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18/11/2008 | FRANCE | N°08/02480

France | France, Cour d'appel de Rouen, Ct0193, 18 novembre 2008, 08/02480


R.G. : 08/02480

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU 18 NOVEMBRE 2008

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DU HAVRE du 14 Novembre 2007

APPELANT :

Monsieur Philippe X...

...

50000 ST LO

comparant en personne,

assisté de Me Marie-José Y..., avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE :

Société PPG COATINGS

7, allée de la Plaine

76700 HARFLEUR

représentée par Me Bruno SAGON, avocat au barreau du HAVRE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application d

es dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 02 Octobre 2008 sans opposition des parties devant...

R.G. : 08/02480

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU 18 NOVEMBRE 2008

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES DU HAVRE du 14 Novembre 2007

APPELANT :

Monsieur Philippe X...

...

50000 ST LO

comparant en personne,

assisté de Me Marie-José Y..., avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE :

Société PPG COATINGS

7, allée de la Plaine

76700 HARFLEUR

représentée par Me Bruno SAGON, avocat au barreau du HAVRE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 02 Octobre 2008 sans opposition des parties devant Madame RAYNAL-BOUCHÉ, Conseiller, magistrat chargé d'instruire l'affaire, en présence de Monsieur MOUCHARD, Conseiller,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame PAMS-TATU, Président

Madame RAYNAL-BOUCHÉ, Conseiller

Monsieur MOUCHARD, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Monsieur CABRELLI, Greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 02 Octobre 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 Novembre 2008

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 18 Novembre 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame PAMS-TATU, Président et par Monsieur CABRELLI, Greffier présent à cette audience.

Engagé en qualité d'aide chimiste le 5 octobre 1976 par la société INTERNATIONAL CELOMER aux droits de laquelle se trouve la société PPG COATING, M. Philippe X... y est devenu après promotions successives responsable hygiène sécurité en juin 1998, au coefficient 400 de la convention collective, pour un salaire mensuel brut de 2.928,57 € à compter du 1er mars 2004.

Le site de production où il était affecté était classé "installations classées pour la protection de l'environnement soumis à autorisation" (ICPE).

Des difficultés sont apparues dans ses relations avec l'employeur en décembre 2005, caractérisées par des remarques émises sur son travail et, il s'est trouvé en arrêt pour maladie à compter du 23 décembre 2005 .

Il a bénéficié d'arrêts de travail successifs et, régulièrement convoqué à un entretien prééalable au licenciement prévu pour le 4 août 2006 , son licenciement lui a été notifié par lettre du 10 août 2006 pour :

... "Votre absence prolongée perturbe considérablement le fonctionnement de l'entreprise.

Vous savez à quel point la fonction "Hygiène Sécurité Environnement" est primordiale sur un site de production, assimilé SEVESO, employant une centaine de personnes...".

"N'ayant pas de candidat en interne pour assurer votre remplacement, ne pouvant pas mettre en danger la sécurité quotidienne de nos employiés et ayant reçu l'information qu'un Corporate Audit aura lieu en 2007, sur lequel il nous faut commencer à travailler, nous nous devons de pourvoir votre poste de façon durable et définitive...".

Il a saisi le conseil de prud'hommes du HAVRE lui demandant de condamner son employeur à lui payer un rappel de rémunération et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, par jugement du 14 novembre 2007 a été débouté de l'ensemble de ses demandes .

Régulièrement appelant de cette décision, faisant développer à l'audience ses conclusions remises au greffe le 18 avril 2008 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, M. X... demande à la cour de l'infirmer et de condamner la société PPG COATINGS à lui payer :

• 126.299 € à titre de dommages et intérêts,

• 6.070,42 € au titre des arriérés de salaire,

• 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

et à lui remettre les bulletins de paie rectifiés .

Il soutient principalement que :

- L'article L 122-45 du code du travail prohibe la rupture du contrat de travail en raison de l'état de santé .

- Le licenciement peut toutefois être prononcé lorsqu'il est fondé non sur la maladie du salarié mais sur la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les arrêts répétitifs et la nécessité de pourvoir à un remplacement définitif .

- Il est d'autre part admis par une jurisprudence constante que le remplacement définitif doit alors intervenir dans un délai raisonnable, compte tenu des spécificités de l'entreprise, de l'emploi concerné et des démarches faites par l'employeur .

- En l'espèce, dès fin mars un salarié avait été affecté pour traiter les problèmes d'hygiène et sécurité et que l'organisation interne de l'entreprise était garantie, son absence ne pouvait ainsi entraîner une désorganisation telle que le licenciement était indispensable.

