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22/11/2022 | FRANCE | N°21/00336

France | France, Cour d'appel de Riom, 1ère chambre, 22 novembre 2022, 21/00336


COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE







Du 22 novembre 2022

N° RG 21/00336 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FRIF

-PV- Arrêt n° 529



SOCIETE MUTUELLE DES ASSURANCES DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS / [X] [P], [M] [D], Société CONSTRUCTION JD



Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PUY EN VELAY, décision attaquée en date du 31 Décembre 2020, enregistrée sous le n° 17/00296





Arrêt rendu le MARDI VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX


r>COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller



En présence de :
...

COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 22 novembre 2022

N° RG 21/00336 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FRIF

-PV- Arrêt n° 529

SOCIETE MUTUELLE DES ASSURANCES DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS / [X] [P], [M] [D], Société CONSTRUCTION JD

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PUY EN VELAY, décision attaquée en date du 31 Décembre 2020, enregistrée sous le n° 17/00296

Arrêt rendu le MARDI VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

SOCIETE MUTUELLE DES ASSURANCES DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS - SMABTP

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Jérôme LANGLAIS de la SCP LANGLAIS BRUSTEL LEDOUX & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

APPELANTE

ET :

Mme [X] [P]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Emmanuelle BONNET-MARQUIS de la SELARL BONNET - EYMARD-NAVARRO - TEYSSIER, avocat au barreau de HAUTE-LOIRE

Timbre fiscal acquitté

INTIMEE et APPELANTE à l'égard de la Société CONSTRUCTION JD dans le cadre de la procédure 21/01243 absorbée par jonction

M. [M] [D]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représenté par Me Philippe DAUPHIN de l'ASSOCIATION SOULIER - DAUPHIN, avocat au barreau de HAUTE-LOIRE

Timbre fiscal acquitté

INTIME

Société CONSTRUCTION JD

[Adresse 2]

[Adresse 2]

non représentée

INTIMEE par Mme [X] [P] dans le cadre de la procédure 21/01243 absorbée par jonction

DÉBATS :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 septembre 2022, en application des dispositions de l'article 789 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX et Mme BEDOS, rapporteurs.

ARRÊT : PAR DÉFAUT

Prononcé publiquement le 22 novembre 2022, après prorogé du délibéré initialement prévu le 8 novembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme Marlène BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [X] [P] est propriétaire d'une maison d'habitation située [Adresse 1], qui a été en grande partie détruite par un incendie survenu le 13 décembre 2011. Elle a en conséquence entrepris la reconstruction de sa maison, concluant le 10 mai 2012 un contrat d'Ordonnancement, pilotage et coordination (OPC) de chantier avec la société ALLIANCE COORDINATION. Ce maître d''uvre a ainsi notamment fait exécuter le lot Maçonnerie par la SAS CONSTRUCTIONS JD, le lot Démolition / Plancher solivage bois par M. [M] [D] et le lot Menuiseries intérieures et extérieures par la SARL [N] INGÉNIERIE. Ces travaux ont été interrompus courant septembre 2012 du fait d'une mésentente totale entre les parties, Mme [P] reprochant au maître d''uvre son absence sur le chantier et divers désordres de construction et ce dernier reprochant au maître d'ouvrage son immixtion permanente sur le chantier.

Saisi par assignations des 13 et 16 août 2013 de Mme [P], le Juge des référés du tribunal de grande instance du Puy-en-Velay a ordonné le 10 octobre 2013 une mesure d'expertise judiciaire confiée à M. [B] [E], architecte-expert près la cour d'appel de Riom. Après avoir rempli sa mission, l'expert judiciaire commis a établi son rapport le 2 avril 2014.

Suivant une ordonnance rendue le 10 septembre 2015, le Juge des référés du tribunal de grande instance du Puy-en-Velay a ordonné une nouvelle expertise judiciaire afin de décrire les travaux réalisés et ceux restant à réaliser, désignant M. [W] [C], architecte-expert près la cour d'appel de Riom. Après avoir rempli sa mission, l'expert judiciaire commis a établi son rapport le 1er août 2016.

En lecture de ces rapports d'expertise judiciaire, Mme [X] [P] a assigné le 24 février 2017 la société ALLIANCE CONSTRUCTION, la SAS CONSTRUCTIONS JD, M. [M] [D], la société [N] INGÉNIERIE, la SOCIÉTÉ MUTUELLE DES ASSURANCES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (SMABTP), en qualité d'assureur de la société ALLIANCE COORDINATION, et la société BANQUE POPULAIRE IARD, son assureur, devant le tribunal de grande instance du Puy-en-Velay.

