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15/03/2023 | FRANCE | N°21/02627

France | France, Cour d'appel de Rouen, 1ère ch. civile, 15 mars 2023, 21/02627


N° RG 21/02627 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I2A6





COUR D'APPEL DE ROUEN



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 15 MARS 2023







DÉCISION DÉFÉRÉE :



19/01735

Tribunal judiciaire d'Evreux du 11 mai 2021



APPELANTS :



Monsieur [E] [P]

né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 6]

[Adresse 10]

[Localité 6]



représenté et assisté par Me Olivier COTE de la SELARL COTE JOUBERT PRADO, avocat au barreau de l'Eure



Madame [B] [G] Ã

©pouse [P]

née le [Date naissance 8] 1959 à [Localité 11]

[Adresse 10]

[Localité 6]



représentée et assistée par Me Olivier COTE de la SELARL COTE JOUBERT PRADO, avocat au barreau de l'Eure





INTIMES :

...

N° RG 21/02627 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I2A6

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 15 MARS 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

19/01735

Tribunal judiciaire d'Evreux du 11 mai 2021

APPELANTS :

Monsieur [E] [P]

né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 6]

[Adresse 10]

[Localité 6]

représenté et assisté par Me Olivier COTE de la SELARL COTE JOUBERT PRADO, avocat au barreau de l'Eure

Madame [B] [G] épouse [P]

née le [Date naissance 8] 1959 à [Localité 11]

[Adresse 10]

[Localité 6]

représentée et assistée par Me Olivier COTE de la SELARL COTE JOUBERT PRADO, avocat au barreau de l'Eure

INTIMES :

Maître Nathalie LEBOUCHER de la Selarl FHB

ès qualités de mandataire liquidateur de la Sci du Fort de Querqueville

[Adresse 4]

[Localité 7]

représenté par Me Nelly LEROUX-BOSTYN, avocat au barreau de l'Eure

Monsieur [H] [K]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 12]

[Adresse 15]

[Localité 3]

représenté par Me Vincent MESNILDREY de la SCP MESNILDREY LEPRETRE, avocat au barreau de l'Eure

Madame [L] [Y] épouse [K]

née le [Date naissance 8] 1970 à [Localité 14]

[Adresse 9]

[Localité 5]

représentée par Me Vincent MESNILDREY de la SCP MESNILDREY LEPRETRE, avocat au barreau de l'Eure

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 7 décembre 2022 sans opposition des avocats devant M. Jean-François MELLET, conseiller, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,

M. Jean-François MELLET, conseiller,

Mme Magali DEGUETTE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER,

DEBATS :

A l'audience publique du 7 décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 1er mars 2023, date à laquelle le délibéré a été prorogé au 15 mars 2023.

ARRET :

CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement le 15 mars 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Les 3 et 5 octobre 2013, M. [E] [P] et Mme [B] [G], son épouse d'une part, M. [H] [K] et Mme [L] [Y], son épouse d'autre part, ont créé la Sci du Fort de Querqueville.

Le capital de la société est réparti ainsi qu'il suit :

- M. [E] [P] : 10 %

- Mme [B] [P] : 40 %

- M. [H] [K] : 10 %

- Mme [L] [K] : 40 %.

Par acte authentique du 27 mars 2014, la Sci du Fort de Querqueville a acquis de l'Etat un ensemble immobilier situé sur la commune de [Adresse 13], moyennant le prix de 50 000 euros.

A la suite d'une mésentente entre associés, le tribunal de grande instance d'Evreux a notamment, par jugement du 8 décembre 2015, prononcé la dissolution anticipée de la Sci du Fort de Querqueville, ordonné l'ouverture des opérations de liquidation, désigné à cette fin la Selarl FHB, en qualité de mandataire liquidateur de la Sci du Fort de Querqueville, et ordonné la vente sur licitation de l'immeuble sur une mise à prix de 50 000 euros.

Suivant adjudication du 15 mai 2017, le bien a été vendu au prix de 500 000 euros.

Me [X], membre de la Selarl FHB, ne parvenant pas à clôturer les opérations de liquidation à raison du refus des associés d'approuver les comptes pour 2014 et 2015, elle les a fait assigner par acte du 9 mai 2019.

