COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 70Z
1ère chambre
1ère section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 25 NOVEMBRE 2010
R.G. N° 09/05437
AFFAIRE :
Association loi 1901 RIVERAINS DU PARC DE [Localité 10] 'ARPS'
...
C/
Société MGL IMMOBILIER
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Mai 2009 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
N° chambre : 8
N° Section :
N° RG : 08/04092
07/05527
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
- SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER
SCP DEBRAY-CHEMIN
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE DIX,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
ASSOCIATION DES RIVERAINS DU PARC DE SCEAUX 'ARPS'
Association Loi 1901 ayant son siège social [Adresse 6] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Madame [G] [D]
née le [Date naissance 1] 1935 à [Localité 8] (92)
[Adresse 7]
représentées par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER - N° du dossier 20090731
Rep/assistant : Me Jacqueline BENICHOU (avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE)
APPELANTES
****************
Société MGL IMMOBILIER
ayant son siège [Adresse 3] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
S.C.I. MAG
société civile immobilière ayant son siège [Adresse 5] prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
représentées par la SCP DEBRAY-CHEMIN - N° du dossier 09000587
rep/assistant : Me Annie TIRARD-ROUXEL (avocat au barreau de PARIS)
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Octobre 2010, Madame Bernadette WALLON, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Bernadette WALLON, président,
Madame Evelyne LOUYS, conseiller,
Madame Dominique LONNE, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT
L'association [Adresse 9] a assigné la société MGL Immobilier, propriétaire d'une villa dans le lotissement du parc des Sceaux sise [Adresse 4], pour l'entendre condamner à démolir les travaux de restructuration qu'elle a effectués dans cette villa qu'elle a aménagée en trois appartements d'habitation.
Elle agit sur le fondement de l'article 1143 du code civil et sur l'article 17 du cahier des charges du lotissement prohibant le morcellement de lots.
Mme [G] [D], propriétaire dans le lotissement, est intervenue volontairement à l'instance suite à la fin de non recevoir soulevée par la société MGL Immobilier tirée du défaut de qualité à agir de l'association [Adresse 9].
Par acte du 27 mars 2008, la société SCI Mag à laquelle la société MGL Immobilier a vendu la maison le 28 décembre 2007, a été assignée en intervention.
Par jugement en date du 14 mai 2009, le tribunal de grande instance de Nanterre a :
- reçu l'association [Adresse 9] et Mme [G] [D] en leur action,
- débouté l'association [Adresse 9] et Mme [G] [D] de l'ensemble de leurs demandes,
- condamné l'association [Adresse 9] et Mme [G] [D] in solidum à payer aux sociétés MGL Immobilier et SCI Mag la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'association [Adresse 9] et Mme [G] [D], aux termes de leurs conclusions signifiées le 17 mai 2010 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs moyens, demandent à la cour de :
- les déclarer recevables et bien fondées en leur appel,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré l'association [Adresse 9] recevable en son action et Mme [G] [D] recevable en son intervention volontaire,
- infirmer le jugement entrepris pour le surplus,
- débouter la société MGL Immobilier et la société SCI Mag de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ,
- constater la violation caractérisée de l'article 17 du cahier des charges,
- ordonner la démolition des travaux de restructuration de l'immeuble sis [Adresse 4] cadastré section AD n°[Cadastre 2] pour une contenance de 00ha 5a 73ca, acquis par la société MGL Immobilier par acte reçu par maître [V], notaire, en date du 31 mars 2005 publié au 5ème bureau des hypothèques de Nanterre le 18 mai 2005, volume 2005P n°5156 et en dernier lieu acquis par la société SCI Mag par acte reçu par maître [N], notaire, en date du 28 décembre 2007,
- condamner la société SCI Mag, et en tant que de besoin in solidum la société MGL Immobilier, aux frais de démolition et de remise en état selon la destination originelle du bien, conforme au cahier des charges, soit une maison comportant une seule habitation individuelle,
- condamner la société MGL Immobilier et la société SCI Mag in solidum à payer à l'association [Adresse 9] et à Mme [G] [D] une somme de
10 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article 1134 du code civil,
- condamner la société MGL Immobilier et la société SCI Mag in solidum à payer à l'association [Adresse 9] et à Mme [G] [D] une somme de
10 000 euros, à chacune d'elle, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Les sociétés MGL Immobilier et SCI Mag, aux termes de leurs conclusions signifiées le 15 janvier 2010 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs moyens, demandent à la cour de :
- dire irrecevables les demandes de l'association [Adresse 9] et de Mme [G] [D],
- subsidiairement, confirmer le jugement rendu le 14 mai 2009 par le tribunal de grande instance de Nanterre en ce qu'il a débouté les requérantes de l'intégralité de leurs demandes,
- condamner l'association [Adresse 9] et Mme [G] [D], in solidum, à payer à la la société MGL Immobilier et à la société SCI Mag la somme de
10 000 euros au titre de ses frais irrépétibles selon l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 septembre 2010.