C'est dans ces conditions que le tribunal judiciaire du Puy-en-Velay a, suivant un jugement n° RG-17/00296 rendu le 31 décembre 2020 :

- condamné la société SMABTP à payer au profit de Mme [P] la somme de 3.000,00 € par an à compter du mois de mars 2013 jusqu'à la réception complète des travaux de rénovation de la maison susmentionnée, en réparation de son préjudice de jouissance ;

- condamné la société SMABTP à payer au profit de Mme [P] la somme de 3.763,50 € par an à compter de l'année 2013 jusqu'à la réception complète de ces travaux, en réparation de son préjudice financier lié aux frais supplémentaires ;

- débouté Mme [P] du surplus de ses demandes ;

- donné acte à M. [D] qu'il prend l'engagement de reprendre les malfaçons ayant affecté son lot de construction conformément aux préconisations de l'expert judiciaire et sous la direction d'un maître d''uvre ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société SMABTP aux entiers dépens de l'instance.

Par déclaration formalisée par le RPVA le 10 février 2021, le conseil de la société SMABTP a interjeté appel du jugement susmentionné, l'appel portant sur les condamnations pécuniaires prononcées à son encontre au titre du trouble de jouissance et du préjudice financier, outre l'imputation des entiers dépens de l'instance (instance n° RG-21/00336).

Par déclaration formalisée par le RPVA le 4 juin 2021, le conseil de Mme [X] [P] a interjeté appel du jugement susmentionné, l'appel portant sur le rejet du surplus de ses demandes (instance n° RG-21/01243).

Suivant une ordonnance rendue le 6 janvier 2022, le Conseiller de la mise en état a ordonné la jonction de l'instance n° RG-21/01243 à l'instance n° RG-21/00336.

' Par dernières conclusions d'appelant notifiées par le RPVA le 14 janvier 2022, la SOCIÉTÉ MUTUELLE DES ASSURANCES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (SMABTP) a demandé de :

' infirmer le jugement du 31 décembre 2020 du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay concernant les condamnations pécuniaires prononcées à son encontre au titre du trouble de jouissance, du préjudice financier et de l'imputation des dépens de l'instance et statuer à nouveau à ce sujet ;

' débouter Mme [P] de l'ensemble de ses demandes ;

' à défaut, limiter la condamnation pécuniaire en réparation du préjudice de jouissance à la somme totale de 12.000 € pour la période de mars 2013 à février 2017 et condamner M. [D] in solidum avec elle au paiement des sommes dues à ce titre à Mme [P] ;

' condamner Mme [P] ou tout succombant à lui payer une indemnité de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner Mme [P] ou tout succombant aux entiers dépens de première instance et d'appel.

' Par dernières conclusions d'intimé et d'appel incident notifiées par le RPVA le 6 janvier 2022, Mme [X] [P] a demandé de :

' au visa des articles 1134 et 1147 du Code civil [ancien] et en lecture des deux rapports d'expertise judiciaire de M. [E] et de M. [C] ;

' réformer le jugement entrepris et condamner en conséquence la SAS CONSTRUCTION JD à lui payer, après avoir constaté ses manquements à ses obligations contractuelles :

* la somme de 11.531,60 € HT, outre taux de TVA applicable et majoration du taux de l'indice de la construction BT-01 au jour de l'exécution de la décision à intervenir, en réparation des malfaçons affectant le lot de maçonnerie ;

* une indemnité complémentaire de 3.000 € au titre de la démolition indue du conduit de cheminée auquel devait être raccordé le poêle à granulés qu'elle avait commandé;

' condamner la SAS CONSTRUCTION JD à lui payer une indemnité de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner la SAS CONSTRUCTION JD aux entiers dépens de première instance et d'appel, devant inclure le coût de la procédure de référé et des deux mesures d'expertise judiciaire susmentionnées.

