COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 57A
3e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 18 SEPTEMBRE 2014
R.G. N° 12/05497
AFFAIRE :
SASU EURO DEPOT IMMOBILIER
C/
SARL GERARD RIBEREAU
Décision déférée à la cour :
Jugement rendu le 28 février 2007 par le Tribunal de Commerce de PARIS
N° Chambre : 13
N° RG : 2006024042
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Pierre GUTTIN, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Patrick GRAS de la SCP GRAS & ROBERT, avocat au barreau de VERSAILLES
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE DIX HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
DEMANDERESSE devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (1 ère chambre) du 8 mars 2012 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de PARIS - Pôle 5- Chambre 11- le 14 janvier 2011.
SASU EURO DEPOT IMMOBILIER
[Adresse 2]
[Localité 2]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant: Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 12000502
Représentant: Me Hervé TANDONNET, Plaidant, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 261,
****************
DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI
SARL GERARD RIBEREAU
exerçant sous l'enseigne SITCOM
N° SIRET : 326 66 1 8 08
[Adresse 1]
[Localité 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant: Me Patrick GRAS de la SCP GRAS & ROBERT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 92,
Représentant : Me Philippe MAMMAR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B1160
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Juin 2014, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOISSELET, Président chargé du rapport et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique BOISSELET, Président,
Madame Annick DE MARTEL, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,
La société EURO DEPOT IMMOBILIER, anciennement «'BRICO DEPOT'», a saisi la cour d'appel de Versailles désignée comme cour de renvoi, après cassation d'un arrêt de la Cour de Paris du 14 janvier 2011 - infirmant partiellement le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 28 février 2007- dans un litige opposant EURO DEPOT IMMOBILIER à la société GERARD RIBEREAU, exerçant sous l'enseigne SITCOM (ainsi nommée dans l'arrêt).
*
Le 5 mars 2002, la société BRICO DEPOT, qui souhaitait s'implanter dans la zone de saint Priest le long de la Nationale 6, a confié à la société SITCOM à titre irrévocable et pour trois mois reconductibles, un mandat de recherche d'implantation, aux fins de location, achat ou prise à bail à construction, portant sur l'un des sites suivants :
- RN6 202 à 206 n° [Cadastre 1],[Cadastre 3] et éventuellement [Cadastre 3], partiellement loués à une société Camping car
- RN6 211 à 221 n° 101, 36, 29, partiellement loués à 'Bois de chiffons' et 'Ecobois'
La rémunération forfaitaire du mandataire était de 66.000 € HT pour la première implantation et de 61.000 € pour la seconde ; à verser lorsque l'opération aura été effectivement conclue et toutes les conditions suspensives acquises. Il n'est pas contesté que c'est la première implantation qui fait l'objet du présent litige.
Le mandat stipulait que le mandant s'interdisait, pendant la durée du mandat, de négocier directement ou indirectement les biens sans en avertir le mandataire et, après l'expiration du mandat et pendant 18 mois, soit jusqu'au 3 décembre 2003, de réaliser un contrat concernant les biens sans le concours du mandataire. Faute de respecter les termes convenus, le mandant s'engageait à verser au mandataire, à titre de dédommagement, l'intégralité des honoraires convenus.
Par courrier du 31 juillet 2002, la société SITCOM donnait à EURO DEPOT IMMOBILIER son accord pour une extension de sa mission de recherche sur la parcelle AX [Cadastre 1] (mandat n° 259) moyennant des honoraires complémentaires forfaitaires de 53.350 €. EURO DEPOT IMMOBILIER n'a pas renvoyé ce courrier avec une mention d'approbation qui lui était demandée, mais dans un courrier subséquent du 19 novembre 2002, elle se reconnaissait débitrice de la somme de 119.350 € hors taxes incluant la somme de 53.350 € (53.350 + 66.000), pour le cas où l'opération se réaliserait.
EURO DEPOT IMMOBILIER reproche à SITCOM d'avoir érigé en mandat ce qui n'est qu'un simple échange de courrier ne prévoyant au demeurant aucune durée, en contradiction avec la loi Hoguet.
