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08/10/1999 | FRANCE | N°1996-5662

France | France, Cour d'appel de Versailles, 08 octobre 1999, 1996-5662


FAITS ET PROCEDURE,

La société PARISUD (déménageur-voiturier) a effectué, les 20 et 21 décembre 1988, le transport de divers objets mobiliers pour le compte de Monsieur X... qui déménageait ; le 21 décembre 1988, ce dernier a émis des réserves relativement à du mobilier manquant ou détérioré. Par suite, la Compagnie P.F.A, assureur de la société PARISUD a proposé, le 22 janvier 1990, une indemnisation pour un montant de 17.639 francs. Suite au refus de la proposition de Monsieur X... et à la réitération par la compagnie d'assurances de l'offre d'indemnisation le 26

avril 1990, Monsieur X... a fait savoir à la société P.F.A, en avril 1993...

FAITS ET PROCEDURE,

La société PARISUD (déménageur-voiturier) a effectué, les 20 et 21 décembre 1988, le transport de divers objets mobiliers pour le compte de Monsieur X... qui déménageait ; le 21 décembre 1988, ce dernier a émis des réserves relativement à du mobilier manquant ou détérioré. Par suite, la Compagnie P.F.A, assureur de la société PARISUD a proposé, le 22 janvier 1990, une indemnisation pour un montant de 17.639 francs. Suite au refus de la proposition de Monsieur X... et à la réitération par la compagnie d'assurances de l'offre d'indemnisation le 26 avril 1990, Monsieur X... a fait savoir à la société P.F.A, en avril 1993, qu'il sollicitait le paiement de la somme proposée en janvier 1990, la société lui a alors indiqué qu'il n'était plus fondé à demander le paiement de son indemnisation, la prescription étant acquise depuis le 27 mars 1990 et ce, en application de l'article 108 du code de commerce.

Ce n'est que le 20 décembre 1995 que Monsieur X... a fait citer la société P.F.A devant le tribunal d'instance de PUTEAUX, afin d'obtenir le paiement de 17.639 francs à titre d'indemnité, 9.800 francs de dommages et intérêts, 1.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Le 21 mai 1995, le tribunal d'instance de PUTEAUX a, par jugement contradictoire :

- condamné la société P.F.A TIARD à payer à Monsieur X... la somme de 17.639 francs à titre d'indemnité, outre les intérêts de droit à compter de ce jour,

- débouté les parties du surplus de leur demande,

- condamné la société P.F.A TIARD aux dépens.

Le 1er juillet 1996, la société P.F.A a interjeté appel de cette décision. Elle fait grief au jugement entrepris d'avoir retenu que sa reconnaissance du droit à indemnisation de Monsieur X... avait créé une obligation nouvelle qui n'était plus née du contrat de transport, que dès lors la prescription était celle du droit commun alors qu'en l'espèce elle n'a délivré aucun titre novatoire et interversif de prescription.

En conséquence, elle demande à Cour de :

- la recevoir en son appel,

- l'y déclarant bien fondée, réformer le jugement entrepris,

Statuant à nouveau, constater que l'action de Monsieur X... est prescrite par application de l'article 108 du code de commerce et le débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Monsieur X... à lui payer une somme de 10.000 francs HT par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamner Monsieur X... en tous les dépens, et dire qu'ils pourront être recouvrés directement par Maître BOMMART, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Dans ses conclusions d'intimé, Monsieur X... fait valoir que :

- en lui présentant une offre d'indemnisation, la société P.F.A a reconnu son droit à indemnisation de sorte que la prescription annale de l'article 108 du code de commerce s'est trouvée interrompue,

- la méconnaissance du droit à indemnisation a entraîné une novation entre le contrat d'assurance initial et la proposition d'indemnisation, que dés lors la prescription s'est trouvée intervertie au profit de celle du droit commun soit un délai de dix ans.

Par conséquent, il est demandé à la Cour de :

- dire la P.F.A TIARD irrecevable et en tout cas mal fondée en son appel,

- la débouter de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, -confirmer la décision entreprise,

Y ajoutant, ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner la P.F.A TIARD à lui payer la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- la condamner également aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué pour ceux la concernant par la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL, société titulaire d'un office d'Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 18 juin 1998 et l'affaire plaidée pour Monsieur X... à l'audience du 22 septembre 1998.

Par arrêt contradictoire en date du 23 octobre 1998, la Cour de céans a enjoint aux parties de s'expliquer sur le délai de prescription

biennale de l'article L 114-1 du code des assurances et sur les éventuelles causes d'interruption de cette prescription, telles que prévues par l'article L 114-2 du même code.

