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19/01/2009 | FRANCE | N°08/00830

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 19 janvier 2009, 08/00830


ROG / MB
DOSSIER N 08 / 00830
ARRÊT DU 19 JANVIER 2009
3ème CHAMBRE,




COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème Chambre,
N 70 / 09


Prononcé publiquement le LUNDI 19 JANVIER 2009, par Monsieur LAPEYRE, Président de la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,


Sur appel d'un jugement du T. G. I. DE PAU du 14 DECEMBRE 2006




COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
Président : Monsieur LAPEYRE
Conseillers : Monsieur LAMANT,
Monsieur ROGER,.


GREFFIER :
Madame BORJA lors des dé

bats et du prononcé de l'arrêt


MINISTÈRE PUBLIC :
Monsieur TREMOUREUX, Avocat Général, aux débats
Monsieur GAUBERT, Avocat Général, au pro...

ROG / MB
DOSSIER N 08 / 00830
ARRÊT DU 19 JANVIER 2009
3ème CHAMBRE,

COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème Chambre,
N 70 / 09

Prononcé publiquement le LUNDI 19 JANVIER 2009, par Monsieur LAPEYRE, Président de la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,

Sur appel d'un jugement du T. G. I. DE PAU du 14 DECEMBRE 2006

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
Président : Monsieur LAPEYRE
Conseillers : Monsieur LAMANT,
Monsieur ROGER,.

GREFFIER :
Madame BORJA lors des débats et du prononcé de l'arrêt

MINISTÈRE PUBLIC :
Monsieur TREMOUREUX, Avocat Général, aux débats
Monsieur GAUBERT, Avocat Général, au prononcé de l'arrêt

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

Z... Christophe
né le 03 Novembre 1975 à MELUN
de nationalité francaise, journaliste
demeurant...- ...

Prévenu, libre, intimé non comparant
Représenté par Maître PRZYBOROWSKI Agathe, avocat au barreau de PARIS (muni d'un pouvoir)

A... Catherine, Geneviève épouse B...

née le 19 Janvier 1947 à PARIS 16EME
de A... Daniel et de C... Jacqueline,
de nationalité francaise, mariée, directeur de publication
Demeurant...- ...

Prévenue, libre, intimée, non comparante
Représentée par Maître PRZYBOROWSKI Agathe, avocat au barreau de PARIS (muni d'un pouvoir)

En présence du MINISTÈRE PUBLIC

D... Frédéric
domicile élu chez Me E... Laurence,...

Partie civile, appelant, non comparant
Représenté par Maître DUPUY-JAUVERT Laurence, avocat au barreau de TOULOUSE (aide juridictionnelle totale no 2008 / 11703 du 06 / 08 / 2008)

RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

LE JUGEMENT :

Le tribunal de Grande Instance de PAU, par jugement en date du 14 Décembre 2006, a relaxé :

* Z... Christophe du chef de DIFFAMATION ENVERS PARTICULIER PAR PAROLE, ECRIT, IMAGE OU MOYEN DE COMMUNICATION PAR VOIE ELECTRONIQUE, le 21 / 09 / 2005, infraction prévue par les articles 32 AL. 1, 23 AL. 1, 29 AL. 1, 42 de la Loi du 29 / 07 / 1881 et réprimée par l'article 32 AL. 1 de la loi du 29 / 07 / 1881.

* A... Catherine épouse B... du chef de DIFFAMATION ENVERS PARTICULIER PAR PAROLE, ECRIT, IMAGE OU MOYEN DE COMMUNICATION PAR VOIE ELECTRONIQUE, le 21 / 09 / 2005, infraction prévue par les articles 32 AL. 1, 23 AL. 1, 29 AL. 1, 42 de la Loi du 29 / 07 / 1881 et réprimée par l'article 32 AL. 1 de la loi du 29 / 07 / 1881.

et a condamné la partie civile D... Frédéric à verser, en application de l'article 472 du Code de Procédure Pénale ;

* à A... Catherine épouse B... la somme de750 euros au titre du préjudice matériel et 750 euros au titre du préjudice moral ;

* à Z... Christophe la somme de 750 euros au titre du préjudice matériel et 750 euros au titre du préjudice moral.

L'APPEL :

Appel a été interjeté par :
Monsieur D... Frédéric, le 18 Décembre 2006 contre Madame A... Catherine et Monsieur Z... Christophe

L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PAU :

Par arrêt en date du 13 / 09 / 2007, la Cour d'appel de Pau :

* a confirmé le jugement de relaxe du tribunal correctionnel de Pau du 14 / 12 / 2006 ;

* a confirmé la décision entreprise en ce qu'elle a condamné D... Frédéric à verser en application de l'article 472 du code de procédure pénale à Mme F... Catherine 750 € au titre du préjudice matériel et 750 € au titre du préjudice moral et à M. Z... Christophe la somme de 750 € au titre du préjudice matériel et 750 € au titre du préjudice moral.

L'ARRET DE LA COUR DE CASSATION :

Par arrêt en date du 20 mai 2008, la Cour de Cassation a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la Cour d'Appel de PAU en date du 13 / 09 / 2007 et a renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Toulouse.

Par arrêt en date du 30 Juillet 2008, la Cour d'Appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, a renvoyé l'affaire à l'audience du 14 Octobre 2008 à 14 heures, date à laquelle les parties présentes ou représentées devront comparaître sans nouvelle citation.

Par arrêt en date du 14 Octobre 2008, la Cour d'Appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, a renvoyé l'affaire à l'audience du 02 Décembre 2008 à 14 heures, date à laquelle les parties présentes ou représentées devront comparaître sans nouvelle citation.

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l'audience publique du 02 Décembre 2008,

Ont été entendus :

Monsieur ROGER en son rapport ;

Maître DUPUY-JAUVERT, Avocat de D... Frédéric, en ses conclusions oralement développées ;

Monsieur TREMOUREUX, Avocat Général, en ses observations ;

Maître PRZYBOROWSKI, avocat de Z... Christophe et de A... Catherine épouse B..., en ses conclusions oralement développées et a eu la parole en dernier.

Le Président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 19 Janvier 2009.

DÉCISION :

FAITS ET PROCEDURE

Catherine A... et Christophe Z... ont été renvoyés devant la juridiction de jugement des chefs de diffamation publique envers un particulier et de complicité ce délit, à raison des passages suivants publiés dans l'hebdomadaire " Le Nouveau Détective " : " Il se faisait passer pour un séminariste ou un dresseur de tigres ", " S'inventant des métiers (....) étudiant vétérinaire, séminariste, soigneur de tigres ", " Frédéric s'installe dans la chambre de l'enfant disparu, dans son lit " ;

Le jugement du TGI de PAU, en date du 14 décembre 2006, a relaxé M. Z... Christophe et Mme A... Catherine du chef de diffamation envers un particulier et a condamné M. D... Frédéric à payer 750 euros au titre du préjudice financier et 750 euros au titre du préjudice moral à chacun des prévenus.

Par arrêt rendu le 13 septembre 2007, la Cour d'appel de PAU, a relaxé M. Z... Christophe et Mme A... Catherine et a condamné M. D... Frédéric à payer 750 euros au titre du préjudice financier et 750 euros au titre du préjudice moral à chacun des prévenus.

Pour confirmer le jugement ayant relaxé les prévenus, l'arrêt attaqué énonce que la partie civile, qui se targue de " plusieurs années d'imposture ", ne saurait qualifier de diffamatoire à son endroit l'imputation de s'être inventé des métiers dont l'exercice, pour insolite que soit leur succession, ne présente aucun caractère attentatoire à son honneur ; il relève que la partie civile ne conteste pas avoir usurpé l'identité d'un jeune Américain et avoir été condamnée pour ces faits aux Etats-Unis ; il ajoute que, sans même qu'il y ait lieu de s'interroger sur la bonne foi des prévenus, l'élément matériel du délit de diffamation n'est pas constitué faute pour les assertions reprochées d'être susceptibles de porter atteinte à l'honneur ou à la considération du plaignant ;

La Cour de cassation, par arrêt en date du 20 mai 2008, a cassé l'arrêt de la Cour d'appel de PAU au motif qu'il y avait lieu " de rechercher non pas si la nature des métiers en cause était attentatoire à l'honneur, mais si le mensonge consistant à prétendre qu'on les avait exercés n'avait pas ce caractère ".

L'appelant et son conseil soutiennent que les allégations sur les métiers sont mensongères car M. D... n'a jamais exercé ces métiers et il importe peu que ces allégations aient été reprises d'un article de " L'Express ". Ils affirment que l'imputation de propos mensongers est nécessairement diffamatoire. Ils soutiennent également que les allégations sur le fait qu'il ait couché dans le lit de l'enfant sont mensongères. Qu'il s'agit d'une extrapolation, d'une image choisie pour marquer les esprits, ce faisant, nécessairement mensongère et choquante. Ils contestent que les prévenus puissent se prévaloir de leur bonne foi, notamment parce que les prévenus ne se sont pas livrés à une enquête sérieuse et parce que est privé du bénéfice de la bonne foi le journaliste qui a procédé par extrapolation. Ils sollicitent 10 000 euros en réparation du préjudice subi et 2 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 (sic).

Les prévenus, Mme A... et M. Z... demandent de confirmer le jugement rendu en ce qu'il a justement considéré que l'article poursuivi ne contenait aucune imputation ou allégation susceptible de porter atteinte à l'honneur ou à la considération, à titre subsidiaire d'accorder aux prévenus le bénéfice de la bonne foi. Ils font valoir que les propos critiqués doivent être interprétés les uns par rapport aux autres et dans leur contexte qui est un article énumérant les multiples impostures commises par M. D.... Ils revêtent ainsi un caractère parfaitement anodin au regard des faits beaucoup plus graves qu'il a commis et qu'il ne conteste pas avoir commis.

A titre reconventionnel, ils demandent une indemnité de 2500 euros pour leur préjudice matériel et de 5000 euros pour leur préjudice moral sur le fondement des articles 472 et 515 alinéa 2 du Code de procédure pénale pour procédure abusive.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'élément matériel de l'infraction

Contrairement à ce qu'affirme M. D... l'imputation de mensonge n'est pas nécessairement diffamatoire. Il est des mensonges qui n'ont ni pour objet ni pour effet de nuire à autrui. Notamment, l'imputation d'avoir menti ne porte pas atteinte à l'honneur de celui qui en est accusé si il s'agit d'un mensonge de type " farce " qui tend à faire sourire et qui ne nuit pas à autrui.

Ainsi, la partie civile, ne saurait qualifier de diffamatoire à son endroit l'imputation mensongère mais amusante de s'être inventé des métiers insolites, laquelle ne présente aucun caractère attentatoire à son honneur et à sa considération. Il ne s'agit pas en effet de métiers susceptibles de conférer des prérogatives particulières ou dont le titre serait protégé par la loi ou qui seraient en elles-mêmes porteuses d'immoralité, ce qui rendrait l'imputation de les avoir exercées attentatoire à l'honneur et à la considération.

Au sujet de l'imputation selon laquelle M. D... s'est installé " dans la chambre de l'enfant disparu, dans son lit ", le Tribunal et la Cour de Pau ont justement relevé qu'il s'agissait de l'usurpation d'identité d'un jeune américain, usurpation non contestée et pour laquelle M. D... a été condamné à plusieurs années d'emprisonnement aux Etats-Unis.

Il n'est pas contesté que M. D... a vécu dans la famille de l'enfant, d'abord chez la soeur de Nicholas G... puis, chez sa mère dans le petit appartement de 40 m ² qu'elle loue où il restera un mois et demi, ainsi qu'il l'a lui même déclaré. Il est clair que " coucher dans le lit " est utilisé au sens figuré, la partie, chambre et lit, étant prise pour le tout, le logement de l'enfant.

Dans ces conditions, le recours à une expression symbolique, l'utilisation d'une métaphore pour caractériser le fait que M. D... avait vécu dans la famille de l'enfant relève de la licence journalistique ne dépassant pas les limites de la liberté d'expression.

Sur la bonne foi.

En matière de diffamation, l'admission de la bonne foi suppose que l'auteur des propos ait agi sans animosité personnelle, en poursuivant un but légitime, avec prudence et mesure dans l'expression, en ayant vérifié sa source.

Ces caractères sont réunis en l'espèce :

Il ne ressort de l'article incriminé aucune animosité personnelle du journaliste envers M. D.... Contrairement à ce que prétend M. D..., il n'y a pas dans l'article incriminé que des éléments à charge. Il en ressort au contraire que le plaignant ne serait pas un escroc mais plutôt un homme " en souffrance " dont les impostures cachent un besoin d'amour. L'article laisse souvent la parole à Frédéric D... afin que celui-ci tente d'expliquer son comportement criminel.

Le but poursuivi est légitime puisque l'article, non seulement expose les impostures les plus notables mais donne la parole à Frédéric D..., à son défenseur et à un psychiatre qui donne un éclairage scientifique sur un phénomène exceptionnel.

Les expressions reprochées aux prévenus ne sont pas malveillantes mais anodines et non dénuées de base factuelle.

Enfin, même si, s'agissant de l'exercice des métiers, l'article s'est contenté de reprendre un article de " l'Express " qui avait reproduit les propos du grand-père de Frédéric D..., les prévenus se sont livrés à une enquête sérieuse puisqu'ils ont procédé à une interwiew laissant abondamment la parole à Frédéric D... et ont utilisé des informations puisées dans un livre d'enquête et dans de précédents articles.

Les prévenus devront donc être relaxés des fins de la poursuite.

Sur la demande de dommages et intérêts

M. D... s'est constitué partie civile et a déclenché une procédure particulièrement lourde alors qu'il ne pouvait manifestement pas se plaindre d'un quelconque préjudice. Les prévenus ont du faire face à une instruction judiciaire et à trois années de procédure ayant donné lieu à 4 décisions de justice. M D... a formé pourvoi en cassation sans exécuter les condamnations prononcées à son encontre. Il y a donc lieu, en application de l'article 515 du code de procédure pénale d'augmenter les dommages intérêts pour le préjudice subi depuis la décision de première instance, Il leur sera accordé en outre la somme de 1000 euros chacun.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Au fond :

Confirme le jugement de relaxe du tribunal correctionnel de Pau en date du 14 décembre 2006

Confirme la décision entreprise en ce qu'elle a condamné M. D... Frédéric en application de l'article 472 du Code de procédure pénale à payer à chacun des prévenus la somme de 750 euros au titre du préjudice moral et 750 euros au titre du préjudice financier

Condamne en outre M D..., en application de l'article 512 du Code de procédure pénale à payer la somme de 1000 euros à Mme F... Catherine et celle de 1000 euros à M. Z... Christophe

En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 08/00830
Date de la décision : 19/01/2009

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Pau


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-01-19;08.00830 ?
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