Postérieurement, le 19 février 2003, la société EURO DEPOT IMMOBILIER, bénéficiaire, et la SCI STEEVE, promettant, ont régularisé une promesse unilatérale de vente portant sur les parcelles AX [Cadastre 3] qui faisait partie du mandat, et la moitié indivise des parcelles AX [Cadastre 3] et [Cadastre 2] sous diverses conditions suspensives devant être réalisée au plus tard le [Cadastre 1] juin 2004 ; le délai a été prorogé au 15 juillet 2005 ; la promesse rappelle l'intervention de SITCOM dans la négociation selon mandat 243 en date du 5 mars 2002 'et son avenant du 28 juillet 2002' ; les honoraires de négociation s'élevant à 149.840 € hors taxes dus 'dès que l'opération aura été effectivement conclue et toutes les conditions suspensives réalisées'. Cette même promesse de vente note que le bail précaire a été négocié par les deux mandataires des parties (Gémofis pour la société STEEVE promettant et SITCOM pour EURO DEPOT IMMOBILIER) pour un montant de 16.664,55 € à partager entre les deux mandataires, à la charge de l'acquéreur.
Par ailleurs, par courrier du 19 novembre 2002 récapitulant la situation des honoraires dont la société EURO DEPOT IMMOBILIER se reconnaissait débitrice, celle-ci affirmait tout d'abord qu'elle s'acquitterait, dès la signature du bail précaire, des honoraires de 15 % du loyer annuel hors taxes revenant aux deux mandataires (Gémofis et SITCOM); pour le reste, EURO DEPOT IMMOBILIER confirmait le mandat de SITCOM pour la somme de 119.350 € hors taxes en cas de réalisation des opérations. Enfin, elle confirmait les 'honoraires exceptionnels' demandés à hauteur de 30.490 € hors taxes, à verser lors de la réitération de l'acte authentique d'acquisition des fonciers de la SCI STEEVE. Ce courrier est devenu le mandat n° 259.
SITCOM réclame donc sur la base du mandat 243 et de 'son avenant', la somme de 119.350 € et sur le fondement de ce 'second mandat' 259, la somme de [Cadastre 1].490 € soit au total 149.840 € hors taxes. La somme de 30.490 € a été réglée par EURO DEPOT IMMOBILIER au cabinet Gémofils et non à SITCOM, en vue d'un partage entre les deux mandataires.
S'agissant de la concrétisation de ces 'mandats' qui constitue la condition du versement des honoraires réclamés, SITCOM fait observer que la promesse de vente de la parcelle [Cadastre 3] (SCI STEEVE) conclue le 19 février 2003 et prorogée au 15 juillet 2005, a été réalisée le 7 juillet 2005 ; la facture d'honoraires présentée par SITCOM a cependant été refusée, si bien que le mandataire a fait opposition sur le prix de vente.
S'agissant des parcelles [Cadastre 1] (SCI AYME VILLEFRANCHE) , [Cadastre 1] (M. [U]), SITCOM fait valoir qu'un bail à construction a été signé le 29 août 2007 sur la parcelle [Cadastre 1], après promesse de bail consentie le 19 juin 2003. Cette promesse contenait délégation de mandat de la SLDI au profit de SITCOM, ouvrant droit pour celle-ci à 50 % de la rémunération globale, soit la somme de 16.664 € hors taxes.
*
La société GERARD RIBEREAU (SITCOM) a sollicité en référé le paiement de ses honoraires. Le juge des référés a dit n'y avoir lieu à référé et a renvoyé l'affaire devant le juge du fond.
Par jugement du 28 février 2007, le tribunal a condamné la société EURO DEPOT IMMOBILIER à verser à la société RIBEREAU la somme de 142.742,64 € TTC,
- dit que la société EUROT DEPOT IMMOBILIER paiera 'de suite' 50 %, soit la somme de 71.371,32 € avec intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2005 ;
- ordonné l'exécution provisoire sur la somme de 71.371,32 €, sans constitution de garantie ;
- enjoint la société EURO DEPOT IMMOBILIER d'informer la société RIBEREAU des suites données quant à l'achat, la location ou la signature d'un bail à construire sur les parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 1], ceci devant amener la société EURO DEPOT IMMOBILIER à verser le complément dû, soit la somme de 71.371,32 € TTC ;
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires.