La Compagnie P.F.A expose, dans ses dernières conclusions du 11 juin 1999, que le dépôt d'expertise amiable du 27 décembre 1989 constitue le point de départ de la prescription biennale de l'article L 114-1 du Code des assurances et qu'il appartenait donc à Monsieur X... d'accepter la proposition d'indemnisation avant le 27 décembre 1991.

Par ailleurs, elle fait valoir qu'elle n'a jamais entendu renoncer au

bénéfice de la prescription biennale ; que la correspondance échangées entre elle et Monsieur X... entre 1989 et 1992 n'est pas de nature à interrompre la prescription ; qu'en tout état de cause, même si les lettres échangées avaient ce pouvoir, il conviendrait alors de constater que le dernier acte interruptif de prescription, est constitué par la confirmation de la proposition d'indemnisation soit le 26 avril 1990, que le délai de deux ans, lors de l'acceptation de l'assuré, était donc expiré.

Par conséquent, elle prie la Cour de :

Recevant la Cie PRESERVATRICE FONCIERE THIARD,

- l'y déclarant bien fondée,

Y faisant droit,

- réformer la décision entreprise,

Statuant à nouveau,

Vu l'arrêt rendu le 23 octobre 1998 par la 1ère chambre B de la Cour d'Appel de VERSAILLES,

Vu les dispositions de l'article L114-1 et 114-2 du Code des

Assurances :

- déclarer Monsieur X... irrecevable en son action pour cause de prescription biennale,

A titre subsidiaire,

- constater que l'action de Monsieur X... est prescrite par application de l'article 108 du Code du Commerce et le débouter de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions,

- condamner Monsieur X... à payer à la P.F.A la somme de 10.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamner Monsieur X... aux entiers dépens et dire qu'ils pourront être recouvrés par la SCP BOMMART- MINAULT conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur X... réplique que, par application des dispositions de l'article 2244 du code civil, et au vu des circonstances de l'espèce, il apparait que la Compagnie P.F.A a renoncé au bénéfice de la prescription biennale de l'article L 114-1 du code des assurances.

Subsidiairement, il expose que, en tant que tiers victime du dommage causé par la société PARISUD, (dont l'appelante est l'assureur), selon les dispositions même de l'article L114-1 du Code des assurances et une jurisprudence de la cour de Cassation, la prescription biennale dudit article du code des assurances ne lui est pas opposable ; qu'en outre, suivant les dispositions de l'article 114-2 du Code des assurances et celles de l'article 2248 du code civil, il apparait que la prescription a été interrompue par la

lettre de P.F.A, le 26 avril 1990, et qu'il a finalement accepté cette proposition d'indemnisation par lettre en date du 4 février 1992.

Il prie donc la Cour de :

- dire la COMPAGNIE PRESERVATRICE FONCIERE TIARD irrecevable et en tout cas mal fondée en son appel,

- la débouter de l'intégralité de ses demandes,fins et conclusions,

- confirmer la décision entreprise,

- dire en tant que de besoin n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article L114-1 du Code des assurances,

En toute hypothèse,

- condamner la COMPAGNIE PRESERVATRICE FONCIERE THIARD à payer à Monsieur X... la somme de 17.639 francs à titre d'indemnités, majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 1995,

- ordonner la capitalisation des intérêt conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil,

- condamner la Compagnie PRESERVATRICE FONCIERE THIARD à payer au concluant la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- la condamner également aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué pour ceux la concernant par la SCP JULLIEN LECHARNY ROLL société titulaire d'un office d'Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 17 juin 1999 et les dossiers des parties déposés à l'audience du 7 septembre 1999.

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, dans la présente espèce, le point de départ de la prescription biennale de l'article L 114-1du Code des assurances de l'action appartenant à Monsieur X..., éventuel bénéficiaire de l'indemnité, pour réclamer la garantie de la société d'assurances P.F.A, assureur de sa cocontractante la SA PARISUD (transporteur-voiturier-déménageur), se situe au jour où cette victime a eu connaissance la réalisation du risque de nature à entraîner le jeu de cette garantie ;

Considérant qu'il est constant que, dès le 21 décembre 1988, Monsieur X... a eu connaissance du sinistre qu'il invoque puisqu'il a, à cette date, formulé par écrit des réserves relatives à du mobilier manquant ou détérioré, et que c'est donc à cette date que se situe le point de départ de la prescription biennale de l'article L.114-1 du Code des assurances ; que ce n'est que le 20 décembre 1995 que Monsieur X... a engagé une action en justice, au fond, contre l'assureur pour lui réclamer une indemnisation de 17.639 francs soit près de sept années après qu'il eut eu connaissance du sinistre ;

Considérant que la prescription pour deux ans de cette action est cependant susceptible d'avoir été interrompue par une des causes d'interruption prévues par l'article L114-2 du Code des assurances, la charge de cette preuve incombant à Monsieur X... ;

