2ème Chambre
ARRÊT N° 92
N° RG 20/00350 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QM4R
(1)
M. [S] [M]
Mme [K] [I] épouse [M]
C/
LA CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ARGENTRE DU PLESSIS
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
-Me Guillaume BROUILLET
-Me Mathieu DEBROISE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 FEVRIER 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 Décembre 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 10 Février 2023 par mise à disposition au greffe et signé par Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller, ayant participé au délibéré collégial, pour le Président empêché,
****
APPELANTS :
Monsieur [S] [M]
né le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 5]
La Giltière
[Localité 4]
Représenté par Me Guillaume BROUILLET de la SCP AVOCATS LIBERTÉ, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
Madame [K] [I] épouse [M]
née le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 5]
La Giltière
[Localité 4]
Représentée par Me Guillaume BROUILLET de la SCP AVOCATS LIBERTÉ, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
LA CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ARGENTRE DU PLESSIS
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Mathieu DEBROISE de la SELARL CABINET MATHIEU DEBROISE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
2
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant acte sous-seing-privé en date du 26 janvier 2010, la société Caisse de crédit mutuel d'Argentré du Plessis a consenti à la société Availles élevage porcs ci-après la société AVEP un crédit de trésorerie d'un montant de 85 000 euros au taux variable de 3,35 % l'an garanti par le cautionnement solidaire de M. [S] [M] et de Mme [K] [I], son épouse, dans la limite de 102 000 euros pour une durée de 60 mois.
Suivant jugement en date du 2 mars 2015, le tribunal de commerce de Rennes a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société AVEP.
Suivant acte d'huissier en date du 7 septembre 2015, la banque a assigné les époux [M] en paiement devant le tribunal de commerce de Rennes qui s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Rennes.
Suivant jugement en date du 3 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Renne a :
Condamné solidairement les époux [M] à payer à la banque la somme de 71 350,13 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du jugement.
Condamné in solidum les époux [M] à payer à la banque la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamné in solidum les époux [M] aux dépens.
Ordonné l'exécution provisoire.
Suivant déclaration en date du 17 janvier 2020, les époux [M] ont interjeté appel.
En leurs dernières conclusions en date du 9 février 2022, les époux [M] demandent à la cour de :
Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
Sur le caractère disproportionné du cautionnement,
Vu l'article L. 341-4 du code de la consommation,
Constater que l'engagement de caution était manifestement disproportionné à leurs biens et revenus.
Constater que la banque ne rapporte pas la preuve que leur situation financière leur permettait de faire face à ce même engagement au jour où ils ont été appelés en garantie.
En conséquence, ordonner l'inopposabilité des cautionnements.
Ordonner que la banque soit dans l'impossibilité de se prévaloir des engagements de caution en raison de leur caractère manifestement disproportionné.
A titre subsidiaire,
Sur la déchéance du droit aux intérêts, frais et pénalités de retard,
Vu l'article L. 313-22 du code monétaire et financier,
Vu l'article 2293 du code civil,
Vu l'article L. 341-6 du code de la consommation,
Constater que la banque ne justifie pas avoir porté à leur connaissance en leur qualité de cautions l'information légale annuelle sur le capital restant dû et les intérêts des prêts en cours.
Ordonner la déchéance du droit aux intérêts.
Confirmer la décision de première instance sur ce point.
A titre infiniment subsidiaire, sur l'octroi de délai de paiement,
Vu l'article 1244-1 du code civil,
Leur accorder un moratoire de 24 mois, et à défaut, un échelonnement de leur dette sur 24 mois.
En tout état de cause,
Condamner la banque à leur payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La condamner aux dépens.
En ses dernières conclusions en date du 7 avril 2022, la banque demande à la cour de :
Vu les articles 1134 et suivants du code civil devenus 1103 et suivants et 1193 et suivants du code civil,
Vu les articles 2288 et suivants du code civil,
Vu les articles 783 et 784 du code de procédure civile,
Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Débouter les époux [M] de leurs demandes, fins et conclusions.
