La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/04/2022 | FRANCE | N°21/03871

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 27 avril 2022, 21/03871


N° RG 21/03871 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I4VR







COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 27 AVRIL 2022



EN OMISSION DE STATUER









DÉCISION DÉFÉRÉE :



19/01316

Cour d'appel de Rouen du 22 septembre 2021





DEMANDEUR à la requête :



Sa ETABLISSEMENTS ANDRE BONDET

14 rue de la Bienne ZI Le Lioux

01590 DORTAN



représentée par Me Vincent MOSQUET de la Selarl LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au bar

reau de Rouen et assistée de Me LOPEZ substituant Me Gérard LEGRAND de la Selas FIDUCIAL LEGAL BY LAMY, avocat au barreau de Lyon







DEFENDEURS à la requête :



Madame [B] [L] épouse [W]

née le 07 juillet 1943 à ...

N° RG 21/03871 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I4VR

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 27 AVRIL 2022

EN OMISSION DE STATUER

DÉCISION DÉFÉRÉE :

19/01316

Cour d'appel de Rouen du 22 septembre 2021

DEMANDEUR à la requête :

Sa ETABLISSEMENTS ANDRE BONDET

14 rue de la Bienne ZI Le Lioux

01590 DORTAN

représentée par Me Vincent MOSQUET de la Selarl LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me LOPEZ substituant Me Gérard LEGRAND de la Selas FIDUCIAL LEGAL BY LAMY, avocat au barreau de Lyon

DEFENDEURS à la requête :

Madame [B] [L] épouse [W]

née le 07 juillet 1943 à Angerville

1649 route de Saint Jean

76690 SAINT ANDRE SUR CAILLY

représentée par Me Caroline ROTH de la Selarl NOMOS Avocats, avocat au barreau de Dieppe

Monsieur [C] [W]

né le 17 novembre 1936 à Mont Saint Aignan

1649 route de Saint Jean

76690 SAINT ANDRE SUR CAILLY

représenté par Me Caroline ROTH de la Selarl NOMOS Avocats, avocat au barreau de Dieppe

Monsieur [K] [H]

né le 14 décembre 1957 à Honfleur

213 rue des Houssayes

76520 LA NEUVILLE CHANT D'OISEL

représenté par Me Renaud DE BEZENAC de la Selarl DE BEZENAC & Associés, avocat au barreau de Rouen

Madame [A] [H]

née le 20 septembre 1958 à Rouen

213 rue des Houssayes

76520 LA NEUVILLE CHANT D'OISEL

représentée par Me Renaud DE BEZENAC de la Selarl DE BEZENAC & Associés, avocat au barreau de Rouen

Monsieur [P] [N]

ès qualités de mandataire liquidateur de la société ECO TENDANCE

13 rue de l'Hôtel de Ville

82000 MONTAUBAN

représenté et assisté par Me Marc ABSIRE de la Selarl DAMC, avocat au barreau de Rouen

Sa MMA IARD

14 boulevard Marie et Alexandre Oyon

72030 LE MANS CEDEX

représentée par Me Stéphane SELEGNY de la Selarl AXLAW, avocat au barreau de Rouen et assistée par Me Iris VOGEDING du cabinet HFW, avocat au barreau de Paris

Sa MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

14 boulevard Marie et Alexandre Oyon

72030 LE MANS CEDEX

représentée par Me Stéphane SELEGNY de la Selarl AXLAW, avocat au barreau de Rouen et assistée par Me Iris VOGEDING du cabinet HFW, avocat au barreau de Paris

Société AMLIN INSURANCE SE

Koning Albert II - Iaan 37

1030 BRUSSEL BELGIQUE

représentée et assistée par Me Catherine LETRAY de la Scp LENGLET, MALBESIN & Associés, avocat au barreau de Rouen plaidant par Me Claire DEWERDT

Sa AXA FRANCE IARD

313 Terrasses de l'Arche

92000 NANTERRE

représentée par Me Caroline SCOLAN de la Selarl GRAY SCOLAN, avocat au barreau de Rouen

Sa BEOLOGIC

Jolainstraat 44

8554 ZWEVEGEM (Belgique)

représentée et assistée par Me Anne-France PETIT, avocat au barreau de Rouen

Sa INTER MUTUELLES ENTREPRISES

66 rue de Sotteville

76100 ROUEN

représentée et assistée par Me Marc ABSIRE de la Selarl DAMC, avocat au barreau de Rouen

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 21 février 2022 sans opposition des avocats devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,

M. Jean-François MELLET, conseiller,

Mme Magali DEGUETTE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme [R] [T],

DEBATS :

A l'audience publique du 21 février 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 avril 2022.

