COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 10A
1ère chambre 1ère section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 15 NOVEMBRE 2012
R.G. N° 11/06626
AFFAIRE :
[Y] [C]
C/
MINISTERE PUBLIC
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Juillet 2011 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE
N° chambre : 1
N° Section :
N° RG : 09/08456
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
M° Melina PEDROLETTI
MP
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE QUINZE NOVEMBRE DEUX MILLE DOUZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [Y] [C]
né le [Date naissance 8] 1969 à [Localité 13] (SENEGAL)
[Adresse 3]
[Localité 9]
Rep/assistant : la SCP Melina PEDROLETTI (avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 00021231)
ayant pour avocat Maitre P.K NIANG, avocat au barreau de l'Essonne
APPELANT
****************
Madame [H] [B]
née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 11] (SENEGAL)
ayant demeuré chez Monsieur [P] [J] [Adresse 5]
[Localité 10]
actuellement [Adresse 3]
agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de son fils mineur [K] [C] né le [Date naissance 6] 2006
Rep/assistant : la SCP Melina PEDROLETTI (avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 00021231)
ayant pour avocat Maitre P.K NIANG, avocat au barrau de l'Essonne
MINISTERE PUBLIC représenté par Monsieur le Procureur général près la cour d'appel de Versailles lui-même représenté par Monsieur CHOLET, avocat général.
INTIMES
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Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Octobre 2012, Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président,
Madame Dominique LONNE, Conseiller,
M. Dominique PONSOT, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT
Vu l'appel interjeté par [Y] [C] du jugement rendu le 22 juillet 2011 par le tribunal de grande instance de Pontoise qui a :
- constaté que le récépissé prévu par l'article 1043 du Code de procédure civile a été délivré, - déclaré l'action recevable, - annulé l'enregistrement de la déclaration de nationalité souscrite le 14 décembre 2001 par [Y] [C] devant le juge d'instance du tribunal de Paris (13 ème arrondissement) - dit que [K] [C] né le [Date naissance 6] 2006 à [Localité 16] (Sénégal) n'est pas français, - ordonné la mention prévue par l'article 28 du Code civil, -condamné [Y] [C] et [H] [B] aux dépens ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 28 décembre 2011 par lesquelles [Y] [C], poursuivant l'infirmation du jugement entrepris, demande à la cour de dire l'action du ministère public prescrite, subsidiairement mal fondée, en conséquence, de le débouter de l'ensemble de ses prétentions et de :
- dire que [Y] [C], né le [Date naissance 8] 1969 à [Localité 13] (Sénégal) est de nationalité française, - dire que [K] [C] né le [Date naissance 6] 2006 à [Localité 16] (Sénégal) est de nationalité française,
- condamner l'Etat à lui verser la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Vu les conclusions signifiées le 27 juin 2012 par lesquelles [H] [B] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de son fils mineur, [K] [C], demande qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle s'associe aux conclusions développées par [Y] [C] ;
Vu les conclusions du 23 janvier 2012 aux termes desquelles le ministère public demande à titre principal de constater la caducité de l'acte d'appel, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement déféré et d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du Code civil ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 4 octobre 2012,
SUR QUOI, LA COUR
Considérant que le 14 décembre 2001, [Y] [C], de nationalité sénégalaise, a souscrit, devant le tribunal d'instance de Paris 13 ème arrondissement, une déclaration d'acquisition de la nationalité française, sur le fondement de l'article 21-2 du Code civil, en invoquant son mariage le [Date mariage 7] 1998, à [Localité 14] (Sénégal) avec [T] [P], de nationalité française ;
Qu'estimant, au vu d'un dossier transmis par le Ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, que cette déclaration a été enregistrée par fraude, le procureur de la république près le tribunal de grande instance de Pontoise a fait assigner [Y] [C] en son nom personnel, [Y] [C] et [H] [B], en qualité de représentants légaux de leur fils mineur, [K] [C], aux fins de voir prononcer l'annulation de l'enregistrement de déclaration de nationalité française et de dire que [K] [C] n'est pas français devant le tribunal de grande instance de Pontoise qui a rendu le jugement entrepris ;
Sur la prescription de l'action
