COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES 2ème chambre 1ère section ARRÊT No
CONTRADICTOIRE
CODE NAC : 20G
DU 25 FÉVRIER 2010 R. G. No 08/ 09998
AFFAIRE : Hakim, Azziz X...
C/
Hassina Y... épouse X...
Décision déférée à la cour : ordonnances rendues les 10 décembre 2008 et 28 mai 2009 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre : 3ème
No cabinet : 4 JAF.
No RG : 08/ 11928 Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le : à :
SCP KEIME
SCP BOMMART
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE VINGT CINQ FÉVRIER DEUX MILLE DIX,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur Hakim, Azziz X...
né le 31 mars 1973 à BOULOGNE BILLANCOURT (92100)
de nationalité française ...
92360 MEUDON LA FORET représenté par la SCP KEIME GUTTIN JARRY, avoué-No du dossier 08000980
assisté de Me Pascaline SAINT ARROMAN PETROFF (avocat au barreau de PARIS)
APPELANT
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Madame Hassina Y... épouse X...
née le 10 janvier 1984 à CHELLALAT EL ADHAOURA (ALGÉRIE) ...
...
92230 GENNEVILLIERS représentée par la SCP BOMMART MINAULT, avoué-No du dossier 00036772
assistée de Me Fatiha BELKACEM (avocat au barreau de NANTERRE)
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2009/ 010447 du 29/ 07/ 2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
INTIMÉE ****************
Composition de la cour : L'affaire a été débattue le 12 Janvier 2010, en chambre du conseil, Xavier RAGUIN, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de : Monsieur Xavier RAGUIN, Président,
Madame Nelly DELFOSSE, Conseiller
Madame Christine FAVEREAU, Conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Denise VAILLANTFAITS ET PROCÉDURE
Hakim X... et Hassina Y... ont contracté mariage le 20 février 2006 à AIN OUSKIR (Algérie). Une enfant est issue de cette union :- Lila, née le 8 avril 2007
Par ordonnance de non conciliation du 10 décembre 2008, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NANTERRE, a :- rejeté l'exception de litispendance soulevée par Hakim X... ;- avant dire droit, ordonné une enquête sociale ; En l'attente du dépôt du rapport-dit que l'autorité parentale serait exercée conjointement par les parents ;- fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile de sa mère ;- dit que le père exercerait un simple droit de visite un samedi sur deux dans un lieu médiatisé ;- fixé la contribution paternelle à l'entretien et à l'éducation de Lila à la somme mensuelle et indexée de 250 euros ;- dit que Hakim X... devrait verser à son épouse une pension alimentaire d'un montant mensuel et indexé de 400 euros en exécution de son devoir de secours ;- prononcé l'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents et ordonné l'inscription de l'interdiction sur les passeports ; Le rapport d'enquête sociale ayant été déposé le 24 avril 2009,
Le juge aux affaires familiales, selon ordonnance du 28 mai 2009 a :- dit que l'autorité parentale était exercée conjointement ;- maintenu la résidence de Lila chez sa mère ;- dit que le père exercerait un droit de visite et d'hébergement selon les modalités suivantes :- jusqu'en septembre 2009 : un simple droit de visite en lieu médiatisé un samedi sur deux, avec autorisation de sortie ;- à compter de septembre 2009 : les 2ème et 4ème samedis de chaque mois, de 10 heures à 17 heures, à charge pour les parents de s'organiser pour que la remise de l'enfant s'effectue devant un commissariat ;- à compter de la fin des vacances de Noël 2009 : du samedi 10 heures au dimanche 18 heures les semaines paires, la remise de l'enfant se faisant dans les mêmes conditions ;- à compter de septembre 2009 : la 1ère moitié des vacances scolaires les années paires et la 2ème moitié les années impaires ;- donné acte à Hassina Y... de ce qu'elle s'engageait à remettre au père les copies du carnet de santé de l'enfant ;- maintenu l'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'accord des parents. *
Hakim X... a interjeté appel de ces deux ordonnances par déclarations des 31 décembre 2009 et 1er juillet 2009. Les procédures ont été jointes par ordonnance en date du 10 juillet 2009.
Dans ses dernières écritures au fond signifiées le 25 novembre 2009, Hakim X... demande à la cour de :- déclarer Hassina Y... irrecevable en ses prétentions ;- fixer son droit de visite et d'hébergement tel que prévu dans l'ordonnance du 28 mai 2009 ;- autoriser les parents à sortir l'enfant du territoire français pendant un mois, sous réserve pour chaque parent d'informer l'autre au moins un mois à l'avance et d'adresser une copie du billet de retour de l'enfant ; Subsidiairement-fixer sa contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant à la somme mensuelle de 100 euros ;- supprimer la pension alimentaire mise à sa charge au titre du devoir de secours ; En tout état de cause-condamner Hassina Y... à lui régler la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;- la condamner aux entiers dépens. *
Dans ses dernières écritures du 15 octobre 2009, Hassina Y... demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions la décision entreprise et de condamner Hakim X... aux dépens d'appel.
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L'ordonnance de clôture a été prononcée le 5 janvier 2010.
Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la Cour renvoie aux écritures déposées et développées à l'audience, conformément à l'article 455 du code de procédure civile. SUR CE, LA COUR
Sur la fin de non recevoir Considérant que Hakim X... oppose à l'action engagée par Hassina Y... la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ; qu'il fait valoir que le divorce des époux a été prononcé à sa demande par le tribunal de KOLÉA (Algérie) le 10 décembre 2008 et que ce tribunal était compétent pour en connaître en raison de la nationalité algérienne des deux époux, dont la mariage a été célébré le 20 février 2006 à AIN OUSKIR (Algérie) et dont le premier domicile commun a été fixé en Algérie ; Que Hakim X... ajoute d'une part que l'absence de recours à l'encontre du jugement rendu contradictoirement et la transcription du divorce sur les registres d'état civil des parties emporte acquiescement de Hassina Y... au divorce et que des condamnations pécuniaires ont été prononcées au profit de son épouse à concurrence de 186 000 dinars et de sa fille (pension alimentaire mensuelle de 5 000 dinars) ; Considérant qu'il résulte de l'article 1er de la Convention franco-algérienne du 27 août 1964 que les décisions rendues par les juridictions algériennes ont en France, de plein droit, l'autorité de la chose jugée à condition que la décision émane d'une juridiction compétente selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l'Etat où la décision doit être exécutée ;
Considérant que dès lors qu'une fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée par une juridiction étrangère lui est présentée, il appartient au juge français de contrôler la régularité internationale de la décision étrangère en recherchant notamment si le choix de la juridiction n'a pas été faite de manière frauduleuse pour échapper aux conséquences d'un jugement français dès lors que les époux résident en France ; Qu'en l'espèce, il est constant que les deux époux se sont installés en France quelques mois après leur union en Algérie ; Qu'ils étaient domiciliés à MEUDON (Haut-de-Seine) dans un appartement dont le père de Hakim X... est propriétaire ; que l'enfant commun Lila est née à Sèvres (Hauts-de-Seine) et est présente sur le territoire français ; que Hakim X... a une licence de taxi et exerce son activité pour la compagnie G 7 ; qu'il perçoit ses revenus en France et y paye ses impôts ; Que le centre des intérêts familiaux se trouve donc bien situé en France et que leur nationalité commune algérienne ne suffit pas à rattacher le litige de façon caractérisée à l'Algérie ;
Considérant que la saisine par Hakim X... d'une juridiction algérienne apparaît dès lors purement artificielle et dictée par le souci d'échapper aux conséquences financières d'une décision française, les condamnations mises à sa charge par la décision algérienne étant minimes (1. 818 euros au profit de son épouse et 48 euros de pension alimentaire au profit de sa fille) et sans rapport avec les ressources et les charges de chacun des parents ; Qu'en outre, il doit être observé que le divorce obtenu en Algérie l'a été " par volonté unilatérale de l'époux " ; qu'il s'agit d'un droit exclusif reconnu à l'époux par le droit algérien qui se trouve, sur ce point, en contrariété avec les engagements internationaux de la France (art. 5 du protocole additionnel du 22 novembre 2004 à la Convention européenne des droits de l'Homme) et contraire à l'ordre public ;
Qu'ainsi, l'efficacité internationale de la décision du tribunal de KOLEA invoquée ne peut être reconnue en France et que la fin de non recevoir soulevée doit être rejetée ;
Sur les mesures provisoires Considérant que les points en litige devant la cour concernent :- les modalités de sortie du territoire de l'enfant commun Lila ;
- le montant de la pension alimentaire à la charge du père ;
- l'exécution du devoir de secours ; Que les autres dispositions, non contestées, des ordonnances déférées seront confirmées ;
Les modalités de sortie du territoire de l'enfant commun Lila Considérant que Hakim X... fait grief au premier juge d'avoir prononcé une interdiction de sortie du territoire sans l'autorisation des deux parents au motif qu'en raison du conflit existant entre eux, les modalités de cette interdiction entraînent une rupture des liens avec les grands-parents demeurés en Algérie ; Considérant cependant que les tensions existantes entre les époux justifient les mesures édictées par le premier juge d'autant plus qu'elles ne mettent pas obstacle à ce que les grands-parents viennent visiter leur petite-fille en France ; Qu'il n'y a pas lieu de modifier la décision critiquée sur ce point ; Le montant de la pension alimentaire à la charge du père et l'exécution du devoir de secours
Considérant que Hakim X... n'a pas actualisé sa situation financière depuis l'ordonnance critiquée et ne produit pas son avis d'imposition sur les revenus de 2008 ; qu'il fait état de charges personnelles alors qu'elles sont établies au nom de son père qui assure son logement (taxe d'habitation, redevance audiovisuelle, charges de copropriété, EDF, téléphone, GDF) et qu'il ne justifie pas qu'il se substitue à ce dernier pour effectuer les règlements ; Qu'il fait état du remboursement d'un emprunt professionnel dont l'annuité de 2007 s'élèverait à 11 364, 44 euros mais que les pièces qu'il verse à l'appui de cette affirmation sont insuffisantes pour en faire la preuve ;
Considérant que Hassina Y... est sans ressources et est hébergée par des tiers ; Que c'est donc au terme d'une analyse pertinente des ressources et des besoins des parties, adoptée par la cour, que le premier juge a fixé les obligations de Hakim X... envers sa fille et envers Hassina Y... ; Qu'il n'y a pas lieu de réformer sa décision de ces chefs ; Sur l'article 700 du code de procédure civile
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; Que Hakim X... sera débouté de sa demande de ce chef ; Sur les dépens Considérant que Hakim X... qui succombe en son appel sera condamné aux dépens engagés dans la procédure d'appel ; PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE, en dernier ressort et après débats en chambre du conseil,
REJETTE la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ;
CONFIRME en toutes leurs dispositions les ordonnance prononcées les 10 décembre 2008 et 28 mai 2009 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NANTERRE ; DÉBOUTE Hakim X... ses demandes plus amples ou contraires et notamment de celle formée en application de l'article 700 du code de procédure civile. CONDAMNE Hakim X... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP BOMMART et MINAULT, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et de la loi sur l'aide juridictionnelle ; arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
signé par Xavier RAGUIN, président, et par Denise VAILLANT, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute. LE GREFFIERLE PRÉSIDENT