Les faits exactement relatés par l'appelante la société SOFINCO sont les suivants ;
Suivant acte sous seing privé en date du 29 novembre 1989, la banque SOFINCO a consenti à Mademoiselle Colette X... une ouverture de crédit utilisable par fraction avec la carte bleue d'un montant de 35.000 Francs.
Des incidents de paiement sont survenus au mois de mars 1992 et ont perduré les mois suivants.
Donc conformément à l'article IV du contrat, la banque SOFINCO a adressé à Madame X... une mise en demeure de payer la somme de 45.550,24 Francs, par lettre avec accusé de réception en date du 31 juillet 1993, visant l'acquisition de la déchéance du terme.
Cette mise en demeure est restée infructueuse,
La banque SOFINCO a donc obtenu de Monsieur le Président du tribunal d'instance de COLOMBES une ordonnance d'injonction de payer en date du 1er septembre 1993 portant sur la somme de 42.221,95 Francs, avec intérêts au taux contractuel, 3.000 Francs à titre d'indemnité outre la somme de 303,55 Francs au titre des frais.
Cette ordonnance revêtue de la formule exécutoire, ainsi qu'un commandement de payer ont été signifiés à Madame X... par acte d'huissier en date du 18 octobre 1994 (signifiés en mairie).
Un procès-verbal de saisie-attribution ensuite a été dressé le 4 mars 1994 et dénoncé au tiers saisi le 10 mars 1994.
Madame X... a acquiescé à cette saisie-attribution et son acquiescement du 7 avril 1994 devant huissier a été signifié au tiers saisi par acte d'huissier en date du 13 avril 1994.
Une quittance valant main-levée a été établie le 21 avril 1994.
Madame X... ayant été à nouveau défaillante, un procès-verbal de saisie-attribution sur la somme en principal et intérêts de 37.538,17 Francs a été dressé par acte d'huissier en date du 24 janvier 1995, visant toujours l'ordonnance d'injonction de payer du 1er septembre 1993.
Puis un procès-verbal de saisie-vente a été dressé par acte d'huissier en date du 25 juillet 1995.
Ce n'est qu'à la suite de ces différents actes de procédure que Madame X... a cru pouvoir former opposition à l'ordonnance d'injonction de payer suivant déclaration au greffe en date du 27 juillet 1995 qui a abouti à un jugement du tribunal d'instance de COLOMBES, du 19 mars 1996.
Le tribunal d'instance a statué sur les termes suivants :
- dit que l'opposition formée par Madame X... est recevable en la forme et bien fondée quant au fond,
- infirme l'ordonnance d'injonction de payer du 8 septembre 1993,
- déboute la société SOFINCO de toutes ses demandes,
- laisse les dépens à sa charge.
Le 24 mai 1996, la banque SOFINCO a interjeté appel.
Elle demande à la Cour de :
- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
Vu l'article 1416 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile,
Vu la dénonciation d'un procès-verbal de saisie-attribution de compte bancaire en date du 10 mars 1994,
Vu l'acquiescement de Madame X... à cette saisie,
- dire et juger que son opposition en date du 25 juillet 1995 est irrecevable comme tardive au sens de l'article 1416 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile,
En conséquence,
- confirmer l'ordonnance en date du 1er septembre 1993 qui a condamné Madame X... à payer la SOFINCO la somme de 42.221,95 Francs, outre la somme de 3.000 Francs à titre d'indemnité et 303,55 Francs augmentée des intérêts au taux contractuel à compter du 31 juillet 1993, date de la mise en demeure,
Vu le décompte de Maître Y..., huissier de justice en date du 14 novembre 1995,
- dire et juger que Madame X... reste devoir la somme de 35.645,71 Francs augmentée des intérêts au taux contractuel à compter du 14 novembre 1995, date depuis laquelle ils n'ont plus été calculés ; la condamner à payer cette somme ;
- condamner Madame X... à payer à la banque SOFINCO la somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- condamner Madame X... aux dépens de première instance et d'appel au profit de Maître DELCAIRE, avoué, conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile,
Madame X... qui a été assignée et réassignée en mairie n'a pas constitué avoué.
L'arrêt sera donc réputé contradictoire.
L'ordonnance de clôture a été signée le 9 avril 1998 et l'appelante a fait déposer son dossier à l'audience du 29 mai 1998.
