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04/09/2024 | FRANCE | N°23/00355

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 04 septembre 2024, 23/00355


COUR D'APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale















ARRET N°



DU : 04 Septembre 2024



N° RG 23/00355 - N° Portalis DBVU-V-B7H-F6YS

VTD

Arrêt rendu le quatre Septembre deux mille vingt quatre



Sur APPEL d'une décision rendue le 04 janvier 2023 par le Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de MONTLUCON (RG n° 22/01003)



COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente d

e chambre

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller



En présence de : Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, lors de l'appel des causes et Mme Christi...

COUR D'APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 04 Septembre 2024

N° RG 23/00355 - N° Portalis DBVU-V-B7H-F6YS

VTD

Arrêt rendu le quatre Septembre deux mille vingt quatre

Sur APPEL d'une décision rendue le 04 janvier 2023 par le Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de MONTLUCON (RG n° 22/01003)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller

En présence de : Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, lors de l'appel des causes et Mme Christine VIAL, Greffier, lors du prononcé

ENTRE :

La société CREATIS

SA immatriculée au RCS de Lille Métropole sous le n° 419 446 034 00128

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentants : Me Laurie FURLANINI, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Olivier LE GAILLARD de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE (plaidant)

APPELANTE

ET :

Mme [U] [W]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Non représentée, assignée à étude

M. [R] [K]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Non représenté, assigné selon procès-verbal de l'article 659 du code de procédure civile

INTIMÉS

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, à l'audience publique du 23 Mai 2024, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame THEUIL-DIF, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 04 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par offre en date du 20 janvier 2021 acceptée le 22 janvier 2021 par signature électronique, la SA Créatis a consenti à Mme [U] [W] et M. [R] [K] un crédit à la consommation sous forme de regroupement de crédits, d'un montant de 55 700 euros amortissable en 144 mensualités au taux d'intérêt débiteur annuel fixe de 3,89 %.

Les emprunteurs n'ont pas respecté leurs engagements, le premier impayé non régularisé survenant au mois de juin 2021. L'organisme de crédit a prononcé la déchéance du terme du prêt le 9 juin 2022, après mise en demeure du 29 avril 2022 par lettres recommandées avec accusé de réception.

Par actes d'huissier du 8 septembre 2022, la SA Créatis a fait assigner Mme [U] [W] et M. [R] [K] devant le juge des contentieux de la protection (JCP) du tribunal judiciaire de Montluçon aux fins d'obtenir leur condamnation solidaire à lui payer la somme de 62 633,45 euros outre intérêts au taux contractuel à compter de la mise en demeure.

Seule Mme [U] [W] s'est présentée à l'audience : elle n'a contesté ni le principe, ni le montant de sa dette.

Par jugement réputé contradictoire du 4 janvier 2023, le JCP a :

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat de regroupement de crédits en date du 22 janvier 2021 pour un montant de 55 700 euros ;

- condamné Mme [U] [W] et M. [R] [K] solidairement à payer à la SA Créatis la somme de 52 813,13 euros pour solde du prêt susvisé, avec intérêts au taux légal sans majoration ;

- débouté la SA Créatis de sa demande de capitalisation des intérêts ;

- rejeté toutes autres demandes ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [U] [W] et M. [R] [K] in solidum aux dépens ;

- rappelé que la décision était exécutoire de plein droit.

Le JCP a notamment énoncé, pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, que la lecture de la pièce n°13 permettait de constater deux dates de consultation du FICP les 14 janvier et 29 janvier au nom des deux débiteurs sans que le résultat de cette consultation ne soit renseigné ; qu'en l'absence de production des justificatifs de la demande de consultation du fichier, mais également de son résultat, ce document ne pouvait suffire à justifier que le prêteur avait respecté les prescriptions de l'article L.312-16 du code de la consommation ; qu'en conséquence, le prêteur était déchu de la totalité du droit aux intérêts conformément à l'article L.341-2 du même code.

La SA Créatis a interjeté appel de ce jugement suivant déclaration électronique en date du 27 février 2023, déclaration d'appel signifiée le 17 avril 2023 à Mme [U] [W] (à étude) et le 20 avril 2023 à M. [R] [K] (selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile).

