23/06/2023
ARRÊT N°2023/286
N° RG 21/00677 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N7FY
NB/LT
Décision déférée du 15 Janvier 2021 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FOIX ( 18/00107)
B. TEYCHENNE
Section commerce
S.A. BANQUE CIC SUD OUEST
C/
[K] [I]
[E] [V]
INFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le 23 juin 2023
à Me MOURGUES,
Me PLAIS-THOMAS,
Me DEGIOANNI
Ccc à Pôle Emploi
le 23 juin 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 1
***
ARRÊT DU VINGT TROIS JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTE
S.A. BANQUE CIC SUD OUEST
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Lucile MOURGUES, avocat au barreau de TOULOUSE
Représentée par Me Bertrand LUX, avocat au barreau de Bordeaux et du Québec
INTIM''S
Monsieur [K] [I]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Emmanuelle PLAIS-THOMAS de la SELARL PLAIS-THOMAS - SALVA, avocat au barreau D'ARIEGE
Madame [E] [V]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Regis DEGIOANNI de la SCP DEGIOANNI - PONTACQ - GUY-FAVIER, avocat au barreau D'ARIEGE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant S. BLUM'', présidente et N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
S. BLUM'', présidente
M. DARIES, conseillère
N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier, lors des débats : C. DELVER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par S. BLUM'', présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre
FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [E] [V] a été embauchée à compter du 1er février 2000 par le groupe Crédit Industriel et Commercial (CIC) en qualité de technicienne de production suivant contrat de travail à durée déterminée régi par la convention collective de la banque. Son contrat s'est poursuivi en contrat à durée indéterminée à compter du 1er avril 2001.
Par convention de transfert tripartite du 15 juillet 2008, le contrat de travail de la salariée a été transféré au CIC Sud Ouest. Elle a évolué vers des fonctions de chargée d'accueil, puis de chargée de clientèle, et à partir de 2016, de chargée d'affaires professionnels.
Initialement à l'agence de [Localité 4], puis à celle de [Localité 7], elle a été affectée à l'agence de [Localité 5]/ [Localité 6] le 8 août 2017, sous la responsabilité de M. [K] [I].
Dans le dernier état de la relation contractuelle, son salaire moyen mensuel s'élevait à la somme de 2 973,32 euros brut.
Par courrier du 17 mai 2018, Mme [V] a sollicité la conclusion d'une rupture conventionnelle, ce que l'employeur a refusé par courrier du 6 juillet 2018.
La salariée a été reçue en entretien le 23 mai 2018 par la responsable ressources humaines du CIC Sud Ouest. Au cours de celui-ci, elle a dénoncé des faits de harcèlement dont elle était victime de la part de M. [I].
Mme [V] a été placée en arrêt maladie à compter du 11 juin 2018 pour syndrome dépressif réactionnel sévère.
Par courrier du 25 juillet 2018, réceptionné par la banque le 27 juillet 2018, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail dans les termes suivants : 'Par courrier du 6 juillet dernier, vous m'avez informée refuser d'accéder à ma demande de rupture conventionnelle de mon contrat de travail dès lors que vous êtes consciente que ma demande a été formulée du fait du harcèlement moral dont je suis victime depuis de très nombreux mois de la part de M. [I], directeur des agences de [Localité 5]/ [Localité 6] auprès desquelles je suis en poste depuis août dernier.
Comme bon nombre de mes collègues ayant travaillé dans cette agence, je suis moi aussi victime du comportement destructeur de l'intéressé auquel j'ai tenté de résister pendant de nombreux mois jusqu'à ce que mon épuisement psychologique m'amène à bénéficier d'un arrêt maladie en date du 11 juin 2018.
Bien qu'ayant été alerté à plusieurs reprises de cette situation découlant notamment d'un turn over important ou encore des informations remontées par le biais du CHSCT, ce n'est que maintenant qu'il semblerait que la direction du CIC se soit enfin résignée à réagir.
Me concernant il est trop tard!
Je suis en effet totalement écoeurée du système bancaire, et je ne me vois plus continuer à travailler dans ce milieu du fait du comportement déployé par M. [I].
Dans ces conditions, je n'ai d'autres choix que de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail à vos torts sachant que je n'imagine même pas pouvoir exécuter un quelconque préavis.'
Suite à une enquête interne diligentée à l'initiative de l'employeur, M. [I] a été licencié pour faute grave le 27 juillet 2018.
