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30/11/2022 | FRANCE | N°19/03828

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 30 novembre 2022, 19/03828


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 19/03828 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P23O













Société [6]



C/



CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE D'ARMORIQUE

































Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBL

IQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2022



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philip...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 19/03828 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P23O

Société [6]

C/

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE D'ARMORIQUE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des débats, et Monsieur Séraphin LARUELLE, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 Octobre 2022 devant Madame Aurélie GUEROULT, magistrat chargé de l'instruction de l'affaire, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 30 Novembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 18 Avril 2019

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal de Grande Instance de SAINT-BRIEUC

Références : 18/00494

****

APPELANTE :

Société [6]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 3]

représentée par Me Valérie SCETBON de l'AARPI MARVEL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Emilie WILBERT, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE D'ARMORIQUE

Service Contentieux

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Mme [R] [I] en vertu d'un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 27 octobre 2010, M. [G] [D], salarié au sein de la société [6] (la société), a déclaré une maladie professionnelle en raison d'une épicondylite gauche et tendinite épaule gauche, laquelle a été prise en charge le 4 février 2011 par la caisse de mutualité sociale agricole d'Armorique (la MSA) au titre du tableau n° 39 des maladies professionnelles en agriculture.

La date de consolidation de l'état de santé de M. [D] a été fixée au 27 juillet 2014.

Par décision du 18 mars 2015, adressée à l'employeur le 9 avril 2015, la commission des rentes a évalué son taux d'incapacité permanente partielle (IPP) à 10%.

Par lettre du 15 juin 2015, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Côtes d'Armor afin de contester la décision d'attribution de ce taux d'IPP (recours enregistré au répertoire général sous le numéro 21500284, devenu numéro 18/00494).

Par lettre datée du 23 mai 2018, la société a saisi la commission de recours amiable en vue de contester la même décision.

Se prévalant d'un rejet implicite de sa demande, la société a saisi le même tribunal par lettre datée du 5 septembre 2018 (recours enregistré au répertoire général sous le numéro 21800475, devenu 18/00524).

Par jugement du 18 avril 2019, ce tribunal devenu le pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, a :

- ordonné la jonction des recours n° 21500284 devenu RG n° 18/00494 et le recours n° 21800475 devenu RG n° 18/00524 sous le n° RG 18/00494 ;

- déclaré irrecevables les recours n° 21500284 devenu RG n° 18/00494 et le recours n° 21800475 devenu RG n° 18/00524 sous le n° RG 18/00494 ;

- déclaré la décision d'attribuer un taux d'IPP de 10 % à M. [D] opposable à la société ;

- condamné la société aux dépens à compter du 1er janvier 2019.

Pour statuer comme il l'a fait le pôle social a retenu que la société n'avait pas soumis préalablement sa réclamation à la commission de recours amiable dans le délai de 2 mois.

Par déclaration adressée le 4 juin 2019, la société a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 9 mai 2019.

Par ses écritures parvenues au greffe le 9 juillet 2020 auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société demande à la cour de :

- déclarer la société recevable en son appel ;

- réformer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

In limine litis,

Sur le recours n°18/00494,

A titre principal,

- constater que la solution consacrée par l'arrêt prononcé le 15 février 2018 par la Cour de cassation (n°17-14.896) doit être écartée, dès lors que l'application de ce revirement de jurisprudence aux instances en cours conduirait à priver la requérante du droit d'accès à un juge ;

En conséquence,

- déclarer la société recevable en son recours n° 18/00494 .

A titre subsidiaire,

- constater que la MSA Armorique ne justifie nullement d'une notification en bonne et due forme de la décision d'attribution de rente à l'égard de la société ;

- constater que la société a régulièrement saisi la commission de recours amiable de la MSA par courrier daté du 28 juin 2018 d'un recours tendant à contester la décision de la MSA attribuant un taux d'IPP de 10% à M. [D] ;

En conséquence,

- dire et juger qu'aucun délai n'a commencé à courir à l'égard de la société ;

- dire et juger la société recevable son recours n°18/00494 ;

Sur le recours n°18/00524,

- constater que la société a sollicité devant le tribunal des affaires de sécurité sociale l'inopposabilité à son égard de la décision attributive de rente d'incapacité permanente partielle concernant M. [D] ;

En conséquence,

- juger que le fait pour la société de solliciter l'inopposabilité à son égard de la décision prise par la caisse de MSA ne constitue pas une réclamation contre une décision prise par un organisme de sécurité sociale au sens de l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale, de sorte que cet employeur n'était pas tenu de saisir préalablement la commission de recours amiable de cette réclamation ;

- constater que la décision attributive de rente concernant M. [D] ne comporte aucune motivation ;

En conséquence,

- dire et juger que la société est recevable en son recours n°18/00524 ;

Sur le fond, à titre principal au visa des articles L. 751-32, alinéa 2, du code rural, l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article, 1315 du code civil, de la décision attribution de rente, et de l'avis technique du docteur [H],

- constater que la décision d'attribuer un taux d'incapacité permanente partielle à M. [D] fait grief à la société au travers de l'augmentation de son taux de cotisation accidents du travail ;

- constater que l'examen clinique du médecin conseil de la MSA est strictement normal sans aucune raideur ;

En conséquence,

- dire et juger inopposable à la requérante la décision d'attribuer un taux d'IPP de 10% à M. [D] avec toutes les conséquences de droit ;

A défaut,

- fixer à 0% le taux d'incapacité permanente partielle de M. [D] à l'égard de la société, dans le strict cadre des rapports caisse-employeur.

Par ses écritures parvenues au greffe le 16 juillet 2021 auxquelles s'est référé et qu'a développées son représentant à l'audience, la caisse demande à la cour de :

In limine litis :

A titre principal :

- déclarer irrecevable le recours 21500284 devenu 18/00494, introduit le 15 juin 2015, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Brieuc, pour absence de saisine préalable de la commission de recours amiable ;

A titre subsidiaire :

- constater que la mutualité sociale agricole justifie d'une notification en bonne et due forme de la décision du 9 avril 2015 attributive de rente à l'égard de M. [D],

- constater que la saisine de la commission de recours amiable du 23 mai 2018 est irrecevable car prescrite ;

- par suite, déclarer le recours de la société du 6 septembre 2018, introduit devant le tribunal des affaires de sécurité sociale sous le numéro 21800475 devenu 18/100524 irrecevable ;

Sur le fond :

- confirmer le taux d'IPP de 10% attribué par la caisse à M. [D] en indemnisation des séquelles constatées suite à sa maladie professionnelle du 27 septembre 2010 ;

- déclarer la décision d'attribuer un taux d'IPP de 10% à M. [D] opposable à la société.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

La cour a autorisé la production de notes en délibéré suite à l'argument soulevé à l'audience par la société, selon lequel la notification de la décision attributive de rente d'IPP mentionne qu'il convient de saisir le Tribunal des affaires de sécurité sociale et non pas la commission de recours amiable.

Par note parvenue au greffe le 18 octobre 2022, la MSA indique qu'elle ne saurait continuer à soutenir que le recours est irrecevable en l'absence de recours de la commission de recours amiable et demande à la cour de s'en rapporter à ses conclusions sur le fond.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 - Sur la saisine de la commission de recours amiable

La société soutient que la saisine directe du tribunal d'un recours tendant à contester la décision de la MSA attribuant un taux d'incapacité permanente partielle de 10% à M. [D] était conforme au droit applicable à la date de son action ; que l'application rétroactive de la jurisprudence du 15 février 2018 (pourvoi n°17-14.897) serait une atteinte du droit d'accès au juge en ce qu'elle consiste en un revirement de jurisprudence; qu'elle n'était pas tenue de saisir préalablement la commission de recours amiable dès lors qu'elle sollicitait l'inopposabilité de la décision attributive de rente; que sa saisine du tribunal par lettre du 15 juin 2015 ne saurait être considérée comme tardive dès lors qu'aucun délai n'a commencé à courir puisque la MSA ne rapporte pas la preuve de la réception par la société de la notification de la décision attributive de rente d'IPP. Elle rajoute que la notification mentionne qu'il convient de saisir le Tribunal des affaires de sécurité sociale.

La MSA réplique que la contestation émise par la société relève du contentieux général de la sécurité sociale et qu'en application des règles de procédure de ce contentieux, cette dernière avait l'obligation de saisir la commission de recours amiable avant de former son recours auprès du tribunal ; que l'arrêt de la Cour de cassation du 15 février 2018 cité par la société n'est que la confirmation de la jurisprudence antérieure; elle ne conteste plus l'irrecevabilité antérieurement soulevée.

Sur ce :

Il est établi que le litige créé par la demande d'un employeur tendant à se voir déclarer inopposable la décision d'une caisse de mutualité sociale agricole d'attribuer une rente à un de ses salariés victime d'un accident du travail relevant du régime agricole, qui porte sur l'état d'incapacité de ce salarié, est de la compétence exclusive des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale. (2e Civ., 25 octobre 2006, pourvoi n° 05-12.684)

Les règles de procédure afférentes à ce contentieux s'appliquent en conséquence et plus précisément en l'espèce celles en vigueur au jour du recours de l'employeur.

L'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 10 septembre 2012 au 1er janvier 2017 dispose que :

Les réclamations relevant de l'article L. 142-1 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d'administration de chaque organisme.

Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation. La forclusion ne peut être opposée aux intéressés que si cette notification porte mention de ce délai.

Toutefois, les contestations formées à l'encontre des décisions prises par les organismes chargés du recouvrement des cotisations, des majorations et des pénalités de retard doivent être présentées à la commission de recours amiable dans un délai d'un mois à compter de la notification de la mise en demeure.

L'arrêt de la Cour de cassation du 15 février 2018 ( 2e Civ., 15 février 2018, pourvoi n° 17-14.896) qui mentionne que les réclamations portées devant les juridictions du contentieux général contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole sont soumises, préalablement à la saisine de la juridiction, à la commission de recours amiable de l'organisme ne s'analyse nullement comme un revirement de jurisprudence. Il est la confirmation d'une solution déjà admise (2 Civ., 15 décembre 2016, n°15-28.465) fondée sur la simple lecture des textes.

S'agissant de la forclusion du recours, il appartient à la caisse qui l'invoque d'établir que sa décision a été régulièrement notifiée. A défaut d'une telle notification ou en cas de notification irrégulière de la décision, son destinataire peut en contester le bien-fondé devant le juge sans condition de délai. (2e Civ., 21 octobre 2021, pourvoi n° 20-16.170)

En l'espèce, la lettre de notification de la décision attributive de rente datée du 9 avril 2015 comporte la mention des voies et délais de recours dans les termes suivants :

Si vous contestez la présente décision, il vous appartient, dans un délai de deux mois à compter du jour de réception de cette notification, de saisir à votre choix

- Monsieur le Président du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du lieu de l'exploitation , à l'adresse suivante :

TASS DES COTES D'ARMOR

[Adresse 1]

[Localité 2]

Ou Monsieur le Président du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du lien de l'accident, à l'adresse suivante :

TASS DES COTES D'ARMOR

[Adresse 1]

[Localité 2]

A cette fin, il y a lieu de vous présenter au Secrétariat du tribunal ou de lui adresser une lettre recommandée avec accusé de réception.

(...)

Force est de constater, sans qu'il soit utile de s'interroger sur la date à laquelle la société a eu connaissance de cette notification ou sur les autres moyens débattus par les parties, que cette dernière mentionne en toute hypothèse une voie de recours inexacte, à savoir un recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale et non devant la commission de recours amiable. Il en résulte que la société peut contester la décision d'attribution du taux d'IPP devant le juge sans condition de délai.

Les recours régularisés par la société devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, les 15 juin 2015 et 5 septembre 2018 sont donc recevables, ce sur quoi les parties s'accordent désormais.

2- Sur le taux d'IPP

La société soutient que son médecin de recours, le docteur [H] considère que les séquelles en lien avec la maladie de M. [D] ont été surévaluées, qu'il convient donc de déclarer la décision attributive de rente inopposable à la société ou à défaut de fixer à 0% le taux d'incapacité permanente partielle de l'assuré à l'égard de la société dans le strict cadre des rapports caisse-employeur.

La caisse réplique que l'avis médical en réponse du docteur [T] du 2 juillet 2018 confirme l'état de santé dégradé de M. [D] ; qu'il a conclu que l'examen pratiqué le 8 octobre 2014 met en évidence un signe de Job nettement positif gauche, le reste des données étant consigné dans le rapport d'IPP.

Sur ce,

Le docteur [H] pour conclure à l'absence de taux d'IPP à retenir indique dans un mémoire daté du 28 mai 2018 :

Commémoratifs

Le 27 septembre 2010, le docteur [W] signait le CMI suivant :

'Maladie n°39 épaule trapèze gauche'

Le 11 avril 2014, l'IRM de l'épaule gauche ne retenait pas de pathologie de la coiffe des rotateurs, mais l'IRM du coude une tendinite des épicondyliens latéraux.

Le 08 octobre 2014, le médecin conseil retenait un taux d'IPP de 10% au motif suivant :

Limitation légère de certains mouvements de l'épaule gauche chez ce gaucher.

DISCUSSION

Sur l'évaluation du taux d'incapacité par la MSA.

Il n'existe pas de pathologie de la coiffe des rotateurs mais une pathologie du coude et une anomalie anatomique de l'acromion.

L'examen clinique du médecin conseil n'est pas exploitable puisque :

- non mené en passif : des amplitudes articulaires identiques en actif et passif et même du coté sain, n'existent pas en médecine

- sans aucune mensuration périmétrique comparative ;

- incomplet : aucun test musculaire effectué : Neer, Jobe, Hawkins, Yocum, Patte, Palm up, Gerber,

- incohérent : il n'existe aucune pathologie de la coiffe des rotateurs permettant d'expliquer une raideur de l'épaule, encore moins une douleur en l'absence de toute tendinite.

Le docteur [T] apporte la réponse suivante dans un avis daté du 2 juillet 2018 :

Epaule douloureuse simple (tendinopathie de la coiffe des rotateurs).

Les soins et l'arrêt de travail, ainsi que les examens pratiqués sont pris en charge au titre de la législation AT/MP.

Il convient entre autre de fixer la date de consolidation (fin des indemnités journalières) et de fixer un taux d'IPP selon le barème indicatif.

Ce qui compte, en l'absence de visualisation par l'imagerie d'une lésion spécifique (arthroscanner non réalisé) c'est bien la mise en évidence clinique de la limitation fonctionnelle (actif et passif) et que des douleurs soient spontanées ou provoquées par la mobilisation.

L'examen pratiqué le 08 octobre 2014 met en évidence un signe de JOB nettement positif à gauche. Le reste des données cliniques est consigné dans le rapport IPP.

Le rapport de notification du taux d'IPP à l'assuré mentionne suite à la déclaration de maladie professionnelle tendinopathie de l'épaule gauche constatée le 27 septembre 2010 que le taux d'IPP fixé à10% tient compte des conclusions médicales suivantes : limitation légère de certains mouvements de l'épaule gauche chez ce gaucher.

L'article L. 434-2, 1er alinéa du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, rendu applicable par l'article L. 751-8 du code rural et de la pêche maritime à l'assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles des salariés des professions agricoles, dispose que :

Le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

(...)

L'appréciation du taux d'incapacité permanente partielle relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.

L'article R.434-32 du code de la sécurité sociale dispose notamment que :

Au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l'existence d'une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit.

Les barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente d'une part en matière d'accidents du travail et d'autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d'invalidité en matière d'accidents du travail.

(...)

Le barème indicatif d'invalidité pour les accidents du travail en vigueur est applicable au litige, dès lors qu'il est rappelé au titre des principes généraux dudit barème qu'il a pour but de fournir les bases d'estimation du préjudice consécutif aux séquelles des accidents du travail et, éventuellement, des maladies professionnelles dans le cadre de l'article L. 434-2 applicable aux salariés du régime général et du régime agricole.

Certaines séquelles de maladies professionnelles ne sont en effet pas prévues au barème des maladies professionnelles.