' Par dernières conclusions d'intimé notifiées par le RPVA le 8 juillet 2021, M. [M] [D] a demandé de :

' lui donner acte qu'il s'engage, conformément à la demande de Mme [P], à reprendre son lot de travaux conformément aux préconisations de l'expert judiciaire M. [C] et sous la direction d'un maître d''uvre, et confirmer le jugement entrepris en ce sens ;

' débouter Mme [P] de sa demande de défraiement formée au visa de l'article 700 du code de procédure civile ;

' débouter la société SMABTP de l'ensemble de ses demandes formé à son encontre;

' condamner la société SMABTP à lui payer une indemnité de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

' statuer ce que de droit sur les dépens.

Bien que régulièrement assignée, en termes de notification de déclaration d'appel et de conclusions de l'appelant par acte d'huissier de justice signifié le 16 Juillet 2021, la SAS JD CONSTRUCTIONS n'a pas constitué avocat et n'a donc fait valoir aucun moyen de défense au fond. La présente décision sera rendue par défaut.

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par chacune des parties comparantes à l'appui de leurs prétentions respectives sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.

Par ordonnance rendue le 12 septembre 2022, révoquant une précédente ordonnance de clôture prononcée le 30 juin 2022, le Conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de cette procédure. Lors de l'audience civile collégiale en double conseiller-rapporteur du 26 septembre 2022 à 14h00, au cours de laquelle cette affaire a été évoquée, chacun des conseils des parties a réitéré ses précédentes écritures. La décision suivante a été mise en délibéré au 8 novembre 2022, prorogée au 22 novembre 2022, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ En ce qui concerne la garantie de la société SMABTP

En application de l'article L.124-3 du code des assurances, ouvrant au tiers lésé un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable, la société SMABTP a été condamnée en première instance, en sa qualité d'assureur de la responsabilité civile professionnelle de la société ALLIANCE COORDINATION à payer au profit de Mme [P] les sommes annuelles de 3.000,00 € à compter de mars 2013 et de 3.763,50 € à compter de l'année 2013 en réparation respectivement du trouble de jouissance et du préjudice financier de cette dernière jusqu'à la réception complète des travaux d'achèvement de restauration de cet immeuble. Les sociétés SMABTP et ALLIANCE COORDINATION sont effectivement liées par un contrat d'assurance garantissant les activités d'Ordonnancement, pilotage et coordination (OPC) de chantier conclu à compter du 1er janvier 2009. Cette garantie contractuelle a donc vocation à être mobilisée, dans la limite de son périmètre, au titre du chantier litigieux effectué suivant ce contrat de coordination OPC conclu le 10 mai 2012 entre Mme [P] et la société ALLIANCE COORDINATION.

Dans ses conclusions d'intimé, Mme [P] ne présente aucune critique sur les montants de condamnations pécuniaires concernant ses indemnisations du trouble de jouissance et du préjudice financier ni d'ailleurs sur le rejet de ses autres réclamations pécuniaires précédemment formées en première instance à l'encontre de la société SMABTP. Elle est donc censée acquiescr sur les discussions relatives aux erreurs de plans et au non-respect de ces documents, à la la sous-évaluation des travaux et au le préjudice moral que le premier juge a écartés en jugeant que ces griefs n'entraient pas dans le périmètre de la garantie souscrite. En cause d'appel, Mme [P] se borne en tout cas à diriger l'ensemble de ses demandes principales, qui seront ci-après discutées, à l'encontre uniquement de la société CONSTRUCTION JD. La discussion ne portera donc en cause d'appel à l'égard de la société SMABTP que sur les condamnations pécuniaires précitées de 3.000,00 € au titre du trouble de jouissance et de 3.763,50 € au titre du préjudice financier pour frais supplémentaires.

Il convient ici de rappeler qu'il résulte des dispositions de l'article 1147 du Code civil [ancien], selon cette version alors applicable à l'ensemble de la situation litigieuse, que « Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. ». En l'espèce, ces deux griefs particuliers de trouble de jouissance et de préjudice financier résultant de frais supplémentaires s'articulent sur un retard allégué dans l'exécution du chantier sous la coordination OPC de la société ALLIANCE COORDINATION garantie par la société SMABTP.

À ce sujet, le rapport d'expertise judiciaire du 2 avril 2014 de M. [B] [E] précise notamment que :

* le contrat d'ordonnancement, de pilotage et de coordination de chantier du 10 mai 2012 comportait la mission suivante :

' Vérification du planning prévisionnel des recettes et dépenses pour la rénovation ci-dessus désignée, avec planning financier des opérations nécessaires au règlement des contractants.

' Préparation et examen des contrats et marchés avec tous les intervenants nécessaires, entreprises, architecte et autres intervenants techniques, assurances.

