COUR D'APPEL
DE RIOM
Chambre Commerciale
POURVOI W08-13023
ARRET No
DU : 16 Janvier 2008
N : 06/02006
VN-CB
Arrêt rendu le seize Janvier deux mille huit
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Mme Claudine BRESSOULALY, Présidente
M. Vincent NICOLAS, Conseiller
Mme Chantal JAVION, Conseillère
lors des débats et du prononcé : Mme C. GOZARD, Greffière
Sur APPEL d'une décision rendue le 6.6.2006
par le Tribunal de grande instance de MOULINS
A l'audience publique du 07 Novembre 2007 M. NICOLAS a fait le rapport oral de l'affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 785 du NCPC
ENTRE :
SARL SUCHET siège social ...
Représentant : la SCP GOUTET - ARNAUD (avoués à la Cour) - Représentant : la SCP HUGUET BARGE-CAISERMAN MOURE-NICOLAON ROBERT (avocat plaidant barreau de CUSSET)
APPELANT
ET :
SARL BREAD & BREAKFAST ...
Représentante : Me MMarie MOTTET (avouée à la Cour) - Représentant : Me Nicole Z... (avocat plaidant barreau de MOULINS)
SCI LES TEMPS 9 - siège social - ...
Représentante : Me Barbara GUTTON-PERRIN (avouée à la Cour) - Représentant : Me Sophie B... (avocat plaidant barreau de MOULINS)
SCP PERRIN - RECOULES siège social ...
représentant SCP LECOCQ Avoué, représentant : Me C... avocat plaidant barreau de CLERMONT FERRAND - représentant : Me CHAMARD D... avocat au barreau de CLERMONT FERRAND
INTIMES
DEBATS :
A l'audience publique du 07 Novembre 2007,
la Cour a mis l'affaire en délibéré au 16 Janvier 2008
l'arrêt a été prononcé publiquement conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile :
La SCI LES TEMPS 9, qui est propriétaire de locaux commerciaux situés à Moulins, ..., les a donnés en location à la société BREAD & BREAKFAST.afin qu'elle puisse y exploiter son fonds de commerce de restauration rapide, de vente de pain et de viennoiseries.
Le 19 mars 2003 la SCI LES TEMPS 9 a confié à la société civile professionnelle d'architecture PERRIN-RECOULES l'agrandissement des locaux. Il était prévu deux tranches de travaux :
- 1ère tranche : extension de la partie production avec début des travaux le 27 octobre 2003 et réception le 23 novembre 2003 ;
- 2ème tranche : extension de la partie commerciale avec création d'une seconde salle, et la date de réception des travaux avait été fixée au 22 décembre 2003.
Il avait été aussi prévu que l'activité commerciale de la société BREAD & BREAKFAST serait interrompue du 27 octobre au 23 novembre 2003.
Le lot no3 "couverture bardage" a été confié le 13 octobre 2003 à la société SUCHET.
Une partie des travaux a été exécutée avec retard.
Par acte d'huissier du 17 mai 2004, la société BREAD & BREAKFAST a fait assigner la SCI LES TEMPS 9 devant le tribunal de grande instance de Moulins pour la voir déclarer responsable de son préjudice consécutif à ce retard et la voir condamner à lui payer des indemnités en raison d'une perte de chiffre d'affaire, en raison de frais supplémentaires qu'elle a été contrainte d'exposer, et en réparation du préjudice causé à son image de marque.
Par acte d'huissier du 9 juin 2004, la SCI LES TEMPS 9 a fait assigner la société PERRIN-RECOULES pour la voir condamner à la garantir de toutes les condamnations pouvant être prononcées à son encontre.
Par acte d'huissier du 20 octobre 2004, la société PERRIN-RECOULES a fait assigner la société SUCHET pour qu'elle soit condamnée à la garantir également de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées contre elle.
