à leur prix de revient (absence de profit). Les profits éventuels ainsi que les ristournes sont répercutés à l'ensemble des sociétaires.
- La commission peut s'entendre des charges d'exploitation retenue aux sociétaires lors de l'enlèvement de la marchandise (TVA, droits indirects) ou lors de la régularisation de fin d'exercice.
- Ces charges sont assises en fonction des enlèvements (quantité et nature de la marchandise commandée) et non sur les ventes réalisées par les adhérents. Un pourcentage est appliqué en conséquence.
- La présentation des comptes au bilan de la coopérative est, selon vos commentaires, conforme aux prescriptions comptables applicables en la matière (écritures aux comptes 467,606 et 607 pour la coopérative et aux comptes 467, 607 et 608 pour le commettant).
D'autre part, nous supposons, compte tenu de la particularité de fonctionnement d'une société coopérative, que la déclaration DAS2 n'est pas effectuée auprès de l'administration fiscale.
Vous avez pu enfin nous préciser que ces coopératives régionales ne prétendaient pas, avant le 1er janvier 1993, à bénéficier du statut d'intermédiaire de commerce, la règle du décalage d'un mois étant sans effet pour leurs opérations comptables.
Il résulte de tout ce qui précède que notre organisme accepte que les coopératives régionales du Mouvement Leclerc puissent bénéficier, pour partie de leur activité, des dispositions prévues à l'article L.651-5 en faveur des commissionnaires opaques.
Nous invitons ces entreprises à effectuer dans les meilleurs délais le versement du complément de la contribution 1996 ainsi qu'une déclaration de chiffre d'affaires rectificative.
La commission à déclarer s'entend de tous les montants perçus par la coopérative au titre des charges d'exploitation.
Les autres produits qui relèvent de l'activité propre de la société sont à déclarer en totalité conformément à l'article L. 651-5, 1er alinéa.(...).
Par la lettre susvisée du 22 avril 2010, le RSI a invité la société à remplir ses obligations de déclaration et de paiement des contributions en déclarant la totalité de son chiffre d'affaires global hors taxes.
Il apparaît que le RSI avait délivré à la société une notification de vérification de l'assiette déclarée le 6 avril 2009 au titre de la C3S 2008 alors que son assiette n'avait pas été contrôlée depuis 1996. Le conseil des centrales d'achat du groupe Leclerc confirmait des contacts et échanges téléphoniques suite aux différentes notifications de vérification de l'assiette déclarée. Le mémorandum du conseil du RSI du 31 mars 2010 fait référence à une lettre du 2 novembre 2009 selon laquelle la mise en oeuvre d'une telle procédure de vérification ... conduit naturellement à apprécier le bien fondé de toute position prise antérieurement notamment pour rectifier une interprétation dérogatoire à des textes de stricte application.
Ce n'est cependant que par lettre du 22 avril 2010 que le RSI a formalisé sa décision de remise en cause de la doctrine jusqu'alors en vigueur.
Les motifs pour lesquels l'organisme entendait revenir sur la précédente conclusion sont ceux de l'argumentation développée dans le cadre du présent litige, qui repose principalement sur le défaut de mandat préalable de commissionnaire, au motif qu'il ne saurait être déduit ni du seul objet social de la société, ni de la reddition des comptes, et l'exigence d'une commission exclusive rémunérant l'activité d'entremise.
Il doit être retenu que ce changement de doctrine est contraire à ce que l'organisme avait précédemment admis et notamment que le mandat était implicitement contenu dans l'objet social et explicitement constaté par la formalisation de pré-commandes et ce alors qu'il n'est pas allégué que les conditions de fait dans lesquelles la société exerce son activité auraient changé, la réduction d'assiette étant sollicitée au titre de la rétrocession des marchandises aux commettants effectuée à leur prix de revient.
Dès lors qu'une décision a été régulièrement notifiée et n'a donné lieu, dans les délais, à aucun recours contentieux, elle revêt un caractère définitif.
Il n'est pas allégué en l'espèce de modification des dispositions de l'article 273 octies, les conditions pour bénéficier du statut de commissionnaire fiscal étant demeurées inchangées aux dates d'exigibilité respectives.
Par suite, même résultant d'une simple tolérance, la décision s'impose tant à son destinataire, qui ne saurait en particulier, en contester la validité par voie d'exception à l'occasion d'un recours formé contre une décision distincte, qu'à son auteur, qui ne peut en prononcer le retrait, c'est-à-dire y mettre fin rétroactivement, à moins que la décision n'ait été acquise au bénéfice de la fraude. La décision définitive peut être abrogée pour l'avenir, sans pouvoir être retirée rétroactivement.
