Chambre de l'Expropriation
ARRÊT N° 4
N° RG 22/01624 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SRO6
L'ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DE LOIRE ATLANTIQUE
C/
Mme [P] [M] veuve [S]
M. [K] [S]
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Lahalle
Me Gauvain
cc commissaire du gouvernement
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 09 JUIN 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre,
Assesseur : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 Avril 2023, devant Monsieur Fabrice ADAM, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
En présence de :
- Madame [T] [A], commissaire du gouvernement de Loire Atlantique représentant la direction régionale des finances publiques de la Loire Atlantique et du département de Loire Atlantique selon pouvoir,
ARRÊT :
contradictoire, prononcé publiquement le 09 Juin 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANT :
L'ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DE LOIRE ATLANTIQUE, identifié au SIREN sous le n° 754 078 475, représenté par M. [N] [D] [Y], directeur
Hôtel du Département
[Adresse 14]
[Localité 15]
Représenté par Me Vincent LAHALLE de la SELARL LEXCAP, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Raphaëlle VAUTIER, plaidant, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉS :
Madame [P] [M] veuve [S]
née le 07 Juin 1964 à [Localité 19], de nationalité française
[Adresse 12]
[Localité 27]
Monsieur [K] [S]
né le 24 Février 1991 à [Localité 27], de nationalité française
[Adresse 6]
[Localité 27]
Représentés par Me Bertrand GAUVAIN de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentés par Me Caroline BARDOUL, plaidant, avocat au barreau de NANTES
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Le plan local d'urbanisme de la commune de [Localité 22] a été approuvé par une délibération du 2'décembre 2011 publiée le 8 décembre suivant.
Afin de conforter les acquisitions entreprises depuis 1981 par le Conservatoire du Littoral dans le secteur de [Localité 24], situé à cheval sur le territoire des communes de [Localité 26] et de [Localité 22], zone de préemption d'espace naturel sensible instituée par le département de Loire Atlantique suivant délibération du 7 octobre 1994 devenue exécutoire le 11 octobre suivant, ces communes ont émis, en décembre 2016, un avis favorable à une procédure de déclaration d'utilité publique afin de maîtriser le foncier du site qui couvre une superficie de 75 ha dont 36 restaient à acquérir.
Après accord du Conservatoire du Littoral, l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique a été ouverte le 23 août 2018. L'arrêté déclarant l'opération d'utilité publique a été pris le 29 novembre 2018 par le préfet de Loire Atlantique et modifié le 17 janvier 2019. L'arrêté de cessibilité des parcelles nécessaires à la réalisation du projet est daté du 23 décembre 2019.
Mme [P] [M] veuve [S] et M. [K] [S] sont propriétaires au sein du périmètre concerné de deux parcelles sises commune de [Localité 22], cadastrées section 177 BW n° [Cadastre 5] d'une contenance de 919 m² et section 177 BZ n° [Cadastre 17] d'une contenance de 1 '630'm².
L'ordonnance prononçant le transfert de la propriété de ces parcelles au profit de l'expropriant a été rendue le 13 février 2020.
Le 19 juin 2020, l'Établissement public foncier de Loire Atlantique, agissant pour le compte du Conservatoire du Littoral en vertu d'une convention de partenariat, a adressé aux expropriés une offre d'indemnisation totale de 4'588 euros que ces derniers n'ont pas acceptée (offre restée sans réponse).
Par requête du 18 août 2021, l'Établissement public foncier de Loire Atlantique a saisi le juge de l'expropriation du département de Loire Atlantique. La visite des lieux a été effectuée le 9 novembre 2021.
Par jugement du 18 janvier 2022, le juge de l'expropriation a ':
- fixé aux sommes de 34'848,94 euros le montant de l'indemnité principale et de 4'484,89 euros le montant de l'indemnité de remploi allouées à Mme [P] [M] Vve [S] et à M. [K] [S],
- condamné l'Établissement public foncier de Loire Atlantique à payer à Mme [P] [M] Vve [S] et à M. [K] [S] une somme de 3'000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné l'Établissement public foncier de Loire Atlantique aux dépens.
Pour ce faire, le juge de l'expropriation a retenu un prix de 1,50 euro/m² pour la parcelle cadastrée section BZ n° [Cadastre 17] et un prix de 35,26 euros/m² pour la parcelle cadastré section BW n° [Cadastre 5].