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 27 avril 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.

*

* *

Par arrêt en date du 22 septembre 2021, la cour d'appel de Rouen a infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a :

* condamné in solidum la société Eco tendance, sous forme de fixation au passif chirographaire, la société Établissements André Bondet et la société MMA Iard à relever la société Axa France Iard indemne de ces condamnations et dit que dans les rapports entre les coobligés la charge définitive serait répartie à concurrence d'un tiers pour la société Eco tendance, sous forme de fixation au passif et deux tiers pour la société Établissements André Bondet in solidum avec son assureur la société MMA Iard,

* condamné in solidum la société Eco tendance, sous forme de fixation au passif chirographaire, la société Établissements André Bondet et la société MMA Iard à relever la société Axa France Iard indemne de ces condamnations au titre des frais irrépétibles et des dépens et dit que dans les rapports entre coobligés la charge définitive serait répartie à concurrence d'un tiers pour la société Eco tendance, sous forme de fixation au passif et deux tiers pour la société Établissements André Bondet in solidum avec son assureur la société MMA Iard

* condamné la société MMA Iard à garantir la société Établissements André Bondet de l'intégralité des condamnations prononcées contre elle,

- confirmé le jugement pour le surplus,

Et statuant à nouveau,

- condamné in solidum la société Eco tendance sous forme de fixation au passif chirographaire, la société Établissements André Bondet, la société Beologic et la société MS Amlin insurance à relever la société Axa France Iard indemne des condamnations prononcées contre elle au profit des époux [H] et des époux [W],

- fixé dans les rapports entre les coobligées la contribution définitive de chacune comme suit :

. la société Eco tendance à 20 %

. la société Etablissements Andre Bondet à 60 %

. la société Béologic et son assureur, la société MS Amlin insurance in solidum à

20 %,

- condamné in solidum les sociétés MMA Iard et Axa France Iard à payer à M. [K] [H] et Mme [A] [H], son épouse d'une part, à M. [C] [W] et Mme [B] [L], son épouse d'autre part, la somme de

2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties pour le surplus,

- condamné in solidum la société Eco tendance sous forme de fixation au passif chirographaire, la société Établissements André Bondet, la société Béologic et la société MS Amlin insurance à relever la société Axa France Iard indemne au titre des frais irrépétibles et des dépens de première instance et dit que dans les rapports entre les coobligés la charge définitive sera répartie à concurrence de 20 % pour la société Eco tendance, sous forme de fixation au passif, de 60 % pour la société Etablissements André Bondet, de 20 % pour la société Béologic in solidum avec son assureur la société MS Amlin insurance.

Par déclaration reçue le 7 octobre 2021, la Sa Établissements André Bondet a présenté une requête au visa de l'article 463 du code de procédure civile, et après avoir rappelé que la formule générale du débouté n'emportait pas décision sur des chefs non motivés, en ce que la cour aurait omis de statuer sur deux des chefs de demandes formulées par celle-ci, à savoir :

- la garantie des sociétés MMA Iard au titre des dommages immatériels non consécutifs,

- la garantie des sociétés MMA Iard au titre des frais de dépose et de repose des lames.

 

Par dernières conclusions notifiées le 8 février 2022, elle rappelle les termes des conclusions, soumises à la cour le 9 février 2021 et rappelées par l'arrêt, par lesquelles elle demandait à la juridiction, au visa des articles 1231-1, 1240 et 1641 du code civil, de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que les sociétés MMA étaient tenues à garantir les frais de remplacement des lames et les dommages immatériels non consécutifs dans la mesure où le plafond est reconstitué chaque année et que les frais du cabinet Erget ne sont pas imputables sur le plafond,

y ajoutant,

- juger que les frais de dépose-repose des lames sont à la charge de la société MMA,

- condamner la société MMA à la garantir de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre, et restant définitivement à sa charge.

