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12/09/2002 | FRANCE | N°1999-8662

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12 septembre 2002, 1999-8662


La société GEFCO, commissionnaire de transport, a confié divers transports à la SARL TRANSPORTS TABOURET. Certaines opérations, réalisées au cours des mois de novembre et décembre 1995, ont donné lieu à l'émission de factures par les TRANSPORTS TABOURET à GEFCO pour un montant total égal à 147.872,43 F. ( 22.543,01 ). Ces différentes factures ont été cédées à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY (ci-après CREDIT MUTUEL) dans le cadre de la loi Dailly, et leur cession a été notifiée à la société GEFCO par courriers recommandés reçus les 26 décembre 1995, 02, 03 et

04 janvier 1996. Le 11 septembre 1995, le trésor public, créancier des TRANS...

La société GEFCO, commissionnaire de transport, a confié divers transports à la SARL TRANSPORTS TABOURET. Certaines opérations, réalisées au cours des mois de novembre et décembre 1995, ont donné lieu à l'émission de factures par les TRANSPORTS TABOURET à GEFCO pour un montant total égal à 147.872,43 F. ( 22.543,01 ). Ces différentes factures ont été cédées à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY (ci-après CREDIT MUTUEL) dans le cadre de la loi Dailly, et leur cession a été notifiée à la société GEFCO par courriers recommandés reçus les 26 décembre 1995, 02, 03 et 04 janvier 1996. Le 11 septembre 1995, le trésor public, créancier des TRANSPORTS TABOURET, a notifié à la société GEFCO un avis à tiers détenteur pour 177.668 F. ( 27.085,31 ). En exécution de cet avis à tiers détenteur, la société GEFCO a réglé au trésor public trois mensualités de 23.000 F. ( 3.506,33 ); le solde, soit la somme de 108.668 F. ( 16.566,33 ), a été réglé au trésor public le 12 janvier 1996. La société TRANSPORTS TABOURET a été placée en redressement judiciaire par décision du 26 décembre 1995. Par écrit en date du 17 janvier 1996, le CREDIT MUTUEL a réitéré sa demande de paiement auprès de la société GEFCO ; celle-ci a alors présenté une demande de restitution de son règlement auprès des services fiscaux de l'Aude ; son recours a été rejeté par l'administration fiscale. C'est dans ces circonstances qu'à la suite d'une procédure de référé, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY-SUR-SEINE a, par acte d'huissier du 24 décembre 1998, assigné la société GEFCO en paiement de la somme de 108.668 F. ( 16.566,33 ). Par jugement du 17 septembre 1999, le tribunal de commerce de NANTERRE a condamné la société GEFCO à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY-SUR-SEINE la somme de 108.668 F. ( 16.566,33 ), avec intérêts au taux légal à compter du 06 juin 1996, augmentée d'une indemnité de 15.000 F. ( 2.286,74 ) au titre de l'article 700 du

nouveau code de procédure civile. La société GEFCO a interjeté appel de cette décision. Elle fait valoir qu'il résulte des conventions d'affrètement versées aux débats que la société TRANSPORTS TABOURET louait ses services en permanence à la société GEFCO. Elle en déduit que la créance des TRANSPORTS TABOURET existait en germe depuis la signature de ces conventions, et qu'elle a été transférée à l'Administration Fiscale, dès notification de l'avis à tiers détenteur, par application de l'article L 263 du Livre des Procédures Fiscales et de l'article 70 alinéa 2 du décret du 31 juillet 1997, prévoyant qu'au fur et à mesure des échéances, le tiers saisi doit se libérer entre les mains du créancier saisissant. Alléguant qu'en vertu de l'article 13 de la loi du 09 juillet 1991, la saisie peut porter sur des créances à exécution successive, elle demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY-SUR-SEINE de toutes ses réclamations, et d'ordonner à cette dernière de lui restituer la somme de 108.668 F. ( 16.566,33 ) avec intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 1999. Elle réclame en outre la somme de 20.000 F. ( 3.048,98 ) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY-SUR-SEINE conclut à la confirmation du jugement. Elle réplique que les conventions d'affrètement litigieuses doivent s'analyser comme des contrats-cadre prévoyant un certain nombre d'obligations mises à la charge du voiturier, et qu'elles n'ont pas d'autre objet que de définir les règles générales applicables aux relations entre les sociétés GEFCO et TRANSPORTS TABOURET. Elle conteste que ces conventions puissent être assimilées à des contrats à exécution successive, alors que chaque opération de transport était autonome, et alors que la rémunération sous la forme d'un forfait journalier, y compris pour les journées non roulées, n'était prévue que sous réserve que le

