FAITS ET PROCEDURE La SA EUROMARCHE a confié à la S.A. TRANSPORTS GRAVELEAU les 31 décembre 1992 et 31 mars 1993, trois transports de marchandises depuis son magasin CARREFOUR à SAINT-QUENTIN EN YVELINES à destination des sociétés SEGA et BANDAI situés respectivement à PARIS et à SAINT-OUEN L'AUMONE. Se prévalant de la perte totale ou partielle des colis expédiés, la société EUROMARCHE a assigné, le 17 février 1995, la société GRAVELEAU devant le Tribunal de Commerce de VERSAILLES en réparation de son préjudice et cette dernière a soulevé la prescription de l'action sur le fondement de l'article 108 du Code du Commerce et réclamé subsidiairement le paiement de factures non acquittées. Par jugement rendu le 23 octobre 1996, cette juridiction a débouté la société GRAVELEAU de sa demande reconventionnelle, l'a condamnée à régler à la société EUROMARCHE la somme de 24.438 francs majorée des intérêts légaux depuis le 17 février 1995, dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts légaux depuis le 17 février 1995, dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts, ordonné l'exécution provisoire, alloué une indemnité de 5.000 francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à la société EUROMARCHE et condamné la défenderesse aux dépens. Appelante de cette décision, la société GRAVELEAU fait grief au Tribunal d'avoir écarté l'acquisition de la prescription annale édictée par l'article 108 du Code de Commerce au profit de la prescription commerciale décennale en retenant à tort une reconnaissance de sa responsabilité de sa part dont elle dément l'existence. Elle fait valoir qu'en toute hypothèse, en l'absence de déclaration de valeur et de toute faute lourde qui lui soit imputable, il doit être fait application de la clause limitative de responsabilité conforme au contrat type messagerie du 07 mai 1988 plafonnant la responsabilité du transporteur à 150 francs par kilo avec un maximum de 4.500 francs par colis ou masse indivisible. Elle reproche encore aux premiers juges d'avoir estimé prescrite sa
demande reconventionnelle en compensation au titre de cinq factures non réglées en se prévalant de la signification en date du 02 février 1994 de l'ordonnance d'injonction de payer du 07 janvier 1994 dont elles ont fait l'objet du jugement rendu le 17 octobre 1994 sur opposition dont la signification aurait selon elle fait courir le délai de la prescription annale. Elle demande, en conséquence, à la Cour de déclarer irrecevable comme prescrite la demande en paiement de la société EUROMARCHE et subsidiairement, de limiter l'indemnité mise à sa charge à la somme globale et forfaitaire de 24.438 francs ainsi que de condamner la société EUROMARCHE au versement de la somme de 26.808,93 francs avec intérêts au taux légal à compter du 07 janvier 1994, outre la compensation en tant que de besoin des créances respectives des parties. Elle réclame aussi une indemnité de 20.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société EUROMARCHE forme appel incident pour solliciter outre l'entier débouté de la société GRAVELEAU, 132.960 francs et 20.000 francs de dommages et intérêts en réparation respectivement des pertes de marchandises et de son préjudice commercial. Elle conclut subsidiairement à la confirmation du jugement déféré, sauf à y ajouter une indemnité de 20.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle oppose que la société des transports GRAVELEAU a bien admis le principe de remboursement en novembre 1993. Elle prétend que le transporteur a commis une faute lourde en n'ayant pas exercé sur ses préposés les contrôles nécessaires, ni pris les mesures de protection s'imposant. Elle ajoute que la demande en paiement de la société des Transports GRAVELEAU est bien prescrite en soulignant que le jugement du 17 octobre 1994 ayant mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer a autorité de chose jugée. L'ordonnance de clôture est intervenue le 08 juin 2000. " MOTIFS DE L'ARRET " SUR L'ACTION DE LA SOCIETE
EUROMARCHE CONTRE LE TRANSPORTEUR Considérant que les trois transports confiés par la société EUROMARCHE à la société des TRANSPORTS GRAVELEAU depuis son magasin CARREFOUR à SAINT-QUENTIN EN YVELINES ont fait l'objet de réserves au titre de la perte totale ou partielle des marchandises expédiées dont la régularité n'est pas discutée ; Considérant ainsi que sur le premier envoi de 4 palettes d'un poids total de 500 kilos chargé le 31 décembre 1992, seuls 61 colis sont parvenus à destination de la société BANDAI à SAINT-OUEN L'AUMONE, le bon de livraison du 05 février 1993 portant la mention d'un manque de 10 colis ; Que le second envoi en date du 31 décembre 1992 comprenant 2 colis d'un poids total de 40 kilos a donné lieu à une constatation de perte totale par la société SEGA à PARIS qui en était destinataire ; Qu'enfin, trois des quatre colis d'un poids global de 70 kilos expédiés le 31 mars 1993 à la société SEGA se sont révélés manquants à l'arrivée ; Considérant qu'aux termes de l'article 108 du Code de Commerce, les actions pour avaries, pertes ou retards engagées notamment contre le voiturier sont prescrites dans le délai d'un an qui suit la livraison de la marchandise ou la date à laquelle elle aurait dû être effectuée ; Considérant que la société des TRANSPORTS GRAVELEAU se prévaut de l'acquisition de cette prescription eu égard à la délivrance de l'acte introductif d'instance à la requête de la société EUROMARCHE seulement le 17 février 1995 ; Considérant toutefois, que les premiers juges ont admis, à juste titre, en l'espèce, l'intervertion de la prescription résultant de la reconnaissance formelle du dommage de la part du transporteur et de sa promesse de le réparer intervenues en Novembre 1993, un tel acte étant constitutif pour le créancier d'un titre nouveau de nature à entraîner la substitution de la prescription de droit commun de 10 ans édictée par l'article 189 bis du Code de Commerce à la prescription annale ; Considérant certes, que la
