COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
RENVOI DE CASSATION COMMERCIAL
J.B./P.G.
ARRET No Code nac : 8B
contradictoire
DU 30 JANVIER 2007
R.G. No 05/00354
AFFAIRE :
S.A.R.L. G ET A DISTRIBUTION
C/
S.A.S. PRODIM
Décision déférée à la cour : sentence arbitrale prononcée le 10 juillet 2000 à CAEN
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
SCP DEBRAY-CHEMIN
SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE TRENTE JANVIER DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
DEMANDERESSE devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (2ème chambre civile) du 08 juillet 2004 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de CAEN, 1ère chambre, section civile, le 23 avril 2002
S.A.R.L. G ET A DISTRIBUTION ayant son siège 10 Place de la Mairie 78790 SEPTEUIL, agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège.
représentée par la SCP DEBRAY-CHEMIN, avoués - N du dossier 05057
Rep/assistant : la SCP BROUARD CHESNELONG GOMBERT et PERRIN, avocats au barreau de PARIS.
****************
DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI
S.A.S. PRODIM ayant son siège Zone Industrielle, Route de Paris, 14120 MONDEVILLE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, avoués - N du dossier 0440283
Rep/assistant : la SCP LEBLOND CONSTANTIN ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS.
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Décembre 2006, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Mme Joëlle BOURQUARD, Président,
Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller,
Monsieur Denis COUPIN, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Thérèse GENISSEL
Vu la communication de l'affaire au ministère public en date du 13 octobre 2005 ; FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES
Selon un contrat de franchise en date du 02 février 1994, la société PRODIM a concédé à la société G ET A DISTRIBUTION l'utilisation de l'enseigne SHOPI pour l'exploitation de son fonds de commerce de vente au détail situé à Septeuil (Yvelines) pour une durée de sept ans.
Par lettre du 25 octobre 1996, la société G ET A DISTRIBUTION a résilié le contrat, reprochant à la société PRODIM un manquement à ses obligations contractuelles.
Le litige a été soumis, conformément à l'article 12 du contrat, à un tribunal arbitral qui, le 28 juin 1999 a rendu une première sentence qui a déclaré la société G ET A DISTRIBUTION responsable de la rupture des liens contractuels, a dit que celle-ci devait payer à la société PRODIM 236.350,57 francs (36.031,41 euros) au titre du solde des marchandises impayées, des produits accessoires et de la clause pénale, celle de 200.000 francs (30.489,80 euros) de perte de marge et pareille somme pour le dépôt de garantie et les dommages et intérêts, a rejeté la demande de la société PRODIM tendant à la dépose de l'enseigne COCCINELLE en observant qu'aucune demande de dommages et intérêts n'avait été formée pour non-respect de la disposition contractuelle contenue dans l'article 6 du contrat.
La société PRODIM a alors décidé d'engager, le 09 août 1999, une deuxième procédure d'arbitrage pour réclamer ces dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice résultant de la violation par la société G ET A DISTRIBUTION de la clause contractuelle de non-affiliation à une enseigne de renommée nationale ou régionale.
Conformément à la clause d'arbitrage, la société PRODIM a désigné un arbitre monsieur X.... La société G ET A DISTRIBUTION n'ayant pas procédé à désignation dans le délai de quinze jours, le président du tribunal de commerce de Caen, saisi par requête, a désigné, par ordonnance du 06 octobre 1999, monsieur Francis Y.... Les deux premiers arbitres en ont désigné un troisième, monsieur Z..., nommé président du tribunal arbitral.
La société G ET A DISTRIBUTION a discuté les conditions de désignation de monsieur Y..., auprès du président du tribunal arbitral. Ce dernier, constatant que celle-ci n'avait pas contestée par la voie judiciaire, a décidé la poursuite des travaux et, après dépôt d'un mémoire en demande de la société PRODIM réclamant la somme de 3.000.000 francs (457.347,05 euros) à titre de dommages et intérêts, a fixé au 17 avril 2000 l'audience de plaidoirie.
