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26/01/2023 | FRANCE | N°19/05561

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 26 janvier 2023, 19/05561


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°33



N° RG 19/05561 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-QBEY













SAS HINTERLAND



C/



M. [D] [T]

















Confirmation















Copie exécutoire délivrée

le : 26 janvier 2023



à :

Me Christophe LHERMITTE

Me Ronan TIGREAT





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇA

IS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JANVIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°33

N° RG 19/05561 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-QBEY

SAS HINTERLAND

C/

M. [D] [T]

Confirmation

Copie exécutoire délivrée

le : 26 janvier 2023

à :

Me Christophe LHERMITTE

Me Ronan TIGREAT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JANVIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 Novembre 2022

devant Monsieur Philippe BELLOIR, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

La SAS HINTERLAND prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Avocat postulant du Barreau de RENNES et ayant Me Marine KERROS de la SELARL MAZE-CALVEZ & ASSOCIES, Avocat au Barreau de BREST, pour conseil

INTIMÉ :

Monsieur [D] [T]

né le 13 Octobre 1972 à [Localité 4] (29)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]

Ayant Me Ronan TIGREAT, Avocat au Barreau de BREST, pour Avocat constitué

La société LE BRAS-LAVANANT, devenue la SAS HINTERLAND, est une société de transport routier, spécialisée dans le transport de conteneurs maritimes.

Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 29 mars 2002, M. [T] a été engagé en qualité de chauffeur à compter du 1er avril 2002 par la SAS HINTERLAND, en application de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport.

Le contrat de travail comportait quant à la rémunération la stipulation suivante : ' En rémunération de votre travail, vous percevrez un salaire brut mensuel de 1622,04 € sur la base de 204 H de travail par mois'.

Au mois de novembre 2016, la SAS HINTERLAND a proposé au salarié un avenant à son contrat de travail stipulant : 'la durée de travail effectif du salarié est basée sur une durée de 195 heures par mois (...) en rémunération de ses services, le salarié percevra un salaire brut horaire de 10,80 euros'.

M. [T] a refusé de signer cet avenant.

Le 28 juillet 2017, M. [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Nantes afin de solliciter la condamnation de la SAS HINTERLAND à lui payer :

- 2.517,51 € au titre du rappel de salaire de juillet 2014 à avril 2018,

- 251,75 € au titre des congés payés afférents,

- 2.420,44 € au titre des heures supplémentaires,

- 242,04 € au titre des congés payés afférents,

- 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

' Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

La cour est saisie de l'appel formé le 12 août 2019 par la SAS HINTERLAND à l'encontre du jugement prononcé le 24 mai 2019 par lequel le conseil de prud'hommes de Brest a :

' Condamné la SAS HINTERLAND à verser à M. [T] les sommes suivantes avec intérêts de droit :

- 2.517,51 € au titre du rappel de salaire de juillet 2014 à avril 2018,

- 251,75 € au titre des congés payés afférents,

- 2.420,44 € au titre des heures supplémentaires,

- 242,04 € au titre des congés payés afférents,

- 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Rappelé l'exécution provisoire de droit (article R.1454-28 du code du travail) à laquelle sera assorti le jugement et fixé le salaire moyen mensuel à la somme de 2.162,40 €,

' Débouté les parties du surplus de leurs demandes,

' Condamné la SAS HINTERLAND aux dépens, et y compris en cas d'exécution forcée, les éventuels honoraires et frais d'huissier.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 12 novembre 2019, suivant lesquelles la SAS HINTERLAND demande à la cour de :

' Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit y avoir lieu à rappel de salaire et paiement d'heures supplémentaires,

- Condamné la SAS HINTERLAND au versement de plusieurs sommes à M. [T],

' Débouter M. [T] de l'intégralité de ses demandes,

' Condamner M. [T] à verser à la SAS HINTERLAND la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 31 mars 2022, suivant lesquelles M. [T] demande à la cour de :

' Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Y additant,

' Condamner la SAS HINTERLAND à verser à M. [T] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure devant la cour, outre les entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 avril 2022.

Le dossier a été plaidé à l'audience du 13 mai 2022 à l'issue de laquelle les parties ont engagé un processus de médiation.

Par ordonnance du 7 juillet 2022, le Président de la 8ème chambre de la Cour d'appel a désigné un médiateur avec un délai de trois mois pour accomplir sa mission.

Les parties ont fait connaître à la Cour l'absence d'accord aux termes du processus de médiation et ont déposé leurs dossiers à l'audience de point médiation fixée le 18 novembre 2022.

Le dossier a été mis en délibéré le 26 janvier 2023.

Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le rappel de salaire au titre de la garantie de rémunération

Pour infirmation à ce titre, la SAS HINTERLAND soutient essentiellement que la possibilité de décompter le temps de travail sur une base trimestrielle est de droit dans le secteur des transports routiers de marchandises.

Pour confirmation, M. [T] réplique qu'il bénéficie d'un salaire brut mensuel garanti sur la base de 204 heures, indépendamment des heures réellement travaillées.