- La société ne produit d'ailleurs aucun élément de nature à établir le motif qu'elle invoque .

- Pendant son arrêt de travail, il a d'ailleurs continué à collaborer et a fournir tous les éléments permettant à sa remplaçante qui avait toutes les compétences néécessaires de travailler normalement .

- Mme Z..., en dépit de la lettre datée du 21 juillet 2006 qui lui est attribuée, n'a été embauchée en contrat à durée indéterminée qu'au 1er janvier 2007 alors que le licenciement datait du mois d'août .

- Il ne peut être estimé que le remplacement est intervenu dans un délai raisonnable et, le licenciement a été quant à lui précipité et inspiré par un motif personnel tenant àà son âge et son ancienneté et dans le cadre d''une réorganisation décidée par l'entreprise .

- L'Audit Corporate devant intervenir en 2007 n'avait rien d'inattendu, il avait assumé le précéédent en 2004 et pouvait tout à fait assumer celui à venir si on lui avait laissé le temps de reprendre son poste.

- Son préjudice est particulièrement important alors que le licenciement est intervenu à l'âge de 56 ans, auquel il n'a plus aucune chance de retrouver un emploi et alors qu'il a passé trente années de services irréprochables pour le compte de la société, il était en droit d'espérer encore trois ans de salaire outre la participation et l'intéressement .

- Contrairement à ce qu'a estimé le conseil de prud'hommes, le coefficient 460 n'est pas réservé aux ingénieurs mais également ouvert aux cadres lorsqu'ils ont l''ancienneté requise et, la somme qu'il réclame à titre de rappel lui est bien due .

Faisant soutenir à l'audience ses conclusions remises au greffe le 19 juin 2008 auxquelles il convient de se reporter pour exposé exhaustif, la société PPG COATINGS demande outre la confirmation de la décision entreprise la condamnation de M. X... à lui payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1.000 € .

Elle fait pour l'essentiel valoir que :

- Elle avait envisagé de rompre le contrat de M. X... au regard de son mauvais état d'esprit à l'égard de son employeur et, constatant en juillet 2006 après sept mois d'absence et l'absence de perspective de reprise les perturbations résultant de cette absence, a décidé de mettre en place la rupture du contrat pour ce motif.

- La mention dans la lettre de licenciement d'une perturbation et de la nécessité de remplacement répond aux exigences de la loi .

- M. X... avait été absent 241 jours sous couvert de 9 arrêts de travail, alors qu'il tenait un poste particulièrement sensible, il revendique lui-même l'importance de ce poste pour réclamer un rappel de salaire .

- La perturbation apportée à la marche de l'entreprise est justifiée par les pièces versées aux débats .

- La remplaçante avait une qualification supérieure à la sienne et a fait connaître le 21 juillet qu'on lui avait proposé un contrat à durée déterminée dans une autre entreprise et souhaitait que son sort soit scellé.

- La confusion des mails adressés pendant son congé démontre bien que les problèmes de sécurité de l'entreprise devaient être suivis quotidiennement dans l'entreprise .

- Si M. X... indique qu'il aurait pu procéder à l'audit, après avoir repris le travail, il n'en justifie pas .

- La convention collective ne prévoyait l'attribution du coefficient 460 qu'aux cadres ayant un diplôme d'ingénieur, ce qui n'était pas le cas de M. X... mais celui de Mme Z..., sa remplaçante.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il est constant que M. X... a été absent en raison d'arrêts pour maladie successifs du 23 décembre 2005 à la rupture du contrat de travail .

Si la maladie d'un salarié ne peut justifier son licenciement, il en va autrement lorsque le fonctionnement de l'entreprise est perturbé par son absence prolongée ou ses absences répétées et que l'employeur est tenu de pourvoir à son remplacement définitif.

Il n'est pas contestable que compte tenu notamment de la taille de l'entreprise et de son type d'activité relevant des installations classées IPEC, le responsable Hygiène et Sécurité y tient un poste important pour sa bonne marche .

Cependant, il n'est pas fourni de pièces de nature à démontrer que des perturbations d'une particulière importance auraient été engendrées par l'absence de M. X... ; l'échange des messages informatiques montre seulement que jusqu'en fin mars 2006, les attributions avaient été accomplies par d'autres salariés de l'entreprise, avec la collaboration de M. X... qui continuait malgré son arrêt pour maladie à communiquer avec eux .

