09/05/2022
ARRÊT N°
N° RG 17/00010 - N° Portalis DBVI-V-B7B-LL4J
MD/NB
Décision déférée du 06 Décembre 2016 - Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN - 16/00006
(M. [S])
EARL DES GABACHS
C/
[G] [O]
Compagnie d'assurances AR-CO
SARL SEGUY TP
Société SMABTP
SARL SOLS ET EAUX
SCP VITANI BRU
INFIRMATION
et EXPERTISE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU NEUF MAI DEUX MILLE VINGT DEUX
***
APPELANTE
SAS LARROQUE venant aux droits de L'EARL DES GABACHS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
[M] [I]
[Localité 12]
Représentée par Me Laurent MASCARAS de l'ASSOCIATION D'AVOCATS MASCARAS CERESIANI - LES AVOCATS ASSOC IES, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Elisabeth MALET de la SCP MALET FRANCK ET ELISABETH, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMES
Maître [G] [O], pris en sa qualité de commissaire à l'exéxution du plan de la SARL SOLS ET EAUX, fonctions auxquelles il a été désigné par jugement en date du 3 avril 2015 prononcé par le Tribunal de Commerce de CASTRES
[Adresse 1]
[Localité 9]
Représenté par Me Rachel LAHANA, avocat au barreau de TOULOUSE
SCP VITANI BRU, prise en sa qualité de mandataire judiciaire de la SARL SOLS et EAUX
[Adresse 16]
[Adresse 16]
[Localité 10]
Représentée par Me Rachel LAHANA, avocat au barreau de TOULOUSE
SARL SOLS ET EAUX
[Adresse 15]
[Localité 11]
Représentée par Me. Rachel LAHANA, avocat au barreau de TOULOUSE
SARL SEGUY TP, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 19]
[Localité 7]
Représentée par Me Bernard DE LAMY, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Bertrand DE GERANDO, avocat au barreau de PARIS
SMABTP, Société d'Assurance Mutuelle à cotisations variables, poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représentée par Me Emmanuel GILLET de la SCP CARCY-GILLET, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Ingrid CANTALOUBE-FERRIEU, avocat au barreau de TOULOUSE
Cie d'assurance AR-CO
[Adresse 18]
[Adresse 13] (BELGIQUE)
Représentée par Me. Marie-Laure MARGNOUX, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 14 Février 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :
M. DEFIX, président
C. ROUGER, conseiller
J.C. GARRIGUES, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : A. CAVAN
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.
EXPOSÉ DU LITIGE ET PROCÉDURE
Courant mars 2010, l'Earl des Gabachs a fait entreprendre la création d'une retenue collinaire à [Localité 17] (82) aux fins d'irrigation, dont l'étude a été confiée à la Sarl Sols et Eaux assurée par la société de droit belge Arichitectes-Coopérative dite Arc-Co, et la réalisation à la Sarl Séguy TP assurée par la Smabtp.
Les travaux ont été achevés en août 2010.
L'Earl des Gabachs a dénoncé l'incapacité de la retenue à remplir sa destination d'irrigation de ses cultures de maïs en raison d'un défaut d'étanchéité.
Par ordonnance du 15 mai 2014, le juge des référés du tribunal de grande instance de Montauban a désigné M. [D] en qualité d'expert qui déposé son rapport le 31 mars 2015.
Par actes d'huissier des 2 et 7 décembre 2015, l'Earl des Gabachs a fait assigner la société Séguy TP, la Smabtp et la société Sols et Eaux devant le tribunal de grande instance de Montauban aux fins d'indemnisation.
La société Sols et Eaux ayant été placée en redressement judiciaire depuis le 27 février 2015, Maître [O], administrateur judiciaire et la Scp Vitani-Bru, mandataire judiciaire sont intervenus volontairement à l'instance le 9 mars 2016.
Par acte du 7 septembre 2016, l'Earl des Gabachs a fait appeler en cause la compagnie d'assurances Arc-Co.
La jonction a été ordonnée le 7 octobre 2016.
Par jugement contradictoire en date du 6 décembre 2016, le tribunal de grande instance de Montauban a :
'- condamné la société Séguy TP in solidum avec la Smabtp à payer à l'Earl des Gabachs la somme de 45 000 € au titre de la reprise des désordres ;
- dit opposable la franchise contractuelle de la police d'assurance de responsabilité décennale génie civil ;
- les a condamnés à lui payer la somme de 38 495 € au titre des dommages consécutifs ;
- débouté l'Earl des Gabachs de ses demandes plus amples ;
- condamné la société Séguy Tp in solidum avec la Smabtp à payer à l'Earl des Gabachs la somme de 3 000 € en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile ;
- condamné la Smabtp à relever et garantir la société Séguy Tp du montant des condamnations prononcées in solidum y compris au titre des dépens, sous réserve de sa franchise contractuelle ;
- mis hors de cause la société Sols et Eaux, Me [O] et la Scp Vitani-Bru es-qualité'.
Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé qu'il n'était pas discuté que l'ouvrage a été achevé et son prix intégralement réglé par le maître de l'ouvrage de sorte qu'il a fait l'objet d'une réception tacite sans réserve et que les désordres apparus postérieurement et consistant en un défaut d'étanchéité du plan d'eau rendaient l'ouvrage impropre à sa destination qui est de constituer une retenue collinaire en vue de l'irrigation de terres agricoles, engageant ainsi la responsabilité décennale de la Sarl Seguy TP pour les seuls travaux que cette dernière a réalisés comprenant la création d'une retenue collinaire impliquant l'étanchéité des terres du lit du lac.