Suivant conclusions parvenues à la cour par voie électronique le 29 avril 2023 et signifiées aux intimés les 2 et 11 mai 2023 (selon les mêmes modalités), la SA Créatis demande à la cour au visa des articles 1103, 1104, 1231-1, 1902 du code civil, des articles L.312-1 et suivants du code de la consommation, et de l'article L.313-3 du code monétaire et financier, de déclarer recevable et bien fondé son appel, et y faisant droit de :

- réformer le jugement en ce qu'il :

a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat de regroupement de crédits en date du 22 janvier 2021 ;

a condamné solidairement Mme [U] [W] et M. [R] [K] à lui payer la somme de 52 813,13 euros pour solde du prêt avec intérêts au taux légal sans majoration ;

l'a déboutée de sa demande au titre de la capitalisation des intérêts, de la clause pénale et de l'article 700 du code de procédure civile ;

- en conséquence, et statuant à nouveau :

- condamner solidairement Mme [U] [W] et M. [R] [K] à lui payer les sommes suivantes arrêtées au 23 août 2022 :

$gt; capital restant dû : 54 477,51 euros ;

$gt; intérêts : 2 537,43 euros ;

$gt; assurance : 1 260,31 euros ;

$gt; indemnité conventionnelle : 4 358,20 euros ;

$gt; Total : 62 633,45 euros outre frais et intérêts de retard au taux contractuel à compter de la mise en demeure et jusqu'à parfait paiement ;

- subsidiairement, et si par impossible la déchéance du droit aux intérêts devait être confirmée, limiter cette sanction aux seuls intérêts contractuels échus et non payés à ce jour ;

- assortir toute condamnation en paiement à l'encontre de Mme [U] [W] et M. [R] [K] des intérêts au taux légal, avec majoration de 5 points en application de l'article L.313-3 du code monétaire et financier ;

- en tout état de cause, ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil ;

- condamner in solidum Mme [U] [W] et M. [R] [K] à lui payer la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamner in solidum aux entiers dépens ;

- dire que dans l'hypothèse où à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir, l'exécution devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier de justice, le montant des sommes retenues par l'huissier, en application de l'article R.444-55 du code de commerce et son tableau 3-1 annexé, devra être supporté par le débiteur, en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'article L.111-8 du code des procédures civiles d'exécution ne prévoyant qu'une simple faculté de mettre à la charge du créancier les dites sommes.

Mme [U] [W] et M. [R] [K] n'ont pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été signée le 11 avril 2024.

MOTIFS

- L'article L.312-16 du code de la consommation prévoit qu'avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L.751-1.

L'article L.341-2 énonce que le prêteur qui n'a pas respecté cette obligation est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

En application de l'article L.751-6 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu'ils ont consulté le fichier, les établissements doivent conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable. Ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l'intégrité des informations ainsi collectées.

Lorsqu'il y a deux emprunteurs, la consultation concerne chacun des emprunteurs.

L'arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers a fait l'objet d'une réécriture par le biais de l'arrêté du 17 février 2020, impactant ainsi les contrats de crédits conclus après cette date.

L'article 13-IV prévoit que les organismes prêteurs peuvent se faire délivrer une attestation de consultation du FICP par la Banque de France.

L'article 13-I encadre de manière plus stricte les éléments de preuve que les prêteurs doivent produire pour justifier les informations collectées au cours de la consultation du FICP, en imposant, à cet égard, la production d'un document respectant un formalisme spécifique, à partir d'un modèle-type annexé, et comportant des mentions obligatoires.

En l'espèce, l'appelante verse aux débats en pièce n°2 l'offre de crédit à la consommation à laquelle ont souscrit le 22 janvier 2021 par signature électronique, Mme [U] [W] et M. [R] [K].

Il est en outre produit en pièce n°13 qualifiée dans le bordereau des pièces de 'justificatifs de consultation du FICP', un document reprenant l'ensemble des mentions figurant dans le modèle-type annexé au décret du 17 février 2020, et ce, pour les deux emprunteurs à deux dates différentes, les 14 et 29 janvier 2021.

Ces éléments sont suffisants pour s'assurer de la fiabilité de la consultation du FICP par la SA Créatis, et aucun manquement aux obligations résultant de l'article L.312-16 du code de la consommation n'est donc relevé.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts sur le fondement sus-rappelé.

