COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 91A RENVOI DE CASSATION CIVIL ARRET No CONTRADICTOIRE DU 07 SEPTEMBRE 2006 R.G. No 05/04158 AFFAIRE : Le Directeur X... des Impôts C/ Michel Y... Décision déférée à la cour :
Jugement rendu par le tribunal de grande instance de PARIS, le 10 septembre 1998 2ème chambre 2ème section RG 1996/17416 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP LISSARRAGUE Me Claire RICARDREPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : DEMANDEUR devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation ( chambre commerciale, financière et économique) du 28 septembre 2004 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de PARIS (1ère chambre, section B) le 27 octobre 2000 (RG 1998/23497) Monsieur Le Directeur Général des Impôts, poursuites et diligences du directeur des services fiscaux de Paris-Sud élisant domicile en ses bureaux 9, place Saint Sulpice - 75006 PARIS représenté par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD Avoués - N du dossier 0541353 DEFENDEUR DEVANT LA COUR DE RENVOI Monsieur Michel Y... demeurant ... - 75004 PARIS représenté par Me Claire RICARD Avoué - N du dossier 250591 rep/assistant : Me Jean PAILHES (avocat au barreau de PARIS) Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 31 Mai 2006, Madame Lysiane LIAUZUN, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Francine BARDY, président,
Madame Lysiane LIAUZUN, conseiller,
Madame Françoise SIMONNOT, conseiller,
qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT
L'administration fiscale a notifié le 10 novembre 1993 à Monsieur Michel Y... un redressement fondé sur la remise en cause de la valeur d'un appartement dont ses parents lui ont fait donation de la nue-propriété par acte du 28 novembre 1990.
La valeur de l'appartement, estimé dans l'acte de donation à la somme de 2.100.000F (320.143ç), soit 14.400F (2.134ç) le m , en pleine propriété, et, compte tenu de l'usufruit réservé, de 1.836.000F (279.896ç), a été portée par l'administration à la somme de 43000 F. le m en pleine propriété et les droits rappelés, soit 817.160F (124.575ç), assortis des intérêts de retard, soit 214.504F (32.701ç) ont été mis en recouvrement le 6 avril 1995.
La réclamation contentieuse présentée par Monsieur Y... a été admise partiellement le 24 mai 1996 et la valeur vénale a été ramenée à 39.000F le m (5.945ç) en raison de la vétusté des équipements collectifs de l'immeuble (ascenseur et chauffage) et de la distribution inadaptée des pièces de l'appartement, les droits supplémentaires étant ainsi ramenés à 680.855F (103.796ç) et les intérêts de retard à 178.724F (27.246ç).
Par acte du 19 juillet 1996, Monsieur Y... a fait assigner le directeur des services fiscaux de Paris-Sud devant le Tribunal de Grande Instance de PARIS afin d'obtenir l'annulation de la décision d'admission partielle et la décharge ou, subsidiairement, la réduction de l'imposition supplémentaire émise.
Par jugement avant dire droit du 7 novembre 1997, le Tribunal a désigné un expert qui a estimé, dans son rapport déposé le 10 mars 1998, la valeur du bien à 34.000F le m .
Par jugement du 10 septembre 1998, le Tribunal a annulé la notification de redressement en retenant que les éléments de comparaison cités par l'administration ne concernent pas des biens intrinsèquement similaires à celui objet du redressement.
L'administration ayant interjeté appel de ce jugement, la Cour d'Appel de PARIS, par arrêt du 27 octobre 2000, l'a infirmé et a débouté Monsieur Y... de toutes ses demandes, estimant que les caractéristiques des biens retenus par l'administration comme termes de comparaison sont, par leur situation géographique, objectivement comparables à celles de l'appartement en cause .
Par arrêt du 28 septembre 2004, la Cour de Cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt de PARIS et renvoyé les parties devant la Cour d'Appel de VERSAILLES, faisant grief à la Cour d'Appel de PARIS d'avoir retenu que les caractéristiques des biens immobiliers retenus pour l'évaluation de l'appartement sont, par leur situation, objectivement comparables, ajoutant qu'en statuant par de tels motifs, impropres à établir que la notification de redressement précisait, de façon à permettre à son destinataire de prendre parti au vu de ses seules indications, les circonstances établissant le caractère intrinsèquement similaire de biens pris comme éléments de comparaison dans les conditions usuelles sur le marché réel considéré, la cour a privé sa décision de base légale .
L'administration a saisi cette cour par déclaration de saisine du 26 mai 2005.
Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 10 février 2006 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de ses moyens, l'administration, appelante, conclut à la réformation du jugement du 10 septembre 1998 en ce qu'il a annulé la procédure de redressement pour insuffisance de motivation et demande à la cour de : - constater l'accord des parties sur la valeur vénale de l'appartement à 34000 F.
le m au jour de la donation, - rejeter la demande de l'intimé en paiement de la somme de 3.000ç de frais irrépétibles dés lors que l'administration a déjà été condamnée au paiement de 1.200ç par la Cour de Cassation, - condamner Monsieur Z... aux entiers dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 22 novembre 2005 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de ses moyens, Michel Y... conclut à la confirmation, en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande à la Cour, en y ajoutant, de condamner le Directeur des Services Fiscaux de PARIS SUD au paiement de la somme de 3.000ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. SUR CE
Considérant qu'il incombe à l'administration des impôts, lorsqu'elle entend substituer à la valeur déclarée dans un acte de mutation la valeur vénale réelle du bien en cause, de justifier, dès la notification du redressement, l'évaluation par elle retenue au moyen d'éléments de comparaison tirés de la cession, avant la mutation litigieuse, de biens intrinsèquement similaires, sans qu'ils soient pour autant strictement identiques, étant précisé que l'appréciation de la similitude des éléments invoqués avec le bien en cause ne peut être que concrète et ne se limite pas à la situation géographique ;
Considérant qu'en l'espèce, l'administration a retenu dans la notification de redressement quatre termes de comparaison en précisant pour chacun la date de la vente ( toutes en 1990 et antérieures à la donation), l'adresse des biens vendus (tous dans le
5ème arrondissement comme l'immeuble litigieux, mais dans des rues différentes), la superficie (supérieure à 120 m ) , l'étage, étant observé qu' un seul est situé au 3ème étage et non deux comme indiqué par l'administration dans ses conclusions (celui sis 62bd Saint-Germain étant situé, dans la notification, au 2ème étage), et la nature de la construction (immeubles tous construits à la fin du 19ème siècle, début de 20ème, dont la façade est en pierre de taille et de briques) ;
que ces indications, contenues dans la notification de redressement, sont suffisantes pour permettre à son destinataire de prendre son parti à leur seule vue ;
Considérant qu'il résulte tant des mentions de l'acte de donation que de l'expertise que l'appartement litigieux, situé au 3ème étage d'un immeuble de construction ancienne à façade sur rue en pierre de taille avec une entrée d'assez belles dimensions, digicode, interphone, ascenseur, escalier en pierre revêtu d'un tapis, d'une superficie de 150m outre au 7ème étage une chambre et un débarras et en sous-sol une cave, comprend une entrée de grande dimension, un salon avec belle cheminée, un petit salon, une salle à manger, une petite cuisine, trois chambres, un WC et une salle de bains ;
que l'expert a encore relevé la très bonne situation de l'immeuble en secteur résidentiel recherché pour l'habitation, au coeur du quartier latin ;
qu'il s'ensuit que, même si l'expert a relevé que les ventes produites par l'administration concernent toutes des immeubles de plus belle facture, ce qui n'est pas évident à la vue des photographies produites, les éléments de comparaison retenus par l'administration sont intrinsèquement similaires au bien ayant fait l'objet de la donation, étant également observé que la valeur de 43.000F le m retenue initialement par l'administration entre dans la
fourchette de prix donnée par l'expert au titre du marché local, la valeur de 34000 F. le m finalement retenue par l'expert et acceptée par l'administration ayant été fixée en raison de l'état intérieur de l'appartement (état d'entretien, distribution des pièces, éclairage) ;
qu'en conséquence, la notification du redressement est en la forme, quant à la motivation, régulière, l'administration ayant démontré l'insuffisance de déclaration ;
qu'il s'ensuit que le jugement rendu le 10 septembre 1998 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS sera infirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant qu'il convient de donner acte à l'administration fiscale, ainsi qu'accepté en première instance par Monsieur Y..., de son accord pour entériner l'estimation de l'expert et fixer la valeur de l'appartement litigieux à la date de la donation à la somme de 34000 F. le m ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, eu égard à l'équité, de prononcer une condamnation sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort,
VU l'arrêt rendu le 28 septembre 2004 par la Cour de Cassation,
INFIRME le jugement prononcé le 10 septembre 1998 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS en toutes ses dispositions,
ET STATUANT À NOUVEAU,
DIT que la notification de redressement en date du 10 novembre 1993 est régulière,
DONNE ACTE à Monsieur le Directeur des Services Fiscaux de PARIS SUD pour que la valeur de l'appartement à la date de la donation soit fixée à 34000 F. (5183,27 euros) le m ,
DÉBOUTE les parties de toute autre demande,
FAIT MASSE des dépens de première instance et d'appel, y compris les honoraires de l'expert et dit qu'ils seront supportés par moitié par chacune des parties et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
- signé par Madame Francine BARDY, président et Madame Sylvie RENOULT, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute. Le GREFFIER,
Le PRESIDENT,