' Vérification de la bonne exécution des travaux et du respect des plannings, représentation du maître d'ouvrage lors des réunions de chantier.

* dans les faits, la société ALLIANCE COORDINATION n'a produit aucun planning financier ni aucun planning des travaux, contrairement aux termes de sa mission ci-dessus ;

* la durée du chantier litigieux était fixée à six mois à compter de l'obtention de la demande d'autorisation de travaux ;

* ce chantier, d'un volume financier total de 81.050,36 € TTC outre 717,60 € TTC et 8.153,51 € TTC d'honoraires de maîtrise d''uvre et autres frais [pour une indemnité d'assurance perçue à hauteur de 89.500,00 €], n'a donné lieu sur les 12 lots prévus de travaux qu'à la conclusion le 16 mai 2012 de 2 lots de travaux portant respectivement sur le lot Maçonnerie confié à la SAS CONSTRUCTIONS JD et sur le lot Démolition / Plancher solivage bois confié à M. [D] conformément aux clauses classiques propres à tous les marchés de travaux ;

* suite à la déclaration préalable de travaux déposés en mairie le 18 avril 2012 et à un arrêté de non-opposition du 23 mai 2012 du Maire de [Localité 6], cinq réunions de chantier ont été menées entre le 7 juin 2012 et le 5 juillet 2012, ce qui permet d'inférer que les travaux litigieux ont démarré au minimum à compter du 7 juin 2012;

* ces travaux ont été interrompus en cours de chantier, certains intervenants de travaux s'étant engagés à reprendre leur lot respectif (repositionnement des menuiseries de la part de M. [N], reprise des défauts de planéité et achèvement des planchers de la part de M. [D], achèvement de la maçonnerie de la part de la société Constructions JD) ;

* « Il nous est donc impossible de décrire les travaux nécessaires pour réparer les désordres qui a priori n'en sont pas, puisque le chantier est en cours et que toute action corrective peut être apportée. Il nous est donc impossible d'en chiffrer le coût. Seule la reprise du chantier par un maître d''uvre qualifié permettra d'aplanir ces difficultés » (page 15) ;

Par ailleurs, le rapport d'expertise judiciaire du 1er août 2016 de M. [W] [C] précise notamment que :

* la maison de Mme [P] est une maison de ville imbriquée entre deux autres constructions, comportant deux étages sur rez-de-chaussée, en maçonnerie traditionnelle de pierres hourdées au mortier de chaux, comportant une couverture en tuiles de terre cuite à emboîtement avec charpente en bois à voligeage jointif ;

* les travaux de démolitions (une cloison restant à démolir dans pièce sur rue), de maçonnerie (ouvertures devant être agrandies avec linteaux pour permettre le libre accès aux coffres de volets roulants, un seuil de porte-fenêtre devant être réalisé, condamnation et démolition partielle du conduit de cheminée nécessaire au raccordement de la chaudière), de plancher bois (une solive cintrée devant être remplacée et le parquet en OSB devant être soigneusement fixé), de plafonds (non-conformité aux règles de l'art, entr'axe des rails devront être ramené à 0,60 ml), de doublages (fixation des rails à parfaire pour conformité aux préconisations du fabricant, appuis intermédiaires à compléter, ossature à terminer), d'électricité (non-conformité du fait de dérivations derrière les cloisons de doublage nécessitant réfection totale, compteur électrique mal placé), de menuiseries extérieures (embrasures des baies devant être agrandies pour l'accessibilité des coffres de volets roulants), de plomberie-sanitaires (non-conformité des piquages des canalisations en cuivre du fait des soudures masquées par les cloisons de doublage, tubes PVC des évacuations d'eaux usées posés à l'envers, ballon d'eau chaude ne devant pas reposer au sol pour éviter des dégâts dus aux infiltrations d'eau dans la cave, WC suspendu devant être reposé à la bonne hauteur) et d'enduits extérieurs (parties non adhérentes de l'enduit en place devant être purgées) ont été affectés de malfaçons ;

* les travaux inachevés concernent les escaliers qui ne sont pas posés, les enduits de façades qui n'ont pas été réalisées, la zinguerie non réalisée, les menuiseries intérieures non posées, les plafonds, cloisons et doublages non réalisés, l'électricité et la plomberie non conformes et inachevées ;

