04/09/2007
Arrêt no
LGW/DB/IM
Dossier no06/02499
CENTRE HOSPITALIER D'USSEL
/
Josette X...
divorcée Y...Arrêt rendu ce quatre Septembre deux mille sept par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) à l'audience publique de renvoi de cassation de la Cour d'Appel de RIOM, tenue en audience ordinaire conformément à la décision de Mme la Première Présidente de la Cour d'appel de RIOM composée lors du délibéré de :
M. Louis GAYAT DE WECKER, Président de chambre
Mme C. SONOKPON, Conseiller
M. Christophe RUIN, Conseiller
en présence de Mme Dominique BRESLE greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
CENTRE HOSPITALIER D'USSEL
prise en la personne de son reorésentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis
2 Avenue du Docteur Roullet
19208 USSEL CEDEX
Représenté et plaidant par Me DIAS avocat au barreau de TULLE (SCP GOUT DIAS ET ASSOCIES)
APPELANT
ET :
Mme Josette X... divorcée Y...
...
19200 USSEL
Représentée et plaidant par Me FREYSSINET suppléant Me Marie-Paule B...
C... avocat au barreau de TULLE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007/001199 du 25/05/2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RIOM)
INTIMEE
Monsieur GAYAT de WECKER Président ayant présenté le rapport et Monsieur RUIN Conseiller, après avoir entendu à l'audience publique de renvoi de cassation du 19 Juin 2007 tenue en audience ordinaire conformément à la décision de Mme la Première Présidente en date du 9 janvier 2007, et tenue en application de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, sans qu'ils s'y soient opposés, les représentants des parties, le dossier ayant préalablement été communiqué au Ministère Public en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré et à l'audience publique de ce jour indiqué par le magistrat rapporteur, a été lu par Mme SONOKPON Conseiller, le dispositif de l'arrêt dont la teneur suit conformément à l'article 452 du nouveau code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE:
Le 10 octobre 2001, Madame Josette Y... est embauchée à effet du 5 novembre 2001 par le Centre hospitalier d'Ussel dans le cadre d'un contrat emploi solidarité (contrat à durée déterminée), en qualité d'agent de service hospitalier, devant prendre fin le 4 novembre 2002.
Affectée à la maison de retraite du Centre Hospitalier, Mme Y... écrit le 5 février 2002 à son employeur pour lui demander s'il est possible de la changer de service vu les difficultés rencontrées par elle pour assister les personnes en fin de vie.
Le 16 février 2002 suivant, elle lui adresse un nouveau courrier pour lui indiquer qu'elle ne reprendra pas son travail dans ces conditions à la maison de retraite (....).
Par courrier du 18 février 2002 le centre hospitalier lui notifie par lettre recommandée la rupture de son contrat de travail.
Saisi le 13 juin 2002 de demandes tendant à la reconnaissance du caractére abusif de la rupture, le Conseil des Prud'hommes de Tulle, au terme d'un jugement du 4 mars 2003, dit le contrat rompu à l'initiative de l'employeur et le condamne au paiement de 5.219,24€ au titre des dommages et intérêts pour application de l'article L 122-3-8 du Code du Travail et de 300€ à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement.
Sur appel du Centre hospitalier, la Cour d'Appel de Limoges , au terme d'un arrêt du 18 novembre 2003, déboute la salariée de l'ensemble de ses demandes.
Le 27 septembre 2006, la Cour de cassation, saisie d'un pourvoi formé par Mme X..., casse et annule en toutes ses dispositions l'arrêt ainsi rendu au motif qu'il ne résulte pas des circonstances de la rupture une volonté claire et non équivoque de rompre le contrat et renvoie la cause et les parties devant la Cour de céans.
Le 7 novembre 2006, le Centre Hospitalier de Tulle a sollicité la réinscription du dossier au rôle de la Cour.
PRÉTENTIONS DES PARTIES:
Le Centre hospitalier d'Ussel, concluant au rejet des prétentions adverses, demande de dire que la rupture du contrat est intervenue d'un commun accord et, à titre subsidiaire, qu'elle a été justifiée par la force majeure ou pour le moins par la faute grave de la salariée et de condamner l'appelante au paiement de 2.500€ au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il expose que la salariée, aprés avoir multiplié les absences sans justifications, lui a successivement fait connaitre dans un premier courrier daté du 5 février 2002 qu'elle ne pouvait plus continuer à travailler dans le meme service ( accompagnement des personnes âgées en fin de vie) et dans un second courrier du 16 février 2002 qu'eu égard à son impossibilité de pouvoir continuer à travailler elle ne reprendrait pas son travail le 18 septembre 2000.