SUR CE LA COUR
I)
Considérant qu'en matière d'injonction de payer, aux termes de l'article 1416 du nouveau code de procédure civile :
"L'opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l
'ordonnance (portant injonction de payer) ;
"Toutefois si la signification n'a pas été FAITE à PERSONNE, l'opposition est recevable jusqu'à l'expiration du délai d'un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou partie les biens du débiteur" ;
Considérant que dans la présente espèce, les pièces justificatives complètes produites par la société SOFINCO permettent d'établir la chronologie des différents actes de signification et de mesure d'exécution à retenir, pour déterminer le point de départ du délai d'opposition et statuer donc sur la recevabilité de ce recours ;
Considérant qu'il est constant que :
- l'ordonnance portant injonction de payer est du 1er septembre 1993 et que sa signification a été faite en mairie, le 8 septembre 1993 ;
- l'opposition n'a été formée par Madame X... que le 27 juillet 1995 ;
Considérant qu'en l'absence d'une signification à personne de l'ordonnance d'injonction de payer, doivent donc s'appliquer les dispositions de l'alinéa 2 de l'article 1416, et qu'il convient donc de rechercher quelles ont été les premières mesures d'exécution pratiquées à la demande de la société SOFINCO ;
Considérant qu'il est constant, sur ce point, que le 4 mars 1994, la banque SOFINCO a fait pratiquer par huissier une saisie-attribution (pour 48.016,37 Francs) et que cette mesure n,'a fait l'objet d'aucune constestation de la part de Madame etlt;BEDEAU (article 61 alinéa 2 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1991), mais que, bien au contraire, la débitrice a acquiescé à cette mesure d'exécution par acte d'huissier établi contradictoirement le 7 avril 1994 ; que cet acte d'acquiescement peut être retenu comme constituant un premier acte signifié à personne, au sens de l'article 1416 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile ;
Considérant que plus, qu'il est constant qu'une seconde saisie-attribution a été pratiquée par acte d'huissier du 24 janvier 1995 (pour 37.538,47 Francs), là encore, entre les mains de la POSTE - ORLEANS - LA SOURCE ;
Considérant qu'il est patent que ces deux saisies-attributions ont rendu indisponibles toutes les sommes laissées au compte de Madame X... et que, conformément aux dispositions des articles 43 et 47 de la loi du 9 juillet 1991, ces mesures d'exécution ont emporté indisponibilité et attribution immédiate au profit de la société SOFINCO saisissante de ces sommes saisies entre les mains du tiers saisi ; que cette seconde saisie-attribution n'a fait l'objet d'aucune contestation de la part de la débitrice saisie (article 45 de la loi du 9 juillet 1991) ;
Considérant par ailleurs, que ces deux saisies-attributions ont été pratiquées en vertu de l'ordonnance d'injonction de payer du 1er septembre 1993 qui constitue bien un titre exécutoire, au sens de l'article 3 de la loi du 9 juillet 1991 constatant les créances certaines, liquides et exigibles de la société SOFINCO ;
Considérant en définitive, que Madame X... devait former son opposition à injonction de payer un mois au plus tard après la date de la première saisie-attribution ou de la seconde - ou même à compter de son acte d'acquiescement devant huissier, du 7 avril 1994, qui représentait le premier acte qui lui était signifié à personne - et non pas à compter de la date de la saisie-vente du 25 juillet 1995 comme l'a retenu le 1er juge dont la décision est par conséquent infirmée ; que son opposition formée le 25 juillet 1995 l'a été tardivement et qu'elle est donc déclarée irrecevable ;
II)
Considérant que l'ordonnance d'injonction de payer du 1er septembre 1993 sera donc appliquée et recevra son plein et entier effet ; que la somme fixée sera augmentée des intérêts au taux contractuel à compter de la mise en demeure du 3 juillet 1993 ;
Considérant que compte-tenu des paiements partiels faits par Madame X... et dont il a été justifié (article 1315 alinéa 2 du code civil), l'huissier Maître Y... a, à bon droit, arrêté au 14 novembre 1995, la dette de Madame X... qui s'établit à un montant justifié restant dû de 35.645,71 Francs ; que cette somme portera intérêts au taux contractuel à compter du 4 septembre 1996, date des conclusions formulant ce chef de demande et valant sommation de payer au sens de l'article 1153 alinéa 3 du code civil ; que Madame X... est donc condamnée à payer à la société SOFINCO cette somme et ces intérêts contractuels ;
Considérant enfin, que compte-tenu de l'équité, Madame X... est condamné à payer à la société SOFINCO la somme de 4.000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort :
I)
Vu l'article 1416 du nouveau code de procédure civile :
Infirmant et statuant à nouveau :
- DECLARE irrecevable l'opposition à injonction de payer formée par Madame Colette X... le 25 juillet 1995 ;
II)
Par conséquent :
- DIT ET JUGE que l'ordonnance portant injonction de payer du 1er septembre 1993 recevra son plein et entier effet et sera exécutée, les sommes fixées étant augmentées des intérêts au taux contractuel à compter de la mise en demeure du 3 juillet 1993 ;
- CONDAMNE Madame X... à payer à la société SOFINCO la somme de 35.645,71 Francs avec intérêts au taux contractuel à compter du 4 septembre 1996 ;
- CONDAMNE Madame X... à payer à la société SOFINCO la somme de 4.000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- LA CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par la SCP DELCAIRE BOITEAU, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.