Par jugement du 11 mai 2021, le tribunal judiciaire d'Evreux a :

- dit que la facture n° 187 du 11 avril 2014 d'un montant rectifié de 14 811,72 euros est intégrée aux comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2014 ;

- approuvé les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2014 ;

- dit que les factures FA 00229, 00230, 00231, 00232, 00233, 00234, 00235, 00236, 00237 pour un montant total de 51 422,44 euros sont intégrées dans les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2015 ;

- approuvé les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2015 ;

- ordonné l'apurement du passif de la Sci du fort de Querqueville ;

- ordonné le remboursement aux associés du capital versé sur leurs parts sociales et non amorti ;

- ordonné la répartition du boni de liquidation au prorata du nombre de parts sociales des associés, à savoir :

. M. [E] [P] : 10 %

. Mme [B] [G] épouse [P] : 40 %

. M. [H] [K] : 10 %

. Mme [L] [Y] épouse [K] : 40 %

- ordonné la clôture de la liquidation de la Sci du Fort de Querqueville ;

- débouté M. [H] [K] et Mme [L] [Y], son épouse du surplus de leurs demandes ;

- débouté M. [E] [P], Mme [B] [G], son épouse du surplus de leur demande ;

- condamné M. [H] [K] et Mme [L] [Y], son épouse à la moitié des dépens de la présente instance ;

- condamné M. [E] [P] et Mme [B] [G], son épouse à la moitié des dépens de la présente instance.

Par déclaration reçue au greffe le 24 juin 2021, M. et Mme [P] ont interjeté appel de la décision.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 18 février 2022, M. [E] [P] et Mme [B] [G], son épouse demandent à la cour d'appel d'infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes ayant pour objet d'écarter des comptes de l'exercice 2014 de la Sci du Fort de Querqueville la facture FA 187 du 11 avril 2014 émise par la Sarl Etablissement X. [K] d'un montant de 15 0277 euros et des comptes de l'exercice 2015 les factures FA factures FA 229, FA 230, FA 231, FA 232, FA 233, A 234, FA 235, FA 236 et FA 237 pour un montant total de

51 422,44 euros et statuant à nouveau de :

- débouter M. et Mme [K] de leur demande d'homologation des bilans et comptes de résultat 2014 et 2015 tels qu'établis par la Sarl Cogebs, cabinet d'expertise comptable ;

- ordonner à Me [X] de donner instruction à la Sarl Cogebs d'écarter des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2014 la facture FA 187 du 11 avril 2014 émise par la Sarl Etablissement X. [K] d'un montant de 15 0277 euros ;

- ordonner à Me [X] de donner instruction au cabinet d'expertise comptable COGEBS d'écarter des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2015 les factures FA factures FA 229, FA 230, FA 231, FA 232, FA 233, A 234, FA 235, FA 236 et FA 237 pour un montant total de 51 422,44 euros ;

- débouter M. et Mme [K] du surplus de leurs demandes ;

- débouter M. et Mme [K] de leur appel incident ;

- confirmer le jugement du 11 mai 2021 en ce qu'il a débouté M. et Mme [K] de leur demande d'intégration à leur compte-courant dans la Sci du Fort de Querqueville de la somme de 2 671,20 euros ;

- condamner M. et Mme [K] à payer à M. et Mme [P] une somme de

3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. et Mme [K] aux dépens de l'instance avec distinction au profit de Me Olivier Cote, avocat associé de la Selarl [V] Joubert Prado.

Ils soutiennent en substance ce qui suit :

- compte tenu de la cogérance qui avait été instituée entre les associés, M. et Mme [K] ne pouvaient engager sans l'approbation de leurs deux autres associés des dépenses d'un montant supérieur à 15 000 euros, conformément à l'article figurant en page 11 des statuts ;

- la facture d'un montant de 15 027 euros doit être déduite des comptes de l'exercice 2014, puisqu'elle excède le plafond ;

- plusieurs factures sont imprécises et elles n'apportent pas la preuve de la réalisation des travaux correspondants ;

- il ne peut donc être considéré que les dépenses correspondantes entrent dans l'objet social ;

- s'agissant des factures d'annonces légales qu'ils indiquent avoir payées à l'occasion de la vente sur adjudication de l'immeuble, M. et Mme [K] n'avaient pas qualité à engager de telles dépenses puisque Me [X] était désignée comme liquidateur.

Par dernières conclusions notifiées le 14 novembre 2022, M. [H] [K] et Mme [L] [Y], son épouse demandent à la cour d'appel d'infirmer le jugement déféré et d'intégrer dans leur compte-courant les frais de publicité légale de

2 671,20 euros, de confirmer en toutes ses autres dispositions le jugement déféré et de :

- rejeter les demandes adverses ;

- ordonner l'emploi des dépens de l'instance en frais privilégiés de liquidation ;

- condamner M. et Mme [P] au règlement d'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

- subsidiairement, d'ordonner à Me [X], ès qualités, d'écarter toutes les factures produites par les consorts [P] des comptes de la Sci.

