COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 00A
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 07 OCTOBRE 2014
R.G. N° 13/05235
AFFAIRE :
[J] [O]
C/
[S] [Q]
...
Décision déférée à la cour : Arrêt rendu(e) le 03 Juillet 2013 par le Cour d'Appel de PARIS
N° Chambre : 4
N° Section : 4
N° RG : 13/0365
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Franck LAFON
Me Véronique BUQUET-ROUSSEL VERSAILLES,
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE SEPT OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [J] [O]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20130360
assisté de Me Vincent CANU, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0869
APPELANT
****************
Monsieur [S] [Q]
né le [Date naissance 2] 1915 à [Localité 2] (ALLEMAGNE)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 42113
assisté de Me Serge BEYNET de la SELURL SERGE BEYNET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0482 -
Madame [B] [I] épouse [Q]
née le [Date naissance 1] 1927 à [Localité 3]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 42113
assistée de Me Serge BEYNET de la SELURL SERGE BEYNET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0482 -
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Juin 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant M. Serge PORTELLI, Président chargé du rapport et Madame Sylvie FETIZON, conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Serge PORTELLI, Président,
Madame Sylvie FETIZON, Conseiller,
Madame Isabelle ORSINI, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre QUINCY,
FAITS ET PROCEDURE,
Le 13 octobre 1981, la société Selectpierre Lamblardie et la société d'assurances Abeille Paix-vie ont loué à M. et Mme [Q] un appartement au [Adresse 1]. Ce bien a été vendu par la société Margaux Développement à M. [O] le 28 septembre 2007.
Par acte d'huissier du 1er avril 2011, M. [O] a donné congé pour reprise personnelle à M. et Mme [Q] à effet au 14 novembre 2011.
Les locataires s'étant maintenus dans les lieux, M. [O] et Mme [M] ont saisi le tribunal d'instance de Paris 12ème. Ils sollicitaient en dernier lieu de :
- valider le congé et constater que, suite aux offres de relogement signifiées le 26 octobre 2011 et le 2 novembre 2011 le bail a pris fin le 15 novembre 2011 et que les défendeurs sont occupants sans droit ni titre,
- ordonner leur expulsion avec l'assistance de la force publique sous astreinte journalière de 150€ à défaut de libération des lieux dans le délai de 8 jours à compter de la signification de la décision et dire que le tribunal se réservera le contentieux de la liquidation de l'astreinte,
- condamner solidairement M. et Mme [Q] à payer à M. [O] une indemnité d'occupation égale au montant du loyer majoré de 50% augmenté des charges jusqu'à la libération effective des lieux,
- condamner M. et Mme [Q] à laisser M. [O] faire réaliser par les entreprises désignées par lui les travaux de sécurisation de l'installation électrique de l'appartement et ce, sous astreinte de 150€ par jour de refus après communication du calendrier des opérations au moins huit jours avant le début des travaux,
- condamner M. et Mme [Q] à justifier dans le délai de 15 jours à compter de la signification du jugement de la vérification des brûleurs de la gazinière et de la remise en état de marche de la ventilation mécanique contrôlée (VMC) sous astreinte de 150€ par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification du jugement,
- condamner solidairement M. et Mme [Q] à payer à M. [O] et Mme [M] une somme de 4.000€ à titre de dommages intérêts pour préjudice moral et 2.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner l'exécution provisoire.
Par conclusions en défense, M. et Mme [Q] ont formulé les demandes suivantes:
- constater l'irrecevabilité de la demande de Mme [M] qui n'est pas propriétaire, ni bailleresse,
- constater la nullité des congés indiquant notamment que les offres de relogement émises par le bailleur ne répondent pas aux conditions posées par l'article 15-III de la loi du 6 juillet 1989 applicables aux locataires âgés de plus de 70 ans, dont les ressources annuelles sont inférieures à une fois et demi le montant annuel du salaire minimum de croissance,
- débouter M. [O] du surplus de ses demandes et le condamner à leur payer la somme de 2.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 16 février 2012, le tribunal d'instance du 12ème arrondissement de Paris a :
- déclaré Mme [M] irrecevable en sa demande de dommages intérêts,
- déclaré nuls et de nul effet les congés signifiés par M. [O] à M. et Mme [Q] à effet au 14 novembre 2011,
- débouté M. [O] de sa demande en validation de congés ainsi que de ses demandes connexes d'expulsion, de fixation d'une indemnité d'occupation et de paiement de dommages intérêts,
- enjoint à M. et Mme [Q] de laisser libre accès au logement aux entreprises désignées par M. [O] afin de procéder aux travaux de sécurisation de l'installation électrique, après avoir eu communication du calendrier des opérations au moins huit jours avant le début des travaux,
- dit qu'à défaut de laisser cet accès, M. et Mme [Q] seront condamnés au paiement pendant une durée de trois mois d'une astreinte fixée à 40€ par jour de retard à compter de la première date d'intervention fixée,
- dit que le tribunal se réserve le contentieux de la liquidation de l'astreinte,
- condamné M. [O] à payer à M. et Mme [Q] la somme de 800€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- condamné M. [O] aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire.