Le 14 avril 2000, la société G ET A DISTRIBUTION assignait la société PRODIM, messieurs Y... et Z... devant le président du tribunal de grande instance de Caen, statuant en référé, demandant à titre principal, de déclarer nulle la désignation de monsieur Y.... Le tribunal arbitral suspendait en conséquence ses travaux.
Par ordonnance rendue le 02 juin 2000, le juge des référés s'est déclaré incompétent. Le tribunal arbitral a fixé au 04 juillet 2000 l'audience des plaidoiries et au 24 juin la date limite de dépôt des mémoires.
La société G ET A DISTRIBUTION assignait alors, le 28 juin 2000, monsieur Y... devant le président du tribunal de grande instance de Caen, statuant en référé le 05 juillet suivant, pour voir prononcer la rétractation de l'ordonnance rendue sur requête le 06 octobre 1999.
Par lettre recommandée reçue le 04 juillet 2000, le conseil de la société G ET A DISTRIBUTION demandait à monsieur Z... de se récuser. Le 03 juillet en fin d'après-midi, il adressait le mémoire en défense de la société G ET A DISTRIBUTION. L'audience de plaidoirie se déroulait en présence des parties le 04 juillet 2000.
Par une sentence rendue le 10 juillet 2000, le tribunal arbitral a écarté des débats le mémoire et les pièces tardivement produites par la société G ET A DISTRIBUTION, a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, a dit que la société G ET A DISTRIBUTION avait manqué à son obligation contractuelle de non-réaffiliation, l'a condamnée à payer à la société PRODIM 200.000 francs (30.489,80 euros) en réparation du préjudice, a partagé les frais et dépens de l'instance arbitrale à raison de deux tiers à la charge de la société G ET A DISTRIBUTION et d'un tiers à celle de la société PRODIM a ordonné l'exécution provisoire.
La société G ET A DISTRIBUTION a formé devant la cour d'appel de Caen, un recours en annulation de la sentence arbitrale en faisant valoir que, par arrêt du 11 octobre 2001, cette même cour d'appel avait rétracté l'ordonnance, rendue sur requête le 06 octobre 1999 par le président du tribunal de grande instance de Caen, désignant monsieur Y... en qualité d'arbitre.
Par un arrêt du 23 avril 2002, la cour a dit que la sentence se trouvait nécessairement anéantie en conséquence de cette décision de rétractation, a constaté que la société PRODIM avait renoncé expressément au bénéfice de la sentence, a constaté que les demandes de la société G ET A DISTRIBUTION étaient devenues sans objet, a rejeté la demande d'évocation qui aurait eu pour effet de faire échapper les parties à leur juge naturel au fond, et a condamné la société G ET A DISTRIBUTION à payer à la société PRODIM 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.
Sur pourvoi formé par la société G ET A DISTRIBUTION, la deuxième chambre civile de la cour de cassation, par un arrêt rendu le 08 juillet 2004, a dit qu'en statuant ainsi, alors que, constatant la nullité de la sentence arbitrale par une décision d'annulation, elle était tenue de statuer sur le fond en l'absence de volonté contraire de toutes les parties, la cour d'appel avait violé les dispositions de l'article 1485 du nouveau code de procédure civile.
Elle a en conséquence cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 23 avril 2002 et renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles.
La société G ET A DISTRIBUTION, qui a saisi la cour de renvoi, explique que la sentence arbitrale rendue le 10 juillet 2000 encourt la nullité parce qu'elle a été rendue hors délai, que les arbitres n'ont pas respecté les dispositions de l'article 346 du nouveau code de procédure civile, en raison d'un manquement au principe du contradictoire et parce que la composition du tribunal est irrégulière.