Elle expose que la cour a infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la société MMA Iard à la garantir de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre au motif que la police souscrite auprès de la société MMA excluait toute garantie au titre des frais de remplacement des lames ; que la cour ne semble avoir statué que sur la garantie de la société MMA Iard au titre des frais de remplacement des lames, ainsi qu'il ressort de la lecture de l'arrêt sans se prononcer sur les garanties de l'assureur :

- au titre des dommages immatériels non consécutifs incluant les frais de défense (article 700 du CPC et dépens), les frais d'expertise et le préjudice de jouissance,

- au titre des frais de dépose et de repose des lames, évalués à la somme de

6 121,80 euros TTC pour les époux [H] et à la somme de 8 344,80 euros TTC pour les époux [W], ces frais étant distincts des frais de remplacements des lames qui correspondent au coût des matériaux fournis.

Elle conteste l'analyse des sociétés MMA Iard qui considèrent que le défaut de motifs au sens de l'article 455 du code de procédure civile n'ouvre que la possibilité d'un pourvoi et soutient que :

- un défaut de motifs est caractérisé lorsque la cour ne répond pas à un moyen, lequel se définit comme les raisons de fait ou de droit dont les parties se prévalent pour fonder leurs demandes,

- une omission de statuer est caractérisée lorsqu'il n'a pas été répondu à une demande, comme en l'espèce.

 

Par conclusions notifiées le 26 novembre 2021, la Sa MMA Iard et la société d'assurances mutuelles MMA Iard soutiennent qu'en infirmant le jugement en ce qu'il avait condamné les MMA à garantir la société Etablissements André Bondet de ses condamnations, et en condamnant les défendeurs, à l'exception des MMA, tout en déboutant les parties pour le surplus de leurs demandes, la cour a implicitement mais nécessairement fait sienne l'argumentation des MMA sur le rejet de la demande de condamnation formée par la société Établissements André Bondet, quel que soit son fondement.

Elle explique qu'en réalité, celle-ci reproche à la cour, non pas tant une omission de statuer, que le débouté de ses prétentions litigieuses sans motivation suffisante, ce qui constitue un défaut de motifs au sens de l'article 455 du code de procédure civile. Or, le défaut de réponse à conclusions (absence, insuffisance ou contrariété des motifs) ne peut être sanctionné sous couvert de réparation d'omission de statuer ; que dès lors, la société Établissements André Bondet devra le cas échéant former un pourvoi en cassation pour faire valoir ses prétentions relatives à un défaut de motivation allégué, la cour n'ayant pas omis de statuer sur les chefs de demandes visés.

A titre subsidiaire, si le principe de l'omission était retenu, la cour doit reprendre les moyens défendus dans leurs conclusions n°4 signifiées le 16 mars 2020 et débouter la société Établissements André Bondet de ses demandes. L'omission de statuer n'affecte pas l'arrêt en ce qu'il a jugé que les frais nécessaires pour remplacer les biens fournis et le montant du remboursement des produits fournis font l'objet d'une exclusion de garantie de sorte que MMA ne saurait être condamnée à garantir ces postes de préjudice. L'arrêt de la cour est parfaitement motivé sur ce point.

Elle soutient que la garantie dommages immatériels non consécutifs est épuisée et que la garantie des frais de dépose-repose n'est pas mobilisable. Si la cour ne retenait pas ces éléments, elle demande qu'il soit statué sur les appels en garanties dirigés contre la société Béologic et son assureur la société MS Amlin Insurance.

En toute hypothèse, la cour rectifiera son arrêt en ce qu'il a condamné les MMA à verser 2 000 euros aux époux [H] et [W] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, in solidum avec Axa France Iard, au motif que "bien que n'ayant pas gain de cause dans l'instance, [les époux [H] et [W]] ont été appelés à la procédure d'appel en raison du recours formé par les MMA et ont dû développer une argumentation face à l'appel incident de la société AXA France Iard".

Cette décision est en effet contradictoire avec les trois autres arrêts rendus le même jour par la cour d'appel de Rouen dans ce sinistre sériel, qui n'ont pas condamné les MMA au paiement des frais irrépétibles. En outre, l'article 700 du code de procédure civile prévoit le paiement des frais irrépétibles par la partie ayant perdu son procès ou étant tenue aux dépens. Or en l'espèce, les MMA ont obtenu gain de cause.

Par conclusions notifiées le 21 février 2022, la Sa Béologic demande à la cour de :

à titre principal,

- statuer ce que de droit quant à la requête en omission de statuer de la société Établissements André Bondet,

- rejeter la requête en omission de statuer formée par les sociétés MMA Iard à son encontre,

à titre subsidiaire,

- condamner la société MS Amlin Insurance à la garantir et à la relever indemne de toute condamnation prononcée contre elle au profit des sociétés MMA Iard,

en tout état de cause,

- condamner les sociétés MMA Iard à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les dépens devant rester à la charge du Trésor public.

Elle fait valoir que la requête en omission de statuer ne peut viser à statuer sur un chef de demande que sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs ; qu'en l'espèce, la cour a statué sur le partage de responsabilité et ne doit pas rejuger l'affaire sur sa responsabilité désormais fixée ; qu'il ne peut s'agir comme tente de l'obtenir la société Établissements André Bondet d'une réformation de l'arrêt.

Par conclusions notifiées le 18 février 2022, la société de droit belge MS Amlin Insurance demande qu'il soit statué ce que de droit sur la demande en omission mais le rejet de la demande présentée par les sociétés MMA Iard à titre subsidiaire tendant à statuer sur son appel en garantie contre les sociétés Béologic et MS Amlin Insurance pour compléter la décision déférée.

Elle souligne que cette prétention n'est fondée sur aucun défaut de motifs ou omission de statuer.

Par conclusions notifiées le 10 février 2022 d'une part, le 18 février 2022 d'autre part, les époux [H] et les époux [W] ont respectivement demandé le rejet de la demande en erreur matérielle formée par les sociétés MMA Iard au titre des frais irrépétibles.

Les autres parties n'ayant pas d'intérêt au litige sur omission de statuer n'ont pas conclu.

L'affaire a été fixée et appelée à l'audience du 21 février 2022.

MOTIFS

Sur l'omission de statuer

L'article 463 du code de procédure civile dispose que la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

Par dernières conclusions notifiées le 9 février 2021, la société Établissements André Bondet a formé, dans le dispositif, une demande de confirmation du jugement prononcé le 4 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Rouen qui a condamné la société MMA Iard à la garantir de l'intégralité des condamnations prononcées contre elle au titre de la garantie des frais de remplacement des lames et des dommages immatériels consécutifs et l'ajout de la condamnation de l'assureur aux frais de dépose et de repose des lames.

Elle a formé dès lors trois chefs de demandes développées dans la discussion :

- en page 46, la garantie au titre des frais de remplacement des lames, prétention à laquelle la cour a répondu en l'écartant,

- en page 48, la garantie au titre des dommages immatériels non consécutifs qui n'est pas évoquée dans les motifs de la décision discutée,

- en page 53, la garantie au titre des frais de dépose et de repose.

La cour a motivé comme suit sa décision s'agissant de l'exclusion de garantie invoquée par l'assureur :

Il résulte de la police responsabilité civile n° 114 443 119 signée le 7 novembre 2005 par la société Établissements André Bondet que l'assurée a souscrit une assurance garantissant les dommages causés aux tiers sans couvrir les dommages causés au produit fourni qui restent à la charge de l'assurée. En effet, l'article 2.1.2 page 13 de l'avenant et le titre II-A-1 n° 25 page 14 de la police précisent que l'exclusion porte sur « les frais nécessaires pour remplacer les biens fournis par l'assuré ainsi que le montant du remboursement total ou partiel des produits, matériels, travaux ou prestations défectueux lorsqu'il est dans l'obligation de procéder à son remplacement ». Sur le fondement de la garantie des vices cachés ou de la responsabilité délictuelle, la MMA Iard ne garantit pas les matériaux fournis.