L'Établissement public foncier de Loire Atlantique a interjeté appel de cette décision par déclaration du 8 mars 2022 complétée par deux autres déclarations en date des 9 et 10 mars. Ces trois déclarations ont été jointes le 17 mars 2022 par mention au dossier.
Aux termes de ses dernières écritures (9 février 2023), l'Établissement public foncier de Loire Atlantique demande à la cour de' :
- bien vouloir réformer le jugement du 18 janvier 2022 (n° RG 21/00033) du juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Nantes,
- bien vouloir fixer les indemnités d'expropriation revenant aux consorts [S] en raison de l'expropriation des parcelles cadastrées BZ n° [Cadastre 17] et BW n° [Cadastre 5] leur appartenant sur le territoire de la commune de [Localité 22] à la somme totale de 4'588 euros,
- bien vouloir condamner les consorts [S] aux dépens et à lui verser la somme de 3'000 euros au titre des frais irrépétibles,
- bien vouloir rejeter toutes demandes, prétentions contraires.
L'Établissement rappelle qu'il n'existe aucune contestation sur la date de référence (2'décembre 2011), l'absence de qualification de terrain à bâtir des biens expropriés et leur consistance (parcelle de terre à usage naturel et libre de toute occupation) et la situation privilégiée de la parcelle cadastrée BW n° [Cadastre 5]. Il précise que ces deux parcelles sont situées en zone naturelle non constructible (ND), dans la zone de préemption espace naturel sensible instauré par le département, et dans un secteur protégé à plusieurs titres (DTA de l'estuaire de la Loire, schéma de cohérence territorial du pays de Retz, zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique, site Natura 2000, schéma régional de cohérence écologique des Pays de la Loire, stratégie de création d'aires protégées).
Il ne conteste pas l'évaluation effectuée par le premier juge de la parcelle BZ n° [Cadastre 17] (1,50'euro/m²), mais celle de la parcelle BW n° [Cadastre 5] qui, si elle bénéficie d'une situation privilégiée, ne peut être évaluée à un prix supérieur ainsi qu'il résulte de l'étude du marché. Il fait grief au jugement d'avoir retenu que cette parcelle pourrait servir de terrain de loisir, ce qui n'avait jamais été invoqué, pour l'évaluer au prix de 35,26 euros/m² par référence à un bien situé à 6 km, commune de [Localité 26], plus à l'intérieur des terres et dans un secteur différent (Nx au lieu de Nd), correspondant de plus à une valeur de convenance (parcelle attenante au domicile de l'acquéreur pour en faire un jardin), tout en écartant les termes de comparaison qu'il avait produits comme ceux produits par le commissaire du gouvernement, tous faisant état de biens acquis au prix de 1,50 euros/m² (dont plusieurs attenants à des parcelles construites).
Aux termes de leurs écritures (4 août 2022), Mme [P] [S] née [M] et M.'[K] [S] demandent à la cour de':
- confirmer le jugement du juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Nantes du 18'janvier 2022 en toutes ses dispositions,
- débouter l'Établissement public foncier de Loire Atlantique et le commissaire du gouvernement de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner l'Établissement public foncier de Loire Atlantique à leur verser la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens et frais d'expertise afférents au présent litige.
Les consorts [S] rappellent que leurs deux parcelles, situées en zone N, secteur Nd, du plan local d'urbanisme de [Localité 22], sont en dehors des périmètres de la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) et du site Natura 2000.
Ils ne contestent ni la date de référence retenue (2 décembre 2011) ni la qualification et la consistance des biens, mais font valoir que la parcelle BW n° [Cadastre 5] bénéficie d'un emplacement privilégié, jouxtant une parcelle bâtie (secteur Uc du plan local d'urbanisme de [Localité 22]), étant desservie par une voie carrossable et l'ensemble des réseaux et bénéficiant d'un panorama exceptionnel puisque face à la mer.
Ils relèvent que les termes de comparaison cités par l'expropriante et le commissaire du gouvernement sont pour certaines situées en ZNIEFF, une autre en zone agricole (secteur Ad) et ne sont pas desservies par les réseaux.
Ils précisent que la maison située en face de leur terrain a été vendue en 2016 moyennant le prix de 695'000 euros. Comme termes de référence, ils citent la parcelle retenue par le premier juge (commune de [Localité 26], cadastrée section AO n° [Cadastre 11]) ainsi qu'une autre transaction en limite de secteur urbanisé.
Ils ne contestent pas l'évaluation de la seconde parcelle au prix de 1,50 euro/m².