Y ajoutant,
Condamner solidairement les époux [M] à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Les condamner sous la même solidarité aux dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions des parties.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Les époux [M] font valoir qu'antérieurement à leur engagement au profit de la société Caisse de crédit mutuel d'Argentré du Plessis, ils s'étaient engagés en qualité de cautions auprès de la société Crédit agricole pour un montant total de 1 067 500 euros et de la société Banque populaire pour un montant total de 320 000 euros, soit un montant total de 1 387 500 euros au titre des prêts souscrits par la société [M] élevage. Ils précisent que les encours étaient importants puisqu'au moment où cette société a bénéficié d'un plan de redressement, le passif à restructurer atteignait la somme de 1 599 594 euros. Ils considèrent que la banque aurait dû veiller à l'exacte valorisation des actifs de la société AVEP et que les informations portées à sa connaissance, l'existence d'engagements antérieurs, auraient dû la conduire à solliciter des informations complémentaires. Ils font valoir que selon les bilans en possession de la banque, les actifs de la société AVEP étaient valorisés à la somme de 592 273 euros. Ils soutiennent que l'engagement de caution à hauteur de la somme de 102 000 ajouté à leurs engagements antérieurs était manifestement disproportionné.
La banque réplique que les époux [M] ont déclaré un patrimoine de 1 499 880 euros. Elle soutient qu'elle n'était pas tenue de vérifier les informations communiquées dès lors que les fiches patrimoniales établies par les cautions ne comportaient aucune anomalie apparente. Elle considère que la seule indication selon laquelle les époux [M] s'étaient portés cautions sans précision des montants n'était pas de nature à caractériser l'existence de prêts par ailleurs déclarés comme inexistants. Elle relève que les époux [M] ont sciemment et volontairement procédé à une fausse déclaration concernant la valeur des actifs de la société AVEP. Elle précise qu'elle ne détenait aucune information relative à cette société, les éléments révélés postérieurement à l'appel en garantie des cautions ne pouvant être pris en compte.
Le premier juge a retenu que le montant de la somme réclamée par la banque n'était pas discuté étant rappelé qu'il correspondait à la créance déclarée dans le cadre de la procédure de collective sauf à déduire les intérêts, la banque ne discutant pas la déchéance du droit aux intérêts invoquée par les cautions en raison du défaut d'information annuelle.
Les époux [M] ont certifié l'exactitude des renseignements mentionnés dans les fiches patrimoniales remises à la banque alors qu'ils s'engageaient en qualité de cautions en garantie du crédit de trésorerie accordé à la société AVEP. Au regard de la valeur nette déclarée des parts sociales de la société AVEP, soit la somme de 900 000 euros, de la valeur nette déclarée du patrimoine immobilier, soit la somme de 599 880 euros, et des revenus des époux [M], de l'ordre de 40 000 euros par an, l'engagement litigieux souscrit à hauteur de la somme de 102 000 euros ne présentait aucun caractère excessif.
Même en prenant en compte les engagements de caution antérieurs que les époux [M] avaient omis de déclarer à la banque, du moins dans leurs montants, pour une somme totale de 1 387 500 euros, le nouvel engagement de 102 000 euros n'apparaissait pas excessif au regard de leur patrimoine net déclaré et de leurs revenus.
Les époux [M] ne peuvent reprocher à la banque de n'avoir pas vérifié la valeur réelle de la société AVEP au motif qu'il était mentionné dans les fiches patrimoniales qu'un engagement avait été pris à l'égard de cette société sans autre précision et que dans le même temps il était indiqué qu'elle n'avait contracté aucun emprunt. Il résulte en effet de leurs explications que les emprunts pour lesquels ils s'étaient précédemment engagés avaient été contractés par la société [M] élevage. Les fiches patrimoniales ne présentaient à cet égard aucune anomalie.
Les éléments figurant dans les fiches patrimoniales n'étaient affectés d'aucune anomalie apparente et permettaient de considérer que l'engagement souscrit n'était pas disproportionné aux biens et revenus des cautions. La banque n'était pas tenue de vérifier l'exactitude des sommes mentionnées dans les dite fiches quant à la valorisation des parts sociales de la société AVEP peu important que les époux [M] soutiennent depuis lors que leur valeur était bien moindre. A cet égard, ils ne démontrent aucunement que la banque était en possession de documents lui permettant d'estimer à la baisse la valeur des parts sociales de la société AVEP.
Le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.
Les époux [M] ont bénéficié en raison de la durée de la procédure de larges délais. Il n'y a pas lieu de faire droit à leur demande de délai de grâce.
Leurs demandes seront rejetées.
Ils seront condamnés solidairement à payer à la banque la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.
Ils seront condamnés solidairement aux dépens de la procédure d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Rennes en date du 3 décembre 2019 en toutes ses dispositions.
Rejette les demandes de M. [S] [M] et de Mme [K] [I], son épouse.
Y ajoutant,
Condamne solidairement M. [S] [M] et Mme [K] [I], son épouse, à payer à la société Caisse de crédit mutuel d'Argentré du Plessis la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.
Les condamne solidairement aux dépens de la procédure d'appel.
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT