COUR D'APPEL
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 08 novembre 2022
N° RG 20/00865 - N° Portalis DBVU-V-B7E-FNNM
-LB- Arrêt n° 500
S.A.R.L. [Localité 1] GESTION IMMOBILIERE / Syndicat des coproprietaires de l'immeuble Sis [Adresse 4] [Localité 1]
Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AURILLAC, décision attaquée en date du 02 Juin 2020, enregistrée sous le n° 17/00621
Arrêt rendu le MARDI HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé
ENTRE :
S.A.R.L. [Localité 1] GESTION IMMOBILIERE
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Hélène JOLIVET, avocat au barreau D'AURILLAC
Timbre fiscal acquitté
APPELANTE
ET :
Syndicat des coproprietaires de l'immeuble sis [Adresse 4] [Localité 1] représenté par son syndic la SARL IMMOTECK, agence ORPI, [Adresse 2] [Localité 1]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Claire SERINDAS, avocat au barreau D'AURILLAC
Timbre fiscal acquitté
INTIMEE
DÉBATS :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 septembre 2022, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX et M. ACQUARONE, rapporteurs.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 08 novembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Pendant plusieurs années, la SARL [Localité 1] Gestion Immobilière (ci-après la SARL AGI) a été le syndic de la copropriété de l'immeuble situé [Adresse 4] à [Localité 1] (15). La dernière assemblée générale convoquée et tenue par ce syndic est celle du 10 mars 2008. Aux termes de la résolution n°7 du procès-verbal de cette assemblée, la SARL A.G.I. a été reconduite dans son mandat pour une durée de trois années, soit jusqu'au 10 mars 2008.
Par ordonnance de référé en date du 19 octobre 2016, le président du tribunal de grande instance d'Aurillac, saisi par plusieurs copropriétaires, a désigné maître [P] en qualité d'administrateur provisoire de la copropriété avec pour mission, pour une durée de six mois :
-d'assurer la représentation légale du syndicat des copropriétaires,
-de convoquer l'assemblée générale des copropriétaires aux fins de désignation d'un syndic,
-plus généralement, d'exercer les pouvoirs qui lui sont confiés au visa des articles 18 à 18-2 de la loi du 10 juillet 1965,
-et, pour y parvenir, de se faire remettre par la SARL A.G.I., dans le délai d'un mois à compter de la décision, la situation de trésorerie, la totalité des fonds immédiatement disponibles et l'ensemble des documents et archives du syndicat, ainsi que le solde des fonds disponibles après un apurement des comptes, et de fournir l'état des comptes des copropriétaires ainsi que celui des comptes du syndicat.
Une assemblée générale des copropriétaires a été convoquée le 27 décembre 2016, aux fins qu'il soit procédé à la désignation d'un syndic. À l'issue de cette assemblée, il a été constaté l'absence de candidat pour exercer la fonction de syndic professionnel ou bénévole.
Maître [P] a rendu son rapport de fin de mission le 3 janvier 2017, constatant notamment l'absence de désignation de syndic par l'assemblée générale des copropriétaires et le défaut de trésorerie de la copropriété faisant obstacle à la souscription d'un contrat d'assurance de l'immeuble.
Par ordonnance du 27 février 2017, le président du tribunal de grande instance d'Aurillac a désigné la SARL Immoteck en qualité de syndic judiciaire pour une durée de six mois.
Au cours de l'assemblée générale du 27 mai 2017, la SARL Immoteck (agence ORPI) a été désignée comme syndic de la copropriété pour une durée de 36 mois et autorisée à ester en justice à l'encontre de l'ancien syndic, la SARL A.G.I.
Par acte d'huissier en date du 7 novembre 2017, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 4] à [Localité 1] (15), représenté par son syndic, la SARL Immoteck, a fait assigner devant le tribunal de grande instance d'Aurillac la SARL A.G.I., prise en la personne de sa gérante, Mme [K] [Z], pour obtenir sa condamnation à l'indemnisation des préjudices résultant selon lui des fautes et manquements du syndic pendant l'exercice de son mandat et après son expiration, réclamant notamment les sommes de 14'228,77 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier et 10'000 euros en réparation de son préjudice moral.
Par jugement du 2 juin 2020, le tribunal judiciaire d'Aurillac a statué en ces termes:
-Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la SARL A.G.I. et tirée de l'absence d'habilitation du syndic la SARL Immoteck pour agir en justice ;
-Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la SARL A.G.I. et tirée de la prescription partielle des demandes du syndicat des copropriétaires ;
-Dit que la SARL A.G.I. a commis des fautes de gestion dans le cadre de son mandat de syndic de la copropriété de l'immeuble du [Adresse 4] à [Localité 1], puis en sa qualité de syndic de fait ;
En conséquence,
-Condamne la SARL A.G.I. à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 6442,85 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice né de l'absence de règlement de la facture de consommation d'eau ;
-Condamne la SARL A.G.I. à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1492,20 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice financier ;
-Condamne la SARL A.G.I. à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1237,50 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte de chance (frais de nettoyage) ;
-Condamne la SARL A.G.I. à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5056,22 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance (réfection de la cage d'escalier) ;
-Condamne la SARL A.G.I. à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
-Condamne la SARL A.G.I. à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile avec distraction au profit de maître Claire Serindas ;
-Condamne la SARL A.G.I. aux dépens de l'instance ;
-Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision ;
-Rejette le surplus des demandes.
Par déclaration électronique en date du 16 juillet 2021, la SARL A.G.I. a relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 18 décembre 2020, le syndicat des copropriétaires a sollicité devant le conseiller de la mise en état, au visa de l'article 524 du code de procédure civile, la radiation de l'affaire eu égard au défaut d'exécution du jugement par la SARL A.G.I.
Le 7 avril 2021, la SARL A.G.I. a versé au syndicat des copropriétaires la somme de 19'228,77 euros.
Par ordonnance du 17 juin 2021, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de radiation présentée par le syndicat des copropriétaires et condamné la SARL A.G.I. à payer à celui-ci la somme de 1000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 30 juin 2022.
Vu les conclusions en date du 10 août 2021 aux termes desquelles la SARL A.G.I. demande à la cour de :
-Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription partielle et,
Statuant à nouveau,
-Débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes d'indemnisation à hauteur de 1492,20 euros pour frais bancaires et pour sa consommation d'eau à hauteur de 6442,85 euros ;
-Infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée pour perte de chance au titre de l'intervention de l'entreprise de nettoyage suite à sinistre ;
En conséquence,
-Débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation à hauteur de 1237,50 euros ;
-Infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 5056,22 euros au titre de la rénovation de la cage d'escalier et débouter en conséquence le syndicat des copropriétaires de toute demande de ce chef ;
-Infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3000 euros au titre de son préjudice moral, et en conséquence débouter le syndicat des copropriétaires de toute demande à ce titre, et notamment de son appel incident ;
-Subsidiairement, dire que le coût de la consommation d'eau des copropriétaires de l'immeuble à hauteur de 6742,85 euros ne constitue pas un préjudice en lien direct avec les fautes qui lui sont reprochées ;
-Subsidiairement, infirmer le quantum des condamnations prononcées au titre des pertes de chance de l'indemnisation de l'intervention de nettoyage et de réfection de la cage d'escalier et en fixer le pourcentage à 40 % des sommes réclamées ;
-Infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et, reconventionnellement , condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 3000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés tant en première instance qu'en appel, outre les dépens de l'entière procédure ;
-Débouter le syndicat des copropriétaires de toute demande de ce chef ainsi qu'au titre des dépens de première instance et d'appel.
Vu les conclusions en date du 16 juillet 2021 aux termes desquelles le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 1] (15) demande à la cour de :
Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,
-Déclarer la SARL A.G.I. mal fondée en son appel et en toutes ses demandes ;
-La débouter de l'ensemble de celles-ci ;
-Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné la SARL A.G.I. à lui payer la somme de 3000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
Statuant à nouveau,
-Condamner la SARL A.G.I., prise en la personne de son représentant légal, à lui payer la somme de 10'000 euros au titre du préjudice moral subi par le syndicat des copropriétaires ;
Y ajouter,
-Condamner la SARL A.G.I. à lui payer la somme de 3000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
-La condamner aux dépens d'appel dont droit de recouvrement direct au profit de maître Serindas.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées pour l'exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il sera rappelé, à titre liminaire, qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif » et que les demandes de « constater que... » ou de « dire et juger que...», ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions, au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile, mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions.
-Sur le défaut d'habilitation de la SARL Immoteck, en qualité de syndic, pour agir en justice :
La SARL A.G.I. a relevé appel du chef du jugement ayant « rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'habilitation du syndic, la SARL Immoteck, pour agir en justice » mais renonce devant la cour à le critiquer. Le jugement sera confirmé sur ce point.
-Sur la prescription de l'action :
Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En l'espèce, le syndicat des copropriétaires recherche la responsabilité du syndic à raison des fautes qui auraient été commises par celui-ci dans l'accomplissement de sa mission pendant son mandat, mais également après l'expiration de celui-ci, la SARL A.G.I. ayant continué selon lui à réaliser des actes relevant des fonctions de syndic au-delà du 10 mars 2011.
Il est constant que la prescription d'une action en responsabilité, qu'elle soit fondée sur la responsabilité délictuelle ou contractuelle, ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.
La SARL A.G.I. soutient qu'en l'occurrence l'action est prescrite pour tous les faits qui lui sont imputés comme fautifs, antérieurs au 7 novembre 2012, ce qui concerne d'après elle les frais bancaires générés par un solde débiteur perdurant depuis 2010 et les sommes réclamées au titre de la consommation d'eau par la Communauté d'Agglomération du Bassin d'[Localité 1] (CABA), chargée de l'alimentation de la gestion de l'eau au sein de l'immeuble.
Elle estime en effet que dans la mesure où la dernière assemblée générale sur sa convocation s'est tenue le 10 mars 2008, et alors qu'une nouvelle assemblée générale aurait dû être convoquée au plus tard le 10 mars 2009, les copropriétaires ne pouvaient ignorer l'absence de budget permettant l'appel des charges. Elle rappelle que l'hypothèse de la carence du syndic est spécifiquement prévue par l'article 18-IV de la loi du 10 juillet 1965 et les articles 8 et suivants du décret du 17 mars 1967.
Le syndicat des copropriétaires dénonce plusieurs manquements de la SARL A.G.I. aux obligations résultant pour elle de son mandat de syndic. Il lui reproche en particulier de n'avoir pas convoqué d'assemblée générale depuis celle tenue le 10 mars 2008, de n'avoir pas procédé aux appels de fonds nécessaires au fonctionnement de la copropriété, de s'être abstenue de recouvrer les charges de copropriété et de n'avoir rendu aucun compte de sa gestion. L'intimé souligne encore que la SARL A.G.I., nonobstant l'expiration de son mandat le 10 mars 2011, a poursuivi ses fonctions comme « syndic de fait » à l'égard des copropriétaires mais également des tiers (Compagnie d'assurances, CABA, notaire').
Selon l'intimé, les fautes de gestion commises par la SARL A.G.I. ont eu pour conséquence que des créances n'ont pas été payées (factures d'eau réclamées par la CABA) et que le compte courant de la copropriété a présenté à partir de l'année 2010 un solde débiteur, ce qui a engendré des frais bancaires.
Ainsi que l'a relevé le premier juge, il ressort des pièces communiquées que le syndicat des copropriétaires a eu connaissance des dettes de la copropriété, en l'occurrence de la dette au titre des factures d'eau, courant 2014, lorsque certains copropriétaires se sont inquiétés auprès de la CABA de l'absence de facturation, celle-ci leur ayant alors fait part de son intention de procéder à une coupure d'eau au mois de janvier 2015. Plusieurs copropriétaires se sont adressés à la SARL A.G.I. par courrier du 27 octobre 2014 pour lui enjoindre de remédier à cette situation.
Il apparaît que c'est à ce moment-là que le dommage résultant des fautes imputées au syndic s'est manifesté. Le tribunal a en conséquence retenu à juste titre que le point de départ de la prescription quinquennale se situait au mois d'octobre 2014, étant observé que le syndicat des copropriétaires ne pouvait déduire de l'absence de convocation de l'assemblée générale l'existence de difficultés de trésorerie faisant obstacle à l'acquittement de ses obligations financières, s'agissant tant du règlement des factures que de l'alimentation du compte bancaire du syndicat, géré par le syndic.
L'assignation au fond ayant été délivrée le 7 novembre 2017, le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'acquisition de la prescription quinquennale.
-Sur la responsabilité de la SARL A.G.I. :
Le syndic répond de sa gestion envers le syndicat des copropriétaires selon les règles du mandat, conformément aux dispositions des articles 1992 et suivants du code civil. En sa qualité de mandataire du syndicat des copropriétaires, il est responsable à son égard des fautes commises dans l'accomplissement de sa mission. La responsabilité découlant du lien juridique unissant le syndic au syndicat, fondée sur les règles du mandat, est de nature contractuelle.