En vertu de l'article L.312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date de règlement effectif, les sommes restant dues produisent des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre le prêteur pourra demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application de l'article 1231-5 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret (8 % du capital restant dû à la date de la défaillance).

En l'espèce, la SA Créatis produit notamment à l'appui de sa demande :

- l'offre préalable de crédit signée électroniquement le 22 janvier 2021 ;

- la fiche de dialogue : revenus et charges et ses justificatifs ;

- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées ;

- le justificatif de consultation du FICP ;

- le document d'information propre au regroupement de créances ;

- la notice d'assurance ;

- le tableau d'amortissement ;

- l'historique du prêt ;

- un décompte de créance.

Elle justifie par ailleurs de l'envoi aux deux emprunteurs le 29 avril 2022 d'un courrier recommandé de mise en demeure exigeant le règlement dans un délai de 30 jours des mensualités impayées à hauteur de 6 347,70 euros correspondant aux échéances exigibles du 30 juin 2021 au 31 mars 2022, sous peine de voir prononcer la déchéance du terme du prêt.

A défaut de régularisation des mensualités impayées, la déchéance du terme est intervenue et un courrier recommandé de mise en demeure a été adressé le 9 juin 2022 à M. [K] et Mme [W] portant sur la somme totale de 62 186,39 euros.

Aussi, au vu des pièces justificatives produites, la créance de la SA Créatis s'établit de la façon suivante (créance arrêtée au 9 juin 2022) :

- capital restant dû : 54 477,51 euros

- intérêts : 2 090,37 euros ;

- assurance : 1 260,31 euros ;

soit la somme totale de 57 828,19 euros.

M. [K] et Mme [W] seront ainsi condamnés solidairement à payer la somme de 57 828,19 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 3,89 % l'an à compter du 9 juin 2022 sur la somme de 54 477,51 euros.

Aux termes de l'article 1231-5 alinéa 2 du code civil, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Le caractère manifestement excessif de la peine peut notamment résulter de la comparaison de celle-ci avec le préjudice effectivement subi par le créancier, ou encore du cumul de l'indemnité avec d'autres charges majorant les coûts financiers supportés par le débiteur.

En l'espèce, l'indemnité de 4 358,20 euros réclamée par la SA Créatis apparaît manifestement excessive en ce qu'elle se cumule avec les indemnités de retard calculées sur plusieurs échéances avant la déchéance du terme ainsi qu'il ressort de l'historique du compte.

Cette indemnité sera en conséquence réduite à la somme de 900 euros.

M. [K] et Mme [W] seront condamnés solidairement au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux légal.

La sanction de déchéance du droit aux intérêts n'étant pas prononcée, il n'y a pas lieu de statuer spécifiquement sur l'application de la majoration du taux légal prévue par l'article L. 313-3 alinéa 1er du code monétaire et financier.

De surcroît, la capitalisation des intérêts n'est pas prévue en matière de crédit à la consommation, les sommes auxquelles le prêteur peut prétendre étant limitativement énumérées par la loi. La SA Créatis ne peut donc se prévaloir de la capitalisation des intérêts.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Succombant à l'instance, M. [K] et Mme [W] seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel.

Toutefois l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le droit proportionnel de recouvrement prévu par les articles R.444-3 tableau 3-1 et A.444-32 du code de commerce sera laissé à la charge du créancier conformément à l'article R.444-55 du même code et à l'article L111-8 du code des procédures civiles d'exécution.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt rendu par défaut, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction,

Infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne solidairement Mme [U] [W] et M. [R] [K] à payer à la SA Créatis la somme de 57 828,19 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,89 % l'an à compter du 9 juin 2022 sur la somme de 54 477,51 euros, et celle de 900 euros au titre de la clause pénale avec intérêts au taux légal ;

Déboute la SA Créatis de ses demandes au titre de la capitalisation des intérêts et de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum Mme [U] [W] et M. [R] [K] aux dépens de première instance et d'appel, sans qu'il y ait lieu de leur faire supporter le droit proportionnel mis à la charge du créancier par l'article R444-55 du code de commerce relatif au tarif des huissiers de justice.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 23/00355
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;23.00355 ?
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