véhicule soit effectivement à la disposition de GEFCO. Elle relève que la partie adverse ne démontre nullement qu'elle garantissait à la société TRANSPORTS TABOURET le versement d'une rémunération minimum même dans le cas où elle ne lui confiait pas de mission de transport. Elle observe qu'en l'espèce, l'avis à tiers détenteur a été notifié à la société GEFCO le 11 septembre 1995, et que les cessions par bordereaux Dailly ont été effectuées au mois de décembre 1995 pour des prestations effectuées aux mois de novembre et décembre 1995, donc postérieurement à la notification de l'avis à tiers détenteur. Elle ajoute que la société appelante, qui avait au plus tard début janvier 1996 reçu l'ensemble des notifications de cessions de créances, ne pouvait ignorer l'existence de ces cessions de créances, lorsqu'elle a le 12 janvier 1996 effectué son règlement entre les mains du trésor public en exécution de l'avis à tiers détenteur. Elle réclame en outre une indemnité égale à 20.000 F. ( 3.048,98 ) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 11 octobre 2001. MOTIFS DE LA DECISION : ä Sur la créance du CREDIT MUTUEL et sur l'incidence de l'avis à tiers détenteur : Considérant qu'aux termes de l'article L 263 du Livre des Procédures Fiscales, " l'avis à tiers détenteur a pour effet d'affecter, dès réception, les sommes dont le versement est ainsi demandé au paiement des impositions privilégiées, quelle que soit la date à laquelle les créances mêmes conditionnelles ou à terme que le redevable possède à l'encontre du tiers détenteur deviennent effectivement exigibles " ; considérant qu'il s'infère de cette disposition que l'avis à tiers détenteur, s'il permet d'appréhender, non seulement les créances immédiatement exigibles, mais également les créances à terme ou conditionnelles, est en revanche inopérant sur les créances qui se forment après sa notification ; considérant qu'il y a donc lieu de rechercher si les

créances cédées au CREDIT MUTUEL, correspondant à des prestations effectuées en novembre et décembre 1995, existaient en germe ou à titre conditionnel dès la signature des conventions d'affrètement et si elles sont nées de l'exécution successive de celles-ci, donc antérieurement à la notification de l'avis à tiers détenteur ; considérant qu'en l'occurrence, aux termes des conventions d'affrètement produites aux débats, la société GEFCO a confié à la société TRANSPORTS TABOURET l'exécution de certains transports nationaux ou internationaux, et, à cette fin, lui a fixé un " cadre général prévoyant un certain nombre d'obligations mises à la charge du voiturier " concernant le matériel à fournir, l'état du matériel et sa propreté, la publicité aux couleurs de GEFCO, les titres et les documents de transport, le respect de la législation sociale, du Code de la Route et des assurances à souscrire ; considérant qu'en vertu des clauses de ces conventions, il est spécifié que le voiturier, disposant du matériel et des documents nécessaires à ces transports nationaux et internationaux, accepte de fournir un véhicule ou un ensemble routier afin d'effectuer des transports routiers de marchandises diverses " lorsqu'il est affrété par GEFCO " ; considérant que si, à l'annexe : " rémunération du voiturier ", les parties ont prévu que le voiturier bénéficierait d'un forfait journalier de 1.050 F. (160,07 ) " sous réserve que le véhicule soit effectivement à la disposition de GEFCO ", il n'est toutefois ni démontré ni allégué que cette rémunération minimum devait être versée au transporteur même dans l'hypothèse où la société appelante ne lui confiait pas de mission de transport ; considérant qu'il suit de là que les conventions d'affrètement susvisées n'avaient vocation à s'appliquer que pour autant qu'une opération de transport spécifique ait été effectivement confiée par la société GEFCO aux TRANSPORTS TABOURET ; or considérant qu'il ne s'infère nullement des documents

