PPS/ JD DOSSIER N0 05/ 01185 ARRÊT DU 08 MARS 2006 3ème CHAMBRE, COUR D'APPEL DE TOULOUSE 3ème chambre n° 284 Prononcé publiquement le MERCREDI 08 MARS 2006, par la 3ème Chambre des Appels Correctionnels, Sur appel d un jugement du T. G. I. DE FOIX du 28 JUIN 2005
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats, du délibéré et du prononcé de l arrêt, Président : Monsieur PUJO-SAUSSET, Conseillers Monsieur BASTIER, Madame SALMERON, GREFFIER : Madame DUBREUCQ, Greffier, aux débats et au prononcé de l arrêt. MINISTERE PUBLIC : Monsieur TREMOUREUX, Avocat Général, aux débats et au prononcé de l arrêt.
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR : f
B... Mathias né le 29 Mai 1984 à ST GIRONS Fils de B... René et de A... Patricia De nationalité francaise, célibataire, etudiant Demeurant...-09200 ST GIRONS Prévenu, intimé, libre, comparant Assisté de Maître MARFAING Isabelle, avocat au barreau de TOULOUSE commis d office C... Jason né le 20 Août 1970 à TONBRIDGE (ROYAUME-UNI) Fils de C... John et de D... Jane De nationalité britannique, marié, sans profession Demeurant...-09200 MONTJOIE EN COUSERANS Prévenu, appelant, libre, comparant Assisté de Maître RABAT Stéphanie, avocat au barreau de FOIX CAISSE PRIMAIRE D ASSURANCE MALADIE DE L ARIEGE, 1 avenue de Sibian-09000 FOIX Partie intervenante, non appelante, non comparante LE MINISTÈRE PUBLIC appelant, E... Martine Demeurant...-09200 ST GIRONS Partie civile, non appelante, comparante C... Jason Demeurant...-09200 MONTJOIE EN COUSERANS Partie civile, appelant, comparant, assisté de Maître RABAT Stéphanie, avocat au barreau de FOIX F... Marie Demeurant...-09200 MONTJOIE EN COUSERANS Partie civile, non appelante, non comparante RAPPEL DE LA PROCÉDURE : LE JUGEMENT : Le tribunal, par jugement en date du 28 Juin 2005 :- a relaxé B... Mathias du chef de : VIOLENCE AVEC USAGE OU MENACE D UNE ARME SUIVIE D INCAPACITESUPERIEURE A 8 JOURS, le 15/ 08/ 2004, à La Bastide du Salat, infraction prévue par les articles 222-12 AL. 1 10o, 222-11, 132-75 du Code pénal et réprimée par les articles 222-12 AL. 1, 222-44, 222-45, 222-47 AL. 1 du Code pénal-a déclaré C... Jason coupable de : VIOLENCE AVEC USAGE OU MENACE D UNE ARME SANS INCAPACITE, le 15/ 08/ 2004, à La Bastide du Salat, infraction prévue par les articles 222-13 AL. 1 10o, 132-75 du Code pénal et réprimée par les articles 222-13 AL. 1, 222-44, 222-45, 222-47 AL. 1 du Code pénal VIOLATION DE DOMICILE A L AIDE DE MANOEUVRES, MENACE, VOIES DE FAIT, OU CONTRAINTE, le 15/ 08/ 2004, à La Bastide du Salat, infraction prévue par l article 226-4 du Code pénal et réprimée par les articles 226-4, 226-31 du Code pénal DEGRADATION OU DETERIORATION GRAVE D UN BIEN APPARTENANT A AUTRUI, le 15/ 08/ 2004, à La Bastide du Salat, infraction prévue par l article 322-1 AL. 1 du Code pénal et réprimée par les articles 322-1 AL. 1, 322-15 1o, 2o, 3o, 5o du Code pénal Et par application de ces articles, a condamné :
C... Jason à :
-3 mois d emprisonnement avec sursis,- confiscation de la barre de fer (scellé 154/ 05) SUR L ACTION CI VILE.] a débouté C... Jason de sa demande contre Mathias B..., a constaté que la C. P. A. M. régulièrement appelée en cause par Jason C... n avait pas à intervenir. LES APPELS : Appel a été interjeté par :
Monsieur C... Jason, le 06 Juillet 2005 sur toutes les dispositions M.
le Procureur de la République, le 06 Juillet 2005 contre Monsieur B... MathiasM £
le Procureur de la République, le 06 Juillet 2005 contre Monsieur C... Jason
DÉROULEMENT DES DÉBATS : A l audience publique du 15 Février 2006, le
Président a constaté l identité des prévenus. C... Jason ne parlant pas suffisamment la langue française, M. G... Jean-Pierre a exercé les fonctions d interprète en langue anglaise, après avoir prêté serment d apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience. L interprète a ensuite prêté son ministère chaque fois qu il a été utile. C... Jason, appelant, a sommairement indiqué à la Cour les motifs de son appel. Ont été entendus : Monsieur PUJO-SAUSSET en son rapport ; B... Matbias et C... Jason en leur interrogatoire et moyens de défense ; E... Martine, partie civile, en ses explications ; Monsieur TREMOUREUX, Avocat Général, en ses réquisitions ; Maître MARFAING, Avocat de B... Mathias, prévenu, en ses conclusions oralement développées ; Maître RABAT, Avocat de C... Jason, partie civile et prévenu, en ses conclusions oralement développées ; B... Mathias et C... Jason ont eu la parole en dernier ; Le Président a ensuite déclaré que l arrêt serait prononcé le 08 MARS 2006. DECISION : Par déclaration au greffe en date du 6 juillet 2005, Jason C... a relevé appel du jugement du tribunal correctionnel de FOIX en date du 28 juin 2005 ; le Ministère Public a relevé appel incident le 6 juillet 2005 à l encontre de Jason C... et de Mathias B... ; ces appels interjetés dans les formes et délais légaux sont recevables. Jason C... demande de réformer le jugement déféré, et :
- sur l action publique, vu l article 122-6 du Code pénal, dire et juger Mathias B... coupable des faits qui lui sont reprochés ;
- sur l action civile, de déclarer recevable sa constitution de partie civile d ordonner une mesure d expertise avant-dire-droit, afin d évaluer les préjudices qu il a subis ; de condamner Mathias B... à lui verser la somme de 3 000 euros, à titre d indemnité provisionnelle. M. l Avocat Général requiert l entière confirmation du jugement entrepris et y ajoutant, demande de condamner Jason C... à une amende ; il considère que les conditions de la légitime défense sont réunies en faveur de Mathias B.... La Caisse Primaire d Assurance Maladie de l Ariège régulièrement mise en cause ne s est pas faite représenter. Mathias B... conclut à la confirmation de la décision de relaxe prononcée à son égard. Martine E... sollicite également la confirmation du jugement.
Sur l action publique
Sur les faits
Attendu que Paulin I... organisait, la nuit du 14 au 15 août 2004, une soirée au domicile de la famille E... à BARJAC (Ariège) où il réunissait un groupe d amis dont l arrivée sur les lieux s échelonnait de 20 h 30 à Oh 30 ; Que vers 21 h, un véhicule d invité passait à proximité de l enfant de Jason C..., Jude, âgé de 2ans et demi, qui jouait à proximité de la route ce qui provoquait l agacement de son père ; que celui-ci, de nationalité britannique, maîtrisant peu la langue française, se rendait à pied à la soirée et mettait en garde le conducteur du véhicule, lui reprochant d avoir failli renverser son enfant ; qu après un échange verbal avec les personnes présentes à la soirée, il repartait contrarié chez lui, en disant qu il reviendrait (I ll be back). Que, vers 23 h 30, Jason C..., passablement alcoolisé, retournait effectivement chez Paulin I..., s invitait à la soirée dont il perturbait le déroulement Que vers 2h, Jason C... tentait d empêcher un véhicule de quitter les lieux et se blessait légèrement aux jambes ; qu il était chassé de la propriété et déclarait qu il reviendrait ; Qu à 2 h 45, Jason C... retournait à la soirée, brandissant une barre de fer avec laquelle il tentait de frapper Marie F..., que Paulin I... s'interposait, empêchant Jason C... de se dégager ; que c est alors que Mathias B... frappait Jason C... à la tête, avec une bûche, provoquant sa chute ; que ce dernier se relevait cependant une minute après et se dirigeait vers Mathias B... ; qu il était alors maîtrisé par plusieurs jeunes et immobilisé jusqu à ce que les gendarmes interviennent, suivis par les pompiers.
Attendu que Jason C..., admis à l hôpital de St GIRONS, était ensuite transféré au CHU de RANGUEIL ; Que le médecin-légiste indiquait aux termes de son certificat en date du 30 août 2004, que Jason C... avait présenté le 15 août 2004 :
- un traumatisme crânio-cérébral avec une hémorragie péri-cérébrale ayant nécessité son transfert à RANGUEIL et une intervention neuro-chirurgicale ;
- une plaie suturée de l avant-bras droit et une plaie suturée (agrafe) du cuir chevelu ;
- des lésions érosives en regard de la fesse gauche et des lésions croûteuses des deux genoux ; Que le médecin estimait possible de retenir, considérant un taux d alcoolémie à 2, 26 g par litre présenté par l intéressé lors des faits ainsi qu un traitement anti-agrégeant, que ces éléments avaient pu influencer la constitution des blessures et l évolution de son état de santé par action principalement sur l état de conscience et lhémostase ; Que l incapacité temporaire totale au sens pénal du terme était fixée à trois semaines à compter du traumatisme initial, sous réserve de l évolution de l état de santé de l intéressé.
Attendu que Jason C... avait été hospitalisé au mois de septembre 2003 à RANGUEIL pour prise en charge d une nécrose myocardique inférieure inaugurale thrombolysée par Métalyse avec critère de reperfusion. Sur les violences reprochées à Jason C...
Attendu que Jason C... ne conteste pas sa responsabilité pénale et admet avoir commis des violences n entraînant aucune incapacité sur Marie F..., en faisant usage d une barre de fer, même si ses souvenirs sont fragmentaires ; Que de nombreux témoins entendus au cours de l enquête confirment le comportement violent de Jason C... qui, bien que n étant pas invité à la soirée, a imposé sa présence perturbatrice à plusieurs reprises, adoptant une attitude agressive à l encontre de divers participants dont Marie F... ; Qu en l absence d antécédent judiciaire, la peine de trois mois d emprisonnement avec sursis prononcée à son encontre apparaît adaptée et proportionnée ; que cette disposition du jugement sera en conséquence confirmée, de même que la décision de confiscation de la barre de fer saisie. Sur les violences reprochées à Mathias B...
Attendu que Mathias B... reconnaît avoir porté un coup de bûche à Jason C..., violence dont il est résulté une incapacité temporaire totale de plus de huit jours ; Attendu qu il soutient qu il a agi en état de légitime défense.
Attendu que déjà, vers 2 heures du matin, la nuit des faits, Jason C... s était manifesté en s accrochant à un véhicule pour empêcher, sans raison particulière, trois invités de repartir ; qu il s était mis à plat ventre sur le toit du véhicule qui avait démarré ; qu il avait été traîné sur une dizaine de mètres ; que le véhicule s était arrêté ; que Jason C... s était relevé, saignant des genoux, avait insulté les convives et était retourné dans le salon de la maison ;
Qu en raison de son comportement dérangeant, il avait été expulsé du salon, avait résisté, avait trébuché ; qu il s en était suivi une altercation, notamment avec Mathias B... que finalement Jason C... était retourné chez lui vers 2 h 30, en avertissant qu il reviendrait.
Attendu que Jason C..., en proie à une vive colère, a réveillé son épouse et est retourné à la propriété E..., vers 2 h 45, en hurlant, titubant et avec une barre de fer à la main, Que son épouse l a suivi, accompagnée de son fils Jude, et a essayé de calmer son mari ; Qu il ressort de l ensemble des témoignages recueillis par les gendarmes
-que Marie F... et Paulin I... ont tenté de parlementer avec Jason C... ; que d autres participants à la soirée ont réagi de manière hostile, faisant monter le degré d excitation de ce dernier ;
- que l intervention du voisin MAGE a, un temps, ramené le calme ; que Jason C... était sur le chemin de retour chez lui, quand, devant les moqueries de certains participants à la soirée, il est à nouveau retourné sur les lieux de la soirée ;
- que les jeunes gens se sont regroupés dans la cuisine ; que Jason C..., dehors tenant sa barre de fer, s est présenté devant la fenêtre de la cuisine, vociférant ; qu il s en est suivi une discussion entre Jason C... et Marie F... de part et d autre de la fenêtre de la cuisine, vociférant ; qu il s en est suivi une discussion entre Jason C... et Marie F... de part et d autre de la fenêtre ; que Jason C..., armant son bras, a abattu la barre de fer en direction de la jeune femme ; que celle-ci a eu le réflexe de se reculer, évitant la barre de fer qui s est fichée sur le dormant horizontal de la fenêtre, y laissant une profonde entaille (visible sur photo n0 3) ;
- que Jason C... s'est ensuite dirigé vers la porte d entrée ; que Paulin I... s est interposé ; que Jason DEMQRNAY s est dégagé, continuant sa progression ;
- que c est alors que Mathias B..., qui avait pris une bûche dans un tas de bois à proximité, a contourné la cour, s est dirigé à l arrière gauche de Jason C... et lui a porté un coup de bûche ; que Jason C... sous l effet du coup est tombé à terre, lâchant la barre de fer qui a été écartée par I.... Attendu que Mathias B... a déclaré :
- que Paulin I... avait réussi à ceinturer par derrière Jason C... qui, après avoir tenté d atteindre Marie F..., essayait d entrer dans la maison ;
- qu il s était rendu au tas de bois, saisissant la première bûche lui tombant sous la main était revenu rapidement auprès de I..., juste au moment où celui-ci était éjecté par l anglais ;
- que voyant que Jason C..., débarrassé de toute entrave, se dirigeait vers la porte fenêtre, menaçant, la barre de fer en main, il s était précipité sur lui et lui avait donné un coup à la tête ; Que Paulin I... a confirmé cette version des faits.
Attendu que Hazel Ann J... épouse de Jason C..., entendue par les enquêteurs, a confirmé qu elle avait suivi son mari qui, après l avoir réveillée, était retourné sur les lieux de la soirée vers 2 h 45, qu elle avait tenté en vain de le raisonner ; que celui-ci était armé d une barre de fer ; Qu elle a vu un homme frapper son mari avec une bûche sans autre précision.
Attendu qu il ressort des différentes déclarations recueillies au cours de l enquête à laquelle ont minutieusement procédé les gendarmes de la communauté de brigades Prat, Bonrepaux, Ste Croix Volvestre :
- que Jason C... s est montré particulièrement menaçant ; qu il a fait usage d une barre de fer avec laquelle il a tenté de frapper Marie F... ; que la violence de son coup est attestée par la trace laissée sur le bâti de la fenêtre ;
- qu'immédiatement après, Jason C..., toujours armé, a tenté de pénétrer à l intérieur de la maison où se trouvaient plusieurs jeunes gens ;
- qu il en a été empêché dans un premier temps par I..., mais ce dernier ayant été repoussé, il s apprêtait à entrer, lorsque Mathias B... l a frappé avec la bûche, l atteignant au niveau de la tempe gauche.
Attendu que cette intervention a eu pour but d empêcher Jason C... qui venait de faire preuve d une extrême violence et d un comportement particulièrement dangereux, d entrer dans la maison et d agresser ses occupants ; Que devant une atteinte injustifiée envers autrui, Mathias B... a ainsi accompli, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d autrui ; Qu en présence d un agresseur armé d une barre de fer, dont il n avait pas hésité à faire usage en direction de Marie F..., le moyen de défense de Mathias B... qui a frappé Jason C... avec une bûche, n était nullement disproportionné ; Que cet acte de riposte était en outre strictement nécessaire au but poursuivi, en l occurrence, empêcher Jason C... d entrer dans la maison et de frapper ses occupants avec l arme qu il brandissait toujours ; Que c est à bon droit que les premiers juges ont en conséquence retenu le fait justificatif de la légitime défense en faveur de Mathias B... et l ontjustement renvoyé des fins de la poursuite ; Que le jugement entrepris sera en conséquence confinné en ses dispositions pénales. Sur l action civile Attendu que la légitime défense reconnue au bénéfice de Mathias B... ne peut donner lieu à une action en dommages et intérêts en faveur de Jason C... qui l a rendue nécessaire par son agression ; Que ce dernier sera en conséquence débouté de sa demande d expertise et d indemnité provisionnelle. Attendu que Marie F... a été reçue à bon droit en sa constitution de partie civile mais n a réclamé aucune réparation de son préjudice. Attendu qu il y a lieu également de confirmer les dispositions du jugement en ce qu il a accueilli Martine E... en sa constitution de partie civile et lui a alloué de justes dommages intérêts en réparation de son préjudice matériel.
PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, en matière correctionnelle, par défaut à l égard de la C. P. A. M et de Marie F..., contradictoirement pour les autres parties présentes à l audience, et en dernier ressort ; Déclare les appels recevables ; Confirme en toutes ses dispositions tant pénales que civiles, le jugement du Tribunal de Grande Instance de FOIX en date du 28 juin 2005. Le Président n a pu donner au condamné l avertissement prévu par l article 132-29 du Code Pénal en raison de son absence à l audience de lecture de l arrêt. RAPPELLE que la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d un montant de 120 EUROS dont est redevable chaque condamné ; Le tout en vertu des textes susvisés ; Lecture faite, le Président a signé ainsi que le Greffier. LE
GREFFIER, LE PRESIDENT