Elle soutient qu'elle justifie d'un intérêt à agir puisque la société PRODIM a renoncé à l'exécution de la sentence viciée sans renoncer à son action. Elle expose à cet égard que la société PRODIM a mis en œuvre une troisième procédure d'arbitrage dès l'arrêt de la cour d'appel de Caen. Elle ajoute qu'elle demande à la cour non seulement d'annuler la sentence mais aussi de statuer sur le fond.
Elle rappelle que la première sentence arbitrale a rejeté une demande indemnitaire de la société PRODIM de 2.000.000 francs (304.898,03 euros) au titre du préjudice commercial subi, lié à l'atteinte à l'image de son enseigne et a alloué à la société PRODIM 236.350,57 francs (36.031,41 euros) au titre de la rupture du contrat de franchise. Elle précise que le tribunal a indiqué que la clause pénale couvrait tous les chefs de préjudices pouvant résulter de la rupture du contrat.
Elle en déduit que la demande de la société PRODIM tendant à obtenir une indemnité au titre de la violation de la clause de non-concurrence visée à l'article 6 du contrat se heurte à l'autorité de la chose déjà jugée.
Elle rappelle que, pour être valide, une clause de non-concurrence doit être limitée dans l'espace et dans le temps, doit correspondre à un intérêt légitime, être indispensable à la protection du savoir-faire du franchiseur et doit présenter un intérêt proportionné.
Elle soutient que le savoir-faire est inexistant en l'espèce en affirmant la carence du franchiseur et en soulignant que la nullité de telles clauses a été consacrée par différentes décisions judiciaires.
Elle ajoute que le détournement de l'objet de la clause aboutit à une pratique restrictive de concurrence en raison de l'entrave imposée au franchisé sur sa liberté d'exploiter et à l'égard d'éventuels concurrents de la société PRODIM.
Elle affirme aussi la nullité de la clause au regard des règles du droit communautaire dont l'application n'est pas, selon elle, exclue au motif que le réseau SHOPI ne serait que national. Elle rappelle l'état de la réglementation et notamment le règlement européen du 29 décembre 1999 applicable à l'accord de franchise dès lors que le but recherché par la clause n'est pas la protection d'un savoir-faire, mais celle d'un territoire.
Elle critique les moyens développés par la société PRODIM qui tendent à voir valider la clause de non-affiliation qui n'est pas distincte d'une clause de non-concurrence et qui rend impossible l'exercice de l'activité commerciale.
Elle expose qu'en tout état de cause, elle a exploité son point de vente sans enseigne pendant dix mois, jusqu'en juillet 1997 alors que la clause n'avait vocation à s'appliquer que jusqu'en septembre.
A titre subsidiaire, elle soutient que la clause doit être interprétée strictement et constate que la société PRODIM ne produit aucun élément de nature à démontrer la renommée nationale ou régionale de l'enseigne COCCINELLE.
Elle explique que la contrainte d'exploiter sans enseigne s'est traduite par une perte de chiffre d'affaires et, donc, de marge brute qu'elle estime à 50.000 euros. Elle invoque le harcèlement procédural de la société PRODIM à laquelle elle réclame 30.000 euros de dommages et intérêts et 10.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle demande en conséquence à la cour d'annuler la sentence rendue le 10 juillet 2000, de communiquer le dossier au Parquet Général, de déclarer la société PRODIM irrecevable en ses demandes au regard de l'autorité de la chose jugée, subsidiairement de déclarer la clause prévue par l'article 6 nulle et de nul effet, de débouter la société PRODIM de ses demandes, de la condamner à lui payer 50.000 et 30.000 euros de dommages et intérêts et 10.000 euros pour ses frais irrépétibles.
La société PRODIM réplique que la société G ET A DISTRIBUTION ne dispose pas d'un intérêt à agir en nullité contre la sentence critiquée à laquelle elle-même a renoncée.
Subsidiairement, elle discute la prétendue autorité de la chose jugée en expliquant que ce n'est qu'à compter de la sentence arbitrale la déboutant que pouvait naître une nouvelle prétention à réparation par équivalent.
Elle expose que la clause de non-réaffiliation est différente d'une clause de non-concurrence en relevant qu'elle n'a vocation à s'appliquer qu'en cas de rupture fautive du contrat avant son terme et ne tend qu'à restreindre partiellement et à court terme le champ d'activité de l'ex-franchisé. Elle se prévaut de la jurisprudence et de la doctrine pour en soutenir la validité.
Elle affirme son savoir-faire en tant que premier franchiseur français et rappelle qu'il a été validé par la première sentence arbitrale, devenue définitive.
Elle analyse la validité de cette clause au regard du droit communautaire en déniant toute application rétroactive du règlement d'exemption de 1999, comme celle du règlement d'exemption du 30 novembre 1988 puisque, selon elle, le réseau SHOPI étant strictement national, le contrat de franchise n'est pas de nature à affecter sensiblement la concurrence entre Etats membres.
Elle ajoute que la validité de la clause incriminée au regard du droit français a été reconnue par les cours d'appel de Caen et de Paris.
Elle estime que l'application de la clause prévue par l'article 6 du contrat est incontestable puisque le contrat a été rompu aux torts de la société G ET A DISTRIBUTION et qu'a été posée une enseigne COCCINELLE concurrente, de renommée nationale.
Qualifiant de pure circonstance et de dénuée d'intérêt la demande de communication au Ministère Public, elle s'estime fondée à solliciter des dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation de la clause.
Pour le quantifier, elle se réfère aux pratiques des enseignes concurrentes, évoque l'atteinte à la notoriété du réseau et de l'image de l'enseigne SHOPI ainsi que le risque d'imitation et de captation de certains points de vente par ses concurrents. Elle invoque un parallèle possible entre l'action et celle en concurrence déloyale qui induit un trouble commercial. Elle se prévaut de décisions rendues dans des affaires similaires.
Elle tient pour nouvelle en cause d'appel et donc irrecevable par application des dispositions de l'article 564 du nouveau code de procédure civile, la demande de la société G ET A DISTRIBUTION en paiement de dommages et intérêts pour perte d'exploitation. Elle la considère au surplus comme mal fondée et dépourvue de tout commencement de preuve.
Elle demande en conséquence à la cour de débouter la société G ET A DISTRIBUTION de sa demande d'annulation faute de démontrer un intérêt à agir, subsidiairement de constater la violation de la clause de non-réaffiliation, de condamner la société G ET A DISTRIBUTION à lui payer 450.000 euros à titre de dommages et intérêts ainsi que 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La procédure a été communiquée au Ministère Public le 19 octobre 2006.
Elle a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 28 novembre 2006 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 12 décembre 2006.