Les premiers juges ont considéré que, au titre de la promesse de vente du 19 février 2003 et de l'acte officiel du 7 juillet 2005, la société EURO DEPOT IMMOBILIER s'était engagée à payer les honoraires qu'elle conteste. Elle est donc tenue au paiement de ces honoraires.
- la société EURO DEPOT ayant fait part de son intention de signer l'acte de vente en renonçant aux conditions suspensives, est mal fondée à arguer de la non réalisation de ces conditions pour se soustraire à son engagement, alors que c'est toujours elle qui a demandé les prorogations de la date butoir et que le mandat n'a jamais été dénoncé par EURO DEPOT.
- il n'est pas contesté que l'opération n'est terminée que pour les parcelles [Cadastre 3], [Cadastre 3] et [Cadastre 2] ; que pour les parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 1], les commissions sont comprises dans les 142.742,32 €, l'opération n'étant pas encore réalisée. La société EURO DEPOT devra donc verser à la société RIBEREAU la moitié de la somme due et l'informera de la bonne fin des opérations liées aux parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 1] inachevées, dans les conditions convenues.
La société EURO DEPOT IMMOBILIER a interjeté appel du jugement.
Par arrêt du 14 janvier 2011, la cour de Paris a confirmé le jugement sur l'article 700 du code de procédure civile, sur les dépens et en ce qu'il a débouté la société RIBEREAU de sa demande de dommages et intérêts complémentaires ; elle a considéré que les deux mandats étaient valides et indivisibles pour la totalité des parcelles en cause ([Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 3]),
- infirmé le jugement pour le surplus ;
- condamné la société EURO DEPOT IMMOBILIER à payer à la société RIBEREAU la somme de 161.872, 62 €, en deniers ou quittances, avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2005, outre la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil à compter de la demande du 2 juillet 2009 ;
- condamné EURO DEPOT IMMOBILIER à payer à SITCOM la somme de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejeté le surplus des demandes.
La cour d'appel a considéré que, bien que portant sur des parcelles différentes, le mandat donné à la société RIBEREAU n'était pas divisible de sorte que la réalisation de l'opération s'entend en ce qu'elle portait sur la totalité des parcelles en cause, soit [Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 3] du mandat initial et [Cadastre 1] du mandat 259, et que la totalité de la rémunération convenue s'appliquait à la totalité de ces parcelles.
- à compter de la date du 12 juin 2003, il ne résulte d'aucune pièce que les parties aient entendu poursuivre leurs relations contractuelles de sorte que l'argumentation tirée de ce que la société RIBEREAU aurait manqué à son obligation de conseil pour ne pas l'avoir informée des conséquences défavorables de la transformation du POS en PLU depuis 2005 est dénuée de portée.
- il ressort de la promesse de vente que la société RIBEREAU n'avait droit qu'à la moitié des honoraires exceptionnels.
La société EURO DEPOT IMMOBILIER a formé un pourvoi en cassation.
Par arrêt du 8 mars 2012, la Haute Cour a cassé et annulé en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 janvier 2011 par la cour d'appel de Paris et a renvoyé les parties devant la cour d'appel de Versailles.
La Cour de Cassation, au visa des articles 15, 132 du code de procédure civile, 72 du décret du 20 juillet 1972, a considéré qu'en condamnant EURO DEPOT IMMOBILIER à verser une indemnité à SITCOM, agent immobilier, en exécution d'un mandat de recherche suivi d'un avenant, en considérant que les deux mandats sont valides, puisque la production de l'extrait de registre concernant les mandats litigieux en copie s'avère suffisante, alors que EURO DEPOT IMMOBILIER avait réclamé l'original des mandats, la cour d'appel avait violé les textes susvisés.
