2ème Chambre
ARRÊT N° 31
N° RG 19/07692 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QJCX
(3)
M. [G] [E]
C/
Mme [H] [B]
CRCAM DU FINISTERE STERE
Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me Julie FAGE
- Me Anne-Marie L'HERROU-CORRE
- Me Alexandre TESSIER
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 27 JANVIER 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 18 Octobre 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 27 Janvier 2023, après prorogations, par mise à disposition au greffe
****
APPELANT :
Monsieur [G] [E]
né le [Date naissance 2] 1977 à [Localité 10]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Julie FAGE de la SCP AVOCATS DU PONANT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST
INTIMÉES :
Madame [H] [B]
née le [Date naissance 3] 1982 à [Localité 9]
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Anne-Marie L'HERROU-CORRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/000540 du 24/01/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU FINISTERE
[Adresse 7]
[Localité 6]
Représentée par Me Alexandre TESSIER de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
2
EXPOSÉ DU LITIGE :
De mars 2009 à mars 2013, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère ( ci-après le Crédit agricole) a consenti à la société 'Les Blés d'Or' plusieurs prêts professionnels, garantis par des cautionnements solidaires de M. et Mme [E] ou de M. [E] seulement de la façon suivante :
- le 20 mars 2009, un prêt n° 00242261697 d'un montant de 100 000 euros au taux conventionnel de 4,30% remboursable en 84 mensualités, garanti par le cautionnement personnel et solidaire de M et Mme [E] à hauteur de 100 000 euros sur une durée de 108 mois,
- le 20 mars 2009, un prêt n° 00242261703 d'un montant de 100 000 euros au taux d'intérêt conventionnel de 3,90% remboursable en 84 mensualités, garanti par le cautionnement personnel et solidaire de M et Mme [E] à hauteur de 100 000 euros sur une durée de 108 mois,
- le 28 juillet 2010, un prêt n° 000250759304 d'un montant de 20 000 euros au taux d'intérêts conventionnel de 3,20 % remboursable en 60 mensualités, garanti par le cautionnement personnel et solidaire de M et Mme [E] à hauteur de 20 000 euros sur une durée de 120 mois,
- le 8 décembre 2011, une ouverture de crédit n° 00256164031 d'un montant de 15 000 euros au taux d'intérêts conventionnel variable de 6,20 % d'une durée indéterminée, garanti par le cautionnement personnel et solidaire de M. [E] à hauteur de 15 000 euros sur une durée de 120 mois,
- le 20 novembre 2012, un prêt n°10000005651 d'un montant de 10 000 euros au taux d'intérêts conventionnel variable de 6,00 % remboursable en dix mensualités, garanti par le cautionnement personnel et solidaire de M. [E] à hauteur de 10 000 euros sur une durée de 34 mois,
- le 26 mars 2013, un prêt n°10000024230 d'un montant de 20 000 euros au taux d'intérêts conventionnel variable de 5,50 % remboursable en 7 mensualités, garanti par le cautionnement personnel et solidaire de M. [E] à hauteur de 20 000 euros sur une durée de 31 mois.
Le divorce des époux [E] a été prononcé le 12 septembre 2011 avec effets reportés au 1er septembre 2010. Les parts de la société 'Les Blés d'or' appartenant à Mme [B] ont été attribuées à M. [E].
Par jugement du tribunal de commerce de Brest en date du 16 avril 2013, la société 'Les Blés d'or' a fait l'objet d'un redressement judiciaire. Le Crédit agricole a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur le 10 juin 2013. Par jugement en date du 14 mars 2017, la liquidation judiciaire de la société a été prononcée. Le Crédit agricole a déclaré sa créance le 27 avril 2017 au passif de la procédure.
Par lettre recommandée en date du 28 mai 2017, la banque a mis les cautions en demeure d'exécuter leurs engagements à hauteur de la somme de 161 923,57 euros.
En l'absence de toute exécution, le Crédit agricole a, par acte d'huissier en date du 29 septembre 2017, fait assigner devant le tribunal de grande instance de Brest, M. [E] et Mme [B] en leur qualité de caution, en paiement des sommes dues.
Par jugement en date du 6 novembre 2019, le tribunal a :
- condamné solidairement M. [E] et Mme [B] à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère :
la somme de 16 163,42 euros avec intérêts au taux de 7,30 % à compter du 17 janvier 2019 sur la somme de 15 559,70 euros dans la limite de 100 000 euros au titre du prêt n° 002422261697 du 20 mars 2009,
la somme de 46 734,74 euros avec intérêts au taux de 6,90 % à compter du 8 septembre 2017 sur la somme de 37 730,09 euros dans la limite de 100 000 euros au titre du prêt n° 00242261703 du 20 mars 2009,
- condamné M. [E] à payer la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère :
la somme de 9 559,07 euros avec intérêts au taux de 6,20 % à compter du 7 septembre 2017 sur la somme de 7 873,79 euros dans la limite de 20 000 euros au titre du prêt n° 00250759304 du 28 juillet 2010,
la somme de 15 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2017, date de la mise en demeure, au titre de l'ouverture de crédit n°00256164031 du 8 décembre 2011,
la somme de 10 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2017, date de la mise en demeure, au titre de l'ouverture de crédit n°10000005651 du 20 novembre 2012,
la somme de 20 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2017, date de la mise en demeure, au titre de l'ouverture de crédit n°10000024230,
- ordonné la capitalisation des intérêts échus pour une année entière à compter de la date du présent jugement,
- autorisé M. [E] et Mme [B] à reporter de douze mois le paiement des sommes à compter de la date de signification du jugement,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- débouté les parties de toutes les autres demandes,
- condamné solidairement M. [E] et Mme [B] aux dépens.
Par déclaration en date du 28 novembre 2019, M. [E] a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 17 juin 2022, il demande à la cour de :
Vu les articles L341-2, L341-4, L341-6 (ancien) du Code de la consommation,
Vu l'article L313-22 du Code monétaire et financier,
Vu les articles 2292, 2293 et 1343-5 nouveau du code civil ,
- réformer le jugement en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau :
- débouter le Crédit agricole de ses demandes de condamnation de M. [E] au paiement des sommes de 10.000 euros outre intérêts au titre du prêt n°651 et 20.000 euros, outre intérêts au titre du prêt n°230,
- débouter le Crédit agricole de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Subsidiairement,
- prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre de chacun des concours garantis,
- par conséquent, avant dire droit s'agissant des condamnations à paiement, rouvrir les débats pour enjoindre le Crédit agricole à produire un nouveau décompte imputant l'ensemble des paiements effectués par la société 'Les Blés d'or'sur le capital au titre de chacun des concours garantis,
- débouter le Crédit agricole de ses demandes à hauteur de 50% du solde restant dû au titre de la garantie du concours n°00250759304 de 20 000 € en date du 28 juillet 2010,
- octroyer les plus larges délais de paiement à M. [E] avec application d'intérêts au taux légal,
- condamner le Crédit agricole au paiement de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile de première instance,
- condamner le Crédit agricole au paiement de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
- condamner le même aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 3 avril 2020, Mme [B], qui a réglé à titre forfaitaire et définitif la somme transactionnelle de 45 000 euros à la banque, demande à la cour de :
- constater qu'elle s'est acquittée de toute dette auprès de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère pour la caution donnée par elle pour la société 'Les Blés d'or',
- dire qu'elle est libérée définitivement de son engagement de caution et de toutes ses conséquences,
- dire que Mme [B] ne saurait être condamnée aux dépens de la présente procédure.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 4 mai 2020, le Crédit agricole demande à la cour de :
Vu l'article 2224 du code civil,
Vu le jugement rendu le 6 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Brest,
Vu le règlement de la somme de 45 000 euros effectué par Mme [B] le 26 décembre 2019,
Vu les pièces versées aux débats,
- confirmer le jugement rendu le 6 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Brest sauf en ce qu'il a autorisé Monsieur [E] et Mme [B] à reporter de 12 mois le paiement de ces sommes, à compter de la date de la signification de la décision,