Par jugement du 6 juin 2006, le tribunal de grande instance de Moulins a :
- dit que la SCI LES TEMPS 9 doit indemniser tout le préjudice subi par la société BREAD & BREAKFAST ;
- condamné in solidum la société PERRIN-RECOULES et la société SUCHET à garantir la SCI LES TEMPS 9 de la totalité des condamnations prononcées contre elle ;
- condamné la société SUCHET à garantir la société PERRIN-RECOULES à hauteur de 75 % des condamnations dont elle doit garantie à la SCI LES TEMPS 9 ;
- condamné, sous les mêmes conditions de solidarité et de garantie, la SCI LES TEMPS 9 à payer à la société BREAD & BREAKFAST la somme de 2683 € au titre des frais de location d'un camion frigorifique et de réalisation d'un panneau publicitaire ;
- avant dire droit sur l'évaluation du préjudice commercial subi par la société BREAD & BREAKFAST, ordonné une expertise comptable ;
- débouté la société BREAD & BREAKFAST de sa demande tendant à la réparation de son préjudice fondé sur l'atteinte à son image de marque ;
- condamné la SCI LES TEMPS 9 à payer à la société PERRIN-RECOULES la somme de 8132.80 € avec les intérêts au taux légal augmentés de 20 % passé le délai de trente jours à compter de la date de réception de sa note d'honoraires ;
- débouté la société PERRIN-RECOULES de sa demande tendant au paiement d'une somme de 533.29 € ;
- débouté la SCI LES TEMPS 9, la société PERRIN-RECOULES et la société SUCHET de leurs demandes fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- Condamné in solidum ces dernières à payer à la société BREAD & BREAKFAST une indemnité de 1000 € sur le fondement du même article, ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration faite au greffe le 23 août 2006, la société SUCHET a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 8 octobre 2007, elle demande que le jugement soit infirmé, et que l'appel en garantie dirigé contre elle soit déclaré mal fondé. Reconventionnellement, elle demande que la société PERRIN-RECOULES soit condamnée à lui payer 3000 € à titre de dommages-intérêts et 3000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle soutient qu'elle n'est pas à l'origine du retard dont a souffert la société BREAD et BREAKFAST.
Elle fait valoir qu'en vertu du cahier des clauses administratives particulières la société PERRIN-RECOULES a retenu sur sa facture une somme de 1280.16 € correspondant à des pénalités de retard calculés sur une période de 78 jours ;
qu'elle ne saurait dès lors être tenue au delà du contrat qui la liait à la SCI LES TEMPS 9 ; que le retard dans l'exécution de ses travaux a eu principalement pour cause le défaut de fourniture de plans par le charpentier.
Elle ajoute que n'ayant eu aucun rapport contractuel avec la société BREAD et BREAKFAST, la société PERRIN-RECOULES ne peut exercer contre elle une action pour lui faire supporter les conséquences dommageables des retards.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 23 août 2007 la société BREAD & BREAKFAST conclut à la confirmation du jugement sauf en sa disposition qui l'a déboutée de sa demande de réparation de son dommage consécutif à l'atteinte à son image de marque. Elle demande aussi que la société SUCHET soit condamnée à lui payer une somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Pour justifier de l'existence de ce chef de son préjudice, elle soutient que sa clientèle a pu légitimement penser qu'elle avait définitivement cessé son activité.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 24 avril 2007, la SCI LES TEMPS 9 conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu'elle l'a condamnée à payer à la société PERRIN-RECOULES la somme de 8132.80 € au titre de ses honoraires. Elle demande que cette dernière soit condamnée à lui payer la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Tout en soutenant que la société PERRIN-RECOULES est responsable de plein droit du dommage en application des articles 1792 et suivants du code civil, elle prétend que cette société a été négligente dans sa mission de direction des travaux et de coordination des corps de métier sur le chantier.
Elle invoque l'exception d'inexécution pour refuser de payer les honoraires de la société PERRIN-RECOULES, en faisant valoir que cette dernière est responsable des retards qui ont été apportés à la fin du chantier, et qu'elle n'a pas mené à bien sa mission contractuelle.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 25 octobre 2007, la société PERRIN-RECOULES conclut principalement à l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré recevable et bien fondé l'appel en garantie que la SCI LES TEMPS 9 a dirigé contre elle et sollicite sa condamnation au paiement d'une somme de 3000 € à titre de dommages-intérêts et celle de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Subsidiairement elle demande que la société SUCHET soit condamnée à la garantir d'une quelconque condamnation prononcée à son encontre.