Considérant par ailleurs que la société Sols et Eaux avait reçu une mission de type G2 pour réaliser d'une part une étude de faisabilité du projet de retenue collinaire par une évaluation la plus précise possible du contexte géologique et géotechnique du projet avec détermination des caractéristiques de l'ancrage de la digue permettant notamment d'assurer son étanchéité et d'autre part d'assurer le suivi des travaux pour vérifier leur conformité, le tribunal a estimé, au regard des éléments fournis par l'expert, que ce bureau d'études qui avait vainement recommandé une étude complémentaire avait accompli des prestations sans lien de causalité avec le désordre et devait être mis hors de cause.
Pour retenir la garantie décennale de la Smabtp qui considérait que la police souscrite de génie civil excluait la réalisation de barrages de tout type, le tribunal a jugé que l'ouvrage litigieux était le fruit d'un travail de terrassement et de compactage des terres en forme de talus sans apport maçonné ou de béton ne pouvant s'entendre comme un barrage et qu'en tout état de cause la clause d'exclusion de garantie n'était pas suffisamment précise et limitée pour permettre à l'assuré d'apprécier l'étendue de la garantie souscrite alors que son activité principale est le terrassement.
Le tribunal a retenu la première des trois solutions de reprise des désordres proposées par l'expert judiciaire et consistant en un apport d'argile et la réalisation d'un nouveau compactage pour une valeur de 45 000 euros, solution privilégiée par l'expert et entrant dans la réparation intégrale du préjudice subi. Sur la base des calculs opérés par l'expert, le tribunal a fixé le préjudice économique résultant de la différence de rendement entre la culture irriguée et celle non irriguée entre 2011 et 2014 outre les frais de remise en service du matériel de pompage non utilisé.
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Suivant décision du 3 avril 2015, le tribunal de commerce de Castres avait adopté un plan de redressement de la Sarl Sols et Eaux et désigné Maître [G] [O] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
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Par déclaration en date du 2 janvier 2017, l'Earl des Gabachs a relevé appel de ce jugement en énonçant chacun des éléments du dispositif du jugement au titre des chefs critiqués.
Suivant ordonnance du 10 octobre 2019, le magistrat chargé de la mise en état a rejeté la demande d'expertise présentée par la société appelante après l'avoir déclarée recevable à la solliciter pour la première fois en appel, en considérant que la critique des solutions de remise en état préconisées par l'expert, soit trois méthodes reposant sur des techniques différentes et des coûts différents, relève de l'appréciation de la cour statuant au fond.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le19 janvier 2022, la Sas Larroque, anciennement dénommée Earl des Gabachs, appelante, demande à la cour au visa des articles 1792, 1134 et suivants, 1147 et suivants du code civil en leur rédaction applicable au litige, de :
- réformer le jugement dont appel et, statuant à nouveau,
- débouter la Smabtp, la Sarl Seguy Tp, la Sarl Sols et eaux, 'la Scp Vitani-Bru es qualité, Maître [G] [O] es qualité' et la compagnie Ar-Co de l'ensemble de leurs demandes à son encontre ;
À titre principal,
- 'dire engagée' la garantie décennale de la Sarl Seguy Tp et de la Sarl Sols et eaux ;
- 'juger acquise' l'assurance décennale de la Smabtp et de la compagnie Ar-Co ;
À titre subsidiaire,
- 'dire engagée' la responsabilité contractuelle de la Sarl Seguy Tp et de la Sarl Sols et eaux;
En tout état de cause, en tant que de besoin, avant dire droit,
- ordonner une mesure d'expertise judiciaire ;
- commettre pour y procéder tel expert spécialiste en mécanique des sols et géotechnique;
En tout état de cause : au fond,
- condamner in solidum la Sarl Seguy Tp, la Smabtp, la Sarl Sols et eaux et la compagnie Ar-Co à lui payer les sommes de :
' 350 000 euros HT, soit 420 000 euros TTC à titre de dommages et intérêts pour les travaux de reprise ;
' 38 495 euros HT soit 46 194 euros TTC à titre de dommages et intérêts pour préjudice économique pour les années 2011, 2012, 2013 et 2014 (perte de production, révision du matériel) ;
' 19 245,50 euros hors taxe à titre de dommages et intérêts pour préjudice économique pour les années 2015 et 2016 (perte de production, révision du matériel) ;
' 24 046 euros hors taxe à titre de dommages et intérêts pour préjudice économique pour les années 2017 et 2018 ;
' 30 069 euros hors taxe à titre de dommages et intérêts pour préjudice économique pour les années 2019, 2020 et 2021
' 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner in solidum la Sarl Seguy Tp, la Smabtp et la Sarl Sols et eaux et la compagnie Ar-Co aux entiers dépens, y compris ceux de référé, d'expertise, de première instance et d'appel ces derniers pouvant être recouvrés directement par la Scp Malet.
Invoquant les dispositions de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme interdisant le déni de justice, la société appelante affirme que le juge doit apprécier l'objectivité du rapport d'expertise qui lui est soumis et respecter le principe de la réparation du préjudice, office que le tribunal n'a pas respecté en l'espèce en n'exerçant pas son pouvoir juridictionnel en présence de solutions ne reposant pas sur des travaux pérennes et conformes notamment en n'examinant pas les contradictions du rapport d'expertise et ne tenant pas compte des refus d'exécution des propositions 1 et 2 par les entreprises contactées par le maître de l'ouvrage.
La société appelante considère que la mise en oeuvre d'une membrane étanche est la seule méthode à garantir l'efficacité de la retenue collinaire et l'étanchéité du lac plus efficace bien que plus coûteuse qu'une couche supplémentaire d'argile qui relève d'un 'replâtrage'. Elle a demandé en tant que de besoin une nouvelle expertise.
Sur le périmètre des travaux confiés aux parties intervenantes, la société appelante a affirmé que la société Seguy TP avait bien réalisé la construction de l'intégralité de la retenue collinaire comme en attestent notamment ses propres déclarations devant l'expert judiciaire et que la société Sols et Eaux avait pour sa part manqué à ses obligations de suivi de chantier alors qu'un contrôle interne aurait permis de déceler les constatations de l'expert sur faiblesse d'épaisseur et de qualité de l'argile.
Elle a considéré que le société Sols et Eaux a omis de signaler l'existence du litige aux organes de la procédure de redressement judiciaire.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 21 janvier 2022, la Sarl Sols et Eaux, Maître [O], pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la Sarl Sols et eaux, et la Scp Vitani-Bru, pris en sa qualité de mandataire judiciaire de la Sarl Sols et eaux, intimés demandent à la cour au visa de l'article L. 622-26 du code de commerce et des anciens articles 1382 et suivants du code civil de :
- déclarer la créance alléguée par 'l'Earl des Gabachs' comme lui étant inopposable à elle ainsi qu'à la Scp Vitani-Bru es qualité et Me [O] es qualité ;
À titre subsidiaire,
- dire que les demandes de 'l'Earl des Gabachs' doivent s'entendre en hors taxe dans la mesure où elle récupère la Tva ;
- homologuer le choix de la solution de reprise préconisée par l'expert à hauteur de
45 000 euros ;
- juger qu'elle n'a pas engagé sa responsabilité et rejeter par voie de conséquence tout recours à son encontre ;
À défaut,
- dire qu'elle doit être relevée et garantie de toutes éventuelles condamnations par la société Séguy Tp et son assureur la Smabtp ;
- condamner tout succombant au versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- le condamner aux entiers dépens de l'instance.
Les intimés reprochent à la société appelante de n'avoir procédé à aucune déclaration de créance, le tribunal n'ayant pas statué sur ce moyen d'inopposabilité déjà soulevé en première instance et a subsidiairement pour le surplus demandé la confirmation du jugement.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 29 mai 2017, la Sarl Séguy TP, intimée demande à la cour au visa de l'article 1792 du code civil de :
- constater que les parties ne contestent pas la réception de l'ouvrage sans réserve avant l'apparition du désordre qui était non apparent au moment de cette réception ;
- dire que l'ouvrage a fait l'objet d'une réception tacite sans réserve, à tout le moins prononcer la réception judiciaire sans réserve de ses travaux à la date du 2 mars 2011;
- confirmer le jugement dont appel à ce titre et le réformer dans toutes ses autres dispositions;
- juger que le désordre n'est pas imputable aux travaux tel qu'ils résultent de son contrat d'entreprise la liant à l'Earl Les Gabachs et la mettre dans ces conditions hors de cause ;
- dire en tout état de cause que la société Sols et Eaux est pleinement et entièrement responsable du désordre au titre de son contrat d'études et de maîtrise d'oeuvre partielle qui imposait dans le lit du lac uniquement un décapage des zones d'emprunts en laissant une épaisseur d'argile d'un mètre, sans compactage ;
- l'exonérer en conséquence de toute responsabilité ;
À titre subsidiaire, si par extraordinaire elle était condamnée,
- condamner la société à la relever et garantir sur le fondement de l'article 1382 du code civil en sa rédaction alors applicable au litige au titre de son manquement contractuel vis-à-vis de l'Earl Les Gabachs et si besoin, fixer la créance au passif de la société sols et eaux ;
- condamner au même titre la compagnie d'assurances Ar-Co, sur le fondement de l'action directe dont elle bénéficie contre l'assureur de la société Sols et Eaux, au montant des condamnations prononcées à son encontre ;
- condamner dans tous les cas la Smabtp, son assureur, à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, y compris les éventuels frais et dépens;
- condamner in solidum l'Earl les Gabachs, la société Sols et Eaux et la compagnie d'assurances Ar-Co à la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont les frais d'expertise.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 26 mai 2021, la Société Mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (Smabtp), intimée demande à la cour de :
- rejeter l'appel de la Sas Larroque quant à ses demandes au titre de son préjudice matériel et de son préjudice immatériel ;
- rejeter la demande d'expertise avant dire droit réclamée par le maître d'ouvrage ;
Sur l'appel incident,
- débouter la Sas Larroque ainsi que la Société Sols et Eaux de l'ensemble de leurs demandes en ce qu'elle sont dirigées à l'encontre de la Sarl Seguy Tp et par voie de conséquence à son encontre ;
En conséquence,
- condamner la Sas Larroque à lui rembourser les sommes payées par la compagnie concluante en exécution du jugement dont appel ;
Dans tous les cas,
- dire qu'elle ne peut devoir aucune garantie au titre du remboursement du coût des travaux payés ou encore de la réparation des dommages matériels affectant les travaux;
À défaut,
- limiter le montant du préjudice matériel du maître de l'ouvrage à la somme de 35.000 euros;
- rejeter toute demande d'indemnisation de la Sas Larroque au titre de son préjudice immatériel;
- dire que les sommes susceptibles d'être allouées à l'appelante seront des sommes HT ;
En cas de condamnation de la Sarl Seguy Tp, ne prononcer que des condamnations individualisées entre l'entreprise et le Bureau d'Etudes ;
Reconventionnellement,
- condamner le Bet Sols et Eaux '(sauf à constater seulement la créance)' in solidum avec son assureur la Compagnie Ar-Co à relever et garantir intégralement la Smabtp des condamnations qui seraient prononcées à son encontre, à raison des fautes imputables à Sols et Eaux, susceptibles d'être invoquées sur le fondement délictuel ou quasi-délictuel par la concluante;
À défaut,
- appliquer la règle de la réduction proportionnelle à l'égard de la compagnie Ar-Co à condition que la compagnie d'assurance justifie de la prime payée par Sols et Eaux en cas de déclaration de sa mission auprès de la Sas Larroque ;
Dans tous les cas,
- dire qu'elle sera autorisée à déduire de son règlement les franchises opposables à la Sas Larroque ou à toutes parties au titre du préjudice matériel et du préjudice immatériel du maître d'ouvrage ;
- condamner tout succombant à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- statuer sur les dépens comme sur le principal sous le bénéfice des mêmes garanties dont distraction de droit au profit de Me Cantaloube Ferrieu, avocat constitué.
Pour dénier sa garantie, la Smabtp considère que la retenue collinaire n'est pas une catégorie d'ouvrage visée dans les conditions particulières de la police garantissant la responsabilité décennale génie civil qui exclut expréssément les lacs et barrages de tout type et que le dommage n'entre pas plus dans les prévisions de la garantie prévue par la police 'risque des entreprises de construction Artec' limitée à l'indemnisation du préjudice immatériel du maître de l'ouvrage soumise à franchise.
Subsidiairement, elle estime que la responsabilité du bureau d'étude est engagée pour manquement dans son obligation de suivi et de surveillance des travaux et que l'assureur de celui-ci doit sa garantie nonobstant d'une part l'absence de déclaration par l'assuré de la mission reçue, seulement sanctionnée par la réduction proportionnelle et toute clause contraire devant être réputée non écrite et d'autre part l'absence de garantie au titre des missions relatives aux retenues collinaires, ouvrage de génie civil non soumis à l'obligation d'assurance décennale et pouvant dès lors relever de la garantie facultative y compris pour préjudice matériel des tiers lésés et des dispositions de l'article L. 124-5 du code des assurances applicables en l'espèce.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 27 juillet 2017, la compagnie d'assurance Ar-Co, intimée, demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
- condamner la société Séguy Tp ou tout autre succombant au paiement de la somme de
3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- constater l'absence de responsabilité de la société Sols et Eaux, les griefs n'étant pas imputables à son intervention mais uniquement à celle de la société Séguy TP et en l'absence de tout manquement dans l'exécution de la mission limitée de type G2 qui lui a été confiée, déclarer sans objet les demandes et appels en garantie formés à son encontre ;
- dire qu'elle est recevable et bien fondée à opposer les limites du contrat d'assurance N°DP IC 20013 souscrit par la société Sols et Eaux et notamment le refus de garantie du sinistre en raison du défaut de déclaration de la mission et du défaut de garantie de l'activité, les missions relatives aux retenues collinaires relevant de l'exclusion prévue à l'article 1.1 alinéa 4 des conditions générales du contrat ;
- déclarer irrecevables et en tout cas mal fondées les demandes formulées par les sociétés Earl Les Gabachs, Seguy Tp et Smabtp à son encontre au vu du refus de garantie valablement opposé à la société Sols et Eaux ;
- prononcer sa mise hors de cause ;
A titre infiniment subsidiaire,
- la recevoir en son recours en garantie à l'encontre des sociétés Séguy Tp et Smabtp et les condamner in solidum à la relever et la garantir indemne de toute condamnation à raison des fautes imputables à la société Séguy Tp sur le fondement délictuel ;
- juger qu'elle sera autorisée à déduire de tout règlement la franchise opposable aux tiers d'un montant de 25.000 euros ;
- condamner les sociétés Séguy Tp et Smabtp au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La société Ar-Co a principalement soutenu l'absence de responsabilité de son assurée en considérant que la société Sols et Eaux avait une mission limitée à l'étude géotechnique en phase projet et dont le rapport comportait, selon l'expert judiciaire, tous les renseignements nécessaires à la réalisation de la retenue y compris l'indication de la nécessité de procéder à des études complémentaires pour vérifier la pérméabilité du calcaire et rechercher les anomalies karstiques.
Elle a, en tout état de cause, dénié sa garantie pour non respect par l'assurée des conditions générales de la police lui imposant de déclarer sa mission qui ne relevait d'ailleurs pas à la date des faits des activités pour lequelles la société Sols et Eaux était assurée.
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L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 janvier 2022. L'affaire a été examinée à l'audience du 14 février 2022.
MOTIVATION
1. Il est constant que l'Earl des Gabachs a fait réaliser des travaux de création d'une digue collinaire dont il n'est contesté par aucune des parties qu'elle constitue un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil et que ces travaux réalisés par la Sarl Seguy TP ont été réceptionnés par le paiement intégral des factures dont les dernières datent du 21 octobre 2010 et par la prise de possession sans réserve de l'ouvrage.
2. Suivant procès-verbal dressé le 20 juillet 2012 par voie d'huissier, il était constaté que le 'lac' retenu par cette digue est 'quasi vide' avec peu d'eau en son milieu.
Le maître de l'ouvrage a engagé une action en référé en 2014 pour solliciter une expertise et en décembre 2015 une action au fond sur le fondement de la responsabilité décennale du constructeur dirigée contre l'entrepreneur et le bureau d'études.
Le maître de l'ouvrage, appelant, ne conteste que les modalités et l'étendue de la réparation définies par le premier juge sur la base d'un rapport d'expertise dont il critique les conclusions, l'entrepreneur ayant formé appel incident pour voir rejeter toute demande à son égard en raison de l'absence d'imputabilité du dommage aux travaux qu'il a réalisés et le bureau d'études soulèvant principalement l'inopposabilité de la créance éventuelle, invoquée à son encontre, en raison du défaut de déclaration de la créance à la procédure collective puis subsidiairement sa mise hors de cause en raison de la limitation de sa mission et de l'absence de prise en compte par le maître de l'ouvrage de ses préconisations. Les assureurs dénient leur garantie en leur principe ou leur montant.
- sur le rapport d'expertise judiciaire :
3. Il sera tout d'abord relevé que la société appelante soulève avant toute demande et au visa de l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'homme un déni de justice dont elle aurait été victime, en reprochant au tribunal de ne pas avoir exercé 'son pouvoir juridictionnel en présence de lettres de refus et n'a pas rendu la justice de manière équitable', la société Larroque faisant allusion à son refus de voir exécuter par la société Seguy TP une des trois propositions réparatoires de l'expert judiciaire dont elle conteste la pertinence technique du point de vue de son efficacité.
Au-delà des termes employés qui ne sont d'ailleurs suivis d'aucune demande d'annulation de la décision de première instance ni même de l'expertise, il s'avère que la question posée à la cour ne concerne en réalité qu'une critique du volet de la mesure d'instruction sur la réparation du préjudice que l'appelante demande en fin de compte à la cour de réexaminer après la désignation d'un nouvel expert.
Cette question sera traitée après l'examen des responsabilités encourues.
Les conclusions de l'expert sur les causes purement techniques du désordre ne sont en revanche pas discutées. Sur la base du rapport d'un sapiteur spécialisé dans l'étude des sols, l'expert a considéré que la qualité de l'argile mise en place, d'une épaisseur assez faible, est d'une perméabilité limite pour ce genre d'ouvrage en présence d'un compactage réalisé avec du matériel inadéquat sans analyse préalable de la perméabilité.
- sur l'imputabilité du dommage aux travaux réalisés par la société Seguy TP :
4. La société Seguy TP affirme que le devis du 18 janvier 2010 prévoyait seulement son intervention pour un compactage du corps de digue et pour, le lit du lac, un 'décapage de la terre végétale sur l'emprise des ouvrages et des zones d'emprunt'.
Elle souligne le fait qu'elle n'avait aucune mission d'étude des sols et n'était que la simple exécutante des travaux commandés par le maître de l'ouvrage qui en aurait assumé la co-maîtrise d'oeuvre partielle avec la société Sols et Eaux, titulaire des missions G2 et G4, lui imposant de procéder aux préconisations nécessaires et au suivi des travaux.
Toutefois, ainsi que le souligne l'appelante en se fondant d'ailleurs sur le rapport d'expertise judiciaire (p. 25 de ses conclusions), la réponse au dire de la société Seguy TP est nette et sans réplique factuelle pertinente. L'expert judiciaire indique en effet que cette société a bien réalisé la construction de l'intégralité de la retenue collinaire ainsi que le précise la désignation des travaux dans les factures établies sans détailler précisément la nature des travaux réalisés en ajoutant que 'M. Seguy était présent aux différentes réunions tenues sur place. Il n'a pas contesté son implication et a expliqué le mode opératoire du déroulement du chantier de terrassement (digue et fond), les endroits où ont été faits les emprunts d'argile, la manière de compacter ainsi que les interventions lorsqu'il a constaté que la retenue ne se remplissait pas correctement'.
L'expert avait indiqué dans le corps de son rapport que les compactages n'ont pas été réalisés par un 'compacteur à pieds de mouton' mais avec les roues à pneus des tombereaux signant un compactage mal réalisé de telle sorte qu'à supposer que l'analyse préalable des terres à compacter ait été insuffisante et que les préconisations de complément de travaux n'aient pas été suivies par le maître de l'ouvrage, la société Seguy TP est bien intervenue dans la réalisation des travaux de compactage sans aucune réserve ni objection et suivant une méthode inadaptée.
Sa responsabilité est donc bien engagée à ce titre.