Ils soutiennent en substance ce qui suit :

- les comptes des exercices 2016 et 2017 ont été approuvés par les associés ;

- or, ils reprennent l'intégralité des factures présentées par M. et Mme [P] ou

M. et Mme[K] pour les années 2014 et 2015 ;

- ces factures ont donc été de fait validées ;

- les travaux d'aménagement sont conformes à l'objet social bien qu'ils aient été jugés partiellement non conformes au droit de l'urbanisme ;

- une seule facture dépasse de 26,66 euros le plafond de 15 000 euros ;

- le montant de 15 000 euros s'analyse par prestation et non par montant d'engagement annuel ;

- la somme ne concerne pas une prestation unique mais plusieurs prestations de menuiseries extérieures, chauffage, plomberie ;

- les parties étaient d'accord pour que cette facture ne soit reprise qu'à hauteur de

15 000 euros dans les comptes de la Sci, gardant à titre personnel le surplus de

26,66 euros ;

- les factures dont il est demandé le rejet n'ont pas trait aux travaux non conformes ;

- il ont permis d'apporter une plus-value au bâtiment qui a été cédé 10 fois son prix d'achat ;

- il ne résulte pas des statuts que les factures auraient dû être précédées de devis ;

- les factures d'annonces légales ont été engagées par l'un des associés gérants dans l'intérêt de la Sci, conformément au mandat statutaire, et pour un montant bien inférieur à 15 000 euros.

Par dernières conclusions notifiées le 2 décembre 2021, Me [X], ès qualités, demande à la cour d'appel, au visa des articles 10 du décret du 3 juillet 1978, de :

- prendre acte de ce qu'elle s'en remet à justice ;

- statuer sur les comptes de la Sci du Fort de Querqueville,

- ordonner la clôture de la liquidation de la Sci du Fort de Querqueville,

- statuer ce que de droit quant aux dépens de première instance et d'appel.

Elle soutient en substance que les comptes de liquidation n'ont pu être approuvés ; qu'elle n'entend pas prendre position sur les chefs critiqués par les appelants ou les intimés.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 novembre 2022.

MOTIFS

Selon l'article 10 du décret du 3 juillet 1978, quelle que soit la nature de l'acte qui les nomme, les liquidateurs doivent rendre compte aux associés de l'accomplissement de leur mission, dans les conditions déterminées par l'acte de nomination, ou, à défaut, au moins annuellement sous forme d'un rapport écrit décrivant les diligences qu'ils ont effectuées pendant l'année écoulée.

La décision de clôture de la liquidation est prise par les associés, après approbation des comptes définitifs de la liquidation. A défaut d'approbation des comptes ou si la consultation des associés s'avère impossible, il est statué sur les comptes et, le cas échéant, sur la clôture de la liquidation, par le tribunal de commerce pour les sociétés commerciales, par le tribunal judiciaire dans les autres cas, à la demande du liquidateur ou de tout intéressé.

Les comptes définitifs, la décision des associés et, s'il y a lieu, la décision judiciaire prévue à l'alinéa précédent sont déposés au greffe du tribunal de commerce en annexe au registre du commerce et des sociétés.

Ainsi que l'a relevé le tribunal, l'approbation des comptes pour les exercices 2016 et 2017 par l'assemblée générale du 17 janvier 2019 ne vaut pas approbation implicite des exercices 2014 et 2015. Les dispositions du titre V des statuts impliquent en effet une approbation des comptes sociaux pour chaque exercice.

Il y a lieu, en application de l'article 10 alinéa 3 du décret du 3 juillet 1978, de statuer sur les comptes des années 2014 et 2015 qui n'ont pas été approuvés par les associés.

Le tribunal a rappelé qu'en application des statuts, 'la gérance a le pouvoir d'engager des dépenses entrant dans l'objet social, jusqu'à un montant de

15 000 euros, sans avoir à solliciter une autorisation préalable de la collectivité des associés'.

Le droit de faire porter au débit de la société des dépenses du chef d'un associé est donc conditionné par seulement deux éléments : l'objet de ces dépenses, qui doit correspondre à l'objet social, et leur montant, qui doit être inférieur à 15 000 euros.

Les statuts ne conditionnent pas l'admission d'une créance à la production d'un devis. Par ailleurs, le plafond de 15 000 euros ne concerne pas les devis de travaux, ni dans leur globalité, ni dans leurs différents tranches : il ne concerne que les 'dépenses engagées', soit le montant facturé qu'il s'agit de porter au débit du chef d'un associé.