Elle conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la SCI LES TEMPS 9 à lui payer une somme de 8132.81 € au titre de ses honoraires, mais sollicite son infirmation en ce qu'il a rejeté sa demande tendant au paiement d'une somme de 533.29 €, au titre de la mission "sécurité protection de la santé". Elle demande aussi que la société SUCHET soit solidairement condamnée à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et condamnée aux dépens, solidairement avec la SCI LES TEMPS 9.
Elle soutient que sa responsabilité doit seulement être recherchée sur le fondement de l'article 1147 du code civil, et qu'au regard de cet article, elle n'engage pas sa responsabilité de plein droit, qu'elle n'a pas commis de faute de surveillance et de coordination des travaux, que les délais impartis à la société SUCHET n'était pas "une vue de l'esprit".
Elle prétend en particulier que cette société n'avait pas à demander au charpentier ses plans avant de commencer ses travaux, qu'elle aurait dû passer commande des matériaux dès le 13 octobre 2003, date de signature des marchés, qu'elle aurait pu ainsi en disposer à compter du 9 novembre 2003, qu'en outre les autres entreprises ont terminés dans les délais impartis les travaux qui leur avaient été confiés.
Au sujet de sa demande en paiement d'une somme de 533.29 € elle expose que cette somme correspond à des honoraires afférents à une mission "sécurité protection de la santé", mission qui relève d'une obligation légale.
Elle prétend avoir réalisé les différentes prestations prévues au contrat et que la SCI LES TEMPS 9 ne peut donc invoquer l'exception d'inexécution.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 novembre 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1) sur la demande formée par la société BREAD et BREAKFAST contre la société LES TEMPS 9 :
a) sur la responsabilité de la société LES TEMPS 9 :
Attendu qu'il résulte de l'article 1719 du code civil que le bailleur a l'obligation d'assurer une jouissance paisible au preneur et qu'il ne peut s'exonérer de cette obligation qu'en cas de force majeure ;
Attendu en l'espèce que la société BREAD et BREAKFAST a subi un trouble dans sa jouissance ;
Attendu en effet qu'il avait été prévu que son activité commerciale, pendant les travaux, serait interrompue seulement du 27 octobre au 23 novembre 2003 ; que cependant, elle l'a été complètement jusqu'au 27 novembre 2003, et partiellement ensuite, grâce à la location d'un camion frigorifique, jusqu'au 22 décembre 2003, date de la reprise de l'activité de production dans les lieux loués ;
Attendu ensuite que les travaux auraient dû être terminés le 22 décembre 2003; qu'ils ne seront réceptionnés, avec des réserves, que le 12 janvier 2004, et celles-ci ne seront seulement levées, dans leur totalité, que le 1er avril 2004 ; qu'en outre, la poursuite des travaux au delà du 22 décembre 2003 a causé des perturbations à la société BREAD et BREAKFAST ;
Attendu que ces troubles de jouissance ont eu pour cause la décision de la société LES TEMPS 9 d'agrandir les lieux donnés en location ; que cette dernière n'allègue ni n'établit que l'inexécution de son obligation a eu pour cause un cas de force majeure ;
qu'il s'ensuit que le jugement du tribunal de grande instance sera confirmé en ce qu'il a condamné la société LES TEMPS 9 à indemniser tout le préjudice subi par la société BREAD et BREAKFAST ;
b) sur le préjudice subi par la société BREAD et BREAKFAST :
Attendu que cette société ne prouve pas, en dehors de ses seules affirmations, que le trouble de jouissance qu'elle a subi, du 24 novembre 2003 au 12 janvier 2004, a fait naître dans sa clientèle la certitude qu'elle avait cessé définitivement son activité ; que ce chef de son préjudice n'étant pas certain, il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de réparation fondée sur l'atteinte à son image de marque ;