La salariée ayant ainsi manifesté son intention de rompre la relation salariale, il fait valoir qu'ayant été amené à constater le 18 septembre 2000 l'absence de la salariée de son poste de travail, il lui a fait part par courrier du même jour de son accord quant à la rupture des relations ce qui suffit à caractériser l'existence d'une rupture d'un commun accord.
Il observe qu'en raison de la nature de son contrat prévoyant la désignation d'un tuteur, il ne lui était pas possible de faire droit à la demande de changement de service ce qui explique qu'il n'ait pas donné satisfaction à la demande dont il avait été saisi.
Au cas où la Cour ne retiendrait pas la rupture d'un commun accord, il demande de constater qu'il s'est trouvé dans un cas de force majeure et qu'en tout état de cause le refus de la salariée de reprendre son poste constitue une faute grave justifiant la rupture immédiate du contrat de travail.
Madame Josette X..., concluant à la confirmation, demande le versement de:
- 5 .219,24€ au titre de l'article L 122-3-8 du Code du Travail
- 579,92€ au titre du non respect de la procédure de licenciement
- 1.524, 49€ à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail
- 2.500€ au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle expose qu'elle n'a pas entendu solliciter la rupture de son contrat de travail mais seulement réclamer à son employeur de pouvoir changer de service du fait des difficultés rencontrées par elle pour accompagner les personnes en fin de vie et du harcèlement dont elle faisait l'objet de la part de sa supérieure hiérarchique, l'absence de toute précision relative à son affectation dans son contrat de travail faisant qu'il était parfaitement possible de la changer de service.
Elle demande en conséquence d'écarter les prétentions de l'appelante fondées sur la constatation d'une rupture d'un commun accord.
Elle soutient que le Centre Hospitalier ne peut davantage arguer d'un cas de force majeure ni d'une faute grave dans la mesure où le courrier de l'employeur du 18 février 200 n'en fait nullement état.
Elle demande de faire droit au plein de ses demandes.
M. l'avocat général auquel le dossier avait été communiqué a fait parvenir des observations écrites d'où il résulte qu'il s'en rapporte à droit.
DISCUSSION :
Sur la recevabilité
L'appel, interjeté dans le délai d'un mois prévu par les articles 538 du Nouveau Code de Procédure Civile et R. 517-7 du Code du Travail, est régulier en la forme ce qui rend recevable l'appel incident qui s'y est greffé.
Sur le fond
- Sur la rupture du contrat emploi solidarité:
- les principes
La rupture d'un contrat emploi solidarité est soumise au régime de la rupture des contrats à durée déterminée.
En application de l'alinéa 1er de l'article 122-3-8 du Code du Travail, sauf accord des parties, le contrat à durée déterminée ne peut etre rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de force majeure ou de force majeure.
Aux termes de l'alinéa 3 du même article, la méconnaissance par l'employeur des dispositions prévues à l'alinéa premier ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat sans préjudice de l'indemnité prévue à l'article L 122-3-4.
- l'espèce
A l'appui de son appel, le Centre Hospitalier soutient en premier lieu que la rupture des relations contractuelles aurait procédé d'un commun accord.
Il est de principe que la rupture anticipée par accord des parties ne peut résulter que d'une volonté claire et non équivoque.
Dans le cas d'espèce, cette volonté n'a été exprimée par aucune de parties ce qui exclut dés lors qu'il y ait pu avoir accord en vue d'une rupture.
En effet, dans son courrier du 16 février 2002, la salariée, tirant les conséquences du refus de son employeur de faire droit à sa demande de changement de service exprimée dans son courrier du 5 février précédent, s'est bornée à l'informer que ne pouvant continuer à travailler dans ces conditions elle ne reprendrait pas son travail le 18 février suivant sans pour autant et a aucun moment de son courrier solliciter de façon claire et non équivoque une quelconque demande de rupture anticipée d'un commun accord.
Dans son courrier du 18 février, l'employeur n'a lui même nullement fait mention d'une rupture d'un commun accord, ayant en effet fait le choix de fonder ladite rupture sur la prise en considération des manquements de la salariée.
En conséquence, il y a lieu de constater que la rupture des relations contractuelles n'a pas procédé d'un commun accord.