Le contrat de travail de M. [T] comportait une clause de salaire mensuel garanti rédigée en ces termes : ' En rémunération de votre travail, vous percevrez un salaire brut mensuel de 1622,04 € sur la base de 204 H de travail par mois'.

M. [T] ayant refusé de signé l'avenant du mois de novembre 2016 relatif à la durée du travail effectif, le contrat de travail signé en mars 2002 continuait à s'appliquer.

En effet, si le lissage des heures de travail est autorisé sur un trimestre, dans le transport routier, de façon permanente, le lissage des rémunérations est interdit.

Le salaire mensuel brut garanti de M. [T] étant basé sur 204 heures, l'employeur devait appliquer chaque mois cette garantie, indépendamment du nombre d'heures effectuées. Si pendant le trimestre, le salarié fait moins d'heures, c'est le salaire mensuel brut garanti qui s'applique. Par la suite, si le salarié fait plus d'heures pendant un mois, l'employeur attend la fin du trimestre pour régler ou pas ces heures.

Si depuis le 1er octobre 2016, la SAS HINTERLAND a décidé de régler les heures supplémentaires mois par mois, cette décision ne change rien quant à l'application du salaire mensuel brut garanti.

En l'espèce, le conseil de prud'hommes, qui a retenu que le contrat travail assurait au salarié un salaire mensuel brut garanti basé sur 204 heures et analysant les bulletins de salaire, constaté que le salarié ne l'avait pas perçu, a exactement, sans méconnaître les textes permettant à l'employeur de décompter, comme il l'a fait, la durée du travail hebdomadaire du salarié sur une période de trois mois, condamné l'employeur au paiement d'un rappel de salaire d'un montant de 2.517,51 € assurant au salarié sa rémunération garantie mensuellement.

Il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement entrepris.

Sur les heures supplémentaires ayant donné lieu à un repos compensateur de remplacement

L'article L. 3121-24 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur, prévoit que la substitution du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur est possible si elle est prévue par un accord d'entreprise ou d'établissement, ou à défaut par un accord de branche et que dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, elle peut être mise en place par l'employeur si le comité d'entreprise ou à défaut les délégués du personnel ne s'y opposent pas.

Cependant, il est constant qu'en cas de désignation d'un délégué syndical, l'entreprise se trouve assujettie à l'obligation annuelle de négocier et si aucun accord sur le repos de remplacement n'a été conclu à l'issue du délai imparti pour cette négociation, la décision unilatérale par laquelle l'employeur a mis en place le système de substitution cesse de produire ses effets à l'issue de ce délai, de sorte que le salarié a alors droit au paiement des heures supplémentaires accomplies après cette date.

En espèce, si l'employeur n'invoque l'existence d'aucun accord d'entreprise, d'établissement ou de branche, il résulte du procès-verbal de réunion du 25 janvier 2005 (pièce n°5 de l'employeur) que le délégué du personnel titulaire de l'entreprise a été consulté sur la mise en place d'un dispositif de repos compensateur de remplacement et a donné son accord pour l'application du système tel que présenté par l'employeur à effet au 1er janvier 2005, ce qui vaut une absence d'opposition permettant l'application de la décision unilatérale de l'employeur.

Cependant, à la suite de la désignation de M. [H] comme délégué syndical à compter du 23 février 2009 par le syndicat CFDT, puis de M. [E] en remplacement à compter du 20 décembre 2011puis de M. [R] à compter du 28 novembre 2013, la SAS HINTERLAND devait alors négocier (pièce n°10 du salarié) .

Si elle soutient, sans être contestée, avoir engagé la négociation annuelle obligatoire en 2014, il ne ressort toutefois ni des débats, ni des pièces versées, que celle-ci a abouti et prévu la possibilité d'une substitution en tout ou en partie du paiement des heures supplémentaires par des repos compensateurs, si bien que l'accord atypique antérieur a cessé de produire ses effets au 1er janvier 2015.

Par ailleurs, si la SAS HINTERLAND fait valoir que M. [T] ayant bénéficié de repos compensateurs de remplacement rémunérés, il a été rempli de ses droits et ne pouvait en solliciter paiement sous forme d'heures supplémentaires une seconde fois, force est de constater que l'employeur ne l'établit pas.

En application des règles précitées et des constatations qui précédent, M. [T] est donc fondé à revendiquer le paiement de la totalité des heures supplémentaires accomplies par lui à compter du 1er janvier 2015.

Il ressort du décompte produit jusqu'en novembre 2016, non utilement contesté par la société employeur, la réalisation par l'intéressé d'heures supplémentaires justifiant le versement d'un montant de 2.420,44 € au titre des heures supplémentaires et de 242,04 € au titre des congés payés afférents.

Il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement entrepris.

Sur les frais irrépétibles

Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la société appelante qui succombe en appel, doit être déboutée de la demande formulée à ce titre et condamnée à indemniser le salarié des frais irrépétibles qu'il a pu exposer pour assurer sa défense.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris ;

et y ajoutant,

CONDAMNE la SAS HINTERLAND à verser à M. [T] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre la somme déjà allouée en première instance sur ce fondement ;

DÉBOUTE la SAS HINTERLAND de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS HINTERLAND aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/05561
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;19.05561 ?
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