COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51A
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 17 FEVRIER 2015
R.G. N° 13/04504
AFFAIRE :
SA COOPERATION ET FAMILLE
C/
[S] [U]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Mai 2013 par le Tribunal d'Instance de POISSY
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 12-000458
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Vincent JARNOUX-DAVALON de l'ASSOCIATION ASSOCIATION JARNOUX-DAVALON & PIERRE
Me Dominique DOLSA
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX SEPT FEVRIER DEUX MILLE QUINZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SA COOPERATION ET FAMILLE
prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représentée par Me Vincent JARNOUX-DAVALON de l'ASSOCIATION ASSOCIATION JARNOUX-DAVALON & PIERRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 406 - N° du dossier 2013205
APPELANTE
****************
Monsieur [S] [U]
né le [Date naissance 1] 1936 à [Localité 7] (ALGERIE)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Adresse 3]
repésenté par Me Dominique DOLSA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 444
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/007976 du 20/09/2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Novembre 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant M. Serge PORTELLI, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Serge PORTELLI, Président,
Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,
Madame Anna MANES, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre QUINCY,
FAITS ET PROCÉDURE,
La société Coopération et Famille a donné à bail à Mme [C], par contrat du 27 octobre 1977 (entrée dans les lieux le 1er février 1970), un appartement type F4 situé [Localité 5].
Mme [C] est décédée le [Date décès 2] 2011.
Par lettre du 18 octobre 2011, M. [U], concubin notoire de la défunte vivant depuis au moins un an à la date du décès de Mme [C], a demandé le transfert du bail à son nom en application de l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989.
L'identité du requérant a été mise en cause par le bailleur. Par courrier du 3 novembre 2011, la société Coopération et Famille a demandé à M. [U], préalablement à toute étude du transfert du bail, de justifier de son identité et de sa nationalité conformément à l'article R 441-1 du code de la construction et de l'habitation.
Se prévalant du défaut de réponse satisfaisante, malgré l'intervention du Secours Catholique auprès de qui une solution de relogement a été recherchée, la société bailleresse a refusé de faire droit à la demande de transfert de bail et, par lettre du 19 mars 2012, a demandé la restitution du logement, précisant que le compte présentait à cette date un solde débiteur de 6.358,57€.
Elle faisait valoir que M. [U] ne s'acquittait des indemnités d'occupation que de manière irrégulière, des impayés étant apparus, la dette s'élevant alors à la somme de 6.358,57€, février 2012 inclus.
Par acte d'huissier du 17 avril 2012, la société Coopération et Famille a fait citer M. [U] devant le tribunal d'instance de Poissy en vue de le voir dire occupant sans droits ni titre et le condamner au paiement de la somme de 6.358,57€ à titre d'indemnité d'occupation.
Par jugement contradictoire du 21 mai 2013, le tribunal a :
- dit que le bail d'habitation du 27 octobre 1977 doit être transféré à M. [U], par application des articles 14 et 40 de la loi du 6 juillet 1989,
- débouté en conséquence la société Coopération et Famille de ses demandes,
- condamné le bailleur au paiement de la somme de 500€ par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
La société Coopération et Famille a interjeté appel de la décision. Dans ses dernières conclusions visées le 1er octobre 2014, elle demande à la Cour de
* infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant de nouveau,
* constater que le bail du 27 octobre 1977 de Mme [C] sur l'appartement situé à [Localité 5] s'est trouvé résilié du fait de son décès,
* constater que M. [U] ne peut bénéficier des dispositions de l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989 pour obtenir le transfert des droits au bail sans justifier de son identité et de sa nationalité ou de la régularité de son séjour sur le territoire français,
* en conséquence,
- dire que M. [U] est occupant sans droit ni titre,
- ordonner l'expulsion immédiate de M. [U] et tous occupants de son chef et ce, avec l'assistance du Commissaire de Police et de la force publique et d'un serrurier, s'il y a lieu,
- supprimer le bénéfice, au profit de M. [U], du délai de deux mois prévu à l'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution,
- ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde meuble qu'elle désignera ou tel autre lieu au choix du bailleur et ce, en garantie de toutes sommes qui pourront être dues, aux frais, risques et périls de M. [U],
- condamner M. [U] au paiement d'indemnités d'occupation dont les montants correspondront aux loyers actualisés, augmentés des charges, tels que Mme [C] les réglait au titre de son bail sur le local à usage d'habitation, outre une majoration de cette indemnité de 30 % à titre de dommages et intérêts et ce, jusqu'à parfaite libération des locaux par remise des clés, procès-verbal d'expulsion ou de reprise,
- condamner M. [U] à lui payer la somme de 23.103,67 € à la date du 26 septembre 2014, échéance d'août incluse,
- condamner M. [U] à lui payer la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que M. [U], s'étant toujours refusé de justifier de son identité, n'a produit aucun justificatif permettant d'établir qu'il remplit les conditions de l'article R 441-1 du code de la construction et de l'habitation. Faute d'une identité établie, affirme-t-elle, il ne peut séjourner sur le territoire français. L'appelante fait valoir que M. [U] a violé les règles d'attribution en ne restituant pas le logement de Mme [C] et en s'attribuant d'autorité un logement sans respecter les procédures d'attribution ni les listes d'attente. Cette attitude cause un préjudice à toutes les personnes respectueuses des textes légaux, en attente d'attribution d'un logement HLM. L'appelante soutient que M. [U] ne doit, par conséquent, pas bénéficier du délai de deux mois prévu par le Code des procédures civiles d'exécution. Le bail ayant été résilié du fait du décès de M. [C], la société Coopération et Famille demande de prononcer l'expulsion de l'intimé.
Dans ses dernières conclusions visées le 29 septembre 2014, M. [U] demande à la Cour de :
* le dire et juger recevable et bien fondé,
* à titre principal, confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions et, en conséquence,
- dire et juger que le bail d'habitation du 27 octobre 1977 lui a été transféré,
- débouter la société Coopération et Famille de l'intégralité de ses demandes,
- condamner la société Coopération et Famille à payer, en sus de l'article 700 du code de procédure civile accordé en première instance, une somme de 2.500€ en application du même article,
- condamner la société Coopération et Famille aux entiers dépens,
* à titre subsidiaire,
- débouter la société Coopération et Famille de sa demande de majoration de 30 % au titre de l'indemnité d'occupation faute de justifier d'un quelconque préjudice,
- débouter la société Coopération et Famille de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- statuer ce que de droit quant aux dépens.
Il soutient que, possédant une carte nationale d'identité délivrée le 28 mars 2011, il justifie de son identité. Son séjour ne peut dès lors être qualifié d'irrégulier et il est indifférent qu'il ait pu être condamné pour usurpation d'identité.
MOTIFS
Aux termes de l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989, lors du décès du locataire, le contrat de location est transféré au concubin notoire qui vivait avec lui depuis au moins un an à la date du décès.
Selon l'article 40 de cette même loi, l'article 14 précité est applicable aux logements appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré à condition que le bénéficiaire du transfert remplisse les conditions d'attribution et que le logement soit adapté à la taille du ménage mais ces deux conditions ne sont pas requises envers le concubin notoire.
Aux termes de l'article R441-1 du code de la construction et de l'habitation, les organismes d'habitations à loyer modéré attribuent les logements aux personnes physiques séjournant régulièrement sur le territoire français et justifiant de ressources n'excédant pas certaines limites.
En l'espèce, il n'est pas contesté, comme le rappelle le tribunal, que M. [U] était le concubin notoire de Mme [C] et qu'il vivait avec elle depuis au moins un an à la date de son décès au su du bailleur qui établissait les avis d'échéance de loyer à leurs deux noms.
Il apparaît que M. [U] possède une carte nationale d'identité qui lui a été délivrée le 28 mars 2011 par la Sous-Préfecture de [Localité 6].
Il importe peu dès lors que M. [U] ait pu être condamné pour usurpation d'identité à une peine d'un an d'emprisonnement et pour obtention indue de document administratif et usage à 3 mois d'emprisonnement par jugement du tribunal correctionnel de Nanterre du 19 juin 1987 et qu'une attribution judiciaire d'état civil lui ait été refusée par jugement du tribunal de grande instance de Versailles du 8 février 1989.
Il n'appartient pas à une société d'HLM de se substituer à l'autorité judiciaire ou administrative pour contester un titre de d'identité.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le bail d'habitation du 27 octobre 1977 doit être transféré à M. [U], par application des articles 14 et 40 de la loi du 6 juillet 1989.
S'agissant de la créance de la société Coopération et Famille, celle-ci demande au dernier état de ses conclusions la somme de 23.103,67€ à la date du 26 septembre 2014, échéance d'août incluse et demande que le montant de l'indemnité d'occupation soit augmenté de 30% à titre indemnitaire. Le bail devant être transféré à M. [U], les sommes dues par M. [U] le sont au titre du loyer et non d'une indemnité d'occupation. La cour ne peut modifier le fondement juridique de la demande de la société Coopération et Famille qui sera donc déboutée de ce chef. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Coopération et Famille de l'ensemble de ses demandes.
Le jugement ayant été confirmé sur le fond, il le sera également en ce qu'il a condamné le bailleur au paiement de la somme de 500€ par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
La société Coopération et Famille ayant été déboutée de ses demandes en appel, les dépens exposés devant la cour seront à sa charge.
S'agissant de la procédure d'appel, il apparaît équitable de condamner la société Coopération et Famille, tenue aux dépens, à payer, conformément à l'article 700 du code de procédure civile, à M. [U] la somme de 1.000€ au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
- confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- rejette l'ensemble des demandes de la société Coopération et Famille,
- y ajoutant, condamne la société Coopération et Famille à payer à M. [U] la somme de 1.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne la société Coopération et Famille aux dépens d'appel.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Serge PORTELLI, Président et par Mme Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,