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Dans ses dernières conclusions signifiées le 16 mai 2014, la société EURO DEPOT IMMOBILIER demande à la Cour de constater, que le seul mandat valable, conclu entre la société RIBEREAU et elle, se limite au mandat prévoyant des honoraires de 66.000 € HT';
- constater que la société RIBERAU a gravement failli à ses obligations de conseil, de loyauté et de diligences ;
- en conséquence, infirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 142.742.64 € TTC ;
- débouter la société RIBERAU de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- en tout état de cause, déduire de la somme éventuellement due par elle, les versements intervenus en exécution du jugement de première instance et ordonner le remboursement du surplus par la société RIBEREAU ;
A titre reconventionnel :
- constater, que les versements opérés postérieurement au mandat du 5 mars 2002 l'ont été en contradiction avec les dispositions de l'article 73 alinéa 1er du décret du 20 juillet 1972 et de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 ;
- constater en conséquence qu'ils constituent un règlement indu, et condamner la société RIBEREAU à lui payer la somme de 38.163,88 € TTC avec intérêts à compter de la décision à intervenir' ;
Elle soutient que :
- si elle a dû finalement renoncer à la réalisation des conditions suspensives prévues dans la promesse de vente conclue avec la société STEEVE, c'est parce que cette dernière refusait de proroger son offre une nouvelle fois.
- le mandat du 5 mars 2002 est nul en ce qu'il ne respecte pas le formalisme de l'article 1325 du code civil tel qu'exigé par la loi «'HOGUET ».
- contrairement à ce que soutient la société RIBEREAU, il n'a jamais été question qu'elle accepte de verser des sommes indues et étrangère au mandat.
- l'intimé a manqué à son devoir de conseil, de diligences et de loyauté à son égard.
- la clause pénale n'est pas applicable au cas d'espèce.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 18 mars 2013, la société RIBEREAU demande à la Cour de dire la société EURO DEPOT IMMOBILIER irrecevable et mal fondée en son appel et, en conséquence, la débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- confirmer, ce faisant, en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris ;
- condamner la société EURO DEPOT IMMOBILIER à lui payer le solde des sommes dues à hauteur de 71.371,32 € TTC ;
- dire et juger que les condamnations emporteront intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 27 juillet 2005 ;
- dire et juger qu'il y a lieu à capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil .
Subsidiairement :
- condamner la société RIBEREAU à lui payer la somme de 134.595,00 € HT, soit 160.097,62 € à titre de dommages et intérêts ;
- constater qu'une somme de 71.371,32 € a déjà été réglée sur ladite somme ;
- condamner la société EURO DEPOT IMMOBILIER au paiement du solde dû ;
Dans tous les cas':
- condamner la société EURO DEPOT IMMOBILIER à lui payer la somme de 20.000 € à titre de dommages-intérêts en raison de la gravité des manquements commis et de sa mauvaise foi.
Elle soutient :
- qu'elle a respecté les dispositions impératives de l'article 72 du décret 20 juillet 1972 selon lesquelles tous les mandats doivent être mentionnés par ordre chronologique sur un registre des mandats et le mandat n° 243 n'est par conséquent entaché d'aucune irrégularité, nonobstant ce que tente de faire croire la société EURO DEPOT.
- que si la société EURO DEPOT a reconnu devoir ses honoraires en réglant « malicieusement» les honoraires exceptionnels d'un montant de [Cadastre 1].490 € hors taxes au mandataire de la société STEEVE, elle ne s'est acquittée que partiellement de son obligation de paiement.
La cour renvoie aux conclusions signifiées par les parties, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
- Sur la validité des mandats invoqués par SITCOM
** La validité du mandat exclusif de recherche d'implantation, consenti à SITCOM le 5 mars 2002 par EURO DEPOT IMMOBILIER en qualité de mandant, n'est contestée ni dans son existence ni dans son étendue. Ce mandat répond aux conditions posées par les articles 72 et 73 du décret 72-678 du 20 juillet 1972.
Il prévoit clairement une rémunération forfaitaire de 66.000 € hors taxes, pour une recherche portant sur les parcelles [Cadastre 1], [Cadastre 3] et éventuellement [Cadastre 3] (202 à 206 RN6). Cette somme n'est due que lorsque 'l'opération aura été effectivement conclue et toutes les conditions suspensives acquises'. Le mandat est conclu pour trois mois à compter du 4 juin 2002, renouvelable par tacite reconduction pour une durée égale. Sur le fondement de ce mandat (243), SITCOM demande le paiement de la somme de 66.000 €.
** Selon un échange de courriers du 31 juillet 2002, il n'est pas contestable que SITCOM a accepté une extension de sa mission à la parcelle AX[Cadastre 1], moyennant une rémunération complémentaire de 53.350 € hors taxes en cas de réalisation de l'opération. Ce courrier ne comporte aucune acceptation expresse du mandant. SITCOM réclame cette somme en invoquant un avenant au mandat 243.
Cependant, il est constant que ce prétendu 'mandat' n'est pas conforme aux exigences d'ordre public posées par l'article 72 du décret précité.
En effet selon ce texte, le titulaire de la carte professionnelle portant la mention"Transactions sur immeubles et fonds de commerce" ne peut négocier ou s'engager à l'occasion d'opérations spécifiées à l'article 1er (1° à 5°) de la loi du 2 janvier 1970 sans détenir un mandat écrit préalablement délivré à cet effet par l'une des parties ; le mandat précise son objet et contient les indications prévues à l'article 73.
S'il est vrai que EURO DEPOT IMMOBILIER a reconnu devoir ces honoraires dans un courrier et un acte subséquent, SITCOM ne peut justifier d'un mandat régulier au regard de ces dispositions d'ordre public, sachant que l'extension de mission, qui en l'espèce suppose l'attribution de substantiels honoraires, est soumise aux mêmes conditions que celles du mandat initial ; ce prétendu mandat a un objet distinct (une autre parcelle) et donne lieu au paiement d'honoraires distincts. Cet acte est donc soumis aux conditions posées par le décret de 1972.
SITCOM a été dans l'impossibilité de produire un mandat régulier, comprenant l'accord écrit des deux parties; elle n'a fourni que l'inscription du mandat 243 sur le registre mais l'inscription unilatérale d'un 'mandat' ne pouvait tenir lieu d'acte conforme aux dispositions d'ordre public applicables en l'espèce.
Ainsi, SITCOM ne peut réclamer la somme de 53.350 €.
** SITCOM se prévaut enfin d'un autre 'mandat', inscrit sur le registre des mandats au numéro 259, en qualifiant ainsi le courrier de EURO DEPOT IMMOBILIER en date du 19 novembre 2002.
Cependant ici encore et quelle que soit la reconnaissance par EURO DEPOT IMMOBILIER de son obligation au paiement de la somme de 119.350 € (66.000 + 53.350), ce prétendu mandat n'existe pas au sens des textes d'ordre public précités ; et à défaut de mandat, SITCOM ne peut réclamer le paiement d'honoraires.
Dans ce courrier, EURO DEPOT IMMOBILIER reconnaît également devoir à SITCOM une somme de 30.490 € hors taxes, à verser lors de la réitération de la vente du foncier à la SCI STEEVE. Le mandat ne répond pas cependant aux dispositions d'ordre public s'appliquant aux agents immobiliers, si bien qu'aucune somme ne peut être demandée sur ce fondement.
- Sur la réalisation de l'opération d'implantation
Pour ce qui concerne la réalisation des contrats projetés :
- s'agissant des parcelles [Cadastre 3] , [Cadastre 3] et [Cadastre 2], elles ont donné lieu à une promesse de vente signée le 19 février 2003 avec la SCI STEEVE ; la promesse, prorogée au 15 juillet 2005, a été réitérée le 7 juillet 2005, la prorogation et la réitération -contrairement à la promesse- étant intervenues, hors l'intervention de SITCOM.
