COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 28Z
1ère chambre
1ère section
ARRET N°
DEFAUT
DU 28 OCTOBRE 2010
R.G. N° 09/02424
AFFAIRE :
[R] [D]
C/
Consorts [T]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Janvier 2009 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE
N° chambre : 2
N° Section :
N° RG : 07/00149
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
- SCP GAS
- SCP KEIME GUTTIN JARRY
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT HUIT OCTOBRE DEUX MILLE DIX,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [R] [D]
née le [Date naissance 4] 1935 à [Localité 14] (29)
[Adresse 11]
représentée par la SCP GAS - N° du dossier 20090249
Rep/assistant : Me Marcel-Marc FELDMAN (avocat au barreau de PARIS)
APPELANTE
****************
Madame [J] [N] veuve [T]
née le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 15] (28)
Monsieur [O] [U] [T]
né le [Date naissance 3] 1977 à [Localité 13] (93)
Mademoiselle [A] [B] [T]
née le [Date naissance 8] 1981 à [Localité 13] (93)
tous demeurant [Adresse 2]
représentés par la SCP KEIME GUTTIN JARRY - N° du dossier 09000309
Rep/assistant : Me Joseph SOUDRI (avocat au barreau de VAL D'OISE)
Madame [K] [C] née [T]
[Adresse 12]
DEFAILLANTE assignée à sa personne
Madame [S] [T] épouse [Z]
[Adresse 9]
DEFAILLANTE assignée à étude d'huissier
Monsieur [Y] [T]
[Adresse 7]
DEFAILLANT assigné à étude d'huissier
INTIMES
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Septembre 2010, Madame Bernadette WALLON, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Bernadette WALLON, président,
Madame Evelyne LOUYS, conseiller,
Madame Dominique LONNE, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT
Par jugement du 13 décembre 1984, le tribunal de grande instance de Paris a prononcé le divorce sur demande conjointe de Mme [R] [D] et de M.[M] [T] et homologué la convention définitive portant règlement des effets du divorce aux termes de laquelle l'époux s'engageait à verser à son épouse une prestation compensatoire, sous forme de rente mensuelle de 6000 francs, toute sa vie durant. La rente était indexée mais non révisable.
[M] [T] est décédé le [Date décès 5] 1998 laissant pour lui succéder :
sa seconde épouse, Mme [J] [N],
ses enfants issus du premier lit, Mme [S] [T] épouse [Z], Mme [K] [T] épouse [C] et M. [Y] [T],
ses enfants issus de sa seconde union avec Mme [N], M. [O] [T] et Mme [A] [T].
Par acte des 8, 12 et 18 décembre 2006, Mme [R] [D] a fait assigner Mme [J] [N], Mme [S] [T] épouse [Z], Mme [K] [T] épouse [C], M. [Y] [T], M. [O] [T] et Mme [A] [T] aux fins de les voir condamner solidairement ou in solidum à lui payer la somme de 152 922,84€ au titre de la prestation compensatoire.
Par jugement du 26 janvier 2009, le tribunal de grande instance de Pontoise a :
- dit que la prestation compensatoire était due par [M] [T] de son vivant,
- dit que la rente prévue à la convention a pris fin avec son décès survenu le [Date décès 6] 1998,
- débouté Mme [R] [D] de ses demandes,
- dit que le notaire n'étant pas dans la cause, il ne peut être statué sur la demande le concernant,
- débouté les défendeurs de leur demande relative à l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [D] aux dépens.
Appelante, Mme [R] [D], aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 16 juillet 2010 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, demande à la cour de :
- condamner solidairement ou in solidum l'hoirie [T] à savoir Mme [J] [N] épouse [T], Mme [S] [T], Mme [K] [T] , M. [Y] [T], M. [O] [T] et Mme [A] [B] [T] à lui payer la somme de 221 129,80 euros sauf à parfaire au jour du paiement avec intérêts de droit à compter du 1er janvier 1998,
- dire que le notaire qui a rédigé l'acte de vente d'une maison appartenant à ladite succession devra se libérer de la somme séquestrée à due concurrence de la prestation compensatoire due entre les mains de Mme [R] [D],
- condamner l'ensemble des défendeurs solidairement à lui payer la somme de 5 000€ à titre de dommages et intérêts pour le préjudice financier subi par elle,
-déclarer irrecevable et en tout cas mal fondée la demande subsidiaire formée par les consorts [T],
-les débouter de leurs demandes,
- condamner l'hoirie [T] à lui payer la somme de 3 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les intimés en tous dépens et dire que ceux d'appel pourront être directement recouvrés par la SCP Gas, avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Mme [J] [N], M. [O] [T] et Mme [A] [T], par conclusions signifiées en dernier lieu le 28 juillet 2010 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, demandent à la cour de :
- confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,
- débouter Mme [R] [D] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- la condamner au paiement de la somme de 5 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire, et si par impossible la cour retenait l'interprétation donnée par Mme [R] [D] du jugement de divorce et ne la déboutait pas alors qu'elle aurait déjà un titre,
- rouvrir les débats afin de permettre à la cour de statuer sur les demandes de suppression de la prestation compensatoire,
- la condamner en tous les dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés directement par la SCP Keime Guttin Jarry, avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Mme [S] [T] épouse [Z], Mme [K] [T] épouse [C] et M.[Y] [T] régulièrement assignés n'ont pas constitué avoué.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 septembre 2010.