Le moyen tiré par les appelants de l'absence de devis est donc sans emport, tout comme celui tiré par les intimés de l'existence de lots distincts sur les factures litigieuses.

- Sur l'exercice 2014

Les appelants sollicitent que la facture FA 187 du 11 avril 2014 du chef de

M. [K] soit écartée des comptes sociaux, dès lors qu'elle dépasse de 27 euros le plafond de 15 000 euros prévu par les statuts. Toutefois, aucune clause des statuts ne proscrit de retenir en compte un montant inférieur à celui facturé, dès lors que la dépense est conforme à l'objet social.

En outre, au-delà du caractère minime du dépassement, la cour relève que, lors de l'assemblée générale du 29 septembre 2014, les couples d'associés ont chacun fait état de travaux d' 'environ 15 000 euros' sans opposition particulière.

Il convient enfin de vérifier que les travaux réalisés l'ont été conformément à l'objet social.

En application de l'article 2 des statuts, cet objet recouvre notamment 'la mise en valeur, la transformation, la construction, l'aménagement... de tous biens immobiliers et de leurs accessoires ou compléments'.

La facture litigieuse versée en pièce 5 concerne des travaux de 'réhabilitation dans un ensemble de deux maisons', au titre de lots menuiserie et plomberie, sur le chantier de Querqueville.

L'intitulé même de cette facture démontre que les travaux sont conformes à l'objet social. Le fait que les travaux correspondants l'aient été en contradiction avec les règles d'urbanisme est sans incidence sur leur objet, qui correspond bien à la mise en valeur et à l'aménagement des biens acquis par la société.

Le tribunal a donc valablement pu retenir, pour l'exercice 2014, ainsi qu'il lui était demandé par les intimés, le montant de 14 811,72 euros, soit le montant de la facture litigieuse déduite du coût de deux huisseries qu'ils ont récupérées.

- Sur l'exercice 2015

S'agissant de l'exercice 2015, les parties s'opposent sur le point de savoir si la limite de 15 000 euros s'applique au montant total qu'un associé peut engager sans autorisation sur un exercice ou si, comme l'a retenu le tribunal, il ne s'agit pas d'un montant total, mais d'un montant par facture.

Le tribunal a considéré que la clause ci-dessus, qui est imprécise à cet égard, n'instaurait pas un plafond annuel toutes dépenses confondues, mais limitait simplement le pouvoir d'engagement pour des dépenses relatives à un même objet.

L'interprétation retenue par le tribunal aurait comme conséquence que les associés ne seraient astreints à une aucune limite globale de dépenses par exercice, mais qu'en revanche chaque associé devrait solliciter l'accord des autres pour porter au débit les factures dépassant le seuil, et ce quel que soit leur nombre.

Un tel mécanisme ne se comprendrait pas, a fortiori au regard de la composition du capital qui oppose en l'espèce deux familles à part égales, puisqu'il serait susceptible de mettre en péril la pérennité de la société à raison de l'absence de contrôle du montant global des dépenses. Telle ne peut pas avoir été la commune intention des parties.

Le compte-rendu de l'assemblée générale du 29 septembre 2019 précise d'ailleurs en page 2 :

'M. et Mme [K] constatent avoir réalisés eux-mêmes environ 15 000 euros et sont tous d'accord pour reconnaître le fait que, conformément aux statuts, les gérants ont atteint la somme maximale de travaux pour l'année écoulée'.

Les intéressés ont signé ce compte-rendu, et sont d'ailleurs les seuls à l'avoir fait. Ils ne peuvent faire plaider devant la cour qu'il n'y aurait pas eu de montant maximum d'engagement.

La décision doit donc être infirmée.

Par motifs propres, le tribunal a retenu que les 9 factures FA 229 à 237 pouvaient être retenues, dès lors que le descriptif des travaux concernés correspond effectivement à l'objet social. Ainsi qu'il a été relevé plus haut, l'illicéité au regard du droit de l'urbanisme n'est pas un motif d'exclusion au passif.

Le fait que ces factures ne précisent pas sur quel bâtiment ont été effectués les travaux de clôture, couverture, menuiserie, réseaux, sécurisation et terrassement qu'ils concernent n'est pas de nature à démontrer leur inexistence. Aucune plainte pour faux n'a été déposée au titre de ces factures. Il ne résulte pas des débats qu'elles auraient été contestées avant l'introduction de la présente instance.

Les procès-verbaux de constat dressés sur les lieux les 13 janvier et 2 mars 2015, démontrent bien l'exécution de prestations de louage d'ouvrage par la Sarl [K]. Le bien a d'ailleurs été revendu en 2019 à un prix dix fois supérieur au prix d'adjudication, si bien que la réalisation des travaux de rénovation est établie.