* « Il manque une véritable maîtrise d''uvre pour diriger ce chantier ; la société Alliance Coordination, tant dans sa mission de maîtrise d''uvre que dans celle de coordination semble avoir été manifestement dépassée par l'ampleur des travaux. » (Page 11) ;

* « Il était prévu la pose d'un poële à granulé dans le salon mais la pose de cet équipement est tout simplement impossible car le conduit a été bouché et partiellement démoli. Il conviendra, soit de déboucher et tuber ce conduit, soit de mettre en place un conduit extérieur au travers du mur. Cette prestation a été chiffrée ci-avant. » (Page 12)

Le premier juge a estimé que le délai contractuel de six mois d'exécution des travaux devait commencer à courir, en termes de démarrage du chantier, à compter de septembre 2012 du fait d'une réunion de chantier en septembre 2012, fixant ainsi la date théorique d'achèvement du chantier au mois de mars 2013. Cette appréciation est erronée, l'expert judiciaire M. [E] ayant précisé dans son rapport que les travaux avaient commencé le 7 juin 2012, se conformant en cela à la date du 7 juin 2012 de premier compte-rendu de réunion de chantier (pages 5 et 12). La situation de blocage ayant fini par provoquer l'interruption totale du chantier est intervenue postérieurement à une réunion de chantier du 13 septembre 2012 à laquelle n'a participé aucun représentant de la société ALLIANCE COORDINATION selon un courrier de grief libellé en ce sens à l'encontre de cette dernière par Mme [P] par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 15 septembre 2012. Ce courrier a donné lieu à un autre courrier de grief de la part de la société ALLIANCE COORDINATION, celle-ci reprochant en retour à Mme [P], par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 24 septembre 2012, de perturber l'avancement des travaux en interdisant l'accès du chantier aux entreprises et en remettant systématiquement en cause les choix techniques retenus. Toujours est-il que l'interruption totale du chantier peut objectivement être actée entre les parties au contrat à la date du 11 octobre 2012 de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans laquelle le conseil de Mme [P] a notamment mis en demeure la société ALLIANCE COORDINATION de reprendre l'exécution de ce programme de travaux qui depuis lors n'a jamais été repris.. La durée de ce chantier n'a donc été que de l'ordre de quatre mois jusqu'à son interruption.

En l'occurrence, force est de constater que le jugement de première instance n'a aucunement imputé, dans ce contexte de reproches que se sont mutuellement adressés le maître d'ouvrage et le coordinateur OPC, la responsabilité de cette interruption de chantier à l'une ou l'autre des parties. Le premier juge n'a par ailleurs aucunement défini la teneur et l'ampleur des travaux restant à réaliser jusqu'à leur réception complète comme condition libératoire de ces condamnations pécuniaires renouvelables annuellement au titre du trouble de jouissance et du préjudice financier. Il a enfin assorti la levée de ces condamnations pécuniaires à périodicité annuelle de conditions libératoires échappant totalement à la volonté d'action et à la capacité de diligences de la société SMABTP. En effet, la mise à exécution de l'achèvement des travaux litigieux est désormais susceptible de relever de personnes tierces concernant la maîtrise d''uvre ou une nouvelle coordination OPC ainsi que les différents intervenants de travaux. La mise à la charge de la société SMABTP des conséquences dommageables du trouble de jouissance et du préjudice financier pour frais supplémentaires apparaît dès lors tout à fait incertaine et conjecturale dans ces conditions d'absence préalable d'imputabilité des retards de chantier et de parti pris de périodicité de paiement de ces postes d'indemnisation sans véritable terme ni maîtrise calendaire vis-à-vis du payeur.

En ce qui concerne l'imputabilité de l'interruption de ce chantier, les reproches ayant été formulés par écrit le 24 septembre 2012 par la société ALLIANCE COORDINATION à Mme [P] concernant l'accès des entreprises au chantier ou l'intervention dans les choix techniques constructifs n'apparaissent en définitive pas compatibles avec la rédaction même du marché de travaux aménageant explicitement au profit du maître d'ouvrage la possibilité d'établir lui-même les plans définissant le bâtiment à construire. Ce reproche s'avère donc insuffisant pour donner lieu à qualification d'immixtion du maître de l'ouvrage dans la construction litigieuse. En revanche, il ressort des développements expertaux susmentionnés que la société ALLIANCE COORDINATION a commis dans le cadre même de sa mission OPC un certain nombre de fautes ayant indéniablement provoqué la rupture de confiance avec le maître de l'ouvrage et l'interruption finale et totale du chantier.