Le 1er juin 2012, M. [O] a fait assigner M. et Mme [Q] en liquidation de l'astreinte et en augmentation du taux de l'astreinte. Il formulait devant le tribunal les demandes suivantes:
- liquider le taux de l'astreinte provisoire et le fixer à 200€ par jour de retard jusqu'à exécution des travaux,
- dire que le tribunal se réservera le droit de liquider l'astreinte et de statuer sur les difficultés d'exécution,
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- condamner solidairement les défendeurs à lui payer 4000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant le coût de la notification du 27 avril 2012 et celui du procès-verbal de constat du 14 mai 2012.
M. et Mme [Q], en réponse ont demandé au tribunal de :
- constater qu'ils avaient un motif valable pour s'opposer à la réalisation des travaux de rénovation souhaités par M. [O],
- débouter en conséquence M. [O] de ses demandes de liquidation d'astreinte provisoire et d'augmentation de son taux et de sa durée,
- subsidiairement, réduire à de plus justes proportions l'astreinte liquidée et la demande d'augmentation et ordonner une expertise afin de déterminer quels travaux sont nécessaires,
- condamner M. [O] à leur payer 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au dépens.
Par jugement contradictoire du 22 novembre 2012, le tribunal d'instance a :
- débouter M. [O] de l'intégralité de ses demandes,
- condamné M. [O] à payer à M. et Mme [Q] une somme de 800€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens de l'instance.
M. [O] a relevé appel du jugement. Dans ses dernières conclusions, il formule les demandes suivantes :
- réformer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
- dire et juger les travaux décrits devant le tribunal d'instance par M. [O] conforme aux travaux de remise en conformité de l'installation électrique en vue de la sécurisation des personnes tels qu'ordonnés par le jugement,
- liquider l'astreinte prononcée à 3.640€,
- fixer le montant de l'astreinte à 200€ par jour de retard à compter de la décision à intervenir jusqu'à l'exécution des travaux,
- dire que la cour présentement saisie se réservera tout contentieux ultérieur éventuel de l'astreinte,
- condamner solidairement M. et Mme [Q] à payer à M. [O] la somme de 10.000€ de dommages intérêts pour leur comportement fautif,
- condamner solidairement M. et Mme [Q] à payer à M. [O] une somme de 5.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
M. et Mme [Q], dans leurs dernières conclusions, formulent les demandes suivantes:
- confirmer le jugement,
- débouter M. [O] de sa demande de liquidation d'astreinte provisoire,
- subsidiairement, réduire à de plus justes proportions l'astreinte liquidée,
- plus subsidiairement, débouter M. [O] de sa demande d'augmentation du taux et de la durée de cette astreinte ainsi que de sa demande de dommages intérêts,
- condamner M. [O] à verser à M. et Mme [Q] une somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Buquet-Roussel, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS
Le tribunal a indiqué que le jugement qu'il avait précédemment rendu avait pour objectif de permettre la remise en conformité de l'installation électrique afin d'assurer la sécurisation des occupants de l'appartement. Au vu des travaux dont M. [O] demandait la réalisation, le tribunal a estimé qu'il s'agissait d'améliorer les lieux et non d'assurer la sécurisation exigée. Il a dès lors considéré que les locataires étaient bien fondés à s'opposer au trouble de jouissance qu'aurait généré la réalisation des travaux proposés par le bailleur. Il a en conséquence rejeté la demande de liquidation de l'astreinte.
M. [O], à titre principal, soutient que les conditions d'application de l'article L131-4 du code des procédures civiles d'exécution ne sont pas réunies, aucune cause étrangère pouvant justifier l'inexécution ou un retard dans l'exécution de l'injonction. Il fait valoir que le devis de la société STTB avait été visé par le premier jugement et servait de support aux travaux à exécuter. L'appelant affirme que le jugement du 22 novembre 2012 porte atteinte à l'autorité de la chose jugée et vide d'efficacité la mesure d'astreinte qui avait été prononcée. A titre subsidiaire, M. [O] soutient au visa de la loi du 12 juillet 1967 ou de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 que les époux [Q] sont forclos ou mal fondés à contester les travaux. Il fait valoir que les travaux de sécurité, d'équipement et de confort peuvent être exécutés par le propriétaire et que le locataire ne peut s'y opposer que pour un motif sérieux et légitime et qu'il doit saisir la juridiction compétente dans un délai de deux mois à compter de la réception de la notification qui lui a été faite par le propriétaire. Il soutient pareillement que les époux [Q] ne pouvaient s'opposer à des travaux de mise aux normes de sécurité urgente qu'en prouvant qu'il s'agissait de travaux abusifs et en saisissant le juge des référés.