Enfin, le fait pour M. [K] d'avoir confié les travaux à Sarl [K] n'est pas en lui-même frauduleux ou contraire à la bonne foi. M. et Mme [P] ne peuvent sérieusement prétendre qu'ils auraient ignoré la possibilité de ces interventions au moment de l'achat et de la constitution de la Sci, compte tenu de la profession de

M. [K], et qu'elles auraient eu lieu à leurs insu lors de l'exécution des travaux.

Ils partagent en effet le site avec les intimés, et les véhicules professionnels apparents sur les procès-verbaux de constat d'huissier dressés en 2015 portent le sigle de l'entreprise.

Les factures concernées devront donc être intégrées à l'exercice 2015, mais dans limite de 15 000 euros.

Sont retenues au passif les factures FA 00229 pour 874 euros, FA 00230 pour

10 692 euros et FA 00231 à hauteur de 3 434 euros seulement, afin de respecter le plafond.

Le surplus des dépenses que M. [K] a facturé à la Sci sans autorisation des appelants via sa Sarl, excèdent le plafond et ne peuvent être inscrites.

- Sur l'exercice 2017

M. et Mme [K] expliquent avoir engagé, au cours de l'année 2017 une somme de 2 671,20 euros afin de publier, en vue de la vente du site, des annonces dans les journaux suivants : le Moniteur des ventes, le Figaro magazine et la Manche libre. Ils sollicitent que ces factures soient intégrées au compte de liquidation de la Sci dès lors qu'elles ont été engagées dans son intérêt.

Le tribunal a rejeté cette demande en relevant, conformément au moyen soulevé par les appelants, que les factures dressées par ces journaux l'avaient été au nom de

M. et Mme [K] à titre personnel.

M. et Mme [P] concluent à la confirmation. Ils soutiennent que M. et Mme [K] n'avaient pas qualité pour engager ces dépenses, dès lors que Me [X] était désigné comme liquidateur de la société depuis le 8 décembre 2015.

M. et Mme [K] ne répliquent pas sur ce point.

Aux termes de l'article L. 237-24 du code de commerce, le liquidateur représente la société. Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour réaliser l'actif, même à l'amiable. Les restrictions à ces pouvoirs, résultant des statuts ou de l'acte de nomination, ne sont pas opposables aux tiers.

Il est habilité à payer les créanciers et répartir le solde disponible. Les associés sont sans droit ni qualité pour se substituer au liquidateur de la société.

Le jugement du 8 décembre 2015 ne comporte aucune limitation aux pouvoirs conférés à la Selarl FHB comme mandataire pour procéder aux opérations de liquidation.

M. et Mme [K] n'avaient donc pas qualité pour engager des dépenses au nom de la société postérieurement à la désignation du liquidateur. Ils ont d'ailleurs fait dresser les factures à leurs noms et ne sauraient solliciter qu'elles soient imputées au titre du passif social.

La décision sera donc confirmée en ce que le tribunal a refusé d'intégrer ces dépenses.

Il n'y a pas lieu d'ordonner des action à l'égard de Me [X] qui ne manifeste aucune opposition.

Sur les frais de procédure

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et frais irrépétibles n'appellent pas de critique.

Compte tenu des enjeux du litige et de la nature du conflit né entre les parties, il sera fait masse des dépens d'appel, chacun des couples étant condamné à les supporter par moitié, sans autres modalités liées à la clôture de la liquidation et avec bénéfice de distraction au profit de Me [V], associé de la Selarl [V] Joubert Prado.

Ni l'équité, ni la situation économique des parties n'imposent l'application de l'article 700 du code de procédure civile à leur égard.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement en ce que le tribunal a dit que les factures FA 00229, 00230, 00231, 00232, 00233, 00234, 00235, 00236, 00237 pour un montant total de

51 422,44 euros sont intégrées dans les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2015 ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Décide d'intégrer dans les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2015 les factures FA 00229, 00230, 00231, pour un montant total de 15 000 euros ;

Déboute M. [H] [K] et Mme [L] [Y], son épouse des demandes formées au titre des autres factures;

Fait masse des dépens et condamne M. [E] [P] et Mme [B] [G], son épouse d'une part, M. [H] [K] et Mme [L] [Y], son épouse d'autre part, à les supporter par moitié, dont distraction au bénéfice de Me [V], associé de la Selarl [V] Joubert Prado.

Le greffier, La présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : 1ère ch. civile
Numéro d'arrêt : 21/02627
Date de la décision : 15/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-15;21.02627 ?
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