- sur l'action engagée à l'endroit du bureau d'études :
5. Il est constant que la société Sols et Eaux a été placée en redressement judiciaire le 27 février 2015, soit antérieurement à l'introduction de l'instance au fond. Il est tout aussi constant que le maître de l'ouvrage n'a déclaré aucune créance à la procédure collective. La société Seguy TP qui sollicite subsidiairement la condamnation de cette société ne produit pour sa part aucune déclaration de créance. Le moyen tiré de l'inopposabilité des créances invoquées à l'endroit de la société Sols et Eaux, soulevé en première instance n'a fait l'objet dans le jugement critiqué d'aucune décision statuant sur ses mérites.
Il n'est pas discuté que le plan de redressement par voie de continuation a été arrêté le 3 avril 2015 soit avant la saisine du juge au fond.
6. L'article L. 622-24 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 applicable à la cause énonce notamment 'À partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d'État'.
Par ailleurs, l'article L. 622-26 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 12 mai 2009 précise notamment : 'À défaut de déclaration dans les délais prévus à l'article L. 622-24, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et les dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ou qu'elle est due à une omission volontaire du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6. Ils ne peuvent alors concourir que pour les distributions postérieures à leur demande.
Les créances non déclarées régulièrement dans ces délais sont inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan et après cette exécution lorsque les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus. Pendant l'exécution du plan, elles sont également inopposables aux personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie.'
6.1 La détermination du caractère antérieur ou postérieur d'une créance née de l'exécution incomplète ou défectueuse de travaux dépend du point de savoir si cette créance trouve son origine dans des prestations effectuées antérieurement ou postérieurement au jugement d'ouverture, la date d'exigibilité de la créance étant indifférente.
En l'espèce, le fait dommageable comme sa constatation sont largement antérieurs à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire.
6.2 Maître [O] qui intervenait en qualité d'administrateur judiciaire et qui a désormais la qualité de commissaire à l'exécution du plan affirme dans ses conclusions avoir été informé de l'assignation engagée au fond contre la société Sols et Eaux par courriel du 23 décembre 2015 (pièce n° 16 de l'intimée).
Enfin, les créances invoquées à l'endroit du bureau d'études n'ont fait l'objet d'aucune procédure en relevé de forclusion, seule voie encore accessible à la date de l'assignation notamment dans l'hypothèse d'une omission volontaire du débiteur lors de l'établissement de
la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6 du code de commerce.
7. Les demandes de condamnation formées contre la société Sols et Eaux doivent donc être jugées inopposables à celle-ci.
- sur l'action dirigée contre l'assureur du bureau d'études :
8. La société Ar-Co sollicite sa mise hors de cause en relevant que la société Sols et Eaux ne l'a pas appelée à l'instance ni n'a même conclu contre elle et en répondant aux demandes directement présentées à son endroit par le maître de l'ouvrage, l'entrepreneur et l'assureur de ce dernier.
9. L'article L. 243-1-1, I du code des assurance dispose 'Ne sont pas soumis aux obligations d'assurance édictées par les articles L. 241-1, L. 241-2, et L. 242-1 les ouvrages maritimes, lacustres, fluviaux, les ouvrages d'infrastructures routières, portuaires, aéroportuaires, héliportuaires, ferroviaires, les ouvrages de traitement de résidus urbains, de déchets industriels et d'effluents, ainsi que les éléments d'équipement de l'un ou l'autre de ces ouvrages.
Les voiries, les ouvrages piétonniers, les parcs de stationnement, les réseaux divers, les canalisations, les lignes ou câbles et leurs supports, les ouvrages de transport, de production, de stockage et de distribution d'énergie, les ouvrages de stockage et de traitement de solides en vrac, de fluides et liquides, les ouvrages de télécommunications, les ouvrages sportifs non couverts, ainsi que leurs éléments d'équipement, sont également exclus des obligations d'assurance mentionnées au premier alinéa, sauf si l'ouvrage ou l'élément d'équipement est accessoire à un ouvrage soumis à ces obligations d'assurance.'
Il s'en suit qu'en vertu de ces dispositions combinées avec celles de l'article L. 124-3 du code des assurances que l'assureur est bien en droit d'opposer à la victime de dommages imputables à la réalisation d'un ouvrage de rétention d'eau pour l'exploitation d'une activité agricole toutes les exceptions opposables au soucripteur de l'assurance telles que les exclusions ou limitations de garantie.
10. Par ailleurs, l'article 1-1 de la police DP IC 20013 souscrite par la société Sols et Eaux auprès de la société Ar-Co prévoit que 'la garantie ne s'applique qu'aux missions ayant fait l'objet d'une déclaration nominative de l'assuré à l'occasion de la déclaration annuelle de ses honoraires'.
Il n'est pas contesté qu'une telle déclaration n'a pas été effectuée, une telle omission n'étant effectivement sanctionnée que par une réduction proportionnelle prévue à l'article. 113-9 du code des assurances.
11. Surtout, le bureau d'études n'était pas assuré pour l'activité accomplie à la date d'exécution de sa mission, l'article 1-1 'Généralités' al. 4 des conditions générales prévoyant que 'Ne sont pas couvertes, sauf conventions particulières, les missions ' relatives à des tunnels, écluses, barrages, travaux en mer, lacs et cours d'eau'.
L'assuré n'a d'ailleurs souscrit par avenant qu'à compter du 1er janvier 2013, l'extension de garantie aux 'digues de protection contre les inondations' et 'les retenues collinaires' démontrant s'il en était besoin que ces activités n'étaient pas garanties auparavant et que l'ouvrage litigieux, par sa nature entrait bien dans la définition d'un barrage par la retenue qu'elle contribuait à assurer d'une étendue liquide sous forme de 'lac', terme indifféremment employé par les parties en cours d'expertise et de procédure.
Certes, la réclamation est intervenue en cours de période contractuelle sous l'empire de cet avenant mais le fait dommageable est antérieur à celle-ci c'est à dire à une époque où ce fait n'était pas assuré alors que la garantie subséquente en base réclamation, prévue à l'article L. 124-5 du code des assurances et opposée par la Smabtp, ne vise que le cas où le fait dommageable est antérieur à la date de résiliation ou d'expiration de la garantie et que la première réclamation est adressée à l'assuré ou à son assureur entre la prise d'effet initiale de la garantie applicable au litige et l'expiration d'un délai subséquent à sa date de résiliation ou d'expiration mentionné par le contrat.
La société Ar-Co doit donc être mise hors de cause.
- sur l'action dirigée contre l'assureur du constructeur :
12. La société Smabtp considère que doit s'appliquer l'article 2 des conditions particulières de la police d'assurance souscrite par la société Seguy TP : 'Pour l'application des garanties de votre contrat, sont considérés comme ouvrages de génie civil garantis, les seuls ouvrages indiqués dans la colonne de droite du tableau figurant page suivante' ajoutant 'tout ouvrage non cité dans la colonne de droite de cette liste ne relève pas des garanties du contrat'.
Il n'est pas discuté que la retenue collinaire n'est pas expressément visée dans cette liste et que l'article 3 de la police exclut expressément des garanties du contrat les 'lacs, les barrages de tout type'. C'est ainsi que la Smabtp a notifié à son assurée par lettre du 4 septembre 2012 qu'elle déniait sa garantie au motif que la retenue collinaire n'entrait pas dans les garanties du contrat.
La notion de barrage évoquée dans cette clause n'est nullement définie par sa taille, ses matériaux ni même ses procédés constructifs et doit s'entendre, sans ambiguïté sur sa définition et de manière suffisamment limitée dans sa portée, comme un ouvrage de rétention d'eau ainsi que cela déjà été retenu pour l'exclusion de la garantie due par la société Ar-Co.
Cette garantie doit donc être écartée.
13. Le maître de l'ouvrage recherche aussi la garantie de l'assureur au titre de la police intitulée 'assurance risques travaux des entreprises de construction Artec' souscrite par l'entrepreneur à compter du 1er janvier 2010.
Sans dénier le principe de la garantie sur la base de cette police, l'assureur oppose l'article 5 des conditions générales de celle-ci qui excluent 'les dépenses engagées par la réalisation ou la finition de l'objet de votre marché ainsi que les dépenses nécessaires pour remédier à une non conformité dans vos prestations contractuelles' de telle sorte que cette garantie ne peut qu'être limitée à la réparation du préjudice immatériel du maître de l'ouvrage.
Cette garantie s'appliquera donc à ce seul préjudice avec application de la franchise contractuelle.
- sur la réparation du préjudice :
14. La discussion est centrée sur l'efficacité de la solution à retenir pour mettre fin au désordre et assurer une réparation intégrale à la victime du désordre sans perte ni profit.
L'expert judiciaire a proposé trois solutions réparatrices selon des techniques différentes et des coûts différents soit :
- un renforcement des épaisseurs d'argile sur toute la surface du plan d'eau avec un compactage adapté pour un montant d'environ 45 000 euros,
- avec un plan d'eau à moitié rempli, un épendage de produit argileux pulvérulent (bentonine + colmatage) sur toute la surface (17 000 m²) à raison de 100 gr/mg pour un montant de 35 000 euros,
- la pose d'une membrane étanche sur le terrain pour un montant de 350 000 euros.
Force est de constater que, dans son rapport du 4 avril 2015 (pièce n° 10 du dossier de l'appelante), l'expert judiciaire ne motive aucunement ses propositions autrement que de manière très succincte dans des réponses aux dires et finalement retient dans ses conclusions (page 12) la 'réfection des travaux (par elle-même)' soit la solution n°1 d'une valeur estimée à 45 000 euros, l'expert ayant par ailleurs décidé d'une répartition de responsabilité à fixant à 95 % la part de la société Seguy TP, appréciation relevant de l'office du juge.
Cette motivation retrouvée en page 11 est réduite à ce paragraphe : 'La solution Bentonite + Comagel n'est qu'une hypothèse parmis les 3 envisagée. Elle est évoquée pour comparer les prix de réparation de l'étanchéité pour réaliser le plan d'eau. Ce ne présume en rien de la composition du terrain rencontrée pour réaliser le plan d'eau. L'étude géotechnique fournie contient tous les renseignements nécessaires à la réalisation correcte de la retenue (digue et plan d'eau)'.