- Sur la garantie au titre des frais de dépose et de repose

Dans ses conclusions, la société Établissements André Bondet s'est bornée au visa d'une affaire de même nature jugée à Toulouse le 30 novembre 2018 dans laquelle l'assureur avait admis sa garantie ; elle a rétorqué que l'argument de l'assureur consistant à écarter cette garantie dans la mesure où ces frais n'auraient pas été engagés par la société assurée et alors que sa responsabilité n'était pas établie était inopérant.

L'assureur se réfère aux exclusions de garanties prévues à l'article 2.1.2 page 13 mais distinctes et ainsi libellées : « Les frais de dépose et de repose Est toutefois pris en charge le remboursement des frais de dépose et de repose des produits défectueux fournis par l'assuré dès lors qu'ils sont engagés par lui, sous réserve que sa responsabilité soit dûment établie. »

Les motifs de l'arrêt n'ont pas visé ce chef de demande constituant un poste différent de la garantie susvisée de sorte que l'omission est caractérisée. Elle ne peut être couverte par la décision prise dans le dispositif du débouté des demandes qui ne peut s'appliquer qu'aux prétentions examinées.

Toutefois, la clause qu'il s'agit d'appliquer est claire et insusceptible d'interprétation. Il s'agit pour l'assuré d'obtenir un remboursement de ses frais et non une contrepartie à l'obligation d'indemniser le tiers. La demande dirigée contre l'assureur ne peut qu'être rejetée, le jugement étant bien infirmé quant à cette prétention.

- Sur la garantie au titre des dommages immatériels non consécutifs

Par ailleurs, est réclamé la mise en 'uvre de la garantie des dommages immatériels non consécutifs sur laquelle la cour n'a pas davantage statué. L'omission est caractérisée dans les mêmes conditions que précédemment.

L'assureur invoque l'épuisement de la garantie sollicitée. Il expose que le montant de la garantie couvrant « tout dommage immatériel consécutif à des dommages corporels ou matériels non garantis par le présent contrat » est plafonné à la somme de 305 000 euros « par sinistre pour l'ensemble des sinistres d'une même année d'assurance et pour l'ensemble des assurés » ; que les frais de défense ont, en l'espèce, été pris en charge à hauteur de la somme de 104 027,42 euros au titre des frais et honoraires de l'avocat personnel de la société assurée et de celle de 205 119,12 euros au titre des frais d'expertises amiables et judiciaires soit un total de 309 146,54 euros ; qu'en conséquence, la garantie est épuisée. Elle précise que le plafond s'applique à l'ensemble du sinistre et non par année et vise des décisions différentes relatives à ce sinistre sériel sur le plan national ayant fait ce constat pour débouter la société assurée.

Le tribunal a considéré que la police n'était pas produite, que la reconstitution de la garantie se faisait chaque année, que les frais d'expertise technique ne pouvaient pas être imputés sur le plafond de la garantie.

Devant la cour, au titre de la période de référence, la société Établissements André Bondet a soutenu que le contrat serait vidé de sa substance si une interprétation différente était retenue à la lumière de trois clauses contradictoires ainsi libellées :

- les montants du plafond de garantie sont exprimés par sinistre pour l'ensemble des sinistres d'une même année d'assurance,

- lorsqu'ils sont exprimés par année d'assurance, le montant des garanties constitue la limite de l'engagement de l'assureur pour l'ensemble des conséquences dommageables des sinistres portés à sa connaissance au cours d'une même année d'assurance,

- l'ensemble des réclamations, même si elles s'échelonnent dans le temps, dès lors qu'elles se rattachent à des dommages résultant d'un même fait générateur ou d'une même cause technique initiale, constitue un seul et même sinistre dont la date est celle correspondant à la première réclamation formulée ou à la déclaration de l'assurée.

Elle demande l'exclusion des frais du cabinet d'experts techniques Erget puisqu'il n'est pas démontré que son intervention ait permis de traiter à l'amiable un nombre important de dossiers et que l'assuré était avisé des conditions d'intervention des experts.