- s'agissant des parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 1], une promesse de bail précaire a été signée le 19 juin 2003 avec l'intervention de SITCOM ; elle n'a été réitérée que le 29 août 2007, hors l'intervention de SITCOM.
Aux termes du mandat du 5 mars 2005, 'il est expressément convenu et accepté que les termes du mandat relatifs à la rémunération du mandataire resteront toujours en vigueur même après l'expiration du mandat dans les délais cités ci-dessus'.
Compte tenu de l'aboutissement global du projet, EURO DEPOT IMMOBILIER est redevable de la somme de 66.000 € outre la TVA, au titre du mandat 243 signé le 5 mars 2002. Les autres sommes ne sont pas dues sur le fondement d'un mandat.
- Sur les dommages-intérêts demandés par SITCOM à titre subsidiaire
A titre subsidiaire, SITCOM demande des dommages-intérêts au titre de la clause pénale, en raison du caractère frauduleux du comportement de EURO DEPOT IMMOBILIER.
S'il est vrai que EURO DEPOT IMMOBILIER s'était engagée sur le paiement de certaines sommes, il appartenait à SITCOM, en sa qualité de professionnel, de faire établir des mandats conformes aux dispositions dont elle ne pouvait ignorer ni l'existence ni le caractère d'ordre public.
Le mandat ayant pris fin dans des conditions mal déterminées, rien ne permet de dire que EURO DEPOT IMMOBILIER a caché la réalisation des opérations ; au demeurant SITCOM était parfaitement au courant de la vente intervenue le 7 juillet 2005.
La fraude de la société EURO DEPOT IMMOBILIER n'est pas établie.
Enfin, la bonne foi, -si tant est qu'elle soit démontrée- ne peut être opposée à la règle d'ordre public.
- Sur la demande de dommages-intérêts formée par EURO DEPOT IMMOBILIER
EURO DEPOT IMMOBILIER a demandé le remboursement de la somme de 38.163,88 € TTC en raison de l'irrégularité des mandats postérieurs à celui du 5 mars 2002, et sur le fondement de la répétition de l'indu.
Cette somme de 38.163,88 € est constituée de deux factures payées par EURO DEPOT IMMOBILIER à SITCOM :
- 16.664 € hors taxes qui se présente comme un honoraire de transaction sur une location à la société Steeve des parcelles [Cadastre 3], [Cadastre 3] et [Cadastre 2]. Cette somme n'a jamais été contestée ; son lien avec les mandats irréguliers n'est pas établi. De plus, ce paiement a sa cause dans une convention de délégation d'honoraires et un accord intervenu entre les deux mandataires des parties à la vente.
- 15.245 € hors taxes qui représentent la moitié de la somme de 30.490 € hors taxes versée non pas à SITCOM mais au mandataire de la société STEEVE; la rétrocession de la moitié de cette somme à SITCOM résulte d'un accord passé entre les deux mandataires.
Il n'y a donc pas lieu d'ordonner la restitution de ces deux sommes. EURO DEPOT IMMOBILIER sera déboutée de sa demande.
- Sur les frais irrépétibles
Il est inéquitable de laisser à la charge de SITCOM les frais non compris dans les dépens de l'instance.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant en audience publique, par décision contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 28 février 2007,
Et, statuant à nouveau,
Constate l'irrégularité des 'mandats' du 31 juillet 2002 et du 19 novembre 2002 (249),
Condamne EURO DEPOT IMMOBILIER à payer à SITCOM la somme de 66.000 € outre le montant de la TVA et les intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2005, jusqu'au paiement intervenu dans le cadre de l'exécution provisoire, en deniers ou quittances compte tenu des versements effectués à ce titre,
Dit que le présent arrêt tiendra lieu, le cas échéant de titre pour le recouvrement du trop perçu,
Déboute les parties de leurs demandes en dommages-intérêts,
Y ajoutant,
Condamne EURO DEPOT IMMOBILIER à payer à SITCOM la somme de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne EURO DEPOT IMMOBILIER aux dépens d'appel et autorise leur recouvrement dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,