COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
DR
Code nac : 39D
12ème chambre section 1
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 14 JANVIER 2010
R.G. No 08/09808
AFFAIRE :
S.A. MAISON LE MARQUIER
C/
S.A.R.L. DIFFUSION ET LIVRAISON DE TRAVAUX D'ARTISANAT - DELTA
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Décembre 2008 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre : 1
No RG : 08/1523
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
- Me Jean-Pierre BINOCHE
- SCP DEBRAY-CHEMIN
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE QUATORZE JANVIER DEUX MILLE DIX,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A. MAISON LE MARQUIER
ayant son siège RN 117 Lotissement AMBROISE 40390 SAINT MARTIN DE SEIGNANX, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par Me Jean-Pierre BINOCHE, avoué - No du dossier 683/08
Plaidant par Me Antoine TUGAS, membre de la SCP MALHERBE TUGAS, société d'avocats au barreau de BAYONNE
APPELANTE
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S.A.R.L. DIFFUSION ET LIVRAISON DE TRAVAUX D'ARTISANAT - DELTA
ayant son siège ZI de Rabion 16000 ANGOULEME, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par la SCP DEBRAY-CHEMIN, avoués - No du dossier 09000545
Plaidant par Me Olivier GEOFFROY, avocat au barreau de SAINTES
INTIMEE
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Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 Décembre 2009 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Dominique ROSENTHAL, président, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Dominique ROSENTHAL, président,
Monsieur Claude TESTUT, conseiller,
Madame Marie-Hélène POINSEAUX, conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine MAREVILLE,
Vu l'appel interjeté le 23 décembre 2008, par la société MAISON LE MARQUIER d'un jugement rendu le 11 décembre 2008 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :
* dit la société DIFFUSION ET LIVRAISON DE TRAVAUX D'ARTISANAT, exerçant sous la dénomination DELTA, recevable et fondée en son action,
* condamné la société MAISON LE MARQUIER à payer à la société DELTA la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts,
* débouté les parties de toutes autres demandes,
* condamné la société MAISON LE MARQUIER à verser à la société DELTA la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens comprenant les frais de la saisie contrefaçon.
Vu les dernières écritures en date du 23 avril 2009, par lesquelles la société MAISON LE MARQUIER, poursuivant l'infirmation de la décision entreprise, demande à la Cour de :
* débouter la société DELTA de toutes ses demandes,
* constater que la société DELTA est auteur d'une procédure abusive et la condamner au paiement de la somme de 10.000 euros,
* à titre subsidiaire, ramener le montant des condamnations à de plus justes proportions,
* condamner la société DELTA aux dépens.
Vu les dernières écritures en date du 8 septembre 2009, aux termes desquelles la société DIFFUSION ET LIVRAISON DE TRAVAUX D'ARTISANAT prie la Cour de :
* confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société MAISON LE MARQUIER responsable du délit de contrefaçon à son préjudice,
* le réformer sur les préjudices subis,
* avant dire droit, ordonner à la société MAISON LE MARQUIER de communiquer aux débats les coordonnées de tous les fabricants, distributeurs et fournisseurs lui ayant permis de commercialiser les produits argués de contrefaçon, tous documents comptables et financiers permettant de déterminer les quantités de produits contrefaits qu'elle a commercialisés, livrés, reçus et commandés ainsi que son prix de revient et son prix de vente pour chacun des trois produits contrefaits,
* si la cour n'entendait pas donner suite à cette demande, condamner la société MAISON LE MARQUIER au versement de la somme de 2.000.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier, de son préjudice commercial et de son préjudice de renommée au titre de la vente de plaques de cheminée des modèles "maréchal ferrant", "chien à l'arrêt", "scène de vendange",
* débouter la société MAISON LE MARQUIER de l'ensemble de ses demandes,
* la condamner au versement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens comprenant les frais de la saisie contrefaçon et des constats d'huissier.
SUR CE, LA COUR
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il convient de rappeler que :
* la société DIFFUSION ET LIVRAISON DE TRAVAUX D'ARTISANAT, ci-après dénommée DELTA, a pour activité le négoce d'objets, fournitures et accessoires pour cheminées,
* elle a procédé le 26 septembre 1989, au dépôt auprès de l'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE de quatorze modèles de plaques de cheminées, enregistré le 26 septembre 1989, sous le no892929,
* elle a découvert au mois de décembre 2007, que la société MAISON LE MARQUIER commercialisait trois plaques de cheminées reproduisant ses modèles no274123, 274126, 274120,
* après avoir fait procéder le 17 décembre 2007, par huissier de justice à un constat d'achat dans le magasin de la société LEROY MERLIN, dûment autorisée par ordonnance présidentielle, la société DELTA a pratiqué le 18 janvier 2008, une saisie contrefaçon au siège social de la société MAISON LE MARQUIER,
* à la demande de la société DELTA, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre, par ordonnance du 10 avril 2008, a enjoint à la société MAISON LE MARQUIER de faire retirer des points de vente sur l'ensemble du territoire national les plaques de cheminées litigieuses et de remettre sous astreinte les documents bancaires ou comptables établissant son chiffre d'affaires pour la période du 1er janvier 2007 au 29 février 2009, pour les trois modèles argués de contrefaçon,
* c'est dans ces circonstances, qu'après avoir fait constater par huissier que la société MAISON LE MARQUIER n'avait pas pris les mesures nécessaires pour retirer de la vente les plaques litigieuses, la société DELTA l'a assignée en contrefaçon ;
Sur la contrefaçon :
Considérant que si la société MAISON LE MARQUIER soutient que les éléments représentés sur les plaques de cheminée appartiennent à un fonds commun, il convient néanmoins de constater qu'elle ne verse aux débats aucun document de nature à détruire la nouveauté des modèles déposés ;
Considérant que pour s'opposer au grief de contrefaçon, la société MAISON LE MARQUIER, fait valoir que les plaques de cheminée litigieuse ont été importées de Chine par son fournisseur et que simple distributeur, elle a seulement proposé les produits litigieux à la société LEROY MERLIN, de sorte qu'elle argue de sa bonne foi ;
Mais considérant qu'il n'est pas démenti que la société MAISON LE MARQUIER a vendu à la société LEROY MERLIN les trois modèles de plaques de cheminée litigieuses : "Scène de vendange", "Maréchal Ferrant" et "Chien à l'arrêt" ;
Qu'en exploitant ces modèles sur le territoire français, la société MAISON LE MARQUIER a porté atteinte aux droits que détient la société DELTA sur les modèles déposés ;
Qu'elle ne saurait arguer de sa bonne foi inopérante en matière civile de contrefaçon ;
Qu'au surplus, la société DELTA relève justement que nonobstant l'ordonnance de référé du 10 avril 2008, signifiée le 7 mai suivant, la société MAISON LE MARQUIER n'a pas pris toute mesure afin de retirer l'ensemble des plaques des points de vente (procès-verbaux de constat d'huissier du 3 juillet 2008) ;
Considérant par voie de conséquence, que la décision déférée, qui par des motifs pertinents a retenu des actes de contrefaçon imputables à la société MAISON LE MARQUIER sera confirmée ;
Sur les mesures réparatrices :
Considérant que la demande de communication de pièces comptables afin de déterminer l'ampleur de la masse contrefaisante n'est pas justifiée ;
Considérant qu'il ressort des opérations de saisie contrefaçon que la société MAISON LE MARQUIER a vendu 82 plaques "maréchal ferrant", 71 plaques "chien à l'arrêt", 55 plaques "scène de vendange" ;
Que la société MAISON LE MARQUIER prétend avoir procédé à un achat de plaques portant sur la somme de 8.542 euros ;
Considérant que la mise sur le marché des produits contrefaisants a nécessairement porté atteinte à la valeur patrimoniale des modèles en les banalisant et causé un préjudice commercial à la société DELTA ;
Que le tribunal, en retenant le nombre de plaques contrefaisantes, la qualité médiocre de celles-ci, le maintien à la vente des produits après la signification de l'ordonnance de référé, la position de chacune des sociétés sur le marché concerné, l'importance de la clientèle que représentent les enseignes LEROY MERLIN et BRICORAMA, la présentation dans un catalogue de vente d'une plaque de cheminée portant la mention "DELTA", a exactement fixé l'indemnité réparatrice à la somme de 40.000 euros ;
Qu'il s'ensuit que le jugement entrepris mérite confirmation ;
Sur les autres demandes :
Considérant que la solution du litige commande de rejeter la demande reconventionnelle en dommages et intérêts formée par la société MAISON LE MARQUIER pour procédure abusive ;
Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que cette dernière ne saurait bénéficier des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'en revanche, l'équité commande de la condamner, sur ce même fondement, à verser à la société DELTA une indemnité complémentaire de 5.000 euros ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire,
- CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré,
- Y AJOUTANT,
- CONDAMNE la société MAISON LE MARQUIER à payer à la société DIFFUSION ET LIVRAISON DE TRAVAUX D'ARTISANAT, DELTA, la somme complémentaire de 5.000 euros (cinq mille euros) au titre des frais irrépétibles d'appel,
- REJETTE toutes autres demandes contraires à la motivation,
- CONDAMNE la société MAISON LE MARQUIER aux dépens, comprenant les frais de constat et de saisie contrefaçon et DIT que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- signé par Dominique ROSENTHAL, président, et par Sabine MAREVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,