La police d'assurance souscrite définit le sinistre en son paragraphe 2.3.2 : « Sont considérés comme formant un seul et même sinistre, quel que soit le nombre de lésés, les réclamations résultant d'une même erreur, malfaçon ou faute quelconque. Chaque sinistre est imputé à l'année d'assurance au cours de laquelle la première réclamation a été présentée. ».

L'intervention de l'assureur repose sur un fait générateur soit la réclamation du tiers soit la déclaration de son assuré portant sur un sinistre dont l'année de révélation est identifiée. Le plafond de la garantie s'applique à ce sinistre qui a pour origine la production défectueuse de la société assurée. En application du contrat, les multiples procédures qui ont pour origine la même défaillance de l'assuré correspondent au même sinistre de sorte que les coûts engagés sont additionnés et ne peuvent excéder le plafond défini par le contrat. Le plafond ne peut dès lors se reconstituer chaque année au gré de nouvelles déclarations correspondant au seul sinistre initial tel que défini par la police. En effet, le risque couvert en cas de litiges sériels n'est pas déterminé par le nombre de réclamants et donc lié au coût provoqué par la multiplicité de litiges mais par la même défaillance de l'entreprise.

Une telle analyse n'a pas pour effet de mettre à néant le contrat d'assurance mais intègre toute la portée de la convention, l'équilibre économique entre les parties et le contrôle nécessaire du risque financier supporté par l'assureur au regard des primes versées par l'assuré.

Les clauses ne sont dès lors pas contradictoires mais définissent les contours de la garantie.

Quant à l'intervention du cabinet d'experts Erget, la société Établissements André Bondet a bénéficié de l'intervention de ce professionnel au cours des différentes expertises mises en 'uvre.

Compte tenu des multiples procédures engagées depuis le début des années 2010, de sa qualité d'industriel, particulièrement avisé des particularités de la production mise en cause, de la complexité relative du sujet, de la présence constatée à la fois physiquement lors des opérations et à la lecture des différents rapports d'expertise des membres de ce cabinet, la société assurée n'ignorait pas le rôle, les modalités d'intervention, les coûts générés par la mission confiée. Sur les demandes chiffrées précisément par les clients, la société Établissements André Bondet avait la faculté d'initier des accords ou d'adhérer à des démarches amiables suscitées par d'autres. Elle avait la faculté de mettre fin à la mission pour son compte sur demande auprès de son assureur.

Elle ne soutient dès lors pas de façon probante son argumentation en vue d'exclure les frais de ce cabinet de la garantie accordée par son assureur.

Les sociétés MMA Iard justifient de la dépense engagée de plus de 305 000 euros. La demande de garantie au titre des dommages immatériels non consécutifs ne peut qu'être rejetée, le jugement étant à ce titre infirmé.

Les demandes formées contre les sociétés Béologic et MS Amlin Insurance, son assureur sont sans objet.

Sur l'erreur matérielle

L'article 462 du code de procédure dispose que les erreurs matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.

L'arrêt discuté comporte à la fois une motivation et un dispositif qui concordent quant à la disposition relative aux frais irrépétibles auxquels sont condamnées in solidum les sociétés MMA Iard et la société Axa France Iard de sorte qu'il n'existe pas d'erreur matérielle exigeant une rectification au sens de l'article 462 du code de procédure civile.

La demande formée à ce titre par les sociétés MMA Iard est rejetée.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dépens resteront à la charge du Trésor public.

L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Béologic.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

Fait droit à la requête formée en omission de statuer portant sur les chefs de demandes suivants :

- la garantie au titre des frais de dépose et de repose,

- la garantie au titre des dommages immatériels non consécutifs,

Et statuant sur ces chefs,

Infirme le jugement entrepris et déboute la Sa Établissements André Bondet de ses demandes en garantie dirigée contre son assureur, les sociétés MMA Iard,

Rejette la requête en erreur matérielle formée par les sociétés MMA Iard,

Déboute la Sa Béologic de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

Le greffier,La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 21/03871
Date de la décision : 27/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-27;21.03871 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award