Aux termes de ses écritures (21 juillet 2022), le commissaire du gouvernement forme appel incident et demande à la cour de ':
- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a fixé pour la parcelle cadastrée section 177BZ n° [Cadastre 17], l'indemnité de dépossession à la somme de 2'445 euros,
- réformer le jugement et fixer pour la parcelle cadastrée section 177BW n° [Cadastre 5] l'indemnité de dépossession à la valeur de 1'378,50 euros,
- fixer l'indemnité de remploi à la somme de 764,70 euros,
soit un montant total de 4'588,20 euros arrêté à la somme de 4'588 euros.
Il précise que la date de référence doit être fixée au 8 décembre 2011 qui est la date de publication du plan local d'urbanisme de la commune de [Localité 22] (et non au 2 décembre qui est la date de la délibération). Il ajoute que les terrains situés en zone naturelle ne peuvent recevoir la qualification de terrains à bâtir.
Il critique la décision qui s'est exclusivement fondée sur un prix de convenance (acquisition d'un terrain par le propriétaire de la maison contiguë) et estime que la parcelle BW n° [Cadastre 5] aurait dû être évaluée au même prix que les autres cessions citées et situées à proximité intervenues dans le cadre de la même opération et qui bénéficient également d'une situation privilégiée.
SUR CE :
Description des biens expropriés :
Les consorts [S] sont propriétaires de deux parcelles situées en secteur littoral de la commune de [Localité 22].
La parcelle cadastrée section BZ n° [Cadastre 17] -dont la valeur arrêtée par le premier juge sur la base de 1,50 euro/m² n'est pas contestée - est située à proximité immédiate de la mer dans un secteur resté sauvage. Elle est longée au sud par le sentier littoral et à l'ouest par un chemin fermé à la circulation automobile aboutissant depuis une voie communale à la mer (site dit [Adresse 21]).
La parcelle cadastré section BW n° [Cadastre 5] est également située face à la mer, en limite du hameau de [Localité 20]. Elle est longée au sud par le sentier littoral et au nord par une voie carrossable en cul de sac qui dessert ce hameau. La parcelle [Cadastre 4], contiguë à l'est, est bâtie de même que les parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 7] situées de l'autre côté de la voie carrossable.
Ces deux parcelles sont libres de toute occupation.
Sur les dates de référence :
Il n'est pas contesté, ce qu'a retenu à bon droit le premier juge (sous réserve d'une erreur sans conséquence sur la date de publication de la dernière modification du plan local d'urbanisme), que :
- le montant des indemnités devait être fixé d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété (critère défini par l'article L 322-1 du code de l'expropriation), soit au 13 février 2020,
- le bien exproprié devait être estimé conformément à l'article L 322-2 à la date du jugement de première instance (18 janvier 2022),
- suivant sa qualification juridique au 8 décembre 2011, date à laquelle est devenue opposable la dernière modification (2 décembre 2011) du plan local d'urbanisme affectant la zone (N) où sont situés les biens, ceux-ci se trouvant dans le périmètre de la zone de préemption d'espace naturel sensible, et ce conformément aux dispositions de l'article L 215-18 du code de l'urbanisme («'Lorsqu'un terrain soumis au droit de préemption mentionné aux articles L 215-1 et L 215-2 fait l'objet d'une expropriation pour cause d'utilité publique, la date de référence prévue à l'article L 322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique est remplacée, s'il existe un plan local d'urbanisme, par la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes approuvant, modifiant ou révisant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le terrain») par dérogation à la règle fixée à l'article L 322-2 du code de l'expropriation.
Cette analyse, conforme aux textes cités, doit être approuvée.
Sur la qualification de terrain à bâtir :
À la date de référence, les deux parcelles se trouvait en N, secteur Nd, du plan local d'urbanisme de la commune de [Localité 22] qui correspond «'aux secteurs naturels destinés à être protégés, en raison des qualités des sites, des milieux naturels, des paysages».
Ces parcelles, inconstructibles, ne peuvent recevoir la qualification de terrain à bâtir ce qu'aucune des parties ne conteste.
L'emplacement de la parcelle BW n° [Cadastre 5] est, en revanche, privilégié ce qui est admis par l'ensemble des parties, ce en raison de sa desserte par une voie carrossable et desservie par les réseaux, de sa localisation à proximité immédiate tant de la zone urbanisée (quartier de [Localité 20]), dont elle se trouve aux confins, que de la mer.
