1ère Chambre
ARRÊT N°4/2023
N° RG 20/05137 - N° Portalis DBVL-V-B7E-RAOU
Mme [V] [P] [F] [I]
C/
M. [N] [T] [D]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 JANVIER 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre entendue en son rapport,
Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 08 Novembre 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 10 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
Madame [V] [P] [F] [I]
née le 02 Mars 1947 à [Localité 5] (21)
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Emilie BELLENGER, avocat au barreau de RENNES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/013128 du 08/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)
INTIMÉ :
Monsieur [N] [T] [D]
né le 14 Mars 1951 à [Localité 6] (29)
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représenté par Me Michel PEIGNARD, avocat au barreau de VANNES
FAITS ET PROCÉDURE
Suivant acte notarié du 8 juin 2006 au rapport de maître [A], notaire associé à [Localité 7], Mme [I] a acquis de Mme [Y] une maison d'habitation située [Adresse 8] à [Localité 4] édifiée sur une parcelle cadastrée section M n° [Cadastre 2].
M. [D] est pour sa part propriétaire d'un hangar avec terrain autour cadastré section M n° [Cadastre 3] situé au même lieu.
En raison de l'état d'enclave du fonds de Mme [I], celui-ci bénéficie d'une servitude de passage sur le fonds contigu de M. [D] pour tout véhicule ou à pied, en tout temps et à toute heure du jour et de la nuit, sur une bande de 3 m de largeur en limite de terrain dans la partie nord de ladite parcelle, cette bande de terre étant dans le prolongement de la voie d'accès cadastrée section M n° [Cadastre 1].
Mme [I] ayant reproché à M. [D] d'avoir fait construire un mur sur sa propriété qui aurait eu pour effet selon elle de réduire et déplacer l'assiette de la servitude et de rendre moins commode l'accès à son garage, elle a saisi le tribunal judiciaire de Vannes aux fins de remise en état de ladite servitude.
Par jugement du 8 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Vannes a :
-débouté Mme [I] de ses demandes,
-condamné Mme [I] à payer à M. [D] les sommes de :
- 3.000 € à titre de dommages et intérêts,
- 2.000 € au titre des frais irrépétibles, outre les coûts des constats de maître [J] des 4 juin 2018 et 14 février 2019 (sur factures acquittées),
-condamné Mme [I] aux dépens.
Par déclaration en date du 22 octobre 2020, Mme [I] a interjeté appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Mme [I] expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 22 janvier 2021 auxquelles il est renvoyé.
Elle demande à la cour de :
-la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
-réformer le jugement dont appel,
-en conséquence,
-à titre principal,
-condamner M. [D] à la remise en état du chemin sur lequel s'exerçait la servitude de passage et à procéder à la destruction des constructions entravant le libre exercice du droit de passage sur l'assiette initiale de la servitude conventionnellement établie,
-condamner M. [D] à procéder aux travaux de remise en état dans un délai de dix jours à compter de la date de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 200 € par jour de retard passé ce délai,
-à titre subsidiaire,
-fixer à 4 mètres de largeur la servitude de passage,
-condamner M. [D] sous astreinte à procéder à la destruction de son mur de clôture et du poteau de ciment empiétant sur la servitude de passage,
-en tout état de cause,
-débouter M. [D] de ses demandes,
-le condamner à payer à maître Emilie Bellenger la somme de 3.000 € et à Mme [I] celle de 1.500 € sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 en matière d'aide juridictionnelle et de l'article 700 du code de procédure civile,
-débouter M. [D] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile tant de première instance que d'appel,
-le condamner aux dépens de première instance et d'appel.
M. [D] expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 14 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé.