En revanche, la responsabilité de faits dommageables survenus après l'expiration de la période contractuelle n'est plus de nature contractuelle mais de nature délictuelle. Il en va ainsi lorsque le contractant dont le contrat est arrivé à expiration adopte un comportement laissant supposer à l'autre partie ou aux tiers que le contrat subsiste.
Il sera observé en premier lieu que si la SARL A.G.I. indique incidemment dans ses écritures que le contrat de syndic n'a pas été signé suite à l'assemblée générale du 10 mars 2008, elle n'en tire aucune conclusion particulière, reconnaissant expressément avoir été reconduite dans son mandat de syndic pour une durée de trois ans selon la résolution n°7 adoptée au cours de l'assemblée générale, étant précisé qu'il n'est allégué par aucune des parties que l'annulation de cette résolution ait été sollicitée.
Il est établi par les pièces communiquées que la SARL A.G.I. n'a plus convoqué d'assemblée générale après celle tenue le 10 mars 2008, qu'elle n'a pas procédé aux appels de fonds nécessaires au fonctionnement de la copropriété, qu'elle s'est abstenue de recouvrer les charges et n'a rendu aucun compte de sa gestion.
Ces manquements aux obligations résultant pour la SARL A.G.I. de son mandat de syndic constituent des fautes de nature à engager sa responsabilité contractuelle, ce que d'ailleurs celle-ci ne conteste pas, son argumentation étant limitée à soutenir que l'action est prescrite s'agissant des faits antérieurs au 7 novembre 2012.
Il n'est pas discuté en outre que, postérieurement à l'expiration de son mandat le 10 mars 2011, la SARL A.G.I. a continué à accomplir, pour le compte du syndicat des copropriétaires, certains actes relevant des fonctions du syndic (courriers aux copropriétaires, à la CABA, au notaire à l'occasion des mutations de propriété, règlement des échéances du contrat d'assurance de l'immeuble jusqu'en 2016'), ce qui constitue en soi un comportement fautif, étant rappelé que les pouvoirs du syndic cessent avec ses fonctions et que la notion de « syndic de fait » ne correspond à aucune réalité juridique. En outre, la SARL A.G.I. a continué à s'acquitter des échéances de la police d'assurance souscrite pour l'immeuble auprès de la compagnie Groupama jusqu'en 2016, date à laquelle le contrat d'assurance a été résilié pour défaut de règlement des cotisations, de sorte que les conséquences matérielles de l'incendie de l'immeuble, survenu au mois de mai 2016, et dans lequel un des copropriétaires a trouvé la mort, n'ont pas été prises en charge par l'assureur.
Là encore, la SARL A.G.I., dont l'argumentation concerne uniquement la contestation des préjudices, ne discute pas sa responsabilité, qui sera retenue sur le terrain délictuel, étant rappelé qu'en application de l'article 12 du code de procédure civile, le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droits qui lui sont applicables.
-Sur la réparation des préjudices :
-Sur les frais bancaires engendrés par le solde débiteur du compte courant du syndicat des copropriétaires :
Il est établi par les pièces produites que le compte courant de la copropriété présentait un solde débiteur de 3761,42 euros depuis 2010 ce qui a engendré des frais bancaires pour un montant de 1492, 20 euros. Cette situation est la conséquence directe du manque de diligence de la SARL A.G.I. dans la gestion des affaires de la copropriété, étant rappelé qu'elle n'a procédé à aucun appel de fonds et n'a pas signalé au syndicat des copropriétaires la détérioration de sa situation financière.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la SARL A.G.I. au paiement de la somme de 1492,20 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi par le syndicat des copropriétaires.
-Sur la demande au titre du règlement des factures de consommation d'eau:
La SARL A.G.I. fait valoir à juste titre qu'aucun préjudice du syndicat n'est caractérisé dans la mesure où les copropriétaires devaient en toute hypothèse payer les sommes réclamées au titre de leur consommation d'eau, soulignant encore qu'il n'a pas été réclamé au syndicat de frais supplémentaires pour retard de paiement.
Le syndicat des copropriétaires soutient en vain, pour solliciter réparation, que les copropriétaires actuellement présents au sein de la copropriété supportent des charges qu'ils n'attendaient pas puisqu'ils n'étaient pas propriétaires au moments des fautes de gestion commises par la SARL A.G.I., dès lors que la présente action est engagée par le syndicat des copropriétaires et non à titre individuel par les copropriétaires concernés.