Il n'est justifié d'aucun usage particulier à la date du jugement de première instance de sorte que cette parcelle doit être évaluée en fonction de son usage effectif à cette date (prairie naturelle en zone littorale) et ne peut être évaluée, comme l'a fait le premier juge, en fonction d'usage potentiel («'elle pourrait servir de terrain de loisir, qui constitue un usage particulièrement prisé en bord de mer, comme peut l'être un verger pour une maison d'habitation'»).
Sur l'évaluation des biens :
La discussion porte exclusivement sur l'évaluation de la parcelle cadastrée section BW n°'[Cadastre 5] (celle de la parcelle BZ n° [Cadastre 17] n'étant pas discutée).
Pour permettre l'évaluation de cette parcelle par la méthode de la comparaison, l'expropriant cite quatre termes concernant des parcelles situées à proximité ':
- E 1' : traité d'adhésion en date du 4 novembre 2021 à ordonnance d'expropriation du 13'février 2020, portant sur la cession de la parcelle sise à [Localité 22], cadastrée section BW n° [Cadastre 16] d'une contenance de 17 a 15 ca, moyennant le prix principal de 2 572,50 euros, soit 1,50'euros/m². Ce terme de comparaison est intéressant dans la mesure où il est situé à proximité immédiate et proche de la mer (plage de [Localité 25]). Il n'est, en revanche, desservi par aucune voie carrossable,
- E 2 ': traité d'adhésion en date du 1er juillet 2021 à ordonnance d'expropriation du 13'février 2020, portant sur la cession de la parcelle sise à [Localité 22], cadastrée section BW n° [Cadastre 18] d'une contenance de 19 a 10 ca, moyennant le prix principal de 2 '865 euros, soit 1,50'euros/m². Ce terme est également proche du bien à évaluer mais se trouve un peu plus loin de la mer. Il n'est pas desservi par une voie carrossable mais par un chemin,
- E 3' : traité d'adhésion en date du 1er juillet 2021 à ordonnance d'expropriation du 13'février 2020, portant sur la cession de deux parcelles sises à [Localité 22], cadastrée section BW n° [Cadastre 1] et [Cadastre 2] d'une contenance totale de 41 a 86 ca, moyennant le prix principal de 6' 279 euros, soit 1,50'euros/m². Ce terme est également proche du bien à évaluer mais se trouve un plus éloigné de la mer. Il n'est pas desservi par une voie carrossable mais par un chemin,
- E 4 ': acte de vente en date du 5 novembre 2018, portant sur la cession de la parcelle sis à [Localité 22], cadastrée section BW n° [Cadastre 8] d'une contenance de 15 a 70 ca, moyennant le prix principal de 2' 865 euros, soit 1,50'euros/m². Ce terme, à usage de terrain d'agrément, est également proche du précédent comme de la zone urbanisée mais se trouve éloigné de la côte. Il est desservi par un chemin.
Ces quatre termes sont pertinents et donc à retenir mais leur emplacement est moins favorable, soit parce qu'ils se trouvent plus loin de la mer (pour trois d'entre eux), soit parce qu'ils ne sont pas desservis par une voie carrossable (pour trois d'entre eux) soit encore parce qu'ils sont plus éloignés de la zone urbanisée (également pour trois d'entre eux).
Le commissaire du gouvernement -qui conclut aux mêmes fin- cite trois termes de comparaison (dont l'un commun avec l'expropriante, E 1) et fait également état d'une cession (C 1) d'un terrain agricole à un voisin comme exemple de prix de convenance :
- C 1' : vente le 23 août 2021 d'une parcelle agricole sise à [Adresse 23], cadastrée section BW n° [Cadastre 13] par un propriétaire riverain au prix de 4,95 euros/m²,
- C 2' : jugement du 14 décembre 2021 fixant l'indemnité principale due à l'exproprié pour la parcelle sise à [Localité 22] cadastrées section BW n° 7 d'une superficie de 15 a 37 ca au prix de 2 305,50 euros soit 1,50 euro/m². Cette décision est intéressante car elle concerne une parcelle située face à la mer (plage de [Localité 25]), à proximité mais non desservie par une voie carrossable,
- C 3 ': vente le 3 mai 2019 d'une parcelle de terre de 21 a 75 ca, moyennant le prix de 3 262,50 euros', soit 1,50 euros/m². Cette parcelle est située face à la mer, en limite d'une zone urbanisée (hameau de [Localité 25]) et est desservie par une voie carrossable, côté nord, par un sentier à l'est et par le sentier littoral au sud. Elle est orientée de façon identique à la parcelle à évaluer et bénéficie de la même vue. Il s'agit donc d'un terme de comparaison tout à fait approprié.