Considérant, a cet égard, que par lettre du 6 mai 1993, l'assureur P.F.A avait déjà opposé cette prescription à Monsieur X... et que la simple circonstance qu'il n'ait plus, par la suite, invoqué cette fin de non recevoir, ne signifie nullement que, même tacitement, cet assureur aurait, de manière certaine et non équivoque renoncé à s'en prévaloir (article 2224 du Code civil) ; que de plus,

en vertu de l'article 123 du nouveau code de procédure civile, les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire , de les soulever plus tôt ; que dans la présente espèce, Monsieur X... n'invoque pas l'application de ce texte et n'a jamais prétendu qu'il y aurait eu une quelconque intention dilatoire de la part de la Société P.F.A ; que cette appelante est donc déclarée recevable en cette fin de non-recevoir tirée de l'application de l'article L114-1 du Code des assurances (et de l'article 123 du nouveau code de procédure civile) ;

Considérant, par ailleurs, en Droit, que cette prescription biennale est opposable à l'assuré lui-même mais aussi au bénéficiaire de l'indemnité, cette dernière qualité étant celle en laquelle Monsieur X... agit contre l'assureur P.F.A ; que l'article L114-1-2° parle expressément des "intéressés", en cas de sinistre , et non pas restrictivement , de l'assuré, seul ;

Considérant que, toujours sur le terrain de l'application de cet article L114-1 du Code des assurances, il est certes exact, qu'en vertu de l'article L114- 2 dudit code, une reconnaissance de responsabilité (au sens de l'article 2248 du Code civil) est susceptible d'interrompre cette prescription biennale ; qu'à cet égard, Monsieur X... fait état d'une lettre de la Société P.F.A du 26 avril 1990, mais que cette lette ne lui était, même pas personnellement adressée, qu'elle ne contenait aucune reconnaissance expresse et non équivoque de responsabilité (au sens de l'article 2248 du Code civil) ni aucun engagement ferme de payer, et qu'elle se bornait à formuler, dans le cadre de pourparlers en cours, une offre d'indemnisation ; qu'il n'y a donc pas eu de reconnaissance de la part de l'assureur, au sens de l'article 2248 du Code civil et que ce document n'a donc pas interrompu le délai de prescription biennale qui avait commencé à courir, dès le 21 décembre 1988 ;

Considérant enfin, qu'en tout état de cause, même s'il devait être admis que cette lettre de P.F.A du 26 avril 1990 avait interrompu le délai de la prescription biennale, il appartenait alors à Monsieur X... d'agir en justice dans un nouveau délai de deux années, ce qu'il n'a pas fait, puisqu'il n'a engagé son action en justice devant le tribunal d'instance que le 20 décembre 1995 ; que de plus, sa lettre d'acceptation de l'offre, du 4 février 1992, n'a aucune portée d'ordre procédural et ne constitue pas une citation en justice, ni un

commandement ni une saisie signifiés, au sens de l'article 2244 du Code civil, et qu'elle n'a donc eu aucun effet interruptif ;

Considérant que le jugement déféré est, par conséquent entièrement infirmé et que Monsieur X... est débouté de toutes ses demandes, qui sont prescrites et irrecevables ;

Considérant de plus, que, compte tenu de l'équité, cet intimé est condamné à payer à l'appelante la somme de 10.000 francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

VU l'arrêt de cette cour (1ère chambre 2ème section) du 23 octobre 1998 :

VU les articles L114-1 du Code des assurances 123 du nouveau code de procédure civile :

. DECLARE prescrites l'action et toutes les demandes de Monsieur Pierre X... ;

. LE DEBOUTE des fins de toutes ses demandes ; et infirme en son entier le jugement déféré;

LE CONDAMNE de plus à payer à la SA P.F.A (IARD) la somme de 10.000 francs (DIX MILLE FRANCS) en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur X... à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP d'Avoués BOMMART etamp; MINAULT conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le greffier qui a assisté

Le Président, au prononcé, B. TANGUY

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-5662
Date de la décision : 08/10/1999

Analyses

ASSURANCE (règles générales) - Prescription - Prescription biennale - Point de départ - Evénement ayant donné naissance à l'action - /

Le point de départ de la prescription biennale de l'article L. 114-1 du Code des assurances, opposable à l'exercice de l'action en garantie par l'assuré victime d'un sinistre, se situe au jour où cette victime a eu connaissance de la réalisation du risque de nature à entraîner le jeu de la garantie. Lorsque, consécutivement à un déménagement, des réserves écrites ont été émises par l'assuré à la date de réception des meubles transportés, il en résulte nécessairement qu'à cette date, il avait connaissance du sinistre, et c'est à cette même date que se situe le point de départ du délai de prescription biennale de l'article L. 114-1 précité


Références :

Code des assurances, article L114-1

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-10-08;1996.5662 ?
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