Aucune fraude n'est invoquée en l'espèce et si la société conteste le bien fondé de la nouvelle analyse, elle ne dénie pas à l'organisme la possibilité d'en changer.
En revanche, se prévalant d'un principe de sécurité juridique, elle s'oppose à ce que cette décision produise ses effets relativement à la contribution exigible en 2011 en ce que son assiette est le chiffre d'affaires réalisé en 2010.
Au cas particulier, il convient de retenir que si le fait générateur de la contribution est constitué par l'existence de l'entreprise débitrice au 1er janvier de l'année au titre de laquelle elle est due, comme l'a jugé la Cour de cassation, cette contribution revêt, du fait de son affectation exclusive au financement de divers régimes de sécurité sociale, la nature d'une cotisation sociale (Cass. soc., 28 mars 2002, pourvoi n° 00-18.076 ; 2e Civ., 18 janvier 2005, pourvoi n° 03-30.406 ; Cass. 2e civ., 14 févr. 2013, no 11-28.470 ; Cass. 2e civ., 4 avr. 2018, no 17-13.987) soumise aux seules dispositions du code de la sécurité sociale (Soc., 6 mars 2003, pourvoi n° 01-21.077).
Elle est calculée sur le chiffre d'affaires réalisé l'année précédente. Les sociétés doivent déclarer les montants ayant servi à l'application des taxes sur le chiffre d'affaires et non le montant du chiffre d'affaires inscrit au compte de résultat (Cass. 2e civ., 14 févr. 2013, no 12-10.124).
Comme l'a jugé la Cour de cassation, l'article 1er du décret 2007-484 du 13 mars 2007 qui énonce que l'article 273 octies du code général des impôts est devenu sans objet « s'applique exclusivement aux impôts, taxes et contributions régies par le code général des impôts, de sorte que les dispositions en cause ont conservé leur effet pour la détermination des bases de la contribution sociale de solidarité des sociétés et de la contribution additionnelle dans les conditions prévues par l'article L. 651-5 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des contributions litigieuses » (2e Civ., 25 janvier 2018, pourvoi n°17-11.147 ; 2e Civ., 9 mai 2018, pourvoi n° 17-17.219).
Remettant en cause l'autorité de la chose décidée, le RSI a dénié à la société, au cours de l'année 2010, la possibilité de se prévaloir d'un mandat préalable de commissionnaire opaque, alors qu'il admettait depuis 1996 la possibilité pour la société de se prévaloir d'un mandat implicite.
Dans la mesure où elle ne bénéficie plus des effets de la tolérance de l'organisme, la société doit, pour continuer à bénéficier de la réduction d'assiette, pouvoir établir l'existence d'un mandat préalablement conclu au titre de l'année retenue pour déterminer le chiffre d'affaires assujetti à la contribution litigieuse (2e Civ., 24 juin 2021, pourvoi n° 19-26.093 précité), soit en l'espèce antérieurement au 1er janvier 2011. Elle doit à tout le moins pouvoir bénéficier d'un délai de prévenance suffisant pour adapter son organisation à la nouvelle doctrine qui lui est opposée.
Dès lors que la décision par laquelle le RSI informe la société de ce qu'elle ne reconnaît plus l'existence d'un mandat préalable, la prive du statut de commissionnaire, elle modifie la détermination des bases de la contribution.
Elle ne peut, sans être rétroactive, prendre effet avant la contribution de solidarité calculée sur le chiffre d'affaires 2011, soit la contribution exigible en 2012.
Il s'ensuit que le jugement entrepris doit être infirmé.
L'URSSAF ne développe aucun moyen relativement au montant de la créance de restitution.
Il convient en conséquence de la condamner à verser à la société la somme de 1 037 745 euros au titre de la contribution de solidarité des sociétés exigible en 2011, augmentée des intérêts de retard au taux légal à compter de la date de la demande initiale (le 12 mai 2014) et capitalisation des intérêts.
Sur les dépens
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société ses frais irrépétibles. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
S'agissant des dépens, l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale étant abrogé depuis le 1er janvier 2019, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de l'URSSAF qui succombe à l'instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l'application des dispositions l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes du 12 avril 2018 ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Condamne l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Provence-Alpes-Côte-d'Azur à verser à la société [5] ([5]) la somme de 1 037 745 euros au titre de la contribution de solidarité des sociétés exigible en 2011, augmentée des intérêts de retard au taux légal à compter du 12 mai 2014, avec capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;
Déboute la société [5] de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
Condamne l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Provence-Alpes-Côte-d'Azur aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT