15/06/2022
ARRÊT N°240
N° RG 21/00931 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OADG
IMM - AC
Décision déférée du 15 Janvier 2021 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE ( 20/02513)
Madame GAUMET
[M] [N]
C/
S.A. BNP PARIBAS
confirmation
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU QUINZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX
***
APPELANTE
Monsieur [M] [N]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Bruno BINARD de la SELAS LABEL AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 31555.2021.004329 du 01/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)
INTIME
S.A. BNP PARIBAS
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Mathieu SPINAZZE de la SELARL SELARL DECKER, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant I. MARTIN DE LA MOUTTE, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère
P. BALISTA, conseiller
Greffier, lors des débats : C. OULIE
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par V. SALMERON, présidente, et par C.OULIE, greffier de chambre
EXPOSE DU LITIGE :
Le 18 août 2018, Monsieur [M] [N] a ouvert dans les livres de la SA BNP Paribas un compte courant n°3004 00174 00004628520 53.
Ayant constaté que le compte fonctionnait en situation de découvert au delà de l'autorisation sollicitée, la SA BNP Paribas a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 5 octobre 2018, invité Monsieur [M] [N] à régulariser sa situation.
Par courriers recommandés en date du 18 décembre 2018, la banque a informé Monsieur [M] [N] de la clôture du compte.
Par exploit en date du 13 juillet 2020, elle a fait assigner Monsieur [M] [N] devant le tribunal judiciaire de Toulouse.
Par jugement du 15 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Toulouse a :
- Condamné Monsieur [M] [N] à payer à la SA BNP Paribas la somme de 22.134, 88 € au titre du solde débiteur du compte courant n°30004 00174 00004628520 53, avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2018
- Condamné Monsieur [M] [N] aux dépens de l'instance, dont distraction au profit de Me Mathieu Spinazze
- Condamné Monsieur [M] [N] à payer à la SA Bnp Paribas la somme de 600 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 26 février 2021, M.[M] [N] a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions notifiées le 7 février 2022, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, M.[M] [N] demande à la cour au visa des articles 1231-1 du code civil et L133-18 du code monétaire et financier, de :
- Infirmer le jugement déféré en date du 15 janvier 2021 en ce qu'il a :
Condamné Monsieur [M] [N] à payer à la SA BNP Paribas la somme de 22.134, 88 € au titre du solde débiteur du compte courant n°30004 00174 00004628520 53, avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2018;
Condamné Monsieur [M] [N] aux dépens de l'instance, dont distraction au profit de Me Spinazze ;
Condamné Monsieur [M] [N] à payer à la SA Bnp Paribas la somme de 600 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Et statuant à nouveau,
-Constater que la société BNP Paribas a manqué à son devoir de vigilance à l'égard de Monsieur [M] [N] ;
-En conséquence,
-Débouter la BNP Paribas de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
-Condamner la société BNP Paribas à verser à Monsieur [M] [N] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Il fait valoir qu'il a été victime du vol de sa carte bancaire et de divers documents bancaires le 5 septembre 2018, qu'il a constaté que des virements frauduleux avaient été réalisés à partir du son compte et reproche à la banque d'avoir manqué à son obligation de vigilance alors que son compte a connu une série d'opérations qu'elle aurait dû juger anormales.
Par conclusions notifiées le 17 février 2022 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, la BNP Paribas demande à la cour au visa des articles 1134 du code civil et L.133-16, L.133-17 et L.133-19 du Code monétaire et financier de :
- Confirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de Toulouse du 15 janvier 2021 dans toutes ses dispositions
-Débouter Monsieur [M] [N] de l'intégralité de ses demandes ;
Condamner Monsieur [M] [N] au paiement de la somme de
2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
-Condamner Monsieur [M] [N] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Spinazze, avocat, sur son affirmation de droit.
L'instruction de la procédure a été clôturée par ordonnance du 21 février 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Monsieur [N] reproche à la banque qu'il avait informée du vol de sa carte et de divers documents bancaires de ne pas avoir tenté de régulariser la situation de ce compte, alors même qu'elle avait constaté des opérations inhabituelles et d'avoir ainsi manqué à son obligation de vigilance.