L'appelant soutient par ailleurs au vu des pièces qu'il produit et dont il détaille le contenu qu'une sécurisation de l'installation électrique est impossible à un moindre coût et avec peu de travaux et qu'il n'est pas davantage possible de procéder à des travaux de sécurisation partielle. Il conteste les conclusions de l'expertise de M. [Z] produite par les intimés.
M. [O] demande enfin réparation en raison du comportement fautif des époux [Q] dans la mesure où ils se sont opposés de manière délibérée et abusive à l'exécution des travaux ordonnés.
Les intimés font valoir que, sur une demande de liquidation d'astreinte, le juge doit toujours vérifier que le débiteur a véritablement manqué à son obligation. Or, soutiennent-ils, alors que les travaux devaient tendre à une sécurisation de l'installation électrique, il s'agissait en réalité de travaux de rénovation. Ils produisent un rapport d'expert préconisant des travaux de sécurisation ne nécessitant pas une rénovation complète. Les intimés soulignent que la facture produite par M. [O] se monte à 24.448,79€ et que l'entreprise qu'ils ont contacté chiffre les travaux nécessaires à la somme de 2.654,88€.
La liquidation d'une astreinte suppose en tout premier lieu que la demande soit formulée suite à l'inexécution de l'injonction telle qu'elle a été formulée par le juge.
Il apparaît que le premier juge avait ordonné dans sa décision du 12 février 2012 qu'il soit procédé 'aux travaux de sécurisation de l'installation électrique, après avoir eu communication du calendrier des opérations au moins huit jours avant le début des travaux'.
Le calendrier des travaux a été signifié aux occupants et devait s'étaler sur une durée de cinq semaines du lundi au vendredi sur des plages horaires de 9H15 à 12H et de 14H15 à 18H. Le devis de la société STTB au vu duquel devaient être exécutés ces travaux se chiffrait à la somme de 24.448,79€. Il ressort de l'examen des différents documents produits par les parties et notamment des expertises versées aux débats, que les travaux visés dans le devis de la société STTB qui n'avaient pas été validés en tant que tels par le tribunal, dépassaient largement l'objectif qui avait été fixé dans le jugement. Comme l'a à juste titre estimé le tribunal dans le jugement attaqué, compte tenu de leur longueur et de leur durée, ces travaux constituaient une amélioration des lieux loués et non la remise en conformité destinée à assurer la sécurisation des personnes qu'il avait ordonnée. Il apparaît par ailleurs que M. et Mme [Q] ont produit de leur côté une facture d'une société ASE Technologie pour des travaux de mise en sécurité électrique d'un montant de 2.654,88€. Ils ont fait réaliser ces travaux à l'automne 2013 et produisent une attestation de conformité soumise à l'appréciation de l'association Consuel qui a accordé son visa le 4 mars 2014.
Il convient donc, pour cette seule raison que les travaux projetés par M. [O] ne correspondent pas à l'injonction du tribunal, de rejeter la demande de liquidation de l'astreinte sans qu'il y ait lieu d'examiner, au visa de l'article L131-4 du code des procédures civiles d'exécution, si l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction provient en tout ou partie d'une cause étrangère, ni de rechercher s'il peut résulter des travaux envisagés un trouble de jouissance pour les occupants.
Il apparaît par ailleurs que M. [O] a relevé appel du jugement du 16 février 2012 et que cette décision a été contestée par M. [O] dans la mesure où elle avait déclaré nul et de nul effet le congé délivré mais qu'elle a également été contestée par les époux [Q] dans ses dispositions relatives à l'exécution des travaux de sécurisation par la mise en conformité de l'installation électrique. Il ne peut donc être reproché aux époux [Q] d'avoir méconnu les dispositions législatives relatives résultant de la loi du 12 juillet 1967 ou de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, dès lors qu'ils inscrivaient leur contestation dans le cadre d'une procédure initiée par le bailleur et qui fait l'objet d'une autre instance. Il y a donc lieu de rejeter ce moyen soulevé par M. [O].
La demande d'indemnisation présentée par M. [O] en raison de l'opposition abusive et délibérée des époux [Q] sera donc rejetée au vu des précédents développements et du rejet de ses autres demandes.
Le jugement du 22 novembre 2012 ayant été intégralement confirmé sur le fond, il le sera également en ce qu'il a condamné M. [O] à payer à M. et Mme [Q] une somme de 800€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance.
M. [O] ayant succombé dans ses demandes en cause d'appel, les dépens exposés devant la cour seront à sa charge et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
S'agissant de la procédure d'appel, il apparaît équitable de condamner M. [O], tenu aux dépens, à payer, conformément à l'article 700 du code de procédure civile, à M. et Mme [Q], la somme de 2.000€ au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
- confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- rejette l'ensemble des demandes de M. [O],
- y ajoutant, condamne M. [O] à payer à M. et Mme [Q] la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne [O] aux dépens d'appel qui seront recouvrés par les avocats dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Serge PORTELLI, Président et par Madame QUINCY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,