MOTIFS DE L'ARRET
1) Sur l'irrecevabilité des demandes de l'association des Riverains du parc de Sceaux
Considérant que les sociétés MGL Immobilier et SCI Mag font valoir que n'étant pas un coloti, l'association en cause est irrecevable à invoquer les règles du cahier des charges du lotissement et qu'elle ne peut agir qu'à charge de rapporter la preuve de l'existence d'un préjudice collectif, direct et personnel, distinct des préjudices propres à chacun des membres de l'association ;
Mais considérant qu'il est constant qu'une association régulièrement déclarée peut réclamer la réparation des atteintes portées aux intérêts collectifs de ses membres et son action est recevable dans les limites de son objet social ;
Considérant que l'article II des statuts de l'association des Riverains du parc de [Localité 10] prévoit qu'elle 'a pour but l'étude des intérêts individuels et collectifs des propriétaires acquéreurs du morcellement du Parc de [Localité 10], et de façon plus générale, des personnes ayant leur domicile dans ledit lotissement, ainsi que des moyens de défense de ces intérêts, l'exercice de tous actes propres à assurer cette défense tels que démarches auprès des particuliers, interventions auprès des pouvoirs publics, exercice des actions en justice ainsi que toutes opérations ayant pour but la représentation et la défense des droits que confèrent aux dites personnes leurs titres de propriété sur le lotissement' ;
Considérant que le conseil d'administration du 18 septembre 2006 a autorisé l'introduction de la présente procédure ;
Considérant qu'il est avéré que la violation du cahier des charges cause à l'association en cause un préjudice collectif, direct et personnel dès lors que cette violation contrevient aux intérêts collectifs et individuels de ses membres qu'elle est chargée de défendre dans le cadre de son objet social ;
Considérant dès lors, que son action est parfaitement recevable ;
2) Sur la recevabilité des demandes de Mme [G] [D], intervenante volontaire à l'instance
Considérant qu'il est soutenu que cette intervention volontaire accessoire est irrecevable du fait de l'irrecevabilité de la demande de l'association des Riverains du parc de [Localité 10] ;
Mais considérant que d'une part la demande principale de ladite association est recevable que d'autre part, il ne s'agit pas d'une intervention volontaire accessoire, Mme [G] [D], propriétaire coloti, ce dont il est justifié par la production d'une attestation notariée de propriété du 19 février 2008, étant recevable à formuler des demandes tirées de la violation du cahier des charges ;
Considérant que son intervention volontaire doit être déclarée recevable ;
3) Sur la demande de démolition des travaux de restructuration de l'immeuble sis [Adresse 4] ;
Considérant que l'association des Riverains du parc de Sceaux et Mme [D] font valoir que la transformation d'une maison individuelles en un immeuble comportant trois appartements méconnaît les dispositions de l'article 17 du cahier des charges ;
Considérant que les sociétés MGL Immobilier et SCI Mag répliquent que les trois articles du cahier des charges qui utilisent le terme 'bâtiment d'habitation individuelle' à savoir les articles 9, 10 et 17 ont un objet autre que les modalités d'occupation des bâtiments ; que le terme 'bâtiment d'habitation individuelle' est utilisé par opposition au terme 'maisons de rapport et de commerce' uniquement pour décrire l'aspect des bâtiments ce qui est logique dès lors que les règles contenues dans ces trois articles sont des règles d'urbanisme et que pour le droit de l'urbanisme, les maisons individuelles sont celles qui ont un aspect de maisons individuelles quel que soit le nombre de logement à l'intérieur de celles-ci ;
Considérant que l'article 17 du cahier des charges du lotissement énonce : 'Il est interdit aux acquéreurs et à leurs ayants droit de morceler les lots sous quelque forme que ce soit et pour quelque cause que ce soit.