Il demande à la cour de :
-constater que Mme [I] a vendu à M. [U] et Mme [B] la parcelle M n° [Cadastre 2],
-constater en conséquence que du fait de cette cession elle n'a plus ni qualité ni intérêt pour agir,
-constater que les demandes qu'elle a présentées sont désormais sans objet,
-en tant que de besoin, en prononcer l'irrecevabilité et en tout cas constater l'extinction de l'action qui est la sienne,
-confirmer le débouté de Mme [I] et le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Vannes le 8 septembre 2020,
-la condamner à lui payer la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour les causes sus-énoncées et 4.000 € au titre des frais irrépétibles prévus par l'article 700 du code de procédure civile,
-à titre subsidiaire,
-confirmer le jugement prononcé par le tribunal Judiciaire de Vannes le 8 septembre 2020,
-en conséquence,
-débouter Mme [I] de ses demandes,
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé ce débouté et alloué de justes dommages-intérêts et frais irrépétibles ainsi que les dépens,
-la condamner à lui payer la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour appel abusif, et celle de 4.000 € au titre des frais irrépétibles prévus par l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens d'appel dont distraction pour ces derniers au profit de maître Peignard, avocat aux offres de droit
MOTIFS DE L'ARRÊT
1) Sur la recevabilité de l'action
L'article 31 du code de procédure civile dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.
Au cas particulier, il résulte des deux attestations de M. [U] et de Mme [B] que ceux-ci se sont rendus acquéreurs le 21 juillet 2021, soit en cours d'instance, auprès de Mme [I] du bien immobilier cadastré section M [Cadastre 2] dont elle était propriétaire sur la commune d'[Localité 4]. Ceux-ci précisent qu'à l'occasion de cette vente, ils n'ont pas été informés de la procédure en cours.
Mme [I] n'en a pas avisé M. [D], qui l'a appris en constatant un changement de propriétaires et qui a conclu sur ce point le 14 octobre 2022.
Mme [I] quant à elle ne conclut pas sur ce point.
De fait, par la vente de son bien intervenue en cours d'instance, elle a perdu la qualité de propriétaire dudit fonds et, par voie de conséquence, n'a plus ni qualité ni intérêt à agir pour demander la remise en état du passage institué au bénéfice de la parcelle M [Cadastre 2].
Elle sera déclarée irrecevable en sa demande d'infirmation du jugement pour avoir rejeté sa demande de remise en état de la servitude de passage.
2) Sur les dommages et intérêts
La condamnation à payer des dommages et intérêts à M. [D] sera confirmée par adoption de motifs en réparation du préjudice moral causé par une procédure jugée infondée en première intance.
M. [D] ne démontre pas que Mme [I] a agi abusivement en exerçant son droit d'appel. Sa demande de dommages et intérêts à ce titre sera rejetée.
3) Sur les dépens et les frais irrépétibles
Succombant, Mme [I] sera condamnée aux dépens d'appel. Le jugement de première instance sera confirmé s'agissant des dépens de première instance.
Enfin, eu égard aux frais engendrés par la procédure d'appel, il n'est pas inéquitable de la condamner à payer à M. [D] la somme de 1.000 € au titre des frais exposés par lui qui ne sont pas compris dans les dépens. Le jugement de première instance sera confirmé s'agissant des frais irrépétibles de première instance, outre les coûts des constats de maître [J] des 4 juin 2018 et 14 février 2019 (sur factures acquittées).
Les demandes de Mme [I] au titre des frais irrépétibles seront quant à elle rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare Mme [I] irrecevable en sa demande de remise en état d'une servitude de passage au bénéfice d'un bien immobilier situé à [Localité 4] cadastré section M [Cadastre 2] cédé par elle le 21 juillet 2021,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 8 septembre 2020 en ce qu'il a condamné Mme [I] à payer à M. [D] la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts, les dépens et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et le coût des constats,
Condamne Mme [V] [I] aux dépens d'appel,
Condamne Mme [V] [I] à payer à M. [N] [D] la somme de 1.000 € au titre des frais irrépétibles d'appel,
Rejette le surplus des demandes.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE