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04/12/2014 | FRANCE | N°12/08277

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 04 décembre 2014, 12/08277


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 58E



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 04 DECEMBRE 2014



R.G. N° 12/08277





AFFAIRE :





SA ALLIANZ IARD



C/



Me [T] [D]

ès-qualités



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Novembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 4

N° RG : 08/05521





Expéditions exécutoiresr>
Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Hervé KEROUREDAN

Me Franck LAFON

Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS

Me Alexis BARBIER de la SCP BARBIER-

FRENKIAN

Me Chantal QUITTOT-GENDREAU

Me Jack NUZUM de la SCP RIBEYRE-NUZUM & N...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 58E

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 DECEMBRE 2014

R.G. N° 12/08277

AFFAIRE :

SA ALLIANZ IARD

C/

Me [T] [D]

ès-qualités

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Novembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 4

N° RG : 08/05521

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Hervé KEROUREDAN

Me Franck LAFON

Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS

Me Alexis BARBIER de la SCP BARBIER-

FRENKIAN

Me Chantal QUITTOT-GENDREAU

Me Jack NUZUM de la SCP RIBEYRE-NUZUM & NUZUM

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA ALLIANZ IARD

N° SIRET : 542 110 291

[Adresse 7]

[Localité 1]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Hervé KEROUREDAN, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 40

APPELANTE

****************

1/ Maître [T] [D], ès qualité de mandataire liquidateur de la Société JCJ, désigné en cette qualité par jugement du 18 novembre 2010 prononcé par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

[Adresse 3]

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20130144

Représentant : Me Fabienne FOURNIER-LATOURAILLE DUTREIL de la SELARL FOURNIER LA TOURAILLE ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 80

INTIME AU PRINCIPAL - APPELANT INCIDEMMENT

2/ SCI DU PONT DE COIGNIERES

N° SIRET : 332 899 178

ci-devant

[Adresse 5]

[Localité 4]

et actuellement

[Adresse 2]

[Localité 5]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20121054

Représentant : Me Jean LEGER de la SCP MOLAS LEGER CUSIN & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0159

INTIMEE AU PRINCIPAL - APPELANTE INCIDEMMENT

3/ SA COVEA RISKS

N° SIRET : 378 716 419

[Adresse 1]

[Localité 6]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Alexis BARBIER de la SCP BARBIER-FRENKIAN, Postulant, avocat au barreau du VAL D'OISE, vestiaire : 102 - N° du dossier 3141

Représentant : Me Alain BARBIER de la SCP BARBIER-FRENKIAN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J042

INTIMEE

4/ SAS FIDELITE FILMS

N° SIRET : 480 039 718

[Adresse 6]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Chantal QUITTOT-GENDREAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 170 - N° du dossier 213042

Représentant : Me Régis DEXANT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1268

INTIMEE

5/ Société d'assurances mutuelles AREAS DOMMAGES

N° SIRET : 775 670 466

[Adresse 4]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Jack NUZUM de la SCP RIBEYRE-NUZUM & NUZUM, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 187 N° du dossier 201310

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Octobre 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Annick DE MARTEL, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique BOISSELET, Président,

Madame Annick DE MARTEL, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,

La société ALLIANZ IARD est appelante d'un jugement rendu le 8 novembre 2012 par le tribunal de grande instance de Versailles, dans un litige l'opposant à M. [D] -en qualité de mandataire liquidateur de la société JCJ- et aux sociétés du PONT DE COIGNIERES, COVEA RISKS, FIDELITE FILMS et AREAS DOMMAGES.

*

La société JCJ est titulaire, depuis le 1er juillet 1995, d'un bail commercial sur divers locaux appartenant à la SCI DU PONT DE COIGNIERES assurée par AGF (devenue ALLIANZ ). Ces locaux sont exploités en vue d'exercer une activité de restauration et d'animation ; ils comportent, outre la salle de restaurant, une piste de danse, une cuisine, un espace pub et des locaux annexes. La société JCJ a souscrit auprès de la société COVEA RISKS une assurance garantissant sa responsabilité professionnelle ainsi qu'une assurance dommage.

Par convention du 19 mai 2006, la société JCJ a concédé sans autorisation de son bailleur, la disposition des lieux à une société de production, la société FIDELITE FILMS, pour un tournage réalisé du 22 mai au 13 juillet 2006, avec occupation exclusive du lundi matin au vendredi 19 heures. La société FIDELITE FILMS avait l'autorisation de réaliser tout aménagement nécessaire aux prises de vue pendant cette période.

Le 20 juin 2006, un incendie s'est déclaré vers quatre heures du matin, entraînant la destruction des deux locaux du premier étage, et des dommages importants contraignant le titulaire du bail à cesser son exploitation.

Par ordonnance du 5 février 2008, la compagnie AGF (devenue ALLIANZ), a été condamnée à payer à son assuré, la SCI du PONT DE COIGNIERES, la somme provisionnelle de 88.787 € à valoir sur l'indemnité de réparation consécutive au sinistre incendie du 20 juin 2006.

A la demande de la société FIDELITE FILMS et de son assureur, AREAS ASSURANCES, et par ordonnance du 8 septembre 2006, un expert, M. [O], a été désigné. Celui-ci a déposé son rapport le 20 septembre 2007.

S'agissant de l'origine du feu, l'expert a considéré que l'examen des lieux sinistrés permettait de localiser le départ de l'incendie dans l'aire de stockage des poubelles.

S'agissant de sa cause, il relève que l'analyse des débris carbonisés prélevés par les services de police dans l'aire de stockage des poubelles n'a pas mis en évidence la présence d'un liquide inflammable et qu'en l'absence de source potentielle d'inflammation dans la zone de départ du feu, l'incendie n'avait pu être provoqué que par une imprudence de fumeur ou plus probablement, par un acte de malveillance.

Aucun accord n'a pu intervenir pour l'indemnisation des dommages.

*

Le propriétaire des lieux sinistrés, la société DU PONT DE COIGNIERES, a fait assigner son assureur, AGF, au titre de la garantie multirisques des propriétaires non-occupants, ainsi que les sociétés JCJ, COVEA RISKS, FIDELITE FILMS, AREAS ASSURANCES et GERLING FRANCE, au visa des articles 1733 et 1735 du code civil, aux fins de les condamner in solidum à réparer les préjudices nés de l'incendie des locaux.

La société GERLING FRANCE n'est pas, de fait, concernée par le litige.

La société JCJ étant désormais en liquidation judiciaire, Maître [D], son liquidateur judiciaire, a été attrait à la procédure.

***

Par jugement du 8 novembre 2012, le tribunal a condamné la société ALLIANZ à payer à la SCI DU PONT DE COIGNIERES la somme de 329.649 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement, déduction étant faite de la provision versée à hauteur de 88.787 €,

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes ou appels en garantie ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

Les premiers juges ont considéré que,

- l'incendie s'étant déclaré en pleine nuit, alors que l'établissement était fermé, qu'aucune présence d'un préposé de l'une des sociétés en cause n'a pu être observée sur les lieux, aucune faute d'imprudence ou de négligence constatée à l'égard de quiconque, l'hypothèse d'un incendie volontaire ne peut être caractérisée. L'incendie est dû au fait d'un tiers.

- sur le fondement de l'article 1733 du code civil, la responsabilité de la société JCJ n'est pas engagée dans la mesure où l'origine du sinistre, attribuée à une intervention humaine, extérieure, imprévisible et irrésistible, avait le caractère d'un cas forfuit.

- le principe de la responsabilité de la société JCJ ayant été écarté, l'action récursoire de son liquidateur judiciaire contre la société COVEA RISKS est sans objet.

- Il en est de même à l'égard de l'action de la société de la SCI DU PONT DE COIGNIERES, l'article 1733 du code civil ne s'appliquant pas dans les rapports entre le propriétaire et le sous-occupant.

- le propriétaire ne peut être indemnisé de la perte de loyers que pour la période de remise en état des lieux.

- Maître [D] ne peut être garanti par la société COVEA RISKS de la perte de son fonds de commerce ; il ne justifie pas des conditions d'une telle garantie.

La compagnie ALLIANZ IARD a interjeté appel de la décision.

La SCI DU PONT DE COIGNIERES et Me [D] ont formé un appel incident.

Dans ses dernières conclusions visées le 11 mars 2013, la compagnie ALLIANZ IARD demande à la Cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

- de déclarer la société FIDELITE FILMS seule responsable de l'incendie survenu le 20 juin 2006 dans les locaux dont elle avait la jouissance exclusive,

- fixer le montant des dommages à la somme de 418.436 €,

- la déclarer recevable et fondée quant à l'application d'une règle proportionnelle en raison de la déclaration inexacte du risque lors de la souscription de la police tant sur la surface réellement exploitée des locaux que sur l'activité de discothèque non déclarée et fixer en conséquence le montant de l'indemnité due par la compagnie ALLIANZ à son assurée, la SCI DU PONT DE COIGNIERES à la somme de 12.553,08 €,

- condamner la SCI DU PONT DE COIGNIERES à lui restituer le montant des sommes trop perçues,

- débouter la SCI DU PONT DE COIGNIERES de plus amples demandes,

- condamner la société FIDELITE FILM, in solidum avec son assureur, AREAS ASSURANCES, à la garantir de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre.

Elle soutient que les circonstances permettent de considérer qu'un feu d'origine électrique comme évoqué dans la note technique du cabinet SUPPORT est la cause la plus vraisemblable alors que, les locaux étant inaccessibles, il ne peut s'agir d'un acte de malveillance. La société FIDELITE FILMS, seule occupante des lieux, doit être tenue pour responsable en ce qu'elle ne rapporte pas la preuve d'une cause étrangère.

Dans ses dernières conclusions visées le 12 septembre 2013, la SCI DU PONT DE COIGNIERES demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la garantie de la société ALLIANZ,

- infirmer le jugement quant au quantum des sommes dues par la société ALLIANZ à son égard,

- infirmer le jugement pour le surplus,

* A titre principal :

- fixer sa créance sur la société JCJ, et condamner in solidum la compagnie ALLIANZ, les sociétés COVEA RISKS, FIDELITE FILMS et AREAS ASSURANCES, à lui payer à titre d'indemnité pour les dommages matériels :

* travaux de reconstruction..................................291.624,78 €

* à ajouter reprise de plafonds...............................14.893,00 €

* à ajouter réhabilitation 1er étage.........................40.000,00 €

* électricité.............................................................82.496,49 €

* chauffage climatisation ventilation.....................94.186,03 €

* toiture..................................................................45.471,50 €

* extérieur..............................................................36.760,42 €

* réseaux..................................................................5.176,24 €

* mobilier...............................................................10.000,00 €

Sous total.............................................620.608,46 €

Au titre des dommages immatériels :

1. frais et honoraires...............................................90.751,32 €

2 . perte de loyers....................................................42.126,00 €

3. privation de jouissance......................................58.176,00 €

Sous total.............................................191.053,32 €

Total général......................................811.661,78 €

- dire et juger que les sommes dont s'agit sont productives d'intérêts au taux légal à compter de l'assignation en référé provision du 16 novembre 2007,

* A titre subsidiaire :

- fixer sa créance sur la société JCJ, et condamner in solidum la compagnie ALLIANZ, la société COVEA RISKS, la société FIDELITE FILMS et la société AREAS ASSURANCES à lui payer la somme de 412.010,55 € à titre de provision à valoir sur les indemnités qui lui sont dues en suite de l'incendie survenu dans la nuit du 20 juin 2006,

- désigner tel expert avec pour mission de déterminer la cause et l'importance des désordres invoqués,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Elle soutient que l'abattement pratiqué par la compagnie ALLIANZ à concurrence de 70 % des indemnités à revenir à son assuré est totalement injustifié.

- la société JCJ ne rapporte pas la preuve que le sinistre serait dû à un cas fortuit ou de force majeure. Sa responsabilité ne saurait donc être exclue de ce chef.

- l'assureur de la société JCJ ne saurait prétendre que son assurée n'a commis aucune imprudence ou négligence alors qu'elle a enfreint les dispositions contractuelles en louant les locaux en contradiction avec le bail, et qu'elle a autorisé des manipulations électriques qui ont pu être à la source de l'incendie.

Dans ses dernières conclusions visées le 3 mai 2013, la société FIDELITE FILMS demande à la Cour de lui donner acte du fait qu'elle entend faire siennes, dans leur intégralité, les écritures de la société AREAS DOMMAGES, son assureur.

Dans ses dernières conclusions visées le 5 novembre 2013, Me [D] demande à la Cour de dire que l'occupation des lieux par la société FIDELITE FILMS constitue un cas fortuit exonératoire de responsabilité pour la société JCJ,

- dire la compagnie ALLIANZ et la SCI DU PONT DE COIGNIERES mal fondées en leur appel et les en débouter,

- dire que toute mise en cause de la responsabilité de la société JCJ ne pourra donner lieu qu'à une fixation de créance au passif dans la limite des sommes déclarées entre les mains de Me [D] en sa qualité,

- le recevoir, en sa qualité de liquidateur judiciaire, en son appel incident,

- infirmer le jugement,

- condamner la compagnie COVEA RISKS au paiement de la somme de 143.107 € au titre de l'indemnisation de la perte du matériel de cuisine détruit dans l'incendie du 20 juin 2006,

- dire que la société FIDELITE FILMS doit être tenue pour responsable de l'incendie,

- en conséquence, condamner solidairement la société FIDELITE FILMS et son assureur, AREAS, à garantir toutes conséquences pécuniaires du fait de la mise en cause de la responsabilité de la société JCJ dans l'incendie du 20 juin 2006,

- condamner le sociétés FIDELITE FILMS et AREAS à réparer les préjudices nés de cet incendie et donc au paiement des sommes suivantes :

* 143.107 € au titre du préjudice né de la perte du matériel de cuisine détruit dans l'incendie du 20 juin 2006 ;

* 1,2 millions d'euros au titre de l'indemnisation de perte de fonds consécutivement à l'incendie.

Il soutient que la société FIDELITE FILMS était contractuellement tenue de restituer les lieux dans l'état dans lequel elle en avait pris possession et à faire les travaux rendus nécessaires par les dégradations dues à la production et de manière générale à remédier à toute conséquence de sinistre survenu au cours de la période de mise à disposition. Ce constat ne peut conduire qu'à mettre hors de cause la société JCJ qui n'a pas conservé le contrôle sur la chose louée.

- la responsabilité de la société JCJ peut être écartée du fait de l'action de la société FIDELITE FILMS qui a mis en place des nombreuse connexions électriques de mauvaise qualité. Cette intervention de la société FIDELITE FILMS, extérieure à la société JCJ, présente les caractères d'irrésistibilité et d'imprévisibilité constitutifs d'un cas fortuit.

- la responsabilité contractuelle de la société FIDELITE FILMS peut également être recherchée sur le fondement de l'article 1147 du code civil à raison de l'inexécution par cette dernière de l'obligation de restituer les lieux dans l'état où elle les avait pris.

Dans ses dernières conclusions visées le 21 mai 2013, la société COVEA RISKS demande à la Cour de dire sans objet l'appel dirigé par la société ALLIANZ IARD à son encontre à défaut d'une quelconque demande dirigée contre elle,

- sur les appels incidents, elle sollicite la confirmation du jugement en ce que le tribunal a débouté la SCI DU PONT DE COIGNIERES et Me [D] de leurs demandes dirigées contre elle,

- infiniment subsidiairement :

- dire et juger que la garantie de la société COVEA RISKS sera soumise à l'application de la règle proportionnelle de 581,21/618,18èmes,

- condamner les sociétés FIDELITES FILMS et AREAS à la relever et la garantir intégralement de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit de la SCI DU PONT DE COIGNIERES ou de Me [D], es qualité.

Elle soutient qu'il est suffisamment établi que l'incendie est dû au fait d'un tiers, intentionnel ou non, que ni la société JCJ ni la société FIDELITE FILMS ne pouvaient prévoir ou empêcher. L'acte de malveillance est bien la seule cause possible du sinistre.

- la responsabilité de la société FIDELITE FILMS étant une responsabilité sans faute, celle-ci est engagée du seul fait de la réalisation du sinistre pendant la période de mise à disposition exclusive des locaux.

- au titre de l'article 1733 du code civil, toute condamnation prononcée à l'encontre de la société JCJ entraînerait sur le même fondement la responsabilité de la société FIDELITE FILMS au profit de la première, la dispositions visée étant applicable dans les rapports locataires / sous locataire.

Dans ses dernières conclusions visées le 12 septembre 2013, la société AREAS DOMMAGES demande à la Cour de débouter les appelants des prétentions qu'ils forment à son encontre et à l'encontre de son assuré, la société FIDELITE FILMS ; elle sollicite leur condamnation solidaire au paiement d'une indemnité de procédure.

- confirmer pour le surplus la décision déférée,

- A titre subsidiaire :

- réduire à de plus justes proportions le montant des indemnisations et dire et juger qu'elle ne saurait être tenue de payer les sommes de 107.282 € et 1.609 € H.T. dues par la société ALLIANZ à la SCI DU PONT DE COIGNIERES au titre des clauses de valeur à neuf et frais d'expert de sa police d'assurance,

- dire et juger que la société AREAS DOMMAGES ne saurait être tenue de régler plus de 1.524,49 €, soit le plafond de garantie fixé par la police d'assurance de la société FIDELITE FILMS,

- dire et juger que la franchise de 762 €, stipulée à cette police d'assurance, viendra en déduction des condamnations éventuellement prononcées à son encontre.

Elle soutient qu'il est manifeste que la société FIDELITE FILMS ne pouvait raisonnablement prévoir ou empêcher la survenance du sinistre, indépendamment de la survenance d'un cas fortuit. C'est à juste titre que sa garantie n'a pu être mobilisée.

- les premiers juges ont exactement retenu que la SCI DU PONT DE COIGNIERES n'avait aucune action directe de nature personnelle à l'encontre de la société FIDELITE FILMS, étant tiers à la convention de mise à disposition et ne pouvant se prévaloir de l'article 1733 du code civil qui est impératif.

- la société JCJ engage sa responsabilité en étant l'auteur de mensonges constitutifs de dol en déclarant avoir reçu toutes les autorisations lui permettant de conclure la convention de mise à disposition.

- la société JCJ, ayant conservé en partie la jouissance de l'immeuble à la manière d'un locataire, les dispositions de l'article 1733 ne pouvaient être invoquées contre la société FIDELITE FILMS et contre son assureur.

- l'expertise exclut la responsabilité de la société FIDELITE FILMS, la faute de cette dernière n'est pas démontrée.

La cour renvoie aux conclusions signifiées par les parties, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS

- Sur les causes de l'incendie

Plusieurs expertises ont eu lieu : rapport prévisionnel de M. [V] (pour la société FIDELITE FILMS), rapport du cabinet [H] et [E] (la société AREAS DOMMAGES) qui exclut un départ du feu dans les poubelles et situe le départ de l'incendie au 1er étage ; rapport du cabinet Boniface (la société COVEA RISKS) qui considère que la cause du sinistre est indéterminée mais peut être en lien avec les branchements électriques réalisés par la société FIDELITE FILMS ; rapport du cabinet SUPPORT qui considère que le feu n'a pas pris dans les locaux mais exclut un feu de poubelles et privilégie une défaillance de l'installation électrique.

L'expert judiciaire, M. [O], situe pour sa part le point de départ de l'incendie dans l'aire de stockage des poubelles. L'attestation de M. [Z] et le témoignage de l'adjudant chef des Pompiers, M. [B], confirmeraient cette hypothèse. L'expert évoque 'une imprudence de fumer ou plus probablement...un acte de malveillance'.

Il résulte de ces conclusions expertales variées, que les causes exactes de l'incendie restent indéterminées et que le départ du feu ne peut être attribué ni à un acte volontaire émanant du personnel de l'une des sociétés occupantes, ni à une défaillance électrique, ni d'ailleurs à l'acte de malveillance d'un tiers.

- Sur la responsabilité de la société JCJ

Il résulte de l'article 1733 du code civil que le preneur répond de l'incendie à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou par force majeure ou par vice de construction, ou que le feu a été communiqué par une maison voisine.

Le fait que le bail interdisant à la société JCJ de sous-louer, celle-ci a commis une faute contractuelle en enfreignant cette interdiction, n'a pas de lien de causalité direct avec les dommages causés du fait de l'incendie.

Cependant, l'exonération de la société JCJ sur le fondement de l'article 1733 du code civil suppose qu'elle 'prouve' le cas fortuit ou la force majeure c'est à dire l'existence d'un événement irrésistible imprévisible et extérieur. Or les circonstances qui sont à l'origine du dommage ne peuvent être assimilées par leur seule indétermination à un cas fortuit ou une force majeure.

Il en résulte que la société JCJ ne s'exonère pas de sa responsabilité en invoquant les circonstances de l'incendie qui restent indéterminées et à l'état d'hypothèse plus ou moins probable selon les experts. La société JCJ ne 'prouve' pas le cas fortuit ou la force majeure et reste donc soumis à la présomption.

La responsabilité de la société JCJ doit être retenue.

- Sur la responsabilité de la société FIDELITE FILMS

Maître [D] fait valoir que la société JCJ n'avait pas le contrôle des lieux au moment de l'incendie et d'ailleurs durant toute la journée précédente, au cours de laquelle ont eu lieu des montages électriques divers pour les prises de vue, ce qui est exact.

Si elle n'avait pas la maîtrise des lieux dans la période précédent l'incendie, la société JCJ, sur laquelle pèse la présomption de l'article 1733 du code civil, est cependant en droit d'invoquer cette présomption à l'encontre de la société FIDELITE FILMS qui bénéficiait d'une convention d'occupation précaire et avait la pleine et exclusive maîtrise des lieux et installations sur de très larges périodes et particulièrement dans la période précédant l'incendie.

La société FIDELITE FILMS ne peut renverser cette présomption, pour les mêmes raisons que celles qui font obstacle à l'exonération de la société JCJ.

De plus, la société FIDELITE FILMS avait pris l'engagement clair et total de répondre 'des dégradations dues à la production et de manière générale de remédier à toutes conséquences de sinistre survenu au cours de la période de mise à disposition'. Cette responsabilité n'a pas vocation à exclure l'application de l'article 1733 du code civil à son encontre, résultant de sa maîtrise partielle des lieux.

Il ressort de ces éléments que la responsabilité de la société FIDELITE FILMS est engagée, in solidum avec celle de la société JCJ, laquelle, compte tenu de la procédure dont elle fait l'objet, ne peut être condamnée à paiement.

- Sur la garantie des assureurs

* Garantie par la société AREAS DOMMAGES de son assuré, la société FIDELITE FILMS

Pour rejeter sa garantie, la société AREAS DOMMAGES fait valoir que la société JCJ avait conservé la jouissance des lieux ce qui est inexact, particulièrement dans la période précédent l'incendie pendant laquelle la société FIDELITE FILMS en avait la jouissance exclusive. La société FIDELITE FILMS ne peut s'exonérer de la responsabilité pesant sur elle par application de l'article 1733 du code civil ; il n'y a donc pas lieu de prouver sa faute, ou d'ailleurs son absence de faute.

La société AREAS DOMMAGES doit donc garantie à son assuré, la société FIDELITE FILMS.

* Garantie par la société COVEA RISKS de son assuré, la société JCJ

En sa qualité d'assureur de la société JCJ, la société COVEA RISKS fait valoir que son assuré renverse la présomption de l'article 1733 du code civil en établissant l'acte d'un tiers présentant les caractères du cas fortuit ; à titre subsidiaire, elle sollicite la garantie de société FIDELITE FILMS et de son assureur.

La présomption de responsabilité n'étant pas renversée, il appartient à l'assureur de prendre en charge les désordres garantis par la police consentie à son assuré.

La société JCJ réclame à son assureur une somme de 143.107 € composée de deux devis adressés au propriétaire et une facture concernant, non pas la société JCJ mais une société Samou. Elle sera déboutée de sa demande non justifiée.

Par ailleurs, le contrat d'assurance ne couvre pas la perte du fonds de commerce au demeurant non établie.

* Sur l'appel de la société ALLIANZ IARD

La SCI DU PONT DE COIGNIERES a souscrit une assurance multirisques propriétaire non occupant auprès de AGF devenue la société ALLIANZ IARD qui ne conteste pas le principe de sa garantie mais considère qu'il doit être fait application d'une règle proportionnelle en raison des déclarations erronées de la SCI DU PONT DE COIGNIERES sur la surface assurée et sur la destination des lieux. La SCI DU PONT DE COIGNIERES conteste l'application de cette règle ; elle a obtenu du juge des référés une provision de 88.787 €.

Il n'est pas établi en effet qu'une activité de discothèque soit exercée dans les lieux loués et l'application de la règle proportionnelle est insuffisamment justifiée dans son mode de calcul non cohérent. Cette règle a en effet, selon l'assureur, pour effet de ramener l'indemnité de son assuré à la somme de 12.553,08 €.

La société ALLIANZ s'est fait remettre le bail consenti par la SCI DU PONT DE COIGNIERES à la société JCJ et disposait ainsi de tous éléments quant à l'activité de la société locataire. La société ALLIANZ sera déboutée de sa demande de réduction.

La somme de 418.436 € a fait l'objet d'un constat contradictoire, il appartenait à la SCI de soumettre l'intégralité des sommes demandées à l'examen de l'expert.

Il convient donc de confirmer le jugement qui a retenu cette somme, sans appliquer la règle proportionnelle proposée par la société ALLIANZ. De cette somme sera déduite la provision accordée à la SCI DU PONT DE COIGNIERES.

La société ALLIANZ sollicite la condamnation de la société FIDELITE FILMS et de son assureur, la société AREAS DOMMAGES, à la garantir des condamnations mises à sa charge. Elle ne forme pas de demande contre l'assureur de son locataire.

- Sur les condamnations

La SCI DU PONT DE COIGNIERES sollicite la fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société JCJ sur le fondement de l'article 1733 du code civil. Il n'est pas justifié par la SCI DU PONT DE COIGNIERES d'une déclaration de créance au passif de la société JCJ, si bien qu'elle doit être déboutée de sa demande.

La SCI DU PONT DE COIGNIERES sollicite la condamnation in solidum des sociétés ALLIANZ IARD, JCJ, COVEA RISKS, de la société FIDELITE FILMS et de la société AREAS au paiement de sa créance.

La société ALLIANZ IARD doit être condamnée à garantir son assuré pour les sommes qu'il a dû payer dans les limites fixées par le présent arrêt, confirmatif sur ce point.

La société JCJ et la société FIDELITE FILMS sont responsables de l'incendie et leurs assureurs doivent être condamnés à les garantir dans les limites fixées ci-dessus de la réparation du préjudice causé à la SCI DU PONT DE COIGNIERES.

La société JCJ ne peut être condamnée, eu égard à la procédure dont elle fait l'objet.

Il convient donc de condamner in solidum les sociétés ALLIANZ IARD, COVEA RISKS, FIDELITE FILMS, et AREAS DOMMAGES à payer à la SCI DU PONT DE COIGNIERES ou à la personne subrogée dans ses droits, la somme de 418.436 €, outre les intérêts au taux légal tels que prévus par le jugement et sous déduction de la provision versée par la société ALLIANZ à la SCI DU PONT DE COIGNIERES.

Les sociétés AREAS DOMMAGES et COVEA RISKS seront condamnées in solidum à garantir la société ALLIANZ de cette condamnation dont la charge finale sera partagée entre les sociétés AREAS DOMMAGES et COVEA RISKS.

- Sur les frais irrépétibles

Il est inéquitable de laisser à la charge de la SCI DU PONT DE COIGNIERES les frais non compris dans les dépens de l'instance. Les sociétés AREAS DOMMAGES et COVEA RISKS seront condamnées in solidum à payer à la SCI DU PONT DE COIGNIERES la somme de 20.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des autres parties, les frais exposés par elles et non compris dans les dépens de l'instance.

Les indemnités de procédure et les dépens seront supportés à parts égales par les sociétés AREAS DOMMAGES et COVEA RISKS qui devront garantir la société ALLIANZ IARD des frais de procédure, d'expertise mis à sa charge en première instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant en audience publique, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Versailles le 8 novembre 2012 sauf en ce qu'il condamne la société ALLIANZ IARD à garantir son assuré pour la somme de 329.649 € et condamne la société ALLIANZ IARD aux dépens et frais de procédure,

Et, statuant à nouveau,

Condamne in solidum les sociétés ALLIANZ IARD, COVEA RISKS, FIDELITE FILMS, et AREAS DOMMAGES à payer à la SCI DU PONT DE COIGNIERES la somme de 418.436 €, outre les intérêts au taux légal tels que prévus par le jugement et sous déduction de la provision versée par la société ALLIANZ IARD,

Déclare les sociétés JCJ et FIDELITE FILMS responsables des dommages causés du fait de l'incendie,

Condamne les sociétés COVEA RISKS et AREAS DOMMAGES à garantir leurs assurés, dans les termes fixés aux motifs du présent arrêt,

Condamne in solidum les sociétés COVEA RISKS et AREAS DOMMAGES à garantir la société ALLIANZ IARD des condamnations mises à sa charge du fait de l'incendie,

Y ajoutant,

Condamne in solidum les sociétés COVEA RISKS et AREAS DOMMAGES à payer à la SCI DU PONT DE COIGNIERES la somme de 20.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum les sociétés COVEA RISKS et AREAS DOMMAGES aux entiers dépens de l'instance d'appel et dit qu'elles devront garantir la société ALLIANZ des condamnations aux dépens et frais de procédure mis à sa charge par le jugement,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,

Dit que la charge finale de toutes ces condamnations sera partagée entre les sociétés COVEA RISKS et AREAS DOMMAGES à parts égales.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique BOISSELET, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 12/08277
Date de la décision : 04/12/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 03, arrêt n°12/08277 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-04;12.08277 ?
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