Ce barème prévoit :

1.1.2 ATTEINTE DES FONCTIONS ARTICULAIRES.

Blocage et limitation des mouvements des articulations du membre supérieur, quelle qu'en soit la cause.

Epaule :

La mobilité de l'ensemble scapulo-huméro thoracique s'estime, le malade étant debout ou assis, en empaumant le bras d'une main, l'autre main palpant l'omoplate pour en apprécier la mobilité :

- Normalement, élévation latérale : 170° ;

- Adduction : 20° ;

- Antépulsion : 180° ;

- Rétropulsion : 40° ;

- Rotation interne : 80° ;

- Rotation externe : 60°.

La main doit se porter avec aisance au sommet de la tête et derrière les lombes, et la circumduction doit s'effectuer sans aucune gêne.

Les mouvements du côté blessé seront toujours estimés par comparaison avec ceux du côté sain. On notera d'éventuels ressauts au cours du relâchement brusque de la position d'adduction du membre supérieur, pouvant indiquer une lésion du sus-épineux, l'amyotrophie deltoïdienne (par mensuration des périmètres auxilaires vertical et horizontal), les craquements articulaires. Enfin, il sera tenu compte des examens radiologiques.

Les taux proposés sont les suivants :

Dominant Non dominant

Blocage de l'épaule, omoplate bloquée

55 45

Blocage de l'épaule, avec omoplate mobile

40 30

Limitation moyenne de tous les mouvements

20 15

Limitation légère de tous les mouvements

10 à 15 8 à 10

En l'espèce force est de constater que le médecin conseil lors de l'examen médical du 8 octobre 2014 a relevé une limitation légère de certains mouvements de l'épaule gauche chez ce gaucher et donc sur le membre dominant. Le médecin de recours de la société, qui n'a pas procédé à l'examen de l'assuré ne conteste pas la limitation légère en tant que telle mais indique seulement que la raideur de l'épaule et encore moins une douleur ne peut être explicitée. Si le docteur [H] indique que l'examen de l'assuré n'a pas été mené en passif, il ne conteste pas l'examen de la mobilité nonobstant le fait que la MSA ou le médecin conseil n'indique pas les mesures relatives à l'élévation latérale, l'adduction, l'antépulsion, la rétropulsion et la rotation interne ou externe qui l'ont conduit à retenir une limitation légère de certains mouvements de l'épaule gauche.

Il y a lieu de retenir cependant que c'est la mise en évidence clinique de la limitation fonctionnelle constatée qui importe, quelle qu'en soit la cause comme il est indiqué au point 1-1-2 du barème précité. Le médecin conseil souligne que l'examen a pu mettre en évidence un signe de Jobe nettement positif à gauche, soit une impossibilité de résister du coté atteint.

En outre le barème qui préconise un certain nombre d'examens pour caractériser les séquelles n'a aucune force obligatoire, de sorte que le médecin conseil est libre de recourir aux tests et examens utiles auxquels il procède pour déterminer l'existence de séquelles.

Il apparaît que ces séquelles sont certaines et en lien avec la maladie professionnelle de l'assuré.

Le guide-barème prévoit pour une limitation légère de tous les mouvements de l'épaule dominante un taux d'incapacité partielle de 10 à 15 %, sans retenir de réduction dans les cas où tous les mouvements ne sont pas atteints. ( 2e Civ., 13 mars 2014, pourvoi n° 13-13.291).

La fixation du taux d'IPP de 10% attribué à M. [D] est cohérent avec ce barème.

Compte tenu de ces éléments, il y a lieu de fixer le taux d'IPP en réparation des séquelles certaines de la maladie de [D] sur son épaule dominante à 10%.

3 - Sur les frais irrépétibles et les dépens :

S'agissant des dépens, l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la société qui succombe à l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevables les recours de la société [6] ;

Statuant de nouveau et y ajoutant :

DIT que les recours régularisés par la société [6] les 15 juin 2015 et 5 septembre 2018 sont recevables,

FIXE à 10% le taux d'incapacité permanente partielle de M. [D] à la date de la consolidation du 27 juillet 2014 ;

DIT ce taux opposable à la société [6] ;

CONDAMNE la société [6] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 19/03828
Date de la décision : 30/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-30;19.03828 ?
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