24/02/2020
ARRÊT N°141
N° RG 18/00133 - N° Portalis DBVI-V-B7C-MBNH
AA/MB
Décision déférée du 12 Décembre 2017 - Tribunal d'Instance de TOULOUSE ( 11-17-0022)
P.MARFAING
N... P...
C/
Organisme POLE EMPLOI OCCITANIE
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU VINGT QUATRE FEVRIER DEUX MILLE VINGT
***
APPELANTE
Madame N... P...
[...]
[...]
Représentée par Me Olivier MICHAUD de la SELARL JURICIAL, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIME
Organisme POLE EMPLOI OCCITANIE
est représenté par son directeur régional
[...]
[...]
Représenté par Me Françoise DUVERNEUIL de l'ASSOCIATION VACARIE - DUVERNEUIL, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Novembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. BLUM, président et A. ARRIUDARRE, Vice Président placé, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
S. BLUME, président
A. ARRIUDARRE, vice-président placé
J.C. GARRIGUES, conseiller
Greffier, lors des débats : C.PREVOT
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par S. BLUME, président, et par C.PREVOT, greffier de chambre
EXPOSE DU LITIGE
Mme P..., qui travaillait en activité réduite et était inscrite à ce titre auprès de Pôle Emploi, a sollicité en février 2009, en prévision de la rupture de son contrat de travail, le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Elle a bénéficié de l'allocation de solidarité spécifique entre le 24 juin 2009 et le 22 septembre 2010 puis a été admise au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi entre le 13 mai 2010 et le 22 septembre 2010. Demandant à bénéficier de cette dernière aide de manière rétroactive, soit à compter de février 2009, et face au refus de Pôle Emploi, elle a saisi le tribunal d'instance afin d'obtenir la condamnation de Pôle Emploi à lui verser cette allocation à compter de février 2009. Par jugement en date du 27 avril 2012, confirmé par arrêt du 25 novembre 2014, Mme P... a été déboutée de ses demandes.
Dans l'intervalle, l'employeur de Mme P... a été condamné par le conseil des Prud'hommes d'Aix en Provence à lui verser la somme de 75 336,58 euros au titre d'un rappel de salaire, son contrat de travail à temps partiel ayant été requalifié à temps plein et son licenciement jugé irrégulier.
Par courrier du 25 avril 2013, Pôle Emploi a notifié à Mme P... son obligation de lui rembourser un trop perçu de prestations d'aide au retour à l'emploi pour la période du 21 décembre 1996 au 24 octobre 2010 d'un montant de 4 884,25 euros en application de deux régularisations intervenues en 2011 et 2013 suite à la transmission par Mme P... de nouvelles attestations de son employeur pour la période de 2007 à 2009 puis du jugement du conseil de Prud'hommes d'Aix en Provence du 24 juin 2012.
Par acte d'huissier de justice en date du 13 avril 2015, Pôle Emploi Midi-Pyrénées (Pôle Emploi) a fait assigner Mme N... P... devant le tribunal d'instance de Toulouse en paiement des sommes de 4 884,25 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure et de 488,42 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire en date du 12 décembre 2017, le tribunal d'instance a :
- rejeté le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée,
- condamné Mme N... P... à payer au Pôle Emploi Midi-Pyrénées devenu Pôle Emploi Occitanie, pris en la personne de son représentant légal, la somme de 4884,25 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 février 2015,
- rejeté les demandes présentées par Mme N... P...,
- condamné Mme N... P... aux dépens ainsi qu'à payer au Pôle Emploi Midi-Pyrénées devenu Pôle Emploi Occitanie pris en la personne de son représentant légal une indemnité de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Pour ce faire, le tribunal après avoir examiné l'arrêt rendu par la cour d'appel le 25 novembre 2014, a rappelé qu'il avait déclaré sans objet les demandes de restitutions présentées postérieurement à la décision des prud'hommes et l'attestation assedic établie par l'employeur de Mme P... formulées par Pôle Emploi et a considéré qu'en l'absence de demande de condamnation présentée par Pôle Emploi devant la cour d'appel, il n'y avait pas d'autorité de la chose jugée affectant la demande en paiement présentée par cet organisme.
Il a fait droit à la demande de Pôle Emploi justifiée par les pièces versées au titre du re-calcul réalisé faisant apparaître un trop perçu de 4 884,25 euros en considérant que l'absence d'information de Mme P... relative aux retenues opérées en raison de l'existence de ce trop perçu ne faisait pas obstacle à la créance de Pôle Emploi.
Il a débouté Mme P... de sa demande reconventionnelle en retenant que la cour d'appel avait statué sur la validité des régularisations réalisées.
Mme P... a relevé appel de toutes les dispositions du jugement par déclaration en date du 11 janvier 2018.
DEMANDES DES PARTIES
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 27 août 2018, Mme P..., appelante, demande à la cour, au visa des articles 1302-1 et 1351 du Code civil, L 5422-5 et L 5426-8-1 du code du travail, 122 du code de procédure civile, de :
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
- juger que la demande de Pôle Emploi est irrecevable comme prescrite et se heurtant à l'autorité de la chose jugée ;
- juger que cette demande n'est pas justifiée ;
- constater les manquements de Pôle Emploi à ses obligations à son égard et le préjudice en ayant résulté pour elle, justifiant qu'il lui soit octroyé une somme équivalente à celle demandée par l'intimé à titre de répétition d'indu ;
- débouter Pôle Emploi de l'ensemble de ses demandes ;
- le condamner à lui régler la somme de 5 181,65 euros au titre de la régularisation de ses droits ;
- le condamner au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 30 mai 2018, Pôle Emploi Occitanie, intimé, demande à la cour, au visa des articles 1235, 1244-1 et 1376 et suivants du Code civil, des dispositions du règlement annexé à la Convention du 6 mai 2011 relative à l'indemnisation du chômage, de :
- rejeter l'appel de Mme P... et le déclarer infondé ;
- par conséquent, confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel en la condamnant au paiement de la somme de 4 884,25 euros outre les intérêts au taux légal a compter du 19 février 2015 ;
- y ajoutant, la condamner aux dépens de première instance et d'appel outre l'octroi d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est renvoyé, pour l'exposé des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 novembre 2019.
L'affaire a été examinée à l'audience du 26 novembre 2019.
MOTIFS :
Sur les fins de non recevoir :
Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
En vertu de l'article L 5422-5 du code du travail, l'action en remboursement de l'allocation d'assurance indûment versée se prescrit par trois ans. En cas de fraude ou de fausse déclaration, elle se prescrit par dix ans. Ces délais courent à compter du jour de versement de ces sommes.
L'action en restitution de Pôle Emploi, introduite par acte du 13 avril 2015, n'est pas prescrite en ce que cet organisme s'est trouvé dans l'impossibilité d'agir en restitution des allocations versées tant qu'il n'avait pas été statué sur l'action introduite par Mme P... à l'encontre de son employeur au titre de la requalification de son contrat de travail et de l'irrégularité de son licenciement. Le conseil des prud'hommes ayant requalifié le contrat de travail et déclaré irrégulier le licenciement de Mme P... comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse par jugement du 14 juin 2012, la prescription triennale a été interrompue par l'action introduite le 13 avril 2015 ; l'action en restitution est donc recevable.
C'est à juste titre que le tribunal a rejeté le moyen tiré de la chose jugée en rappelant que l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement et qu'aucune demande en restitution de l'indu n'avait été présentée devant la cour d'appel.
Mme P... a ainsi demandé à la cour d'appel d'infirmer le jugement du tribunal d'instance en date du 27 avril 2012 qui l'avait déboutée de sa demande en paiement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter de février 2009 et subsidiairement de sa demande de condamnation de Pôle Emploi à lui verser la somme de 34 022,96 euros au titre de l'aide au retour à l'emploi du 17 mars 2009 au 21 mai 2012 et en tout état de cause à lui verser cette somme à titre de dommages et intérêts. L'arrêt en date du 25 novembre 2014 a confirmé le jugement entrepris et considéré que la demande présentée par Pôle Emploi de voir dire bien-fondées les demandes de restitutions opérées était sans objet. Le tribunal a, à juste titre, souligné qu'aucune demande en paiement n'avait été formulée par Pôle Emploi, que ce soit devant le tribunal d'instance ou devant la cour, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de considérer qu'il y avait autorité de la chose jugée ; l'action en restitution du trop-perçu de Pôle Emploi est donc recevable et le jugement doit être confirmé de ce chef.
Sur la demande en paiement :
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a condamné Mme P... à régler la somme de 4 884,25 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 19 février 2015, à Pôle Emploi. Il suffira de rappeler à ce titre que le tribunal, après avoir examiné les pièces versées, a retenu que les paiements réalisés au titre de l'allocation de solidarité spécifique ont été remplacés par un paiement au titre de l'aide au retour à l'emploi à la suite de documents transmis par Mme P... selon courrier de notification du 10 août 2011 qui lui a été envoyé puis que le montant de son allocation d'aide au retour à l'emploi a été recalculé à la suite du jugement du conseil des prud'hommes selon notification qui lui a été faite par courrier du 16 avril 2013 et qu'il résultait des avis de paiement et du tableau récapitulatif produit par Pôle Emploi que Mme P... avait bénéficié, après retenues de sommes au titre de trop-perçus antérieurs, d'un versement indu pour un total de 4 884,25 euros.
Les critiques apportées par Mme P... en cause d'appel ne sont pas de nature à remettre en cause ces éléments tel que justement appréciés par le premier juge pas plus que les avis de paiement qu'elle produit mentionnant le versement d'une allocation de solidarité spécifique dès lors qu'ils sont antérieurs à la régularisation intervenue en 2011 à la suite des pièces qu'elle avait envoyées à Pôle Emploi ni que ses relevés bancaires retraçant les sommes perçues. Le jugement mérite donc confirmation de ce chef.
Sur la demande indemnitaire de Mme P... :
C'est à juste titre que le tribunal a rejeté la demande formulée par Mme P... au titre de régularisations abusives pratiquées par Pôle Emploi en retenant que la cour d'appel, dans son arrêt du 25 novembre 2014, avait statué sur la validité de ces régularisations.
Il convient de préciser à ce titre que Mme P... ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article L 5426-8-1 du code du travail en considérant que les retenues opérées par Pôle Emploi ne pouvaient se faire que si elle ne contestait pas le caractère indu des sommes qui lui ont été versées puisque ces dispositions sont issues de la loi du 28 décembre 2011 et que les retenues ont été opérées entre juin 2009 et octobre 2010 au titre de trop perçus antérieurs.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme P... mais également en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Mme P..., partie perdante, supportera les dépens d'appel.
Pôle Emploi est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens qu'il a dû exposer à l'occasion de cette procédure. Mme P... sera donc tenue de lui payer la somme globale de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 alinéa 1er 1° du code de procédure civile en complément de la somme déjà allouée à ce titre par le premier juge sans qu'elle ne puisse elle-même obtenir une quelconque somme sur le fondement de ces dispositions.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Déclare l'action recevable comme non prescrite,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Condamne Mme N... P... à verser à Pôle Emploi Occitanie la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
La déboute de sa demande fondée sur ces mêmes dispositions,
La condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
C. PREVOT S. BLUME