En effet, le fait que seuls deux marchés de travaux aient été initialement formalisés (16 mai 2012) sur les 12 lots qui étaient pourtant prévus, alors par ailleurs que les différents comptes rendus de chantier ne rendent jamais compte de l'état d'avancement du chantier, suffit à expliquer sur cette période de l'ordre de quatre mois les retards de chantier qui apparaissent imputables au coordinateur OPC. Selon les constatations expertales, l'absence de planning sérieux de la part du coordinateur OPC a ajouté à ces contretemps ainsi qu'aux difficultés relationnelles entre les parties contractantes. Les deux experts judiciaires susnommés concluent d'ailleurs que cette mission de coordination des travaux a été visiblement dépassée. L'interruption du contrat de coordination OPC apparaît dès lors imputable uniquement à la société ALLIANCE COORDINATION, étant au demeurant constaté que les travaux d'ores et déjà effectués sont affectés de nombreuses malfaçons et non-conformités telles que cela est mentionné et détaillé par l'expert judiciaire M. [C] (cf. : supra).

Dans ces conditions, tout en infirmant le jugement de première instance en ce qu'il condamné la société SMABTP à payer à Mme [P] des dommages-intérêts dans des conditions de périodicité concernant ces deux postes de préjudice retenus, la Cour constate que celle-ci n'en est pas moins responsable de l'ensemble des conséquences dommageables des fautes de son assuré. En cette occurrence, le préjudice de jouissance, qui ne paraît aucunement contestable dans son principe compte tenu de cet important contretemps occasionné à l'accomplissement de ce programme de travaux, sera arbitré à la somme de 12.000,00 € dans le cadre d'un paiement unique excluant toute périodicité, conformément à l'offre subsidiaire présentée en ce sens par la société SMABTP au titre de la période courant de mars 2013 à février 2017.

En revanche, le préjudice financier pour frais supplémentaires qui a été allégué en première instance, et qui par principe ne peut faire l'objet d'une indemnisation forfaitaire, n'a fait l'objet d'aucun décompte détaillé et récapitulatif de créance, permettant d'en vérifier la réalité, l'exactitude et la sincérité. Le jugement de première instance sera en conséquence également infirmé en ce qu'il a condamné la société ALLIANCE COORDINATION à payer sur ce chef au profit de Mme [P] la somme de 3.763,50 € avec périodicité annuelle jusqu'à la réception des travaux d'achèvement à intervenir.

2/ En ce qui concerne la responsabilité de la SAS CONSTRUCTIONS JD

Sur la base d'un devis d'entreprise ECO BLEU du 3 mai 2014, Mme [P] réclame à la société CONSTRUCTION JD la somme totale de 11.531,60 € HT, outre taux de TVA applicable, au titre des travaux de maçonnerie devant être effectués en reprise et achèvement au niveau des fenêtres et de la porte d'entrée du rez-de-chaussée, du mur intérieur ainsi que de la porte-fenêtre, du seuil et de la fissure de l'étage. Elle renvoie à ce sujet aux développements et conclusions énoncés dans le rapport d'expertise judiciaire de M. [C] et précédemment résumés. Le juge de première instance a rejeté ce poste de demande en considérant que celle-ci était hypothétique dans la mesure où Mme [P] avait déclaré accepter une nouvelle intervention de la société CONSTRUCTION JD pour les travaux nécessaires de reprise et que cette réclamation chiffrée n'était en définitive présentée qu'à défaut de cette intervention.

En l'occurrence, dans la mesure où la société CONSTRUCTION JD n'est pas comparante en cause d'appel et ne représente donc pas cet engagement alternatif d'exécution en nature, ce motif de première instance ne peut être maintenu. Il y a lieu ici de considérer, d'une part que l'expert judiciaire M. [C] a fait une exacte appréciation des défaillances de ce lot d'intervention de travaux et d'autre part que les contraintes de reprise et d'achèvement de ces malfaçons sont exactement évaluées sur la base de ce devis d'entreprise.

Le jugement de première instance sera en conséquence infirmé sur ce chef, la société CONSTRUCTION JD devant être au contraire condamnée à payer au profit de Mme [P] la somme précitée de 11.531,60 € HTen réparation de ce poste de préjudice, outre taux de TVA applicable le jour du paiement. Cette condamnation pécuniaire sera par ailleurs assortie de l'indice de la construction BT-01 au jour de l'exécution de la présente décision.