-Sur la demande au titre des conséquences de l'incendie survenu au mois de mai 2016 :
Le syndicat des copropriétaires réclame la somme de 1237,50 euros au titre des opérations de nettoyage et de décontamination des parties communes et celle de 5056,22 euros au titre de la réfection de la cage d'escalier.
Il produit un devis émis le 24 janvier 2017 par la SARL Monpeysssin, pour un montant de 5056,22 euros, portant l'intitulé « devis de peinture suite à incendie », ainsi que la facture de cette société en date du 14 novembre 2018, pour le même montant et la preuve du virement correspondant effectué le 14 novembre 2018 par la SARL Immoteck. Il communique également le devis émis le 30 mai 2016 par la société Vitale Assistance Décontamination pour un montant de 1237,50 euros, décrivant « un très important dépôt de suie sur les supports des parties communes de l'immeuble » et préconisant la décontamination des parties souillées par les suies avec l'indication que « la pollution émise par le sinistre migre vers les logements non souillés».
Contrairement à ce que soutient la SARL A.G.I., ces éléments sont suffisants pour établir un lien entre les travaux concernés et l'incendie survenu, étant observé que le fait que les travaux de nettoyage et décontamination n'aient pas encore fait l'objet d'un vote en assemblée générale est sans incidence sur la réalité du dommage et sa nécessaire indemnisation.
Par ailleurs, le syndicat des copropriétaires verse aux débats un courrier de la société d'assurance BPCE Iard, assureur du propriétaire du logement dans lequel a pris naissance l'incendie et décédé à la suite de cet événement, qui précise n'avoir reçu aucune réclamation au titre des conséquences matérielles du sinistre, qui indique également qu'en toute hypothèse elle n'aurait pu intervenir qu'à hauteur des tantièmes appartenant à ce copropriétaire, et encore qu'aucune demande d'indemnité complémentaire ne pourrait être prise en compte eu égard à l'acquisition de la prescription biennale.
Dans ces circonstances, l'argumentation de la SARL A.G.I. selon laquelle il ne serait pas justifié par le syndicat des copropriétaires que le coût des travaux nécessaires à la réparation des parties communes resterait à sa charge est inopérante, étant rappelé que l'assurance du syndicat des copropriétaires ne peut être mobilisée compte tenu de la résiliation du contrat intervenue en raison du défaut de paiement des cotisations.
Enfin, contrairement à ce que soutient la SARL A.G.I., la réparation du préjudice matériel subi par le syndicat des copropriétaires doit être intégrale, et non pas seulement intervenir au titre d'une perte de chance, alors que du fait de la carence du syndic, le syndicat doit effectivement supporter le coût des travaux tel qu'il est justifié par les devis et factures.
Le jugement sera confirmé, par substitution de motifs, en ce qu'il a condamné la SARL A.G.I. à payer au syndicat des copropriétaires les sommes réclamées en réparation des dommages causés à l'immeuble par l'incendie.
-Sur le préjudice moral du syndicat des copropriétaires :
Les manquements de la SARL A.G.I. à ses obligations de syndic et son comportement après l'expiration de son mandat ont, ainsi que l'a retenu le premier juge, placé le syndicat des copropriétaires dans une situation financière complexe et délicate, ayant nécessité la désignation d'un syndic judiciaire. Aussi, au-delà du préjudice matériel et financier supporté par le syndicat des copropriétaires, l'atteinte à son activité et à son bon fonctionnement, à l'origine d'un état de blocage, caractérise l'existence d'un préjudice moral méritant réparation.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné à ce titre la SARL A.G.I. à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3000 euros.
- Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Le jugement sera confirmé sur la condamnation prononcée au titre des dépens et de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SARL A.G.I. qui succombe pour l'essentiel des prétentions présentées devant la cour, sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement en ce qu'il :
-a condamné la SARL [Localité 1] Gestion Immobilière à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 1] (15) la somme de 6442,85 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de l'absence de règlement de la facture de consommation d'eau ;
Statuant à nouveau,
-Déboute le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 1] (15) de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice lié à l'absence de règlement des factures de consommation d'eau ;
Confirme le jugement pour le surplus, par substitution de motifs ;
Condamne la SARL [Localité 1] Gestion Immobilière aux dépens, cette condamnation étant assortie au profit de maître Claire Serindas du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la SARL [Localité 1] Gestion Immobilière à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 1] (15), pris en la personne de son syndic, la SARL Immoteck, la somme de 2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier, Le Président,