- constater que Mme [B] a versé à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère la somme de 45 000 euros pour laquelle un montant de 11 077,32 euros a été imputé sur le prêt n° 00242261697 et un montant de 33 922,68 euros a été imputé sur le prêt n° 00242261703,
En conséquence,
- condamner M. [E] à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère :
la somme de 5 682,97 euros avec intérêts au taux de 7,30 % à compter du 24 avril 2020, au titre du prêt n° 00242261697, souscrit le 20 mars 2009,
la somme de 10 013,73 euros avec intérêts au taux de 6,90 % à compter du 24 avril 2020, au titre du prêt n° 00242261703, souscrit le 20 mars 2009,
la somme de 9 559,07 euros avec intérêt au taux de 6,20 % à compter du 6 septembre 2017, titre du prêt n° 00250759304, souscrit le 28 juillet 2010,
la somme de 15 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2017, date de la mise en demeure, au titre de l'ouverture de crédit n° 00256164031, souscrite le 8 décembre 2011,
la somme de 10 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2017, date de la mise en demeure, au titre du prêt n° 10000005651, souscrit le 20 novembre 2012,
la somme de 20 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2017, date de la mise en demeure, au titre du prêt n° 10000024230, souscrit le 26 mars 2013,
- ordonner la capitalisation des intérêts échus à compter de la date du jugement déféré,
- constater que l'action en responsabilité intentée par M. [E] contre la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère est prescrite s'agissant du prêt n° 00250759304 souscrit le 28 juillet 2010,
Statuant à nouveau,
- débouter M. [E] de sa demande tendant à se voir octroyer de plus larges délais de paiement,
- débouter M. [E] de l'ensemble de ses prétentions, fins et conclusions,
En tout état de cause,
- condamner M. [E] à verser à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision ainsi qu'aux dernières conclusions déposées par les parties, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 23 juin 2022.
EXPOSÉ DES MOTIFS :
A titre liminaire, il convient de constater qu'à la suite du règlement par Mme [B] de la somme de 45 000 euros à titre forfaitaire transactionnel, le Crédit agricole ne forme plus de demande en paiement à l'encontre de celle-ci en sa qualité de caution. Les demandes de la banque ne concernent plus que M. [E].
Sur l'extinction des cautionnements des prêts consentis le 20 novembre 2012 et le 26 mars 2013 :
Comme en première instance, M. [E] soutient que son engagement de caution pour ces deux prêts se trouve éteint au motif que la société 'Les Blés d'or' a fait l'objet d'un redressement judiciaire le 16 avril 2013 avant que la première échéance du prêt ne soit exigible, les échéances précédentes concernant le remboursement des seuls intérêts. Il souligne le montant des déclarations de créance de la banque démontrant que la créance était entièrement à échoir. Il en conclut qu'aucun incident de paiement n'est intervenu avant l'ouverture de la procédure collective et considère que la caution ne peut être tenue à plus que le débiteur principal, et notamment qu'elle ne peut être recherchée en paiement de créances non échues ayant bénéficié de délai dans le cadre du plan.
Mais comme l'a constaté le tribunal en rappelant que le terme ne met fin qu'à l'obligation de couverture et laisse subsister la garantie pour toute dette née avant l'échéance, l'exigibilité des dettes est survenue durant la durée du cautionnement. En effet, l'échéance respective des prêts concernés par les cautionnements, rendant exigible l'intégralité des sommes dues, se trouve être le 10 septembre 2013 pour le prêt consenti le 20 novembre 2012 et le 10 octobre 2013 pour le prêt consenti le 26 mars 2013.
C'est également à juste titre que le tribunal a rappelé que la caution ne peut se prévaloir des délais donnés au débiteur dans le cadre du redressement judiciaire. En conséquence, les cautionnements liés à ces deux prêts n'étaient pas éteints.
Sur le caractère certain des créances :
Ainsi que les premiers juges l'ont relevé, la banque justifie avoir déclaré l'ensemble de ses créances au passif de la société 'Les Blés d'or'. Elle produit en effet les certificats d'admission de ses différentes créances y compris celles relatives aux deux premiers prêts octroyés le 20 mars 2009. Elle indique également avoir perçu le 26 juin 2018 la somme de 34 452,92 euros de la liquidation judiciaire suite à la vente du fonds de commerce.
