COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80A 11ème chambre ARRET No contradictoire DU 25 JANVIER 2006 R.G. No 04/05067 AFFAIRE : S.A.R.L. EM TECHNIQUE C/ Franck X... Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Octobre 2004 par le Conseil de Prud'hommes de PONTOISE Section : Commerce No RG : 03/00622 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à :
RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS LE VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : S.A.R.L. EM TECHNIQUE 82 avenue du Château BP 7034 95051 CERGY PONTOISE CEDEX Représentée par Me Mathilde HOUET-WEIL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R02 APPELANTE [****************] Monsieur Franck X... 3 Cour des Jonquilles 95810 ARRONVILLE représenté par Me Eric AZOULAY, avocat au barreau de PONTOISE, vestiaire : 10 INTIME [****************] Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Novembre 2005, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette Y..., Présidente, chargée d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Colette Y..., Présidente,
Madame Christine Z..., Conseillère,
Madame Catherine A..., Vice-Présidente, Greffier, lors des débats : Madame Hélène B..., FAITS ET PROCÉDURE,
Employé par la société EM Technique depuis le 1er décembre 1992, en qualité de technico-commercial, M. X... a été convoqué un entretien fixé le 8 avril 2003, préalable à un éventuel licenciement et mis à pied à titre conservatoire par lettre du 21 mars 2003, puis
a été licencié pour faute grave par lettre du 17 avril 2003.
Par jugement rendu le 13 octobre 2004, le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise a jugé le licenciement abusif et a condamné l'employeur à payer au salarié des sommes au titre du salaire correspondant à la mise à pied conservatoire, du préavis de commissions et les congés payés afférents, un prorata de 13ème mois, une indemnité de licenciement, ce avec intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2003 et des dommages-intérêts pour licenciement abusif et une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile avec intérêts au taux légal à compter du jugement.
La société EM Technique a régulièrement relevé appel de cette décision.
Par conclusions déposées à l'audience, elle demande à la Cour : * à titre principal, d'infirmer le jugement et d'ordonner le remboursement par le salarié des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2004, * à titre subsidiaire, de juger que le licenciement a une cause réelle et sérieuse et, les sommes ayant été versées au salarié au titre de l'exécution provisoire en brut, d'ordonner au salarié le remboursement, avec intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2005, des sommes correspondant aux cotisations salariales obligatoires, * de condamner le salarié à lui payer 4.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
M. X..., par conclusions déposées à l'audience, sollicite * la confirmation du jugement, sauf à porter à - 5.974,57 ç l'indemnité de préavis et 597,46 ç l'indemnité de congés payés afférents, - 3.153,25 ç l'indemnité de licenciement conventionnelle, - 35.847,43 ç les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, * l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de solde de prime de bilan et la condamnation de l'employeur à lui payer
à ce titre 1.600 ç pour 2001, 1.600 ç pour 2002 et prorata temporis 933,33 ç pour 2003,
Il demande la condamnation de l'employeur à lui payer 299 ç au titre de la contrepartie financière des tickets restaurant, et 2.000 ç au titre l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Pour l'exposé des moyens des parties, la Cour renvoie aux conclusions précitées soutenues à l'audience. SUR CE, LA COUR :
Sur le licenciement :
Considérant que M. X... a été licencié, aux termes de la lettre du 17 avril 2003, pour - avoir frauduleusement manipulé à plusieurs reprises le système informatique afin de se faire attribuer des commissions auxquelles il ne pouvait prétendre, manifestant ainsi sa déloyauté à l'égard de l'entreprise et de ses collègues de l'équipe commerciale, - avoir notamment falsifié la liste recensant les clients sur lesquels il percevait des commissions, en y ajoutant la société Albemarle qui était déjà depuis longtemps cliente, ceci dans le but de percevoir frauduleusement une commission sur les ventes, - s'être attribué le bénéfice d'un client, la société Prestofluid qui ne dépend pas de son secteur géographique mais de celui d'un de ses collègues, - s'être attribué la paternité de clients qui n'ont pas été démarchés par ses soins, mais sont entrés spontanément en relation commerciale avec la société, - s'être permis d'octroyer des facilités de paiements et des baisses de prix sans même recueillir l'aval de son supérieur hiérarchique direct, agissant ainsi contre l'intérêt de son employeur ;