Les attestations fournies par M. A... (directeur mondial opérations hygiène sécurité et qualité) et M. B... (dont le titre anglais montre qu'il a trait à la santé la sécurité et la direction) soulignent l'importance qu'avaient à leur sens les activités dont était chargé M. X... et que d'une manière générale, son absence prolongée ne pouvait qu'être dommageable, mais ne donnent aucun exemple ou illustration de perturbation avérée ou même imminente en l'espèce.

La teneur du « Corporate audit » prévu n'est quant à elle pas précisée ce qui exclut de considérer que l'absence dans la période précédente de M. C... aurait été de nature à entraîner des difficultés particulières.

Il n'est par ailleurs pas communiqué d'éléments relatifs à d'éventuelles difficultés rencontrées pour trouver un remplacement au salarié absent, et la seule indication concernant la situation de Mme Z... est contenue dans sa lettre datée du 21 juillet 2006 où elle indique travailler « en intérim »dans l'entreprise depuis fin mars .

Il s'en déduit qu'il n'a pas été difficile pour la société de trouver une salariée, dont elle ne conteste pas qu'elle lui donnait entière satisfaction, et qu'elle a embauchée dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée par la suite, pour effectuer le remplacement .

Le fait que Mme Z... ait, le 21 juillet, écrit qu'un poste fixe lui avait été proposé dans une autre société et interrogé l'entreprise sur ses intentions à son égard n'implique pas, alors que rien ne justifie qu'il aurait été difficile alors de trouver un nouveau salarié temporaire, que le remplacement définitif de M. X... était nécessaire .

D'ailleurs, l'engagement de Mme Z... en contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2007, selon proposition d'engagement du 20 décembre précédent, n'est pas intervenu dans un délai raisonnable après la rupture de contrat de travail de M. X... alors qu'en plus de quatre mois, il n'est ni justifié ni même soutenu que l'employeur se serait livré à une quelconque recherche et que la salariée qu'il a embauchée à titre définitif était déjà connue de lui et à son service sous un autre statut .

Il devra dans ces conditions être considéré que le licenciement de M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse .

M. X... avait une ancienneté de près de trente ans dans l'entreprise et avait un salaire mensuel brut de l'ordre de 3.000 € ; licencié à l'âge de 56 ans, il avait peu de chances de trouver un nouvel emploi mais bénéficiait jusqu'à l'âge, peu éloigné, auquel il pourrait bénéficier de la retraite d'une prise en charge par les organismes prestataires d'allocations chômage ; il a également, en raison des circonstances de la rupture subi un préjudice d'ordre moral .

Son préjudice résultant du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse sera réparé par l'allocation de la somme de 90.000 €.

Eu égard à son ancienneté supérieure à deux ans et à l'effectif habituel de l'entreprise au moins égal à 11 salariés , il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société PPG COATINGS aux organismes sociaux des allocations chômages versées à M. X... à la suite de son licenciement dans la limite de six mois d'indemnité .

La convention collective de la chimie dispose que « le coefficient 460 est le seuil d'accueil dans l'avenant no 3 des salariés du groupe 4 . Les ingénieurs et cadres sont classés au coefficient 460 au plus tard 6 ans après leur première affectation à une fonction de l'avenant no 3 dans la profession ».

Il ressort des pièces versées que M. X... a bénéficié d'une affectation à une fonction de l'avenant 3 en juin 1998, les indications de l'article 1 C de l'accord du 10 août ne sont par ailleurs pas cumulatives et M. X..., cadre non ingénieur, devait bénéficier du coefficient 460 à compter de juin 2004 ; il a pourtant été rémunéré jusqu‘à la rupture selon le coefficient 400, et justifie par les calculs qu'il produit qu'il lui est dû à titre de rappel de salaire depuis cette date et rappel d'indemnité de licenciement la somme de 6.070,42 €.

Il n'existe pas en l'espèce d'éléments de nature à faire exception aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile , la Sté PPG COATINGS sera de ce chef condamnée à payer à M. X... la somme de 1.500 €.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme la décision entreprise,

Condamne la société PPG COATINGS à payer à M. X... :

- 90.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 6.070,42 € à titre de rappel de salaire et indemnité de licenciement,

- 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamne à rembourser aux organismes concernés les allocations chômage versées à M. X... à la suite de son licenciement dans la limite de six mois d'indemnités,

La condamne aux dépens .

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Ct0193
Numéro d'arrêt : 08/02480
Date de la décision : 18/11/2008

Références :

ARRET du 06 octobre 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 octobre 2010, 08-45.462, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes du Havre, 14 novembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rouen;arret;2008-11-18;08.02480 ?
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