N° RG 21/03087 - N° Portalis DBV2-V-B7F-I273
COUR D'APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 15 MARS 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
20/00587
Tribunal judiciaire de Rouen du 13 juillet 2021
APPELANTE :
Samcv SMABTP - Société Mutuelle d'Assurance du Bâtiment et des Travaux Publics
RCS de Paris 775 684 764
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Me Caroline SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me Laure VALLET, avocat au barreau de Rouen
INTIMEES :
Sas CTIN
RCS de Rouen 433 068 145
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée et assistée par Me Franck ROGOWSKI de la SELARL CONIL ROPERS GOURLAIN-PARENTY ROGOWSKI ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de Rouen
Sa GAN ASSURANCES
RCS de Paris 542 063 797
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée et assisté par Me Jérôme VERMONT de la SELARL VERMONT TRESTARD & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen plaidant par Me Nina CHARLIER
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 11 janvier 2023 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseillère, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre
M. Jean-François MELLET, conseiller
Mme Magali DEGUETTE, conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Catherine CHEVALIER,
DEBATS :
A l'audience publique du 11 janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 15 mars 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 15 mars 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme WITTRANT, présidente de chambre et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
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* *
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Suivant devis des 7 octobre 2008 et 4 mars 2009, M. [W] [F] et Mme [R] [G], son épouse, ont confié à la société Sitrag, assurée auprès de la Smabtp, la réalisation de travaux d'édification d'un garage semi-enterré, accolé à leur maison, et surmonté d'une terrasse carrelée.
Ces travaux ont été réceptionnés sans réserve le 3 juillet 2009.
A partir du 23 septembre 2015, des infiltrations au plafond et sur les murs sont survenues dans le garage. Une expertise amiable a été réalisée le 3 mars 2016 par le cabinet [K], mandaté par la Smabtp. Le 9 juin 2016, il a validé le devis estimatif des travaux de réfection de la société Sitrag du 9 mai 2016 à hauteur de 28 357 euros HT prévoyant le recouvrement du carrelage avec des travaux d'étanchéité.
La société Sitrag a sous-traité à la société Ctin la réalisation de travaux de reprise de l'étanchéité de la terrasse au moyen d'une finition polyuréthane en octobre 2016 pour la somme de 7 299 euros HT.
Des infiltrations d'eau étant réapparues au niveau du plancher haut du garage, M. [W] [F] a mandaté M. [B] [D] pour réaliser une consultation. Celui-ci a précisé, à l'issue de ses constatations réalisées sur place les 27 novembre 2018 et 12 février 2019, que la société Ctin avait appliqué un revêtement d'étanchéité sur le carrelage de la terrasse sans y incorporer un voile d'armature de sorte que la résine s'était fissurée au droit des joints, ce qui avait généré des infiltrations.
Aux termes d'une transaction conclue les 27 août, 16 et 18 septembre 2019, entre la Smabtp, la société Sitrag et les époux [F], la Smabtp a indemnisé ces derniers à concurrence de 30 000 euros en réparation de tous leurs préjudices résultant des infiltrations. En contrepartie, ces derniers ont subrogé expressément la Smabtp et la société Sitrag dans tous leurs droits et actions à l'encontre de tous responsables des dommages se rapportant à ce litige.
Par actes d'huissier de justice des 23 et 28 janvier 2020, la Smabtp a fait assigner la Sasu Ctin et l'assureur décennal de celle-ci, la Sa Gan Assurances, devant le tribunal judiciaire de Rouen en remboursement de la somme de 30 000 euros.
Suivant jugement du 13 juillet 2021, le tribunal a rejeté toutes les demandes et condamné la Smabtp aux dépens.
Par déclaration du 27 juillet 2021, la Smabtp a formé appel du jugement en toutes ses dispositions.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 28 mars 2022, la Smabtp demande de voir en application des articles 1792 et 1231-1 du code civil et L.124-3 du code des assurances :
- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Rouen le 13 juillet 2021 en ce qu'il :
. a rejeté ses demandes tendant à la condamnation de la Sas Ctin et de la Sa Gan Assurances à lui payer la somme de 30 000 euros et celle de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en plus des entiers dépens,
. l'a condamnée aux dépens,
- condamner la société Ctin et la Sa Gan Assurances à lui payer la somme de
30 000 euros et celle de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter ces dernières de leurs appels incidents et de l'ensemble de leurs demandes dirigées à son encontre,
- condamner la société Ctin et la Sa Gan Assurances au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel que la Selarl Gray Scolan, avocat associé, sera autorisée à recouvrer pour ceux la concernant, conformément à l'article 699 du code précité.
Elle fait valoir que les opérations d'expertise amiable de M. [B] [D] ont été effectuées au contradictoire de la société Ctin, qui a participé aux deux réunions sur les lieux, et de la Sa Gan Assurances ; que le rapport établi par ce dernier et l'avis de M. [Z] [A] du cabinet [T] intervenant pour elle et la société Sitrag sont soumis à la libre discussion contradictoire des parties et qu'ils sont donc opposables aux intimées ; qu'elle fonde également ses demandes sur le rapport de M. [C] [V] du cabinet Cle [Localité 6] mandaté par la Sa Gan Assurances et sur le procès-verbal de constat établi le 4 juillet 2018 par Me [L], huissier de justice, lesquels corroborent les avis de MM. [D] et [A].
Elle conclut, sur la base de ces pièces, à la responsabilité de la Sasu Ctin pour ne pas avoir mis le voile d'armature pourtant préconisé par le produit Kemperol qu'elle a mis en oeuvre ; que cette carence n'a pas pu empêcher les mouvements du support existant de se propager à la résine, ce qui a causé la fissuration du système d'étanchéité ; que la Sasu Ctin ne peut pas prétendre ne pas avoir posé la membrane d'étanchéité alors que ses devis visent toutes les phases de préparation du support et d'application d'une résine d'étanchéité sur la terrasse ; que l'application d'une armature générale de renfort est prévue quel que soit le procédé utilisé (Kemperol ou Masterseal) ; que la Sasu Ctin a accepté sans réserve le support sur lequel elle est intervenue de sorte qu'elle n'est pas fondée à dénoncer une prétendue faute de la Smabtp pour s'exonérer.
Elle précise enfin que la garantie de la Sa Gan Assurances doit être mobilisée ; que l'attestation d'assurance émise par cette dernière pour 2016 prévoit qu'elle garantit l'activité de revêtement de surfaces en matériaux souples et résineux comprenant notamment les travaux de revêtement de sols coulés à base de résine de synthèse, ce que sont les travaux de mise en oeuvre d'un système d'étanchéité liquide effectués en l'espèce par la société Ctin.
Par dernières conclusions notifiées le 28 décembre 2021, la Sasu Ctin sollicite de voir sur la base des articles 1231-1, 1240, 1792, 1103, 1104 et 1193 du code civil, 16 du code de procédure civile :
à titre principal,
- déclarer inopposables à son égard les rapports/avis de MM. [D] et [A],
- débouter la Smabtp de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre,
à titre subsidiaire,
- condamner la Sa Gan Assurances à la garantir de toutes condamnations pouvant être mises à sa charge et à la relever indemne,
- condamner la Sa Gan Assurances à payer l'ensemble des condamnations pouvant être mises à sa charge et limiter le montant des condamnations à la somme de
16 489,01 euros TTC,
en tout état de cause,
- condamner la Smabtp et la Sa Gan Assurances à lui payer une indemnité de
3 000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre les entiers dépens.
Elle précise que si son gérant M. [I] a été présent lors de la première réunion d'expertise de M. [D], il ne l'a pas été lors de la seconde réunion ; que l'avis de M. [D] n'a pas été soumis au préalable aux parties pour leur permettre d'exprimer leurs positions ; qu'il n'a pas eu connaissance du devis et de la facture qu'elle a établis ; que l'avis de M. [Z] [A] qui reprend à l'identique les conclusions de M. [D] sans les compléter n'est pas davantage contradictoire ; que le constat d'huissier de justice produit ne détermine pas la cause du désordre ; que l'avis de l'expert mandaté par la Sa Gan Assurances diffère de celui de MM. [D] et [A].