Il s'ensuit que les créances du Crédit agricole s'élèvent pour chaque prêt aux sommes suivantes :
- 5 682,97 euros au titre du prêt n°00242261697 souscrit le 20 mars 2009,
- 10 013,73 euros au titre du prêt n°00242261703 souscrit le 20 mars 2009,
- 9559,07 euros au titre du prêt n°00250759304 souscrit le 28 juillet 2010,
- 28 814,54 euros au titre de l'ouverture de crédit n°00256164031 souscrite le 8 décembre 2011,
- 11 306,67 au titre du prêt n°10000005651 souscrit le 20 novembre 2012,
- 20 000 euros au titre du prêt n°1000002430 souscrit le 26 mars 2013.
Sur la disproportion des engagements de caution :
Aux termes de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution ne lui permette de faire face à ses obligations au moment où elle est appelée.
Le principe de la proportionnalité tend à vérifier que la caution dispose dans son patrimoine des ressources suffisantes pour acquitter ses propres obligations, étant rappelé qu'il ne s'agit pas de vérifier les capacités de la caution à faire face à l'obligation garantie selon les modalités de paiement qui sont propres à celle-ci.
Le tribunal a débouté M [E] et son épouse de ce moyen de défense considérant que la preuve de la disproportion n'était pas rapportée.
M. [E] était marié sous le régime de la séparation de biens au moment des trois premiers actes de cautionnement, puis divorcé depuis le 14 février 2011 pour les trois derniers engagements. Il sera rappelé qu'il s'était engagé pour les montants suivants :
- 20 mars 2009 : par deux fois dans la limite de 100 000 euros,
- le 28 juillet 2010 pour 20 000 euros,
- le 8 décembre 2011 pour 15 000 euros
- le 20 novembre 2011 pour 10 000 euros,
- le 26 mars 2013 pour 20 000 euros.
Aucune fiche de renseignement n'est produit par la banque qui conclut à la confirmation du jugement sur ce point, arguant que M. [E] ne rapporte pas la preuve du caractère disproportionné des cautionnements souscrits.
Il résulte des pièces produites par M. [E], qu'au moment des deux actes de cautionnement consentis le 20 mars 2009 dans la limite de 100 000 euros chacun, il ne disposait d'aucun bien immobilier à l'exception d'un immeuble en indivision, que ces revenus étaient constitués de ses salaires et qu'il détenait la moitié des parts sociales de la société 'Les Blés d'or. Le Crédit agricole produit de son côté le montant des produits d'épargne détenus par M. [E] à cette date. La valeur du fonds de commerce vendu en février 2009, propriété de la société 'Les blés d'or', ne peut être prise en compte au titre des biens de l'appelant pas plus que les revenus futurs de l'activité commerciale relative à l'acquisition d'un nouveau fonds de commerce pour laquelle les prêts ont été consentis à la société.
L'actif de M. [E] en mars 2009 peut donc être évalué de la façon suivante :
-revenus annuels tels que mentionnés sur l'avis d'imposition produit : 16 663 euros,
- parts sociales ; d'une valeur initiale de 4 000 euros pour chaque associé en 2004, elles ont été évaluées forfaitairement avec les comptes d'associés à la somme de 58 058 euros par les époux dans leur convention de divorce en septembre 2001. En mars 2009, le fonds de commerce acheté en 2004 pour 167 694 euros, a été vendu pour 145 000 euros. La valeur du fonds de commerce correspondant à peu près à la valeur du chiffre d'affaire annuel et les époux [E] n'étant pas encore séparés à ce moment-là, ces parts sociales seront évaluées, en mars 2009, à la somme de 80 000 euros soit pour M. [E] : 40 000 euros,
- bien indivis : M. [E] détient ce bien en nue propriété pour un tiers de la valeur de la succession. Il estime ses droits sur cet actif qui n'est pas disponible, puisque occupé par sa mère en usufruit, à la somme de 11 600 euros. Toutefois, il sera constaté qu'en 1999, ce bien a été évalué à 91 000 euros environ, la part revenant à la succession étant estimée par le notaire à 45 734 euros. En 2018, ce bien est estimé à une somme comprise entre 150 000 et 160 000 euros. Il doit donc être considéré que la valeur de ce bien ne peut être inférieure à 120 000 euros en 2009. Compte tenu du taux de l'usufruit de 50 %, la part revenant à M. [E] peut donc être estimée à 20 000 euros.
- épargne : M. [E] disposait de deux comptes épargnes et d'une assurance vie sur lesquels était déposée la somme totale de 2 791,20 euros.
En conséquence, le montant total des revenus et biens de M. [E] s'élevait en mars 2009 à la somme de 79 454,20 euros. Si les actes de cautionnement au profit de la Maison Soufflet, contractés le 18 juin 2009 et le 22 juin 2010, ne peuvent effectivement être pris en compte puisque postérieurs aux engagements du 20 mars 2009, comme relevé par le tribunal, il est néanmoins établi que les actes de cautionnements souscrits le 20 mars 2009 pour un montant total de 200 000 euros étaient disproportionnés aux biens et revenus détenus par M. [E].
S'agissant du cautionnement consenti le 28 juillet 2010 pour 20 000 euros, celui-ci apparaît également disproportionné compte tenu des engagements souscrits entretemps au profit de la maison Soufflet pour un montant total de 40 598 euros, qui viennent s'ajouter aux cautionnements antérieurs du 20 mars 2009, et du montant des revenus imposables déclarés en 2010 par M. [E] s'élevant à la somme de 8831 euros, la valeur du patrimoine immobilier étant inchangée et celle des parts sociales ayant diminué compte tenu de l'évaluation faite un an plus tard et de la séparation du couple en septembre 2010.
Il en est de même des cautionnements postérieurs souscrits le 8 décembre et le 20 novembre 2011 ainsi que le 26 mars 2013, la valeur du garage attribué dans le partage matrimonial pour 20 000 euros et la souscription d'une assurance vie en octobre 2011 d'une valeur de 4 614,36 euros ne permettant pas à M. [E], malgré une augmentation de ses revenus annuels en 2012 à 28 709 euros et en 2013, à 22 355 euros, de faire face à des cautionnements souscrits pour un montant total de 285 598 euros en 2012 et 305 598 euros en 2013.
La banque ne rapportant pas la preuve qui lui incombe de ce que M. [E] était en mesure de faire face à ses engagements au moment de l'assignation en septembre 2017, alors qu'elle lui réclamait la somme totale de 117 460,23 euros, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a considéré les actes de cautionnements des prêts souscrits les 20 novembre 2012 et 26 mars 2013 non éteints et retenu le caractère certain des créances de la banque. Le Crédit agricole ne pouvant se prévaloir des actes de cautionnements souscrits par M. [E], doit donc être débouté de ses demandes en paiements.
Sur les demandes accessoires :
Le Crédit agricole qui succombe en ses demandes supportera la charge des entiers dépens de première instance et d'appel.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [E] les frais non compris dans les dépens, exposés à l'occasion de l'instance. Aussi, le Crédit agricole sera condamné à lui régler la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et la somme de 2 500 euros sur le même fondement pour les frais irrépétibles de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Brest sauf en ce qu'il a considéré les actes de cautionnements des prêts souscrits les 20 novembre 2012 et 26 mars 2013 non éteints et retenu le caractère certain des créances de la banque,
Statuant à nouveau,
Constate que Mme [B] a versé à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère la somme de 45 000 euros pour laquelle un montant de 11 077,32 euros a été imputé sur le prêt n° 00242261697 et un montant de 33 922,68 euros a été imputé sur le prêt n° 00242261703,
Déboute la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de M. [G] [E],
Condamne la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère à payer à M. [G] [E] au titre de l'article 700 du code de procédure civile :
- la somme de 2 000 euros pour les frais irrépétibles de première instance,
- la somme de 2 500 euros pour les frais irrépétibles d'appel,
Condamne la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Finistère aux dépens de première instance et d'appel,
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT