N° RG 24/01281 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JUAO
COUR D'APPEL DE ROUEN
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 3 SEPTEMBRE 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Décision rendue par le batonnier de l'ordre des avocats du barreau de rouen en date du 29 février 2024
DEMANDERESSE AU RECOURS :
Madame [S] [G]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Caroline ROTH de la SELARL NOMOS AVOCATS, avocat au barreau de Dieppe, plaidant par Me Menou
DÉFENDERESSE AU RECOURS :
Selarl [H] [F]-GREGOIRE LECLERC
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me [H] [F], avocat au barreau de Rouen
DEBATS :
A l'audience publique du 2 juillet 2024, devant Mme Marie-Christine LEPRINCE, première présidente de la cour d'appel de Rouen, assisté de Mme Catherine CHEVALIER, greffier et en présence de Mme [M] [K] greffier stagiaire ; après avoir entendu les observations des parties présentes, la première présidente a mis l'affaire en délibéré au 3 septembre 2024.
DECISION :
contradictoire
Prononcée publiquement le 3 septembre 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signée par Mme LEPRINCE première présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
Exposé du litige,
Par requête adressée à l'ordre des avocats du barreau de Rouen le 21 septembre 2023, Me [H] [F] a saisi le bâtonnier en fixation des honoraires qui lui sont dus par Mme [S] [G] à la somme totale de 4 738 euros outre le remboursement de la participation aux frais de taxe de 40 euros.
Par décision du 29 février 2024, la délégataire du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Rouen a fixé à la somme de 4 738 euros, le montant des frais et honoraires dus par Mme [S] [G] à Me [F], ordonnant le versement de cette somme outre celle de 40 euros au titre des frais d'ouverture de dossier.
Cette décision a été notifiée à Mme [S] [G] par lettre recommandée avec accusé de réception délivrée à sa personne le 4 mars 2024.
Mme [S] [G] a déposé un recours contre cette décision par lettre reçue à la cour d'appel le 8 avril 2024, courrier recommandé posté le mercredi 3 avril 2024. Le dossier a été enregistré sous le numéro 24/1281.
L'audience a été fixée au 4 juin 2024. Les parties ont été régulièrement convoquées par lettre recommandée avec avis de réception en date du 19 avril 2024. Un renvoi a été ordonné à l'audience du 2 juillet 2024.
A l'appui de son recours, Mme [G] sollicite la réformation de la décision du bâtonnier considérant que la convention d'honoraires ne prévoyait pas de données en termes de nombre d'heures ou de rendez-vous. Elle indique qu'elle n'a jamais eu le décompte de ses versements et ajoute qu'elle a assigné Me [F] en responsabilité pour manque de diligence, défaut de conseil et comportement déloyal.
Me [F] demande, dans ses écritures en date du 3 juin 2024, la confirmation de l'ordonnance de taxe en toutes ses dispositions. Il rappelle qu'une convention d'honoraires a été régularisée avec Mme [G] et qu'il a effectué les diligences suivantes :
' une déclaration d'appel
' des conclusions d'appelant
' une communication de pièces
' une rencontre avec la cliente et des rendez-vous téléphoniques
' une plaidoirie devant la cour.
Il indique avoir honoré toutes ses obligations.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 tel qu'il résulte de la modification de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 prévoit que :
'Les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.
Sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci'.
Il ressort des écritures des parties que Me [F] était l'avocat de Mme [G] depuis plusieurs années et que cette dernière lui a confié la défense de ses intérêts dans le cadre de la mise en cause de la responsabilité du notaire qui avait été désigné pour procéder à la liquidation de l'indivision ayant existé entre Mme [G] et
M. [X], anciennement liés par un PACS.
Me [F] a assigné le 21 avril 2021 Me [O], notaire, en responsabilité devant le tribunal judiciaire d'Evreux et par ordonnance en date du 6 décembre 2021, le juge de la mise en état a déclaré l'action intentée prescrite.
Il a formé appel de cette décision et par arrêt en date du 6 juillet 2022, la cour d'appel a confirmé l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Evreux.
Dans le cas de la procédure d'appel, Me [F] a adressé à Mme [G] une nouvelle convention d'honoraires, qui n'a pas été signée par l'intéressée. Il résulte toutefois des échanges de mails qu'elle a été acceptée dans son principe sous réserve de quelques modifications. Il était prévu un honoraire fixe forfaitaire de 3 500 euros HT soit 4 200 euros. Il était en outre prévu des frais de constitution et d'ouverture de dossier et autres frais annexes estimés à 250 euros HT soit 300 euros TTC.
Trois factures ont été émises par la Selarl [H] [F] & associés :
' une facture numéro 7516 émise le 16 décembre 2021 pour un montant de 800 euros HT soit 1 185 euros TTC (procédure d'appel)
' une facture numéro 7568 émise le 5 janvier 2022 pour un montant de 1 200 euros HT soit 1 440 euros TTC (instruction dossier, rédaction conclusions)
' une facture numéro 7919 émise le 28 avril 2022 pour un montant de 1 750 euros HT soit 2 100 euros TTC (solde d'honoraires) outre 13 euros pour timbre de plaidoirie
soit un total de 4 738 euros TTC.
Il n'est pas contesté qu'aucune somme n'a été versée par Mme [G].
Sur la responsabilité de l'avocat
La procédure de contestation en matière d'honoraires et débours d'avocat, fondée sur les articles'174 et suivants du décret du 27 novembre 1991, concerne les seules contestations relatives au montant et au recouvrement des honoraires, de sorte que le juge de l'honoraire n'a pas le pouvoir de connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l'avocat à l'égard de son client résultant d'un manquement à son devoir de conseil et d'information, laquelle obéit au droit commun de la responsabilité.
Le juge de l'honoraire n'étant pas le juge de la responsabilité civile professionnelle de l'avocat, l'argumentation de Mme [G] tenant au manque de diligence, défaut de conseil voire au comportement déloyal de Me [F] est hors débats et ne peut qu'être écartée.
Sur le montant des honoraires
Il n'est pas contesté que le projet de convention d'honoraires transmis par Me [F] n'a pas été signé par Mme [G]. Il sera toutefois relevé que Mme [G] l'avait accepté puisqu'elle apportera quelques rectifications. Quoi qu'il en soit, l'absence de convention d'honoraires ne prive pas l'avocat de la juste rémunération de son travail, laquelle sera appréciée en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, tenant compte des critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, notamment des diligences et du temps passé, la somme facturée de 4 738 euros TTC apparaît tout à fait justifiée.
La décision du bâtonnier sera confirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme la décision du 29 février 2024 rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Rouen en toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
Condamne Mme [S] [G] aux entiers dépens de l'instance d'appel.
Le greffier, La première présidente,