société GRAVELEAU dans ses courriers adressés les 12 août et 28 septembre 1993 à la société EUROMARCHE au sujet exclusivement de l'envoi du 31 décembre 1992 à destination de la société NINTENDO, a d'abord indiqué qu'elle ne pouvait prendre en compte ce litige en prétendant ne pas être responsable de manquants à l'intérieur de palettes filmées ; Que néanmoins, en ce qui concerne les deux expéditions à la société SEGA en date des 31 décembre 1992 et 31 mars 1993, la société des TRANSPORTS GRAVELEAU a clairement précisé dès le 07 octobre 1993 assumer le premier sinistre en ces termes "ayant obtenu vos factures d'origine, nous envoyons le dossier à notre siège pour paiement à hauteur de l'envoi faisant 40 kilos au total, nous vous rembourserons 6.000 francs soit 150 francs au kilo", avant de s'engager par télécopie du 17 novembre 1993 à prendre en charge les incidents survenus lors de ces deux transports en confirmant "un remboursement de ces deux dossiers sur la base de notre limitation contractuelle, à savoir 150 francs du kilo avec un maximum de 4.500 francs par colis, ceci, en l'absence de déclaration de valeur de votre part, soit respectivement 6.000 francs pour l'expédition du 31 décembre 1992 et 6.426 francs pour l'expédition du 31 mars 1993" dont elle avait spécifié plus haut les caractéristiques ainsi que les pertes effectives résultant de leur exécution ; Qu'en outre, s'agissant du premier envoi du 31 décembre 1992 à destination de la société BANDAI, la société des TRANSPORTS GRAVELEAU, après avoir mené une enquête, a finalement adopté la même position dans une télécopie en date du 22 novembre 1993 puisqu'elle fait part d'un remboursement ne pouvant être effectué qu'à hauteur de sa limitation contractuelle de 150 francs du kilo avec un maximum de 4.500 francs par colis à défaut de déclaration de valeur avant de conclure "nous vous dédommagerons donc, pour cette affaire, d'un montant de 10.563 francs H.T." ; Qu'il suit de là, que la société des TRANSPORTS GRAVELEAU,
par ses deux télécopies des 17 novembre et 22 novembre 1993 ayant bien reconnu sans équivoque, sa responsabilité et formulé valablement trois offres explicites de paiement sur la base de la limitation d'indemnité contractuellement applicable, son action n'est pas prescrite ; Considérant que les circonstances des trois sinistres demeurent indéterminées et que la société EUROMARCHE se borne à invoquer de prétendues fautes lourdes de la part du transporteur sans en démontrer la réalité, par aucun élément probant ; Considérant dans ces conditions, et en l'absence de justification de déclaration de valeur, il importe d'appliquer la clause limitative de responsabilité convenue entre les parties figurant sur les documents de transport reprenant les dispositions du contrat type messagerie et plafonnant la responsabilité du transporteur à 150 francs par kilo avec un maximum de 4.500 francs par colis ou masse indivisible ; Que le jugement attaqué sera, en conséquence, confirmé pour avoir condamné la société des TRANSPORTS GRAVELEAU à réparer le préjudice subi par la société EUROMARCHE à concurrence de la somme globale non discutée de 24.438 francs ; " SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE EN COMPENSATION DE LA SOCIETE DES TRANSPORTS GRAVELEAU Considérant que la société appelante poursuit par cette voie, le recouvrement de cinq factures d'un montant global de 26.808,93 francs correspondant au prix des transports et constituant comme telle une prétention soumise à la prescription de l'article 108 du Code de Commerce ; Considérant que la compensation autoritaire opérée par la société EUROMARCHE entre sa dette de frêt et sa créance pour perte et manquants à l'encontre de la société des TRANSPORTS GRAVELEAU n'a entraîné qu'une interruption de ladite prescription sans pouvoir avoir d'effet interversif ; Considérant que si la signification à la société EUROMARCHE du 02 février 1994 d'une ordonnance d'injonction de payer en date du 07 janvier 1994 dont la société les TRANSPORTS GRAVELEAU a été
bénéficiaire au titre des factures en cause a interrompu la prescription annale, il n'en demeure pas moins qu'outre que cette interruption est devenue non avenue en vertu de l'article 2247 du Code Civil, l'ordonnance d'injonction de payer ayant été mise à néant par jugement rendu le 17 octobre 1994 sur opposition de la société EUROMARCHE, la société des TRANSPORTS GRAVELEAU ne peut plus prétendre solliciter le règlement d'une créance du prix des transports alors que cette décision dont elle n'allègue, ni ne justifie avoir relevé appel est définitive, en sorte que sa demande reconventionnelle formée la première fois, le 25 mai 1995, est à double titre irrecevable ; Considérant que le jugement entrepris doit, dès lors, être entièrement confirmé ; Considérant qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties leurs frais irrépétibles ; Que celles-ci qui succombent chacune en certaines de leurs prétentions supporteront les dépens d'appel par moitié ; " PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Ï CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ; Ï DIT n'y avoir lieu à application en la cause de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Ï FAIT masse des dépens d'appel pour être partagés par moitié entre les parties et AUTORISE leurs avoués à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ARRET PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER
LE CONSEILLER faisant fonction de Président M. Thérèse X...
F. LAPORTE