En conséquence, il ne pourra être construit, sur chaque lot, qu'un bâtiment d'habitation individuelle, de manière à éviter tout morcellement ultérieur de la propriété' ;
Considérant qu'il est constant que les stipulations du cahier des charges d'un lotissement, quels que soient son contenu, son ancienneté et son approbation administrative ou non, ont, entre les colotis, un caractère contractuel ;
Considérant dès lors que la circonstance que la construction a fait l'objet d'un permis de construire n'est pas de nature à faire obstacle à une demande de démolition sachant que l'administration délivre les autorisations de construire au seul vu des règles d'urbanisme applicables, le permis de construire étant en tout état de cause délivré 'sous réserve des droits des tiers' ;
Considérant qu'il résulte du dossier que l'article 17 du cahier des charges du lotissement tel qu'il vient d'être rappelé, doit s'interpréter comme comportant une double interdiction, à savoir celle de morceler un terrain et d'y édifier plusieurs bâtiments et celle d'y édifier un immeuble comportant plusieurs habitations ;
Que cette interprétation se trouve confortée par l'article 10 visant 'les maisons d'habitation individuelles communes' décrites comme des habitations bourgeoises ce qui s'oppose à la notion d'immeubles d'habitation collectifs, l'article 9 se référant pour sa part aux 'parties réservées aux habitations individuelles' ;
Considérant enfin, que la lecture du cahier des charges du lotissement fait clairement apparaître que les dispositions contractuelles qu'il contient ont pour objet de préserver l'harmonie du lotissement en interdisant tout habitat collectif à l'exception des parcelles longeant l'actuelle route nationale 20 qui est expressément prévue par l'article 11 de ce document ;
Considérant que les sociétés intimées ont manifestement contrevenu à l'interdiction contenue dans le cahier des charges du lotissement en aménageant l'immeuble litigieux en trois appartements distincts ;
Considérant que conformément à l'article 1143 du code civil, une exécution en nature, soit la démolition s'impose ; que l'association des Riverains du parc de Sceaux et Mme [G] [D] doivent être déclarées bien fondées en leur demande de démolition des travaux de restructuration de l'immeuble dont s'agit et de remise en état selon la destination originelle du bien conforme au cahier des charges, soit une maison comportant une seule habitation individuelle ;
Considérant que le jugement entrepris sera donc infirmé ;
4) Sur la demande de dommages et intérêts
Considérant que l'association [Adresse 9] et Mme [D] sollicitent le paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison d'une 'collusion frauduleuse' incontestable entre les sociétés MGL Immobilier et SCI Mag pour faire échec à leurs demandes légitimes ;
Mais considérant qu'il n'est pas rapporté la preuve de la collusion dénoncée ni du préjudice allégué de sorte que la demande ne peut prospérer ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris.
STATUANT À NOUVEAU,
ORDONNE la démolition des travaux de restructuration de l'immeuble sis [Adresse 4] cadastré section AD numéro [Cadastre 2], acquis par la société MGL Immobilier par acte notarié en date du 31 mars 2005 et en dernier lieu par la SCI Mag par acte notarié du 28 décembre 2007,
CONDAMNE in solidum les sociétés MGL Immobilier et SCI Mag à supporter les frais de démolition et de remise en état selon la destination originelle de l'immeuble conforme au cahier des charges du lotissement,
DÉBOUTE l'association [Adresse 9] et Mme [G] [D] de leur demande de dommages et intérêts,
CONDAMNE in solidum les sociétés MGL Immobilier et SCI Mag à verser à l'association [Adresse 9] et à Mme [G] [D] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement direct pour ces derniers au profit de la SCP Jullien Lecharny Rol Fertier, avoués, conformément à l'article 699 du même code.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Bernadette WALLON, président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,