Attendu qu'au sujet de l'existence des autres chefs de préjudice de cette société, le jugement déféré repose sur des motifs exacts et pertinents que la cour adopte ; qu'il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point ;
Attendu que la société BREAD et BREAKFAST, pour évaluer son dommage, s'est fondée sur un rapport établi à sa demande le 20 février 2004 par une société d'expertise comptable, la société MGA ;
Attendu que ce rapport est opposable aux autres parties, et peut donc valoir à titre de preuve, dès lors qu'il leur a été communiqué, ainsi que cela ressort des conclusions de la société BREAD et BREAKFAST, et qu'il a été soumis à leur libre discussion ;
que toutefois ce rapport n'apparaît pas suffisant pour permettre une évaluation précise de la perte de chiffre d'affaire subie par la société BREAD et BREAKFAST ;
qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné, avant dire droit sur l'évaluation du préjudice commercial subi par la société BREAD et BREAKFAST, une expertise comptable, et ce d'autant plus que cette société sollicite aussi la confirmation de cette disposition du jugement ;
2) sur les appels en garantie formés par la société LES TEMPS 9 contre la société PERRIN-RECOULES et la société SUCHET :
Attendu que la société PERRIN-RECOULES et la société LES TEMPS 9 ont conclu le 3 octobre 2003, par acte sous-seing privé, un "contrat d'architecte" auquel était joint un document signé par eux le même jour intitulé "cahier des clauses particulières" ;
Attendu qu'aux termes de ces actes, la société PERRIN-RECOULES a été chargée par la société LES TEMPS 9 d'une mission de maîtrise d'oeuvre qui comprenait notamment la mission de direction des travaux ; qu'en vertu de ce chef de sa mission, la société PERRIN-RECOULES était tenue d'assister le maître d'ouvrage pour la passation des marchés de travaux avec les entreprises, de mettre au point ces marchés, et d'assurer la direction de l'exécution des contrats de travaux, en particulier en organisant et en dirigeant les réunions de chantiers hebdomadaires, en rédigeant les ordres de service et les avenants aux marchés, en établissant le décompte définitif des travaux et en proposant le règlement pour solde (cf article 2.3.3 du cahier des clauses particulières) ;
Attendu que la société Les TEMPS 9 et la société SUCHET étaient liées par un contrat de louage d'ouvrage concernant la réalisation du lot "couverture-bardage";
que les marchés de travaux concernant l'extension d'une boulangerie ont été signés par les entreprises le 13.10.2003 pour un délai d'intervention de deux mois au total avec démarrage du chantier au 27.10.2003 ;
que la SCI Les TEMPS 9 recherche la responsabilité à la fois de la société SUCHET et de la SCP PERRIN-RECOULES dans le retard d'exécution des travaux confiés à la société SUCHET ;
Attendu que c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que les premiers juges ont considéré que les responsabilités des sociétés PERRIN-RECOULES et SUCHET à l'égard de la SCI Les TEMPS 9 ne pouvaient être fondées que sur les dispositions de l'article 1147 du code civi ;
Attendu que par courrier adressé le 26.11.2003 à M.LASSERVE, représentant de la SCI Les TEMPS 9, la société PERRIN-RECOULES indiquait qu'un début d'intervention en couverture avait été prévu le 6.11.2003 pour une possibilité de travail à l'intérieur à partir du 12.11.2003 ; que le 12.11.2003 l'entreprise SUCHET avait signalé un problème d'approvisionnement et avait attendu le 17.11.2003 pour annoncer qu'aucun approvisionnement ne pourrait se faire avant la semaine 49 ; que sur demande du maître d'oeuvre, elle fournissait des pièces justificatives qui montraient qu'elle n'avait présenté une demande de prix à son fournisseur que le 3.11.2003, que la commande avait été passée le 12.11.2003 et confirmée le 17.11.2003 pour une livraison semaine 50 ; que l'architecte faisait valoir à juste titre qu'il ne lui appartenait pas d'intervenir dans la gestion de l'entreprise qui devait effectivement prendre les dispositions utiles pour satisfaire l'exécution du marché dans les délais, certes courts, mais qu'elle avait acceptés ;