Mme [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Foix, section commerce, le 24 octobre 2018 pour demander la reconnaissance d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, solliciter la requalification de la prise d'acte de rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que le versement de diverses sommes.
La banque CIC Sud Ouest a appelé M. [K] [I] dans la cause en intervention forcée.
Par jugement du 15 janvier 2021, le conseil de prud'hommes de Foix a :
- jugé que l'employeur a engagé sa responsabilité à l'égard de Mme [V] en raison de manquements à son obligation de sécurité pour non-respect des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et pour défaut de protection de la salariée victime de faits de harcèlement moral perpétrés par un autre préposé,
- condamné le CIC Sud Ouest à payer à Mme [V] la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- requalifié la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
- condamné le CIC Sud Ouest à payer à Mme [V] les sommes suivantes :
*5 946,64 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
* 594,66 euros au titre des congés payés afférents au préavis,
* 24 811,84 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, (article 26.2 de la convention collective applicable),
* 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné le CIC Sud Ouest à délivrer à Mme [V] les documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir (attestation pôle emploi, certificat de travail, bulletin de salaire),
- débouté Mme [V] du reste de ses demandes,
- débouté le CIC Sud Ouest de l'ensemble de ses demandes,
- déboute M. [I] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné le CIC Sud Ouest aux dépens.
***
Par déclaration du 12 février 2021, la SA Banque CIC Sud Ouest a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 19 janvier 2021, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.
***
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 11 mai 2021, le CIC Sud Ouest demande à la cour de :
- déclarer son appel recevable et bien fonde en son appel,
- réformer en tous points le jugement,
Y faisant droit et statuant à nouveau :
À titre principal,
- juger qu'il justifie avoir pris toutes les mesures de prévention en matière de harcèlement moral,
- juger qu'il justifie avoir pris les mesures immédiates propres à faire cesser le harcèlement moral opéré par M. [I] à l'égard de Mme [V],
Par conséquent,
- juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Mme [V] produit les effets d'une démission,
- juger n'y avoir lieu à le condamner à verser de quelconques sommes indemnitaires au bénéfice de Mme [V],
- rejeter l'ensemble des fins, moyens et conclusions formulées par Mme [V] à son encontre.
À titre subsidiaire,
- juger recevable et fondée son action récursoire à l'encontre de M. [I],
- juger que M. [I] a commis une faute dans l'exécution du contrat de travail en faisant subir intentionnellement des agissements répétés de harcèlement moral à l'égard de Mme [V],
- juger que ces agissements sont à l'origine des préjudices du CIC Sud Ouest tenu d'indemniser Mme [V] du fait du harcèlement moral perpétré par M. [I],
- condamner M. [I] à garantir et relever indemne le CIC Sud Ouest toutes condamnations pouvant être prononcées à son encontre et au bénéfice de Mme [V],
En tout état de cause :
- condamner tout succombant à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
***
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 6 juillet 2021, Mme [E] [V] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, et de condamner le CIC Sud Ouest à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
***
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 15 juillet 2021, M. [K] [I] demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le CIC Sud Ouest de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre lui,
- condamner le CIC Sud Ouest à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens de la présente instance.
***
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance en date du 28 avril 2023.
***
Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION :
- Sur la prise d'acte de rupture :
La prise d'acte désigne tout acte par lequel le salarié notifie à l'employeur qu'il met fin au contrat de travail ou qu'il cesse le travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, quelle que soit la dénomination utilisée dans cet acte: démission, prise d'acte, résiliation, départ de l'entreprise, cessation du travail.
Si la prise d'acte de la rupture du contrat de travail n'est soumise à aucun formalisme et peut valablement être présentée par le conseil du salarié au nom de celui ci, c'est à la condition qu'elle soit adressée directement à l'employeur
Il revient à celui qui invoque la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur de rapporter la preuve de faits suffisamment graves qu'il reproche son employeur et il appartient au juge d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient soit d'une démission dans le cas contraire.
Mme [V] soutient qu'elle a subi des actes répétés de harcèlement moral de la part de son directeur d'agence, M. [I], sans que la banque CIC Sud Ouest, qui était avertie de ces comportements, dont avaient été victimes d'autres collaborateurs de l'agence, ait pris de mesures préventives ; que contrairement à ce que soutient la société employeur, celle ci était parfaitement au courant de la persistance des comportements de M. [I] après la médiation de septembre et novembre 2017.