produits aux débats qu'à la date de la notification de l'avis à tiers détenteur, la société TRANSPORTS TABOURET avait été chargée d'une opération de transport pour le compte de la société GEFCO ; considérant que, d'ailleurs, cette dernière avait implicitement reconnu qu'il n'existait aucune prestation de transport en cours, puisqu'aux termes de l'accusé de réception de l'avis à tiers détenteur en date du 15 septembre 1995, elle avait expressément indiqué n'avoir plus de factures à régler à ce transporteur ; considérant qu'au surplus, selon correspondance adressée le 22 février 1996 à la Direction des Services Fiscaux de l'Aude, la société appelante a confirmé que la somme dont elle était redevable envers l'entreprise de transport concernait des factures postérieures à la réception par elle de l'avis à tiers détenteur du 11 septembre 1995 ; considérant qu'en définitive, il apparaît qu'à l'époque de la notification à la société appelante de cette mesure d'exécution, la société TRANSPORTS TABOURET ne bénéficiait d'aucune créance, fût-elle en germe ou conditionnelle, à l'encontre de la société GEFCO, avec laquelle aucune opération de transport n'avait alors été conclue ; considérant qu'il s'ensuit que c'est à tort que la société GEFCO a adressé son règlement au trésor public le 12 janvier 1996, soit à une date postérieure à la réception par elle, entre le 26 décembre 1995 et le 05 janvier 1996, des notifications de cessions de créance au profit du CREDIT MUTUEL ; considérant que le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a condamné la société GEFCO à régler à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY-SUR-SEINE la somme de 108.668 F., soit 16.566,33 , correspondant au paiement indu effectué entre les mains du trésor public, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 06 juin 1996, date de l'assignation en référé. ä Sur les demandes annexes : Considérant que l'équité commande d'allouer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY-SUR-SEINE la somme complémentaire

de 1.600 par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; considérant qu'il n'est cependant pas inéquitable que la société appelante conserve la charge de l'intégralité des frais non compris dans les dépens exposés par elle dans le cadre de la présente instance ; considérant que la société GEFCO, qui succombe en son recours, doit être condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel. ä PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, DECLARE recevable l'appel interjeté par la société GEFCO, LE DIT mal fondé; CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré ; Y ajoutant : CONDAMNE la société GEFCO à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE ROMILLY-SUR-SEINE la somme complémentaire de 1.600 sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; CONDAMNE la société GEFCO aux dépens d'appel, et AUTORISE Maître TREYNET, Avoué, à recouvrer directement la part le concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR FEDOU, CONSEILLER PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT M. THERESE X...

FRANOEOISE LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1999-8662
Date de la décision : 12/09/2002

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Recouvrement (règles communes) - Avis à tiers détenteur - Domaine d'application

Il résulte des dispositions de l'article L 263 du Livre des procédures fiscales que l'avis à tiers détenteur s'il permet à l'administration fiscale d'appréhender, non seulement les créances immédiatement exigibles, mais également les créances à terme à termes ou conditionnelles, reste sans effet à l'égard des créances qui se forment après sa notification.S'agissant d'un contrat d'affrètement en vertu duquel le voiturier accepte de fournir un ensemble routier afin d'effectuer des transports routiers de marchandises diverses " lorsqu'il est affrété " par son cocontractant et que le versement du forfait journalier minimal auquel peut prétendre le voiturier suppose que le véhicule soit effectivement à la disposition du cocontractant, il s'ensuit nécessairement que le contrat d'affrètement n'a vocation à s'appliquer qu'à condition qu'une opération de transport déterminée ait été confiée au voiturier, laquelle constitue la source de créances à l'égard de l'affréteur. Faute de démontrer qu'au jour de la notification au tiers détenteur - ici l'affréteur - une opération de transport aurait été confiée au voiturier ou que celui aurait bénéficié d'une quelconque créance, à terme ou conditionnelle, à l'encontre de l'affréteur, c'est donc à tort que l'affréteur à effectué le règlement au profit du Trésor public de sommes nées postérieurement à la notification de l'avis ; lesdites créances ayant fait l'objet d'une cession antérieure à la notification de l'avis, l'affréteur doit être condamné à payer au cessionnaire les sommes indûment versées au Trésor


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2002-09-12;1999.8662 ?
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