Considérant qu'un avenant du 28 août 1996 au contrat de travail du salarié prévoit le versement au salarié d'une commission de 6% sur le montant net HT, après déduction de la remise, non compris les frais de port, emballage et assurance, - de chaque commande de la part d'un nouveau client qui a été gagné suite aux efforts de M. X... et à
ses visites et - de commandes de la part des sociétés de montages connues, si le prescripteur du matériel est un nouveau client gagné par les efforts de M. X... ;
Considérant qu'il est constant que le salarié a créé un nouveau compte client au nom de la société Albemarle avec un changement de numéro de compte client devenu 025 ;
Qu'il est établi et reconnu par le salarié que la société Albemarle n'était pas un nouveau client ; que le salarié soutient néanmoins que cette société doit être considérée comme un nouveau client parce que la commande portait sur des produits nouveaux par rapport à ceux que la société commandait antérieurement, la société a changé d'adresse de facturation et il a changé d'interlocuteur au sein de la société Albemarle ;
Que l'usage dans l'entreprise, allégué par le salarié, d'un versement de commissions lorsque la commande d'un ancien client porte sur des nouveaux produits n'est pas établi ;
Que la commande par la société de produits nouveaux par rapport à ceux qu'elle commandait antérieurement et son changement d'adresse de facturation n'ont pas donné à la société Albemarle la qualité de "nouveau client gagné" au sens de l'avenant au contrat de travail du salarié ; que de même le salarié ne peut sérieusement soutenir que son changement d'interlocuteur au sein de la société Albemarle, d'autant que cet interlocuteur, M. C..., avait déjà été, ainsi que le démontre l'employeur, en relation avec la société EM Technique, a pu conférer à la société Albemarle la qualité de nouveau client ;
Que la "liste des clients" du 9 janvier 2003, qui apparaît être une première page d'un document plus important, ne comporte aucune mention faisant ressortir qu'il s'agit d'une liste des nouveaux clients et son rapprochement avec les autres documents versés aux
débats ne permet pas de l'établir ;
Que si cette liste mentionne le nouveau numéro (025) de client de la société Albemarle avec une domiciliation en Belgique, lieu de facturation, seule l'utilisation par le salarié du nouveau compte, lequel n'est qu'un acte préparatoire et équivoque, pour obtenir le paiement de commissions indues peut révéler une faute ; que l'employeur n'a pu en avoir connaissance que par la liste datée du 3 février 2003 des nouveaux clients et chiffre d'affaires apportés pour le calcul des commissions, les premières factures de la société Albemarle étant du 29 janvier 2003 ;
Que l'exception de prescription n'est donc pas fondée et, un accord du supérieur hiérarchique n'étant pas démontré, la faute est établie ;
Considérant que l'octroi par le salarié de remises au-delà de la limite de 20% prévue par son contrat de travail est démontrée ;
Que la proposition à la SAGEM d'un tarif de 0,16 ç au lieu de 0,39 ç signée par M. X... engageait l'employeur ;
Que la remise de 56,18 % à la SAGEM pour un autre produit est établie par la facture produite, laquelle est nécessairement conforme à la commande qui ne peut elle-même qu'être conforme à la proposition faite au client ;
Que le salarié ne précise pas à quel titre la société Ecolab à qui des remises de 25,6% ont été accordées pouvait bénéficier d'un prix d'achat spécial, de même que la société Prestofluid ;
Qu'un accord du supérieur hiérarchique du salarié pour l'octroi de ces remises n'est pas établi, de même que pour les remises accordées à la société Ecolab et à la société Prestofluid cumulée avec une remise distributeur de 30 et 40% déjà consentie ;
Considérant que ces seuls faits par leur gravité empêchaient le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du
préavis ;
Considérant que le jugement qui en a décidé autrement sera donc infirmé et le salarié sera débouté de ses demandes afférentes au licenciement ;
Sur la demande de commissions sur vente :
Considérant que la société Albemarle n'étant pas un nouveau client, l'usage dans l'entreprise, allégué par le salarié, d'un versement de commissions lorsque la commande d'un ancien client porte sur des nouveaux produits n'étant pas établi et un accord, quand bien même son contrat de travail ne lui en donnait pas le pouvoir, de M. D... sur l'octroi au salarié des commissions sur les commandes de cette société, ne l'étant pas non plus, la demande de commissions sur les commandes de cette société n'est pas fondée ;
Considérant que la société Prestofluid n'est pas un nouveau client de M. X... et elle n'est pas une société de montage mais une société de distribution ;
Que le salarié est donc également mal fondé en sa demande en paiement de commissions sur les commandes de la société Prestofluid, peu important que les achats soient destinés à une prétendue société Millipore, notamment eu égard à l'activité de la société Prestofluid qui implique l'achat pour revendre ;
Considérant, en revanche, que la preuve n'est pas apportée que la société Draeger est un ancien client et que la société Lay Concept est entrée spontanément en relation avec la société EM Technique ; que la demande concernant ces sociétés sera accueillie ;
Que les demandes concernant les commandes des sociétés Applexion, TDM et De Dietrich, pour lesquelles le salarié précise le numéro client, la date des commandes et leur montant, ne sont pas sérieusement contestées par l'employeur ; qu'elles seront également accueillies ;
Que la somme due au titre des commissions s'établit donc à la somme brute de 1035.10 ç à laquelle s'ajoute l'indemnité brute de congés payés afférents ;
Sur le treizième mois :
Considérant que le contrat de travail initial prévoit le versement au salarié d'une rémunération sur 13 mois ;
Que l'avenant du 28 août 1996 n'a fait qu'accorder au salarié en plus du salaire fixe antérieurement convenu une rémunération variable, sans modifier la base de calcul du 13ième mois résultant du contrat initial ;
Qu'ayant été justement licencié pour faute grave, le salarié ne peut prétendre qu'au paiement d'un 13ième au prorata du temps de présence jusqu'à la notification du licenciement ;
Que dès lors et compte tenu du salaire figurant sur les bulletins de paie du salarié la prime de treizième mois due s'établit à la somme de 652,50 ç à laquelle s'ajoute les congés payés afférents ;
Sur la prime de bilan :
Considérant que la prime n'est pas fixe dans son montant et son caractère fixe dans ses modalités de calcul n'est pas établi pas plus que n'est démontré son caractère général ;
Que le
Que le jugement qui a débouté le salarié de sa demande de ce chef sera confirmé ;
Sur la demande relative aux tickets restaurant :
Considérant que le seul fait que la mise à pied conservatoire soit justifiée, compte tenu du licenciement pour faute grave prive de fondement cette demande ;
Que le salarié en sera débouté ;
Considérant que succombant partiellement, l'employeur supportera les dépens ;
Que l'équité commande d'accueillir à hauteur de 1.500 ç la demande du salarié fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME le jugement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de prime de bilan,
L'INFIRME pour le surplus,
Statuant à nouveau,
DIT que le licenciement est justifié par une faute grave,
CONDAMNE la société EM Technique à payer à M. X... - en deniers ou quittances valables, 652,50 ç ( SIX CENT CINQUANTE DEUX EURO ET CINQUANTE CENTIMES ) au titre de la prime de treizième mois et 65,25 ç ( SOIXANTE CINQ EURO ET VINGT CINQ CENTIMES ) au titre de l'indemnité de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 1er août 2003, - 1035.10 ç ( MILLE TRENTE CINQ EURO ET DIX CENTIMES ) à titre de rappel de commissions et 103,51 ç ( CENT TROIS EURO CINQUANTE ET UN CENTIMES ) au titre de l'indemnité de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 26 mai 2004,
DÉBOUTE M. X... du surplus de ses demandes,
DIT que M. X... devra restituer à la société EM Technique, avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la présente décision, les sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement excédant le montant des condamnations précitées,
CONDAMNE la société EM Technique aux dépens,
LA CONDAMNE à verser à M. X... 1.500 ç ( MILLE CINQ CENTS EURO ) sur le fondement l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Arrêt prononcé et signé par Madame Colette Y..., Présidente, et signé
par Madame Hélène B..., Greffier présent lors du prononcé.
Le GREFFIER,
La PRÉSIDENTE,