Ces élements sont très insuffisants pour éclairer la juridiction sur l'efficacité de la solution n° 1 proposée et il n'appartient pas à l'expert de dire que l'entrepreneur devra personnellement la mettre en oeuvre. Les éléments unilatéralement produits par le maître de l'ouvrage penchant pour une reprise de l'étanchéité de la digue et de la retenue exigent à tout le moins une analyse plus approfondie de son caractère incontournable pour mettre fin aux désordres étant relevé dans la note établie en 2018 par un expert sollicité par la société des Gabachs et par ailleurs inscrit sur la liste des experts près la cour d'appel : 'Aujourd'hui la demesure des moyens à mettre en oeuvre pour reconsidérer la retenue en résolvant l'ensemble des problèmes d'étanchéité sur le fond en aval, en amont et de part et d'autre de la digue auxquels il faudrait faire face reste inchiffrable excepté une protection totale' (pièce n° 19 du dossier de l'appelante).
Il convient en conséquence de faire droit à la demande de nouvelle expertise en la limitant aux solutions réparatoires permettant de mettre fin aux désordres constatés et à l'évaluation de leur coût et des préjudices et coûts induits par ces désordres, les demandes au fond formées contre la société Seguy TP et la Smabtp dans les limites qui ont été définies seront réservées.
- sur les dépens et frais irrépétibles :
La société Larroque sera tenue aux dépens première instance et de référé liés à la mise en cause de la Sarl Sols et Eaux ainsi que de la société Ar-Co. Ils seront réservés pour le surplus.
Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la Sarl Sols et Eaux, Maître [O] et la SCP Vitani-Bru d'une part et de la société Ar-Co d'autre part, les frais non compris dans les dépens que ces parties ont pu exposer. Ces dernières seront déboutées de leurs demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, par décision rendue contradictoirement, publiquement et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu le 6 décembre 2016 par le tribunal de grande instance de Montauban sauf en ce qu'il a mis hors de cause la société Ar-Co.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que la Sarl Seguy TP est tenue de réparer le préjudice subi par l'Earl des Gabachs aujourd'hui dénommée Sas Larroque, sur le fondement de la responsabilité décennale.
Déclare inopposables les demandes formées à l'encontre de la Sarl Sols et Eaux en application de l'article L. 622-26 du code de commerce.
Dit que la Smabtp sera tenue de garantir la Sarl Seguy TP au titre de la seule police intitulée 'assurance risques travaux des entreprises de construction Artec' souscrite à compter du 1er janvier 2010 limitée au préjudice immatériel avec application de la franchise contractuelle.
Avant dire droit sur les demandes en réparation du dommage,
Ordonne une expertise et désigne pour y procéder :
Monsieur [N] [L]
Ingénieur civil des ponts et chaussées
Sol Ingenierie
[Adresse 3]
[Localité 5]
et à défaut,
Monsieur [H] [Z] [H]
DIPLÔMES: Diplôme d'ingénieur en géologie
EGIS- HELIO POLO
[Adresse 6]. D
[Adresse 14]
[Localité 4]
lequel aura pour mission, après avoir pris connaissance de l'entier dossier, de :
* convoquer et entendre les parties assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise ;
* se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission ;
* se rendre sur les lieux ;
* relever et décrire l'évolution de l'état de l'ouvrage et des désordres depuis la date du précédent rapport d'expertise ;
* indiquer les solutions les plus appropriées pour remédier à ces désordres, et en donnant en particulier un avis particulièrement circonstancié sur la pérennité et l'efficacité de la ou des solutions proposées ;
* procéder aux investigations complémentaires nécessaires, le cas échéant avec le concours d'un sapiteur, à l'établissement complet de la liste des travaux nécessaires à l'étanchéité de la retenue collinaire, et en particulier les sondages et étude mathématique de la perméabilité des sols ;
* recueillir avec précision les éléments permettant d'évaluer les préjudices et coûts induits par ces désordres ;
* rapporter toutes autres constatations utiles à l'examen des prétentions des parties,
* mettre, en temps utile, au terme des opérations d'expertise, les parties en mesure de faire valoir leurs observations, qui seront annexées au rapport ;
Dit que l'expert déposera l'original de son rapport au greffe de la cour dans les cinq mois à compter de l'avis de versement de la consignation qui lui sera donné par le greffe,
Précise qu'il adressera aux parties et à leurs avocats une copie de son rapport par application des dispositions de l'article 173 du code de procédure civile,
Fixe à 5 000 euros le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être versée au greffe par la Sas Larroque (chèque libellé au régisseur d'avances de la cour d'appel de Toulouse) dans le délai de d'un mois à compter de l'avis qui lui sera adressé par le greffe en application de l'article 270 du code de procédure civile,
Dit qu'à défaut de consignation dans le délai prescrit la désignation de l'expert sera caduque sauf prorogation de délai ou relevé de caducité à la demande de la partie tenue de consigner se prévalant d'un motif légitime,
Dit qu'en cas de refus ou d'empêchement du second des experts désignés, il sera procédé à son remplacement par ordonnance sur simple requête,
Dit que les opérations d'expertise se dérouleront sous le contrôle du magistrat chargé de la mise en état,
Réserve le surplus des demandes non encore tranchées.
Condamne la société Larroque aux dépens première instance et de référé liés à la mise en cause de la Sarl Sols et Eaux ainsi que de la société Ar-Co.
Déboute la Sarl Sols et Eaux, Maître [O] et la SCP Vitani-Bru d'une part et de la société Ar-Co d'autre part, de leurs demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Réserve les autres dépens et frais irrépétibles.
Renvoie l'affaire à la Mise en état du 24 novembre 2022.
Le Greffier,Le Président,
N. DIABYM. DEFIX
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