Elle ajoute qu'elle n'a réalisé qu'une partie des travaux de reprise de la terrasse n'incluant pas la pose de la membrane d'étanchéité devant être réalisée par la société Sitrag ; que la fiche technique du produit Masterseal M 640 qu'elle a posé sur la terrasse ne préconisait pas la pose d'une armature ; que sa responsabilité ne peut pas être recherchée sur la base du produit 'Kemperol BR' évoqué par MM. [D] et [A] qu'elle n'a pas posé ; que les causes des infiltrations sont multiples et qu'il n'est pas prouvé que ses travaux en sont à l'origine ; que M. [Z] [A] indique que la fissuration des carreaux de carrelage est à l'origine de la fissuration de la résine ; que M. [C] [V] précise que les infiltrations sont dues aux fissurations du support de la terrasse ; qu'en choisissant de financer en 2016 la solution la moins onéreuse qui s'avérait incapable de mettre un terme aux infiltrations, la Smabtp a commis une faute dont elle doit assumer les entières conséquences.
Elle indique à titre subsidiaire que l'activité de pose de résine avec ou sans support textile est garantie par le contrat d'assurance, que l'indemnisation doit être limitée à la somme de 16 489,01 euros TTC telle que fixée dans le protocole d'accord au titre des travaux de reprise de l'étanchéité.
Par dernières conclusions notifiées le 21 janvier 2022, la Sa Gan Assurances demande, en vertu des articles 16 du code de procédure civile, 1103 et 1199 du code civil, L.112-6 et L.121-1 du code des assurances, de :
à titre principal et subsidiaire,
- voir confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Rouen du 13 juillet 2021 sauf en ce qu'il a rejeté sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- voir débouter la Smabtp de l'intégralité de ses demandes et toutes autres parties,
- voir condamner la Smabtp à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et la même somme au titre des frais irrépétibles exposés en appel, outre les entiers dépens d'instance et d'appel dont distraction au profit de la Selarl Vermont Trestard & Associés sur le fondement de l'article 699 du code précité,
- voir rejeter toutes demandes plus amples ou contraires,
A titre infiniment subsidiaire, en cas de réformation totale du jugement,
- voir débouter la Smabtp de sa demande d'indemnisation à hauteur de la somme de 30 000 euros,
- se voir autoriser à opposer sa franchise contractuelle pour la garantie de la responsabilité décennale des sous-traitants à la Sasu Ctin et à la Smabtp à hauteur de 15 % de l'indemnité avec un minimum de 2,28 fois l'indice BT01 et un maximum de 22,86 fois l'indice BT01,
- voir rejeter toutes demandes plus amples ou contraires.
Elle fait valoir que le rapport d'expertise amiable de M. [D], même contradictoire, est insuffisant à lui seul à fonder la demande de la Smabtp ; que le rapport de
M. [A] ne doit pas être analysé comme un élément supplémentaire puisqu'il n'est que le reflet des intérêts d'une seule des parties en cause ; qu'il en est de même du rapport de M. [C] [V] ; que de plus, ce dernier ne confirme pas les rapports de MM. [D] et [A].
Elle soutient à titre subsidiaire que sa garantie n'est pas mobilisable car les travaux d'étanchéité réalisés par la Sasu Ctin ne relèvent pas de l'activité déclarée au contrat d'assurance de pose de revêtements souples ; qu'il importe peu que les conditions particulières ne sont pas versées aux débats dès lors que son assurée ne conteste pas qu'elle n'a pas déclaré l'activité d'étancheur ; que l'allégation de la société Ctin selon laquelle elle aurait posé un revêtement de type Masterseal au lieu du revêtement Kemperol est sans incidence dès lors qu'il s'agit de deux revêtements d'étanchéité.
Elle ajoute à titre infiniment subsidiaire que la transaction conclue par la Smabtp ne lui est pas opposable, qu'en tout état de cause, sa condamnation et celle de la société Ctin doivent être limitées à la somme de 16 489,01 euros TTC retenue pour la reprise de l'étanchéité aux termes de ladite transaction.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 21 décembre 2022.
MOTIFS
Sur le recours subrogatoire de la Smabtp
L'article 16 du code de procédure civile prévoit que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
Le juge ne peut pas se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence des parties et que le rapport afférent a été soumis à leur libre discussion. Il lui appartient de rechercher si elle est corroborée par d'autres éléments de preuve.
En l'espèce, au soutien de son moyen selon lequel la Sasu Ctin a commis une faute et engage de ce fait sa responsabilité, la Smabtp verse notamment aux débats l'avis technique établi le 8 juillet 2019 par M. [D], consultant mandaté par M. [F] dans le cadre du litige l'opposant à la société Sitrag et à la Smabtp.
M. [D] s'est rendu sur les lieux les 27 novembre 2018 et 12 février 2019. Il précise qu'il a effectué les constats de désordres contradictoirement avec la société Sitrag, la société Ctin, la Smabtp et son conseil M. [A], et la Sa Gan Assurances et son conseil M. [V].
La Smabtp précise que la Sa Gan Assurances n'était pas présente lors de la seconde réunion. La Sasu Ctin indique qu'elle n'y assistait pas sans que ce fait puisse être vérifié.
En tout état de cause, l'avis technique dressé par M. [D], qui n'est pas dénommé 'rapport d'expertise', n'a pas été totalement contradictoire dès lors qu'il ne contient pas les observations et les éventuelles pièces des parties présentes, notamment le rapport d'expertise du Cabinet [K] du 9 juin 2016 et le devis estimatif de la société Sitrag du 9 mai 2016 validé le 9 juin 2016. M. [D] précise d'ailleurs à la fin de cet écrit qu'il l'a établi sur la base des éléments communiqués par le client et qu'il doit être considéré 'comme un simple constat rédigé, en toute objectivité, factuelle, technique et enfin non exhaustif puisque aussi complet que le client le permet.'. Enfin, cet avis technique n'a été transmis qu'à M. [F].
Les constatations des désordres ne sont pas discutées. M. [D] a relevé la présence en partie centrale de la terrasse d'un réseau de fissures du produit d'étanchéité, appliqué sur un carrelage lui-même posé sur une chape de ciment, dans lesquelles s'infiltrait l'eau. Il a retenu l'impropriété à destination de l'ouvrage.
En revanche, son avis est critiqué en ce qu'il impute ces désordres à la Sasu Ctin pour défaut de conseil et non-conformité contractuelle. Selon lui, très rapidement, le revêtement d'étanchéité Kemperol Br Etanchéité qu'elle a appliqué sur le carrelage a suivi les déformations de son support, notamment à la suite de fort gradient thermique, provoquant sa rupture matérialisée par les fissures et par voie de conséquence des infiltrations depuis lesdites fissures vers le garage. La fiche technique du produit ne prévoit pas son application sur un carrelage. De plus, elle préconise, s'agissant d'un système d'étanchéité armé, l'incorporation du voile Kemperol avec notamment un chevauchement de cinq centimètres entre chaque lé de voile, à laquelle la Sasu Ctin n'a pas procédé.
Pour corroborer cet avis technique, la Smabtp produit un courrier du 14 décembre 2018 que M. [A] lui a adressé ainsi qu'à M. [V]. Il y précise que :
- la résine appliquée par la Sasu Ctin présente de nombreuses fissures en raison de la propre fissuration de son support constitué par les carreaux de carrelage, ce qui ne rend plus ce revêtement étanche,
- la Sasu Ctin a indiqué avoir appliqué une résine polyester Kemperol Br en précisant qu'il n'existait aucune armature dans le système d'étanchéité,
- la finition constatée sur place non sablée ne correspond pas à la fiche technique de ce produit,
- l'absence d'incorporation d'un voile d'armature constitue la cause de la fissuration du système posé sur un support sujet à de grandes variations dimensionnelles d'origine thermique.
Si ces deux avis se rejoignent pour retenir une mauvaise exécution de sa prestation par la Sasu Ctin, n'est pas écartée, au vu des constatations matérielles précitées, l'hypothèse d'une mauvaise exécution des travaux de reprise du support même de la terrasse effectués par la société Sitrag.
En effet, contrairement à ce qu'avance la Smabtp, l'avis de M. [V] ne corrobore pas les conclusions de MM. [D] et [A] sur le fait générateur des infiltrations. Aux termes de son rapport du 20 mai 2019, M. [V] considère que les infiltrations sont dues aux fissurations du support de la terrasse et que le revêtement posé lors des travaux réparatoires n'a pas supporté les mouvements du support existant, ce qui a créé des fissures.
Le procès-verbal de constat dressé le 4 juillet 2018 par Me [L], mandaté par
M. [F], n'apporte pas d'élément utile sur la cause des désordres contrairement aux affirmations de la Smabtp. Me [L] a seulement constaté leur existence.
En revanche, dans son rapport d'expertise amiable du 9 juin 2016, le Cabinet [K], mandaté par la Smabtp à l'issue de l'apparition des premiers désordres, avait évoqué l'absence d'un système d'étanchéité sur le plancher imputable au non-respect des préconisations prévues par l'article 7.4 du Dtu 52.1 Revêtements de sol scellés relatif à la pose en sols extérieurs. Selon celles-ci, une couche de désolidarisation drainante doit obligatoirement être réalisée sous le mortier de scellement. Le support constitué d'un dallage seul ou d'un dallage associé à une forme de pente a une pente minimale de 1,5 % en éloignant les eaux du bâtiment.
Il avait ajouté qu'au niveau du raccordement en rive de la construction existante, l'étanchéité n'était pas davantage conforme à ces préconisations.
Il s'en déduit qu'à l'origine, les infiltrations avaient été causées par des malfaçons ou des non-conformités affectant l'étanchéité entre le support en béton de la terrasse et les carreaux de carrelage, c'est-à-dire dans la structure de la terrasse-plancher et non pas sur sa surface. Les deux solutions réparatoires suivantes proposées par la société Sitrag visaient à mettre en conformité les travaux :
- dépose et repose du carrelage après mise en conformité et travaux accessoires pour un coût de 42 591 euros HT,
- pose d'un carrelage sur l'existant, compris travaux d'étanchéité et accessoires, évaluée à 29 989 euros HT.
Même si la seconde solution a été retenue, la reprise des désordres ne se résumait pas à la seule application d'une étanchéité liquide sous-traitée à la Sasu Ctin pour un montant de 7 299 euros HT.
La bonne exécution des travaux restés à la charge de la société Sitrag n'a pas donné lieu à un avis technique. Or, tant M. [A] que M. [V] ont constaté la fissuration du support de la terrasse constitué par les carreaux de carrelage et qui était sujet à des mouvements. M. [A] a évoqué sur ce point de grandes variations dimensionnelles d'origine thermique. M. [D] a également fait état de déformations du support, notamment à la suite de fort gradient thermique.
En conséquence, les éléments versés aux débats par la Smabtp, opposables aux intimées, ne permettent pas de caractériser une faute de la Sasu Ctin. Le recours subrogatoire engagé contre elle et la Sa Gan Assurances sera rejeté. Le jugement du tribunal ayant statué en ce sens sera confirmé.
Sur les demandes accessoires
Les dispositions de première instance sur les dépens seront confirmées.
Partie perdante, la Smabtp sera condamnée aux dépens d'appel avec bénéfice de distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande.
Il n'est pas inéquitable de la condamner aussi à payer la somme de 2 000 euros à la Sa Gan Assurances au titre de ses frais de procédure exposés en première instance. La décision du tribunal ayant rejeté cette réclamation sera infirmée. Une indemnité de 2 500 euros lui sera également accordée en cause d'appel.
La somme de 2 500 euros sera allouée à la Sasu Ctin pour ses frais occasionnés par cette procédure d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la Sa Gan Assurances tendant au paiement par tout succombant de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau sur ce chef infirmé et y ajoutant,
Condamne la Smabtp à payer à la Sa Gan Assurances la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des procédures de première instance et d'appel,
Condamne la Smabtp à payer à la Sasu Ctin la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,
Déboute les parties du surplus des demandes,
Condamne la Smabtp aux dépens d'appel avec bénéfice de distraction au profit de la Selarl Vermont Trestard & Associés et de la Selarl Gray Scolan, avocats, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, La présidente de chambre,