MOTIFS DE LA DECISION
Considérant que la société PRODIM a certes renoncé à l'exécution de la sentence arbitrale déférée à la cour, qu'il n'est pas démontré que la renonciation à exécution de la sentence arbitrale par PRODIM présente un caractère irrévocable et définitif et que la société PRODIM qui a introduit une troisième procédure d'arbitrage ait renoncé à son action, que dès lors, il ne saurait être déduit de cette renonciation que la société G ET A DISTRIBUTION n'a plus d'intérêt à agir en nullité de la sentence arbitrale du 10 juillet 2000 ;
Considérant qu'il est constant que par arrêt du 11 octobre 2001, devenu définitif, la cour d'appel de Caen a rétracté l'ordonnance rendue sur requête le 06 octobre 1999 par le président du tribunal de commerce de Caen désignant M. Y... en qualité d'arbitre ; que cette décision consacre l'irrégularité de la composition du tribunal arbitral constituée de MM. Z..., X... et Y..., qu'il s'ensuit que cette instance, irrégulièrement composée n'a pas pu valablement statuer et que la sentence arbitrale rendue le 10 juillet 2000 doit en conséquence être annulée ;
Considérant qu'il appartient à la présente cour de renvoi, ensuite de l'annulation de cette sentence arbitrale, de statuer, conformément à l'article 1485 du Nouveau Code de Procédure Civile, sur le fond du litige dans les limites de la mission confiée aux arbitres ;
Considérant qu'il est établi que les arbitres ont été saisis le 09 août 1999, à l'initiative de la société PRODIM d'une deuxième procédure d'arbitrage tendant à solliciter des dommages intérêts destinés à réparer « par équivalent », le préjudice subi du fait de la violation de la clause de non-affiliation par la société G ET A DISTRIBUTION ;
Considérant que la première sentence arbitrale rendue le 28 juin 1999 a certes rejeté la demande de la société PRODIM tendant à la dépose de l'enseigne COCCINELLE, qu'elle n'a toutefois pas tranché sur une demande de dommages intérêts formée sur la violation de l'article 6 du contrat de franchise ; qu'il convient de relever que cette décision souligne dans ses motifs qu'il convient d'observer que la société PRODIM n'a formé aucune demande de dommages et intérêts pour non-respect de cette disposition contractuelle contenue dans l'article 6 du contrat ; qu'il en résulte que la instance sentence arbitrale, qui n'avait pas été saisie par la société PRODIM d'une demande de dommages intérêts pour violation de la clause de non-réaffiliation, n'a pas statué, ainsi qu'il résulte du dispositif de la sentence, sur une telle demande ; qu'en conséquence, il y a lieu d'écarter la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée dont la société G ET A DISTRIBUTION se prévaut pour déclarer irrecevable la demande formée par la société PRODIM ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6 du contrat de franchise conclu le 02 février 1994, les parties ont convenu qu' «en cas de rupture de la présente convention avant son terme et sans préjudice de la clause pénale ci-dessus et de toute demande de dommages intérêts complémentaires, le franchisé s'oblige à ne pas utiliser directement ou indirectement, personnellement ou par personne interposée, en société ou autrement, durant une période de un an à compter de la date de résiliation du présent contrat, une enseigne de renommée national ou régionale, déposée ou non, et à ne pas offrir en vente des marchandises dont la marques sont liées à ces enseignes (marques propres) ceci dans un rayon de cinq kilomètres du magasin SHOPI faisant l'objet du présent accord » ;
Considérant qu'il est établi que la société G ET A DISTRIBUTION n'a pas respecté la clause à laquelle elle s'était ainsi contractuellement engagée ; qu'en effet, alors que le contrat de franchise avait été résilié le 25 octobre 1996, il résulte de deux constats d'huissier, dressés respectivement les 22 novembre 1996 et 07 juillet 1997, qu'à la date du 07 juillet 1997, la surface de vente exploitée par cette société arborait l'enseigne « Coccinelle Marché » et qu'à la date du premier un constat, elle n'affichait pas l'enseigne « Coccinelle » mais commercialisait des produits de la marque «Belle France » commercialisés par les magasins portant l'enseigne Coccinelle ; que l'enseigne Coccinelle est suffisamment répandue sur le territoire pour être aisément identifiable par la clientèle et être qualifiée d'enseigne de renommée régionale sinon nationale ;
Considérant que la société G ET A DISTRIBUTION conteste la validité de cette clause de non-réaffiliation qu'elle assimile par ailleurs à une clause de non concurrence ;