3/ Sur les autres demandes

La demande formée par Mme [P] à l'encontre de la société CONSTRUCTIONS JD aux fins de paiement de la somme supplémentaire de 3.000,00 € concernant le conduit de cheminée ne fait l'objet d'aucune pièce justificative. Ce poste demande sera en conséquence rejeté, la réparation d'un préjudice matériel ne pouvant être forfaitisée.

Compte tenu de la brusque rupture du contrat et de l'interruption totale du chantier qui apparaît en définitive imputable à la société ALLIANCE COORDINATION assurée par la société SMABTP, il y a lieu de considérer que M. [D] n'a pas été en mesure et en capacité d'exécuter, avant réception des travaux postérieurement en tenant compte d'éventuelles réserves, les correctifs nécessaires sur son lot d'intervention au sujet duquel certaines malfaçons ont été constatées par les experts judiciaires concernant la démolition ainsi que les travaux de plancher et de solivage bois . La demande de garantie formée par la société SMABTP à l'encontre de M. [D] sera donc rejetée.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [D], celui-ci ne disconvenant pas être à l'origine de désordres de construction sur son lot d'interventions, pour lesquels il propose par ailleurs d'effectuer toutes actions de reprise utiles.

Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a constaté l'engagement de M. [D] de reprendre les malfaçons qui lui sont reprochées sur son lot d'interventions conformément aux préconisations de l'expert judiciaire et sous la direction d'un maître d''uvre, étant rappelé à ce sujet que Mme [P] peut discrétionnairement refuser d'y donner suite dès lors qu'elle affirme ne plus être en confiance avec ce professionnel du bâtiment.

Le jugement de première instance sera également confirmé en ce qui concerne le rejet général d'application des dispositions de l'article 700 et l'imputation des dépens de l'instance.

Il serait effectivement inéquitable, au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de Mme [P] les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager à l'occasion de cette instance et qu'il convient d'arbitrer à la somme de 1.500,00 €, à la charge de la société CONSTRUCTIONS JD.

Enfin, succombant en partie dans ses demandes formées à titre principal en cause d'appel, la société SMABTP sera purement et simplement déboutée de sa demande de défraiement formée au visa de l'article 700 du code de procédure civile et en supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

STATUANT PUBLIQUEMENT

ET PAR DEFAUT

INFIRME le jugement n° RG-17/00296 rendu le 31 décembre 2020 par le tribunal judiciaire du Puy-en-Velay ce qu'il a :

- condamné la SOCIÉTÉ MUTUELLE DES ASSURANCES DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (SMABTP) à payer au profit de Mme [X] [P] la somme de 3.000,00 € par an à compter du mois de mars 2013 en réparation de son préjudice de jouissance ainsi que la somme de 3.763,50 € par an à compter de l'année 2013 en allégation d'un préjudice financier consécutif à des frais supplémentaires, jusqu'à la réception complète des travaux susmentionnés ;

- débouté Mme [X] [P] de sa demande formée à l'encontre de la société CONSTRUCTION JD aux fins de paiement de la somme de 11.531,30 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son poste de préjudice de travaux de reprise concernant le lot de maçonnerie.

CONFIRME ce même jugement en toutes ses autres dispositions, en précisant que la condamnation de la société SMABTP aux entiers dépens de première instance inclut l'ensemble des frais et dépens afférents à la procédure de référé et aux deux mesures d'expertise judiciaire susmentionnées.

Statuant à nouveau.

CONDAMNE la société SMABTP à payer au profit de Mme [X] [P] la somme de 12.000,00 € en réparation de son trouble de jouissance.

CONDAMNE la société CONSTRUCTIONS JD à payer au profit de Mme [X] [P] la somme de 11.531,60 € HT, en réparation de son préjudice de reprise concernant le lot de maçonneries, outre taux de TVA applicable au jour du paiement et application du taux de l'indice de la construction BT-01 en vigueur le jour de l'exécution de la présente décision.

CONDAMNE la société CONSTRUCTIONS JD à payer au profit de Mme [X] [P] une indemnité de 1.500,00 € en dédommagement de ses frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.

REJETTE le surplus des demandes des parties.

CONDAMNE la société SMABTP aux entiers dépens de l'instance.

Le greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/00336
Date de la décision : 22/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-22;21.00336 ?
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