MOTIFS
Les époux [M] [T] et [R] [D] , respectivement nés en 1936 et 1935, ont contracté mariage le [Date mariage 10] 1957 devant l'officier d'état civil de la commune de [Localité 16] (Aisne) sous le régime légal de communauté de meubles et acquêts à défaut de contrat de mariage.
[M] [T] a quitté le domicile conjugal en août 1977 et a été condamné par jugement du 11 mai 1978 à payer une contribution aux charges du mariage de 13500 francs par mois .
En juin 1984, les époux ont décidé de divorcer par consentement mutuel et ont signé un protocole d'accord le 8 juin 1984 mentionnant les modalités patrimoniales et extra-patrimoniales de la procédure , lesquelles conditionnaient leur accord pour introduire la procédure de divorce. Ils ont ainsi convenu à l'article 2 que 'monsieur [T] s'engage à verser à madame [T] une prestation compensatoire sous forme de rente mensuelle de 6000 francs (six mille francs), toute sa vie durant, indexée suivant la formule actuelle du tribunal'.
Les époux ont saisi le juge aux affaires matrimoniales qui a homologué la convention temporaire signée le 15 juin 1984 stipulant que 'monsieur [T] s'engage à verser à madame [T] une prestation compensatoire, sous forme de rente mensuelle de SIX MILLE FRANCS (6000 francs), toute sa vie durant.' Il était également prévu une indexation selon le mode de calcul habituel.
Les époux ont réitéré leur demande en divorce et par jugement du 13 décembre 1984, le juge aux affaires matrimoniales a prononcé leur divorce et homologué la convention définitive stipulant à l'article III- PRESTATION COMPENSATOIRE: 'monsieur [T] s'engage à verser à madame [T] une prestation compensatoire, sous forme de rente mensuelle de SIX MILLE FRANCS (6.000 francs), toute sa vie durant'. Le dernier paragraphe de cet article prévoit que cette prestation compensatoire ne sera pas révisable, les époux [T] rejetant l'application des dispositions du troisième alinéa de l'article 279 du code civil.
Mme [D]-[T] soutient que l'expression 'toute sa vie durant', qui s'analyse comme un complément circonstanciel de temps, se rapporte au complément d'objet 'madame [T]' et non au sujet 'monsieur [T]'.
Selon les articles 1156 et suivants du code civil, le juge doit rechercher dans les conventions quelle a été la commune intention des parties plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes et lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun. Toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par rapport aux autres et dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation.
Dès lors que les époux ont convenu que la prestation compensatoire ne serait pas révisable et qu'ils n'ont pas mentionné une durée limitée du versement de cette prestation sous forme de rente mensuelle, celle-ci était nécessairement due jusqu'au décès de l'épouse de sorte qu'il était tout à fait inutile de mentionner l'expression 'sa vie durant' . En revanche, l'indication 'toute sa vie durant' prend tout son sens pour préciser que l'obligation du mari s'éteindra à son décès . Cette précaution était d'autant plus nécessaire que [M] [T] avait, au moment du divorce, des enfants de deux lits différents et vivait maritalement depuis plusieurs années avec celle qui deviendra sa seconde épouse.
Cette interprétation est confortée par la rédaction un peu différente du premier protocole d'accord entre les époux, l'expression 'toute sa vie durant', étant mentionnée entre deux virgules , après une première partie de la phrase sans virgule ce qui conduit à rattacher ce complément de temps au sujet, monsieur [T], et non au complément d'objet indirect, madame [T].
Enfin , il ressort du témoignage de M.[H] [N], beau-frère du défunt, que celui-ci lui avait parlé de la prestation compensatoire importante qu'il versait à son ex-épouse précisant qu'elle cesserait à sa mort comme l'acte de divorce l'indiquait, de sorte que ses enfants n'auraient pas à assumer cette charge après son décès.
C'est donc par une exacte appréciation des faits de la cause que les premiers juges ont débouté Mme [D]-[T] de ses demandes. Le jugement déféré doit être confirmé.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par défaut, en dernier ressort,
CONFIRME le jugement déféré,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Mme [R] [D]-[T] aux dépens qui seront recouvrés directement par la SCP Keime Guttin Jarry, avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Bernadette WALLON, président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,