A titre subsidiaire, le Centre Hospitalier soutient que la rupture des relations contractuelles aurait procédé de la prise en considération de l'existence d'un cas de force majeure ou d'une faute grave.
La lettre de rupture des relations contractuelles est motivée comme suit :
" En raison de votre comportement et de vos absences injustifiées qui entraînent un dysfonctionnement certain dans l'organisation du travail à la Maison de Retraite, j'ai le regret de vous faire connaître qu'il est mis fin à votre contrat emploi solidarité à compter de ce jour :18 février 2002.
En conséquence pour la période du 1er au 17 février 2002, vous ne percevrez aucune rémunération de l'établissement mais bénéficierez des indemnités journalières de la sécurité sociale (...)".
Outre le fait qu'il n'est pas justifié de l'existence d'un cas de force majeure dont la caractéristique est d'être extérieur et imprévisible ce qui ne peut s'appliquer a l'initiative prise par le salarié de s'abstenir de venir travailler le lundi 18 février, il reste que si la force majeure entraîne la cessation immédiate du contrat, le Centre Hospitalier ne s'en est nullement prévalu dans son courrier du 18 février ce qui fait qu'il ne peut utilement arguer de son existence pour faire obstacle aux demandes de son ex-salariée.
En ce qui concerne l'autre cas visé dans la loi ( faute grave), il y a lieu de constater qu'il est seulement fait mention dans la lettre de rupture de griefs articulés autour du comportement et des absences injustifiées qui entraînent un dysfonctionnement certain dans l'organisation du travail à la Maison de retraite.
Cependant en ce qui concerne le "comportement" reproché, celui-ci n'est pas autrement précisé ce qui interdit au juge de pouvoir exercer tout contrôle quant au bien fondé de ce premier grief.
En ce qui concerne les "absences injustifiées", elles ont en commun d'avoir été toujours d'une courte durée et il n'est pas justifié de l'existence d'une perturbation significative au niveau du service comme le Centre Hospitalier l'a lui même implicitement reconnu en se limitant à faire état dans la lettre de rupture d'un "dysfonctionnement certain dans l'organisation du travail" sans autre précision.
Il y a lieu de constater enfin que la rupture a fait suite à l'initiative prise par la salariée de ne pas venir travailler le 18 février, initiative qui a été prise du fait du silence opposé par l'employeur à un précédent courrier du 5 février.
Il s'évince de l'ensemble de ces éléments que le Centre Hospitalier qui n'a nullement visé la qualification de faute grave dans sa lettre de rupture ne justifie pas en tout état de cause de l'existence d'un manquement intolérable du salarié rendant impossible la poursuite des relations contractuelles même un jour de plus.
Le jugement attaqué sera en conséquence confirmé en ce que faisant droit aux dispositions sus-rappelées, il a fixé à 5.219,24 € le montant des dommages et intérêts auxquels Mme Y... pouvait prétendre.
De même, la rupture anticipée du contrat à durée déterminée pour faute grave constitutive d'une sanction étant soumise a la procédure disciplinaire, il a justement fait droit aux prétentions de l'appelante en fixant à la somme de 300 € l'indemnisation devant lui revenir pour non respect de la procédure de licenciement.
Elle sera en revanche déboutée de sa demande en paiement d'une somme de 1.524,49 € a titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail en l'absence de toute justification d'un préjudice autre que celui réparé dans le cadre de l'application des dispositions de l'article L 122-3-8 du Code du Travail.
Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Il sera fait droit aux demandes de Mme Y... dans les limites du présent dispositif.
Le Centre Hospitalier D'USSEL qui succombe sera condamné aux dépens ce qui prive de fondement sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, sur renvoi de cassation
Déclare l'appel recevable,
Le dit mal fondé,
Confirme le jugement attaqué dans l'ensemble de ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne le Centre Hospitalier d' USSEL au paiement d'une indemnité de 1.000 € (MILLE EUROS) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamne le Centre Hospitalier D'USSEL aux entiers dépens qui comprendront ceux de première instance et ceux de la décision cassée.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
LE GREFFIER,P/LE PRESIDENT,
empêché
D. D... C. E...
CONSEILLER
Le présent arrêt est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les conditions précisées dans l'acte de notification de cette décision aux parties.
Il est rappelé que le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire qui n'a pas pour but de faire rejuger l'affaire au fond, mais seulement de faire sanctionner la violation des règles de droit ou de procédure.