L'article L.133-16 du CMF dispose que ' le titulaire du compte est tenu de préserver la sécurité de ses données de sécurité personnalisées et selon l'article L.133-19 IV du même code le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiements non autorisées s'il n'a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L.133-16 et L.133-17".
Selon l'article L.133-17 I du CMF « Lorsqu'il a connaissance de la perte, du vol, du détournement ou de toute utilisation non autorisée de son instrument de paiement ou des données qui lui sont liées, l'utilisateur de services de paiement en informe sans tarder, aux fins de blocage de l'instrument, son prestataire ou l'entité désignée par celui-ci. »
L'examen des relevés de ce compte ouvert le 18 août 2018 et clôturé le 18 décembre 2018 permet de constater que sur ce compte dont le solde était de 0 € le 18 septembre 2018, 9 chèques ont été présentés à l'encaissement le 27 septembre avant d'être rejetés pour défaut de provision, puis recrédités le 4 octobre après régularisation de la provision et 14 chèques ont été présentés à l'encaissement le 28 septembre puis rejetés après opposition du tireur ; Dans le même temps, 9 virements ont été réalisés au débit de ce compte pour un montant de 31.460 € , deux d'entre eux ayant fait l'objet d'un rejet pour 10.000 €. Enfin, 2 opérations ont été réalisées avec la carte bancaire le 28 septembre.
Ainsi entre le 27 septembre et le 4 octobre 2018, le montant des opérations au crédit s'est élevé à 79.130 € et le montant des opérations au débit à 100.661, 68 €.
M.[N] a indiqué dans sa plainte déposée le 11 octobre 2018 au commissariat de police de [Localité 3] avoir oublié dans une rame de métro un sac contenant outre sa carte bancaire, des documents relatifs à son compte bancaire comprenant un RIB et le courrier de la banque l'informant de son code pour la réalisation d'opérations par internet.
Il n'a cependant jamais régularisé d'opposition après le vol de sa carte bancaire et ne justifie pas avoir avisé la banque de ce vol, ni sollicité la modification du code permettant l'accès à son compte. Alors même qu'il soutient que le vol est intervenu le 5 septembre 2018, il n'a déposé plainte que 6 semaines plus tard.
S'il résulte des éléments versés aux débats par la banque que cette dernière a bien encaissé 14 chèques qui, ayant postérieurement fait l'objet d'un avis de rejet du Crédit Mutuel, banque tirée, en raison de l'opposition pour vol formée par le tireur, ont en conséquence été passés au débit du compte, les éléments débattus ne permettent pas, en l'absence de toute anomalie apparente affectant ces formules de chèque versées aux débats, d'imputer une faute à la BNP, qui supportant une obligation de non immixtion ne pouvait refuser de créditer le compte de son client.
Il ne saurait non plus être reproché à la banque d'avoir permis la réalisation par internet de divers virements au débit de ce compte, les 27 et 28 septembre 2018 concomitamment l'encaissement des chèques opposés mais avant qu'ils soient contre-débités puisqu'à cette date, le compte était provisionné et que M.[N] n'avait pas informé le gestionnaire de son compte du vol des documents bancaires ayant permis, ainsi qu'il le soutient, que son compte soit utilisé à son insu.
Enfin si la succession d'opérations anormales devait, comme le soutient M.[N], alerter la banque, cette dernière justifie avoir dès le 5 octobre 2018, soit quelques jours après le rejet des chèques opposés et antérieurement au dépôt de plainte de M.[N], alerté et mis ce dernier en demeure de régulariser la situation de ce compte et établit avoir procédé à la clôture de ce compte le 18 décembre 2018.
A défaut de caractériser un manquement de la banque à son devoir de vigilance, Monsieur [N] dont la négligence est seule à l'origine de la situation débitrice du compte, sera débouté de ses demandes.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a accueilli les demandes de la banque.
Partie perdante, M.[M] [N] supportera les dépens et devra indemniser la BNP Paribas du montant des frais irrépétibles qu'elle été contrainte d'exposer pour les besoins de sa défense en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant après en avoir délibéré, publiquement par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
y ajoutant,
Déboute M.[M] [N] l'ensemble de ses demandes,
Condamne M.[M] [N] aux dépens d'appel ;
Condamne M.[M] [N] à payer à la somme de la BNP Paribas Personal Finance la somme de 1.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier, La présidente, .