Considérant qu'aux termes de l'article 26-4 alinéa 3 du code civil, l'enregistrement peut encore être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans à compter de leur découverte . La cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois suivant l'enregistrement de la déclaration prévue à l'article 21-2 constitue une présomption de fraude ;
Considérant que se fondant sur ces dispositions, [Y] [C] expose que le jugement de divorce des époux [C]/ [P] a été transcrit en marge des actes de l'état civil, le 6 juin 2007, que le ministère public a eu connaissance de la cessation de la communauté de vie, plus de deux ans avant l'assignation, de sorte que son action est prescrite ;
Mais, considérant que le ministère public n'a eu connaissance d'une fraude que par l'envoi d'un dossier par le ministère de l'immigration, le 2 octobre 2009 ; qu'en effet, si le divorce des époux [C]-[P] a été transcrit en marge de l'acte de mariage des époux, le 6 juin 2007, cet acte ne comporte aucune mention relative à l'acquisition de la nationalité française de l'époux de sorte qu'il ne permettait pas de présumer l'existence d'une fraude ; que seul l'acte de naissance dressé par le service central d'état civil pour l'époux devenu français porte mention de l'acquisition de la nationalité française ;
Que la naissance d'enfants nés hors mariage et les démarches entreprises par l'appelant pour acquérir la nationalité française n'ont donc été portées à la connaissance du ministère public que par l'envoi du dossier par le ministère de l'immigration, le 2 octobre 2009 ,
Que l'action introduite le 26 novembre 2009 n'est donc pas prescrite ;
Sur le fond
Considérant qu'au soutien de son recours, [Y] [C] fait valoir qu'il existait, au moment de la souscription de nationalité et plusieurs années après, une communauté de vie affective entre les époux ; qu'il expose, à cet effet, que le premier enfant du couple est né le [Date naissance 2] 2001, soit un mois avant la déclaration de nationalité, et le second enfant, le [Date naissance 4] 2003, soit près de deux ans après cette déclaration et que la réalité de cette communauté de vie ne peut être remise en cause du seul fait de son infidélité ; qu'il ajoute que [T] [P] a souhaité maintenir une communauté de vie affective et matérielle de 2000 à 2006 malgré la naissance d'enfants adultérins ;
Considérant que l'article 21-2 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 16 mars 1998, applicable en l'espèce, conformément aux dispositions de l'article 17-2 du même code, permet à l'étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française d'acquérir la nationalité française par simple déclaration à la condition qu'un délai d'un an se soit écoulé depuis le mariage et que la communauté de vie n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage ;
Que la communauté de vie, obligation découlant du mariage, (article 215 du code civil) doit être tant affective que matérielle ; que la communauté de vie affective, définie par l'article 212 du même code, emporte respect, fidélité, secours et assistance ;
Considérant que [Y] [C] a contracté mariage avec [T] [P], de nationalité française, le [Date mariage 7] 1998 ; que par jugement du 5 décembre 2006, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny a prononcé le divorce des époux [C]/[P] ;
Considérant qu'alors qu'il était uni dans les liens du mariage avec [T] [P], [Y] [C] a eu trois enfants, de [H] [B] qui deviendra sa seconde épouse ; que [K] [C], né le [Date naissance 6] 2006, de [H] [B], après le prononcé du divorce, a été reconnu par [Y] [C], le 22 mars 2007 ; que quand bien même, deux enfants sont nés en 2001 et 2003, de son union avec [T] [P], la naissance hors mariage de trois enfants constitue une violation du devoir de fidélité et est exclusive de toute communauté de vie affective avec son épouse ;
Que si les pièces produites aux débats par l'appelant établissent que [Y] [C] et [T] [P] avait un domicile commun, elles ne sont pas de nature à démontrer la réalité d'une communauté de vie affective avec celle-ci, au sens de l'article 215 du code civil, lorsqu'il a souscrit sa déclaration de nationalité ; que la fraude est donc caractérisée ;
Que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a annulé l'enregistrement de la déclaration souscrite par [Y] [C], constaté son extranéité et dit que [K] [C] n'est pas français ;
Considérant que la solution du litige commande de rejeter la demande formée par [Y] [C] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,
Déboute [Y] [C] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne [Y] [C] aux dépens .
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,