La banque CIC Sud Ouest soutient en réponse qu'elle a élaboré un plan de prévention du stress au travail dès le 1er octobre 2012 et a dispensé à M. [K] [I] une formation au management ; qu'informée une première fois des agissements de M. [I] par courriel collectif du 18 juillet 2017, elle a convoqué les différents protagonistes à une réunion de médiation le 12 septembre 2017,au cours de laquelle les collaborateurs de l'agence se sont déclarés satisfaits des efforts faits par M. [I] ; qu'une seconde réunion a eu lieu le 7 novembre 2017, au cours de laquelle aucun salarié n'a signalé de dysfonctionnement ; qu'elle n'a eu connaissance des faits de harcèlement de M. [I] à l'encontre de Mme [V] que le 23 mai 2018, lors d'un entretien entre cette dernière et la responsable des ressources humaines ; qu'elle a immédiatement diligenté une enquête interne et saisi le CHSCT, avant de procéder au licenciement de M. [I] pour faute grave.
Sur ce :
Mme [V] invoque des faits de harcèlement moral dont elle aurait été victime de la part de son directeur d'agence, M. [I].
En application de l'article L.1152-1 du code du travail, «'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel'».
L'article L. 1154-1 du même code prévoit que le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
A l'appui de ses allégations, Mme [V] verse aux débats :
- un courriel de Mme [L] [X] du 18 juillet 2017 dénonçant le comportement de M. [K] [I] à l'encontre des collaborateurs de l'agence (pièce n° 3),
- un courriel adressé le 20 juillet 2018 à Mme [E] [V] par M. [J] [A], ex collaborateur de l'agence de [Localité 5]/[Localité 6] qui a démissionné par lettre du 18 mai 2017, qui indique que le comportement de M. [K] [I] est bien l'une des raisons qui l'a poussé à poursuivre sa carrière ailleurs (pièce n° 5),
- une attestation de Mme [D] [T], ancienne collègue de travail, qui a quitté la banque le 23 mai 2018, qui indique : 'Mme [V] a intégré l'équipe de [Localité 5]/ [Localité 6] en août 2017. J'ai constaté que M. [I], directeur, n'a jamais mis en place d'accompagnement pour l'intégrer au sein de l'équipe . Très vite, j'ai assisté à des attaques envers Mme [V] (personnelles, professionnelles). . A plusieurs reprises, il a pris Mme [V] à partie en réunion d'équipe. Il lui a dit devant nous trois qu'elle avait un emploi fictif. Il a également dit qu'elle était vieille, très vieille, et qu'après la réunion, il fallait qu'elle change sa couche. Une autre fois, M. [I] a fermé la porte de son bureau (lieu de réunion) à 13h30 devant Mme [V] et Mme [X] qui arrivaient au bout du couloir pour leur montrer le retard (quelques secondes). En réunion, il a toujours mis en avant le reste à faire, et n'a jamais évoqué les réussites de Mme [V], qui étaient nombreuses...En mars, avril, mai 2018, il a systématiquement donné des instructions orales à Mme [V] sur ses dossiers, l'obligeant à refaire et modifier ans cesse, et dès lors que l'analyse semblait décousue, il envoyait le dossier informatique à la hiérarchie...' (pièce n° 15),
- la lettre de démission de Mme [D] [T] en date du 23 février 2018 qui indique quitter le groupe Crédit Mutuel CIC avec regrets et que sa décision est motivée par l'impossibilité de travailler avec le directeur d'agence, M. [K] [I], en précisant : ' Sa perfidie, ses attaques personnelles et la pression morale qu'il fait subir à l'ensemble de l'équipe vont contre les valeurs du groupe auxquelles je suis attachée' (pièce n° 6),
Mme [V] présente, dès lors, des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Ces faits de harcèlement sont d'ailleurs reconnus par la banque CIC Sud Ouest, qui indique cependant avoir pris connaissance des agissements de M. [I] lors d'un entretien entre Mme [V] et la responsable des ressources humaines le 23 mai 2018 ; qu'elle a immédiatement réagi en diligentant une enquête interne, qui a abouti au licenciement de M. [I] pour faute grave le 27 juillet 2018, de sorte que la prise d'acte de rupture de Mme [V] n'était pas justifiée.
La banque CIC Sud Ouest avait cependant été alertée de l'existence de tensions au sein de l'agence de [Localité 5]/ [Localité 6], tensions dues en partie au comportement managérial de M. [K] [I] depuis le mois de juillet 2017, avant l'arrivée de Mme [V] au sein de l'agence. Elle a tenté d'organiser au mois de septembre 2017, une médiation qui s'est révélée insuffisante. Elle ne peut légitimement soutenir avoir été informée des difficultés de Mme [V] seulement lors de l'entretien du 23 mai 2017, alors que Mme [D] [T], dans sa lettre de démission du 23 février 2018, incriminait le comportement de M. [I] à l'égard des collaborateurs de l'agence.
