Madame X... a fait assigner par actes séparés en date des 18 août 1997 la société Action Républicaine, Philippe HERSANT, Gérard DIETRICH d'une part et en date du 14 août 1997 Alain GASCON, Stéphane MARCHAND, la société ECHO COMMUNICATION et Gérard DIETRICH d'autre part aux fins de voir dire et juger que les propos contenus d'une part dans le quotidien "Action Républicaine" édition du Perche du 27 mai 1997, et d'autre part dans le numéro de l'Echo Républicain édition de Nogent le Rotrou du 27 mai 1997, constituaient le délit de diffamation publique envers un particulier prévu et réprimé par les articles 23,29 alinéa 1 et 32 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 et en tous cas une faute au sens de l'article 1382 du code civil. Par le jugement déféré prononcé le 28 octobre 1998, le tribunal de grande instance de Chartres a, écartant les moyens de nullité tirés de l'absence de dénonciation de la procédure au ministère public avant le première audience de procédure et du visa subsidiaire dans les actes introductifs d'instance des dispositions de l'article 1382 du code civil :
-constaté que les propos incriminés constituaient bien le délit de diffamation publique prévu et réprimé par les articles 23, 29 alinéa 1 et 32 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881, -condamné in solidum Alain GASCON, Stéphane MARCHAND, la SA Echo Communication, et Gérard DIETRICH à payer à madame X... la somme de 5000 francs à titre de dommages et intérêts et celle de 3500 francs par application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile. -ordonné la publication d'un communiqué dans la prochaine édition de l'Echo Républicain édition de Châteaudun aux frais des défendeurs, -condamné in solidum Philippe HERSANT, la société l'Action Républicaine et Gérard DIETRICH à payer à madame X... la somme de 5000 francs à titre de dommages et intérêts et celle de 3500 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, -ordonné la publication d'un communiqué dans la prochaine édition de
l'Action Républicaine édition du perche aux frais du défendeur, -rejeté toutes autres demandes, -ordonné l'exécution provisoire sauf du chef de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Alain GASCON et la société Echo Communication ont interjeté appel du jugement ainsi que Stéphane MARCHAND sur appel incident. Ils concluent aux termes de leurs dernières écritures en date du 20 septembre 2001 auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé à la recevabilité et au bien fondé de leur appel, prie la cour, infirmant le jugement de dire prescrite l'action civile de madame X... sur le fondement de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, de constater la nullité de l'assignation en date du 14 août 1997 au regard des dispositions de l'article 53 alinéa 1 et alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881 et en conséquence de dire prescrite et par voie de conséquence éteinte l'action de madame X... à leur encontre , de la débouter de l'ensemble de ses demandes, de la condamner à leur payer la somme de 30 000 francs de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que celle de 20 000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société l'Action Républicaine et Philippe HERSANT intimés, et appelants incidemment, concluent aux termes de leurs dernières écritures en date du 16 novembre 2000 auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé, à la recevabilité et au bien fondé de leur appel, et prie la cour, infirmant le jugement, de constater la nullité de l'assignation en date du 18 août 1997 délivrée par madame X... au regard des dispositions de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, de déclarer en conséquence prescrite et éteinte son action à leur encontre, de la débouter de l'ensemble de ses demandes, de la condamner au paiement d'une somme de 20 000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Madame Florence X..., intimée et appelante incidente, conclut aux
termes de ses dernières écritures auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, au débouté des appelants de leurs demandes, fins et conclusions, à la confirmation du jugement sauf du chef des dommages et intérêts dont elle demande qu'ils soient élevés à la somme de 50 000 francs pour chaque publication litigieuse, sollicitant en outre la condamnation des défendeurs au paiement d'une indemnité de 20 000 francs pour frais irrépétibles à son profit. Madame X... a signifié le 24 septembre 2001 des conclusions interruptives de prescription. Gérard DIETRICH étant décédé en cours d'instance d'appel, ses héritiers en la personne de Anne DIETRICH, Nicole DIETRICH et Nicolas DIETRICH ont été assignés et réassignés en intervention forcée et reprise d'instance et n'ont pas constitué avoué. SUR CE Considérant que Alain GASCON et la société Echo Républicain opposent la prescription de l'action engagée par madame X... aux motifs que le délai imparti à l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 qui courrait en l'espèce depuis le 27 mai 1997 n'a pas été valablement interrompu après l'assignation