Attendu que la société SUCHET ne dément pas les faits exposés par l'architecte mais entend s'exonérer de toute responsabilité au motif que le retard qui lui est reproché est intimement lié à l'absence de communication des plans mentionnés dans le lot 2 -charpente métallique- ; que selon le marché de travaux, l'entreprise de charpente aurait dû établir des plans et les remettre à l'architecte à la première réunion de chantier ; que la société SUCHET indique que cette obligation n'a pas été respectée par le charpentier et que le maître d'oeuvre ne s'en est pas préoccupé ; qu'elle prétend donc qu'elle n'était pas en mesure de passer commande des bacs acier à son fournisseur ;
que cette argumentation est contestée par le maître d'oeuvre au motif que la société SUCHET avait participé à la réalisation de la première tranche de travaux en 1999 en réalisant la couverture de telle sorte qu'elle disposait de tous les dimensionnements nécessaires et pouvait les reprendre sur place si elle les avait égarés ; que les deux travées supplémentaires posées par le charpentier étant identiques, la SARL SUCHET n'était nullement tenue de demander les plans du charpentier ;
Attendu qu'au demeurant il ressort du dossier qu'en définitive les commandes ont été passées par la SARL SUCHET sans établissement de nouveaux plans ;
Attendu qu'au vu des éléments communiqués, si la faute principale à l'origine du retard d'exécution des travaux de couverture incombe bien à la négligence initiale de la SARL SUCHET qui n'a pas immédiatement effectué les commandes qui s'imposaient pour respecter les délais contractuels, ni sollicité sans délai les instructions du maître d'oeuvre dans le cas où elle aurait rencontré des difficultés, une part de responsabilité doit rester à la charge de la société PERRIN-RECOULES, maître d'oeuvre ; qu'il était chargé d'une mission d'assistance dans la passation des marchés ; qu'or la rédaction des contrats a pu prêter à confusion s'agissant de l'établissement de plans par le charpentier ; qu'en outre, le maître d'oeuvre n'a pas fait preuve d'une vigilance suffisamment rigoureuse au niveau de la coordination entre les interventions respectives du charpentier et de la société SUCHET, notamment en raison des dispositions prévoyant la réalisation de plans par le charpentier dont il aurait été logique que le couvreur ait connaissance, même si le contexte particulier du chantier d'extension d'un ouvrage construit quatre ans auparavant avec la participation de l'entreprise SUCHET limite l'incidence de ce défaut de coordination ;
Attendu que les fautes imputables respectivement à la société PERRIN-RECOULES et à la société SUCHET qui ont contribué de manière indéterminée au dommage invoqué par la société Les TEMPS 9, consécutif au retard d'exécution, engagent la responsabilité de leurs auteurs, tenus par principe in solidum de réparer le dommage subi par le maître de l'ouvrage ;
Attendu que s'agissant de l'obligation indemnitaire de la société SUCHET, cette dernière se prévaut des clauses contractuelles sanctionnant le retard dans l'exécution du marché dans ses rapports avec la SCI les TEMPS 9 pour soutenir qu'elle ne pourrait être tenue au-delà des termes du contrat dont l'exécution a conduit à lui faire supporter des pénalités de retard ;
Attendu qu'il est constant que :
-le cahier des clauses administratives particulières opposable à la société SUCHET stipulait, en ses articles 4.3.1 et 4.3.5 qu'en cas de retard "sur le délai d'exécution propre au lot considéré", il serait fait application d'une pénalité journalière égale à 1/1000ème du montant H.T du lot ; que cette clause doit s'analyser en une clause pénale, stipulée pour le simple retard ;
-la facture de la société SUCHET, vérifiée par le maître d'oeuvre le 11 février 2004, et payée par la société LES TEMPS 9, fait ressortir que des pénalités de retard, en vertu des articles précités, ont été appliquées à la société SUCHET pour un montant total de 1.280,16 € HT ;
-que le dommage, en raison duquel la responsabilité de la société LES TEMPS 9 a été mise en jeu, a pour cause l'exécution tardive par la société SUCHET de ses prestations ;
Attendu toutefois que la société SUCHET ne peut s'emparer de ce moyen pour soutenir qu'en droit aucune indemnité supplémentaire ne pourrait être mise à sa charge ; qu'en effet l'article 1152 alinéa 1 du code civil est complété par l'alinéa 2 de ce texte qui dispose que le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire, toute stipulation contraire étant réputée non écrite ; que c'est donc à tort que la société SUCHET soutient qu'elle ne pourrait être tenue de payer à la société LES TEMPS 9 une somme supérieure à celle qui a été prévue par la clause pénale, soit 1.280 € HT ;
Attendu que la Cour est d'ores et déjà en mesure de se prononcer sur le caractère dérisoire de la clause pénale en comparant le montant de la peine conventionnellement fixée et celui du préjudice effectivement subi ; qu'en effet alors qu'il est incontestable que la société BREAD et BREAKFAST a subi un certain préjudice commercial que l'expertise ordonnée en première instance et confirmée en appel permettra de chiffrer, il est d'ores et déjà acquis qu'elle a supporté des frais supplémentaires correspondant à la location d'un camion et d'un panneau publicitaire s'élevant à la somme de 2.683 € ; que le montant de la clause pénale de 1.280 € HT est donc manifestement dérisoire au regard de l'ensemble des dommages générés par le retard d'exécution du lot confié à la société SUCHET ;
Attendu que le dommage subi par la SCI Les TEMPS 9 en raison du retard dans l'exécution des travaux n'étant qu'en partie couvert par la mise en jeu de la clause pénale due par la société SUCHET, la SCI est bien fondée en son appel en garantie dirigé à l'encontre de la SCP PERRIN-RECOULES, tenue in solidum avec la société SUCHET d'indemniser les préjudices consécutifs au retard ;
3)sur l'appel en garantie formé par la SCP PERRIN-RECOULES à l'encontre de la SARL SUCHET
Attendu que l'appel en garantie formé par la SCP PERRIN-RECOULES à l'encontre de la société SUCHET estjustifié ; qu'en sa qualité de co-obligée à la réparation d'un même préjudice, la SCP PERRIN-RECOULES est en droit d'engager une action récursoire contre l'autre co-obligé en proportion de la part devant rester à sa charge ;
Que le recours s'opérera en fonction du partage de responsabilité retenu par les premiers juges sur la base de 25 % à la charge du maître d'oeuvre et de 75 % à la charge de la société SUCHET, cette répartition étant adaptée au regard des fautes imputables à chacune des sociétés et de leurs incidences sur la survenance du retard d'exécution ;
s
qu'en conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société SUCHET à garantir la SCP PERRIN-RECOULES à hauteur de 75 % des condamnations dont elle doit garantie à la SCI Le TEMPS 9 ;
4) sur les demandes en paiement d'honoraires formées par la société PERRIN-RECOULES contre la société LES TEMPS 9 :
a) sur la demande fondée sur le contrat d'architecte en date du 3 octobre 2003 ;
Attendu que ce contrat fixait à 8.132,80 € TTC le montant des honoraires dues à la société PERRIN-RECOULES en contrepartie de sa mission de maîtrise d'oeuvre ; qu'il stipulait aussi que les notes d'honoraires présentées par l'architecte seraient réglées par le maître d'ouvrage dans le délai de 30 jours à réception, faute de quoi des intérêts moratoires seraient dus au taux légal augmentés de 20 % ;
Attendu qu'il est constant que la société LES TEMPS 9 n'a pas payé dans sa totalité la note d'honoraires de la société PERRIN-RECOULES, malgré sa présentation;
Attendu qu'elle invoque en premier lieu l'exception d'inexécution résultant du retard survenu dans la réalisation des travaux ; que cependant, dès lors qu'elle obtient une décision la remplissant de ses droits de ce chef, il lui appartient de payer en contrepartie le montant du prix de la prestation ;