Il s'ensuit que la banque CIC Sud Ouest n'a pas pris de mesures préventives de nature à assurer la sécurité de la salariée et n'a entrepris aucune action pour la soustraire aux actes répétés de harcèlement moral de son directeur d'agence. Ce manquement est suffisamment grave pour justifier la prise d'acte de rupture aux torts exclusifs de la société employeur. Le jugement du conseil de prud'hommes de Foix sera sur ce point confirmé.
- Sur les conséquences de la prise d'acte de rupture :
La prise d'acte de rupture de Mme [E] [V] aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'intimée se bornant à demander, dans le dispositif de ses conclusions, la confirmation du jugement déféré.
Mme [E] [V] a été licenciée sans cause réelle et sérieuse d'une entreprise employant plus de onze salariés, à l'âge de 48 ans et à l'issue de 18 ans de présence effective. Elle a dès lors droit au paiement des indemnités de préavis, de congés payés y afférents et de l'indemnité conventionnelle de licenciement et à des dommages et intérêts pour liencienciement sans cause réelle et sérieuse, à hauteur des sommes qui lui ont été allouées par le conseil de prud'hommes.
Mme [E] [V] justifie également d'un préjudice moral distinct du fait des actes de harcèlement dont elle a été victime durant sa période d'emploi à l'agence de [Localité 5]/ [Localité 6] (moins d'un an), qu'il convient de réduire à la somme de 8 000 euros.
Le jugement déféré sera également confirmé en ce qu'il a ordonné la délivrance par la société employeur à Mme [V] des documents de fin de contrat conformes à la décision prise (attestation pôle emploi, certificat de travail, bulletin de salaire).
En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur fautif à Pôle Emploi Occitanie des indemnités chômage éventuellement payées à Mme [E] [V], dans la limite de trois mois d'indemnités.
- Sur l'action récursoire de la société CIC Sud Ouest à l'encontre de M. [K] [I] :
La société appelante demande à être relevée et garantie des condamnations prononcées à son encontre par M. [K] [I], qui a fait subir intentionnellement à Mme [E] [V] des agissements répétés de harcèlement moral et a ainsi commis une faute à l'égard de la banque dans l'exécution de son contrat de travail.
M. [K] [I] soutient en réponse que la responsabilité pécuniaire d'un salarié à l'égard de son employeur ne peut résulter que de sa faute lourde, et qu'il a été licencié pour faute grave.
- Sur ce :
La responsabilité pécuniaire d'un salarié envers son employeur ne peut être retenue que lorsque le salarié a commis une faute grave révélant son intention de nuire à l'employeur.
En l'espèce, M. [K] [I] a été licencié pour faute grave et non pour faute lourde, de sorte qu'il ne peut être tenu pécuniairement de ses actes devant son employeur.
Le jugement du conseil de prud'hommes de Foix sera confirmé en ce qu'il a débouté la société CIC Sud Ouest de sa demande à ce titre.
- Sur les autres demandes :
La banque CIC Sud Ouest, qui succombe, sera condamnée aux dépens de l'appel.
Il serait en l'espèce inéquitable de laisser à la charge de Mme [V] les frais exposés non compris dans les dépens ; il y a lieu de faire droit, en cause d'appel, à sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Aucune considération particulière d'équité ne commande, en revanche, qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [K] [I].
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Foix le 15 janvier 2021, sauf à réduire le montant des dommages et intérêts alloués à Mme [V] en réparation du préjudice moral par elle subi à la somme de 8 000 euros.
Y ajoutant :
Ordonne le remboursement par la société Banque CIC Sud Ouest à Pôle Emploi Occitanie des indemnités chômage éventuellement payées à Mme [E] [V], dans la limite de trois mois d'indemnités.
Condamne la société Banque CIC Sud Ouest aux dépens de l'appel.
Condamne la société banque CIC Sud Ouest à payer à Mme [E] [V], en cause d'appel, une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La déboute de sa demande formée à ce même titre.
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [K] [I].
Le présent arrêt a été signé par S. BLUM'', présidente et C. DELVER, greffière.
LA GREFFI'RE LA PR''SIDENTE
C. DELVER S. BLUM''
.