en date du 14 août 1997 dans le délai de trois mois qui courrait à nouveau, de telle sorte que la prescription est acquise ; Mais considérant qu'il ressort des pièces de procédure que madame X... qui a fait assigner dans le délai de trois mois suivant la publication litigieuse a valablement interrompu le délai qui court de trois mois en trois mois en signifiant le 6 octobre 1997 des conclusions aux fins d'interruption de la prescription, laquelle a été par la suite régulièrement interrompue ; Considérant que tous les appelants tant à titre principal qu'à titre incident, reprennent en appel le moyen de nullité de l'assignation aux motifs que l'acte introductif d'instance vise au mépris des dispositions impératives de l'article 53 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 successivement les articles de la loi du 29 juillet 1881 et l'article 1382 du code civil, ce moyen ayant été écarté par les
premiers juges qui ont estimé que les dispositions de droit commun n'étaient visées qu'à titre subsidiaire ; Considérant que madame X... conclut à l'irrecevabilité de la demande de nullité présentée par la société l'Echo Républicain qui n'aurait pas été invoquée avant toute défense au fond, et subsidiairement au mal fondé en soutenant que l'article 1382 du code civil n'a été visé qu'à titre subsidiaire, qu'il n'y a aucun visa cumulatif et que la poursuite est parfaitement régulière ; Mais considérant que le reproche fait à la société Echo Républicain de ne pas avoir soulevé in limine litis ce moyen de nullité est totalement infondé dès lors que ce moyen constitue une fin de non recevoir laquelle est recevable en tout état de cause et que même à le qualifier d'irrégularité de fond soumis au régime des articles 118 et suivants du nouveau code de procédure civile, force est de constater , ainsi qu'il ressort des pièces de procédure, que dans leurs premières conclusions prises le 6 mai 1998 , la société Echo Républicain et Alain GASCON soulevaient à titre préliminaire et avant toute défense au fond la recevabilité de l'assignation en se joignant expressément aux moyens soulevés de ce chef par les autres défendeurs, que le moyen est recevable ; Considérant que les règles définies par la loi du 29 juillet 1881 d'ordre public sont applicables aux actions civiles ; Considérant que l'article 53 alinéa 1 de la loi impose à celui qui agit de préciser et qualifier le fait invoqué et d'indiquer la loi applicable ; Considérant que le strict respect de ce formalisme édicté à peine de nullité de l'assignation n'autorise pas le visa cumulatif, alternatif ou subsidiaire de deux ou plusieurs qualifications à un même fait incriminé et fondements différents pour une même poursuite ; Considérant qu'en l'espèce les actes de poursuite rapportent les propos incriminés lesquels sont qualifiés "de diffamatoires pour porter atteinte à la considération et aux qualités professionnelles de madame X... et constitutifs du
délit de diffamation publique envers un particulier prévu et réprimé par les articles 23, 29 alinéa 1 et 32 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 et en tous cas une faute au sens de l'article 1382 du code civil" ; Considérant qu'en visant pour un même fait deux qualifications distinctes et deux fondements différents, madame X... a méconnu les règles d'ordre public de la loi du 29 juillet 1881 de telle sorte que les deux actes introductifs d'instance contenant des demandes irrecevables sont nuls et de nul effet ; Considérant que la conséquence de cette nullité est la prescription de l'action intentée laquelle est éteinte, ce qu'il convient de constater ; Considérant qu'il n'y a pas lieu dès lors de répondre aux autres moyens de nullité ; Considérant que le jugement déféré sera infirmé ; Considérant que l'erreur de droit n'est pas constitutive en l'espèce d'un abus du droit d'ester en justice , de telle sorte que la société Echo Républicain et Alain GASCON et Stéphane MARCHAND doivent être déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts ; Considérant qu'eu égard aux situations respectives des parties, aucun motif d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, les demandes réciproques devant être rejetées ; Considérant que madame X... qui succombe pour l'essentiel, doit supporter la charge des entiers dépens ; PAR CES MOTIFS LA COUR, statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, REOEOIT les appels principaux et à titre incident et les déclare bien fondés, INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, VU l'article 53 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881, DÉCLARE nulles et de nul effet les assignations délivrées par madame X... à l'encontre des appelants les 14 et 18 août 1997, DÉCLARE l'action prescrite conformément à l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, CONSTATE l'extinction de l'action, DÉBOUTE de toutes autres demandes plus amples ou
contraires, DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, CONDAMNE madame X... aux dépens avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,
Le Président, Sylvie RENOULT
Francine BARDY