Les deux termes de comparaison C2 et C3 cités par le commissaire du gouvernement sont pertinents, notamment le terme C 3 qui présente les mêmes caractéristiques.
Les consorts [S] citent deux termes de comparaison' :
- J 1' : vente le 7 juillet 2018 d'une parcelle de 7 a 09 ca située en secteur Nx de la zone N du plan local d'urbanisme de la commune de [Localité 26], moyennant le prix de 25' 000 euros soit 35,26 euros/m². Ce bien se situe à l'autre extrémité de la zone de préemption de l'espace naturel de [Localité 24], mais à l'extérieur de celle-ci. Ce terme est intéressant car le bien cédé, inconstructible, est situé en limite de la zone urbanisée. Cependant le prix stipulé est manifestement un prix de convenance, largement supérieur au prix du marché (il suffit, à cet égard, de prendre en compte la vente C1 citée par le commissaire du gouvernement dans le même hameau que la parcelle à évaluer, cession qui a trait à un terrain vendu dans des circonstances similaires à un voisin mais pour un prix au m² sept fois inférieur...), cette parcelle ayant été acquise, par le propriétaire de la parcelle voisine (cadastrée section AO n° [Cadastre 9] et [Cadastre 10]) pour agrandir son jardin et donner une forme régulière à son bien ce qu'il n'avait pas antérieurement. Ce terme dont le prix ne reflète pas la réalité du marché, doit donc être écarté,
- J 2 ': vente le 8 octobre 2018 d'une parcelle de 3a située en secteur A du plan local d'urbanisme de la commune de [Localité 22], moyennant le prix de 9 '000 euros, soit 30 euros/m². Cette acquisition présente les mêmes caractéristiques que la précédente, s'agissant pour le propriétaire de la parcelle voisine bâtie d'agrandir son terrain, en l'occurrence pour y implanter une piscine et donner à l'ensemble une forme régulière qui lui faisait défaut. Le prix convenu est, là encore, manifestement un prix de convenance, de sorte que ce terme doit également être écarté.
Le juge de l'expropriation, pour fixer le prix de la parcelle exproprié à 35,26 euros/m², a retenu le terme J1 cité par les expropriés.
Pour les raisons qui ont été exposées, ce terme qui reflète un prix de convenance, ne peut être retenu.
La référence la plus pertinente est celle (C3), également en situation privilégiée et pour les mêmes motifs, citée par le commissaire du gouvernement. Les expropriés font certes valoir que cette référence est comprise dans la ZNIEFF instituée au bénéfice des parcelles les plus sensibles, ce qui n'est pas le cas de la parcelle à évaluer, mais cette circonstance -qu'il convient toutefois de prendre en compte, eu égard aux contraintes supplémentaires imposées dans ce zonage particulier- ne peut justifier une différence de prix (au m²) excédant 50 %. Cette parcelle sera estimée au prix de 2,25 euros/m².
L'indemnité principale allouée pour ce bien (parcelle cadastrée section BX n° [Cadastre 5]) sera fixée en conséquence à la somme de 2 '067,75 euros, l'indemnité principale due pour la parcelle cadastrée section BZ n° [Cadastre 17] étant inchangée (2' 445 euros), soit au total une indemnité principale de 4' 512,75'euros.
L'indemnité accessoire sera fixée comme d'usage à 20 % jusqu'à 5 000 euros, soit 902,55 euros.
L'indemnité totale sera donc de 5' 415,30 euros.
Le jugement critiqué sera infirmé sauf en ce qui concerne les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
L'Établissement public foncier de Loire Atlantique supportera la charge des dépens d'appel et devra verser aux consorts [S], unis d'intérêts, une somme de 1 200' euros fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS' :
Statuant par arrêt rendu publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement rendu par le juge de l'expropriation de Loire Atlantique le 18 janvier 2022 sauf en ce qui concerne les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau' :
Fixe le montant de l'indemnité d'expropriation due aux consorts [S] à la somme de 5 '415,30'euros (indemnité principale ': 4 512,75 euros, indemnité accessoire ': 902,55 euros).
Condamne l'Établissement public foncier de Loire Atlantique aux dépens d'appel.
Condamne l'Établissement public foncier de Loire Atlantique à payer aux consorts [S] la somme de 1 200 euros fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président,