COUR D'APPEL DE TOULOUSE
Minute 2023/164
N° RG 23/00162 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PIBY
O R D O N N A N C E
L'an DEUX MILLE VINGT TROIS et le 15 février à 08h55
Nous A. MAFFRE, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 7 DECEMBRE 2022 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu l'ordonnance rendue le 10 Février 2023 à 17H30 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :
[O] [P] [I]
né le [Date naissance 1] 1992 à [Localité 2] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
Vu l'appel formé le 13/02/2023 à 16 h 49 par courriel, par Me Charlotte CAMBON, avocat au barreau de TOULOUSE;
A l'audience publique du 14/02/2023 à 15h00, assisté de K. MOKHTARI, greffier avons entendu :
[O] [P] [I]
assisté de Me Charlotte CAMBON, avocat au barreau de TOULOUSE
qui a eu la parole en dernier ;
avec le concours de [L] [M], interprète, qui a prêté serment,
En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En présence de M.[G] représentant la PREFECTURE DE LA HAUTE GARONNE ;
avons rendu l'ordonnance suivante :
M. [O] [I], âgé de 30 ans et de nationalité algérienne, a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et avec interdiction de retour pendant deux ans pris par le préfet de la Haute-Garonne le 11 janvier 2023, suivi le même jour d'une mesure de placement en rétention administrative.
M. [I] a été conduit au centre de rétention administrative de [Localité 3] (31) en exécution de cette décision.
Saisi par le préfet de la Haute-Garonne en prolongation de la rétention et par M. [I] en contestation de l'arrêté de placement en rétention administrative, le juge des libertés et de la détention de Toulouse a rejeté les exceptions de procédure, déclaré recevable la requête et régulier l'arrêté de placement en rétention administrative, rejeté la demande d'assignation à résidence et ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du 13 janvier 2023 confirmée en appel le 18 janvier 2023 à 17h30.
Indiquant n'avoir pu l'éloigner dans le délai de rétention de 28 jours, le préfet de la Haute-Garonne a sollicité du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse une deuxième prolongation du maintien de M. [O] [I] en rétention pour une durée de trente jours suivant requête datée du 9 février 2023 parvenue au greffe du tribunal le même jour à 10h17.
Ce magistrat a ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du 10 février 2023 à 17h30.
M. [O] [I] a interjeté appel de cette décision, par courriel de son conseil adressé au greffe de la cour le 13 février 2023 à 16h49.
A l'appui de sa demande d'infirmation de l'ordonnance entreprise et de mise en liberté, le conseil de M. [I] a principalement soutenu, sur l'irrégularité de la prolongation de la mesure, que :
. le laissez-passer consulaire établi le 9 février 2023 n'a pas été produit lors de la requête en prolongation alors qu'il s'agit d'une pièce justificative utile,
. les diligences ont été injustement retardées, avec un vol le 11 février 2023 alors que l'accord pour le laissez-passer consulaire a été donné le 20 janvier 2023, la préfecture a attendu le 25 janvier 2023 pour communiquer les détails du vol projeté et les photographies promises pour le jour de récupération du laissez-passer consulaire n'étaient toujours pas remises le 9 février 2023 : il aurait dû être éloigné dès le 28 janvier 2023.
À l'audience, Maître Cambon a repris oralement les termes de son recours et souligné notamment que la production du laissez-passer consulaire est une pièce justificative utile de la transmission en temps utile des photos sollicitées par le consulat et qu'il n'était pas justifié de différer le retour jusqu'au 11 février et au-delà du 28 janvier, délai exigé par le consulat.
M. [I] qui a demandé à comparaître et refusé d'embarquer dans l'avion pour le vol prévu le 11 février, explique qu'il ne veut pas laisser sa femme et son fils : il demande à être libéré même s'il respectera la décision.
Le préfet de la Haute-Garonne, régulièrement représenté à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en s'en remettant à la motivation de celle-ci et en soulignant que
Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les pièces justificatives utiles
En vertu de l'article R743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2.
Doivent être considérées des pièces justificatives utiles dont la production conditionne la recevabilité de la requête les pièces qui sont nécessaires à l'appréciation par le juge des éléments de fait et de droit dont l'examen lui permet d'exercer son plein pouvoir.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le laissez-passer consulaire attendu n'a été établi que le 9 février 2023, et qu'il n'était pas encore en la possession de la préfecture à l'heure matinale de sa requête en prolongation, de sorte qu'il ne pouvait être joint à la requête.
Et c'est à juste titre que le premier juge a estimé suffisantes au contrôle de l'existence des diligences utiles les pièces attestant de l'accord de principe du consulat pour la délivrance d'un laissez-passer et des modalités adoptées pour la remise des pièces sollicitées.
La requête en prolongation de la rétention est donc recevable.
Sur le maintien en rétention
En application de l'article L741-3 du CESEDA, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.
Il s'en évince que les diligences de l'administration doivent être mises en oeuvre dès le placement en rétention et qu'elles doivent être effectives : le maintien en rétention ne se conçoit que s'il existe des perspectives d'éloignement et il convient de se demander non seulement si la préfecture a effectué les démarches nécessaires mais également si les diligences ont une chance d'aboutir dans le délai de la durée légale de la rétention.
Au cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que toutes les diligences utiles ont été menées sans délai par l'administration et qu'elles ont été aussi efficientes que possible, compte tenu du refus d'embarquer de M. [I] : l'existence d'un délai entre la demande d'un billet d'avion et la date du vol ne peut être imputée à faute à la préfecture, compte tenu des contingences spécifiques d'un tel voyage en matière de sécurité.
Sur la prolongation de la rétention
L'article L742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorise la saisine du juge des libertés et de la détention, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public;
2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;
b) de l'absence de moyens de transport.
Au cas particulier, la requête en prolongation est valablement motivée par l'absence de moyen de transport utilisable avant le 11 février 2023 et le refus d'embarquer qui a suivi confirme que la prolongation de la rétention est le seul moyen de prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et de garantir efficacement l'exécution effective de cette décision en l'absence de toute autre mesure moins coercitive possible : il y lieu a donc de faire droit à la demande préfectorale.
La décision déférée sera donc confirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,
Confirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Toulouse le 10 février 2023,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de la Haute-Garonne service des étrangers, à M. [O] [I], ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE
K. MOKHTARI A. MAFFRE