qu'en second lieu la SCI leS Temps 9 expose que la mission de maîtrise d'oeuvre n'a pas été achevée, la déclaration d'achèvement des travaux n'ayant jamais été remplie, la réception ayant tardé et la levée des réserves après travaux de parachèvement n'ayant pas été totalement opérée ;
qu'il n'est toutefois pas démontré que l'établissement d'une déclaration d'achèvement de travaux ait eu un intérêt en l'occurrence et la SCP RECOULES-PERRIN justifie de la levée des réserves par la production des courriers adressés par les entreprises concernées ;
que la contestation opposée par la SCI LES TEMPS 9 ne s'avérant pas justifiée, la confirmation du jugement s'impose en ce qu'il a condamné la SCI LeS Temps 9 à payer à la SCP PERRIN-RECOULES le montant s'élevant à la somme de 8.132,80 € TTC outre intérêts conformément aux engagements contractuels ;
b) sur la demande de paiement d'honoraires correspondant à la mission "sécurité protection de la santé" :
Attendu que le bordereau des pièces communiquées par la société PERRIN-RECOULES le 25.10.2007 mentionne l'existence d'un contrat conclu avec la société LES TEMPS 9 ayant pour objet l'exécution d'une mission SPS ; qu'il ressort de cette pièce signée par les deux parties le 03.10.2003, soit le même jour que le contrat de maîtrise d'oeuvre, que la SCI Les Temps 9 a confié à la SCP PERRIN-RECOULES une mission de coordination sécurité concernant l'opération d'extension du terminal de cuisson (dans le cadre des travaux d'extension des locaux dans lesquels était exploitée une boulangerie ) moyennant un montant forfaitaire de 533,30 € TTC ; que le coût de cette prestation au demeurant obligatoire doit être honoré par la SCI Les TEMPS 9 conformément à son engagement ; que le jugement avait rejeté la demande à défaut production d'un contrat d'honoraires ; que le justificatif étant communiqué en appel, il convient d'infirmer le jugement entrepris et de faire droit à la demande de la SCP PERRIN-RECOULES sauf à observer qu'en l'occurrence le contrat ne prévoit pas de majoration applicable aux intérêts moratoires ; qu'il sera fait application des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer ;
5) sur la demande de dommages-intérêts formée par la société SUCHET contre la société PERRIN-RECOULES et par cette dernière contre la société LES TEMPS 9:
Attendu qu'il n'apparaît pas que les sociétés PERRIN-RECOULES et LES TEMPS 9 ont fait dégénérer en abus leur droit de résister aux prétentions de leurs adversaires ; que par suite les demandes de dommages-intérêts seront rejetées ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant débouté la SCP PERRIN-RECOULES de sa demande en paiement de la somme de 533,29 €.
Infirmant le jugement de ce chef, statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la SCI Les TEMPS 9 à porter et payer à la SCP PERRIN-RECOULES la somme de 533,29 € TTC pour mission sécurité protection de la santé outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure.
Déboute la société SUCHET de ses demandes.
Déboute la société PERRIN-RECOULES de sa demande de dommages-intérêts.
Déboute la SCI Les TEMPS 9 de son appel incident.
Condamne la société SUCHET à porter et payer au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la somme de 1.200 € à la société BREAD et BREAKFAST et la somme de 1.000 € à la société PERRIN-RECOULES.
Déboute la SCI LES TEMPS 9 de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile dirigée contre la SCP PERRIN-RECOULES.
Fait masse des dépens de première instance et d'appel et condamne in solidum la société SUCHET et la société PERRIN-RECOULES à les supporter dans leur intégralité, sous réserve de la garantie due par la SARL SUCHET à la SCP PERRIN-RECOULES à hauteur de 75 % de leur montant.
Dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
La greffière La présidente
C. Gozard C.Bressoulaly