Considérant que la présente clause de non réaffiliation présente un caractère spécifique qui la différence de la clause de non concurrence en ce qu'elle ne vise pas à interdire au franchisé d'exercer toute activité pendant une durée déterminée et dans un espace donné mais préserve au contraire la possibilité pour celui-ci de maintenir son activité sans le recours à une enseigne renommée concurrente dans une limite de temps et d'espace ;
Que cette clause vise à protéger le savoir faire du franchisseur, savoir faire qui constitue l'intérêt légitime de la société PRODIM et qui ne saurait être valablement contesté dès lors qu'il a été consacré par la première sentence arbitrale du 28 juin 1999, devenue définitive ;
Considérant que la circonstance selon laquelle le réseau SHOPI ne comporterait aucun point de vente établi sur le territoire d'un autre Etat ne permet pas d'en déduire qu'il échappe à tout contrainte législative communautaire dès lors que ce réseau s'inscrit dans la stratégie de maillage économique de l'ensemble des réseaux de grande distribution de PRODIM laquelle s'étend nécessairement au-delà des limites d'un seul Etat membre ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner la validité de la clause incriminée au regard du règlement d'exemption no 2790 première dont du 29 décembre 1999 qui en raison de la date de signature du contrat de franchise, 02 février 1994, n'a pas, du fait de son caractère non rétroactif, vocation à recevoir application ; qu'au vu de l'article 3 § 1c du règlement CCE 4087/88 du 30 novembre 1988, relatif à l'application de l'article 85 § 3 du traité, le franchisseur peut imposer au franchisé l'obligation de ne pas exercer, directement ou indirectement, une activité commerciale sur le territoire où il concurrencerait un membre du réseau franchisé, y compris le franchisseur, dans la mesure où cette obligation est nécessaire pour protéger les droits de propriété industrielle ou intellectuelle du franchisseur ou maintenir l'identité commune ou la réputation du réseau franchisé ;
Considérant que la clause litigieuse est strictement limitée à un an, qu'elle vise un espace restreint à un rayon de cinq kilomètres, qu'elle se justifie par la protection du savoir faire reconnu à la société PRODIM et par celle du risque concurrentiel, qu'elle n'interdit pas à la société G ET A DISTRIBUTION de poursuivre son activité ; qu'en conséquence, elle doit être déclarée valable et recevoir application ;
Considérant que la violation de la clause de non réaffiliation par la société G ET A DISTRIBUTION a causé un préjudice à la société PRODIM en ce qu'elle a porté atteinte à la densité de son réseau de distribution et l'a affaibli, qu'il convient, en tenant compte de la durée pendant laquelle l'infraction s'est poursuivie et de la taille de la surface de vente exploitée par la société G ET A DISTRIBUTION, d'évaluer à la somme de 100.000 euros le montant des dommages intérêts qui doivent être alloués à la PRODIM en réparation de son préjudice ;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la société PRODIM la charge des frais qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel; que la société G ET A DISTRIBUTION sera condamnée à lui payer une indemnité de 30 000€ en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Considérant que la société G ET A DISTRIBUTION l'appelante qui succombe dans ses prétentions doit supporter les entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare recevable le recours formé par la société G ET A DISTRIBUTION,
Prononce l'annulation de la sentence arbitrale rendue le 10 juillet 2000,
Statuant sur le fond du litige et dans les limites de la mission soumis aux arbitres,
Rejette la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée et déclare recevable la demande de la société PRODIM,
Déclare valable la clause de non réaffiliation insérée à l'article 6 du contrat de franchise conclu le 02 février 1994 entre la société PRODIM et société G ET A DISTRIBUTION,
Dit que la société G ET A DISTRIBUTION a failli à son obligation contractuelle de non réaffiliation,
Condamne la société G ET A DISTRIBUTION à payer à la société PRODIM la somme de 100.000€ en réparation de son préjudice,
Condamne la société G ET A DISTRIBUTION à payer à la société PRODIM une indemnité de 30.000€ sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne la société G ET A DISTRIBUTION aux entiers dépens et autorise la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS-BOCCON-GIBOD, avoués associés à les recouvrer directement comme il est prescrit à l'article 699 du nouveau code de procédure civile,
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
- signé par Madame Joëlle BOURQUARD, Président et par Madame GENISSEL, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,