COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4CC
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 12 MARS 2015
R.G. N° 14/02599
14/03274
AFFAIRE :
[C], [N], [S] [M]
...
C/
[I] [B] ES QUALITE DE LIQUIDATEUR JUDCIAIRE DES SOCIETES SIRIUS ET PBTH
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Mars 2014 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
N° chambre : 05
N° Section :
N° RG : 2014L00248
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 12.03.15
à :
Me Katell FERCHAUX
[O],
Me Fabienne FOURNIER
[V],
Me Claire RICARD,
Me Pierre GUTTIN,
TC VERSAILLES,
M.P
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE DOUZE MARS DEUX MILLE QUINZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
- Monsieur [C], [N], [S] [M]
né le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 6] (02)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
- Madame [A], [D] [D]
née le [Date naissance 1] 1970 à BERNAY (27300)
de nationalité Portugaise
[Adresse 5]
[Localité 5]
- SAS [A] Prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentés par Maître Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS, avocat postulantau barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629 - N° du dossier 20140114 et par le cabinet HYEST, avocats plaidants au barreau de PARIS
APPELANTS
****************
- Maître [I] [B] ES QUALITE DE LIQUIDATEUR JUDCIAIRE DES SOCIETES SIRIUS ET PBTH
[Adresse 2]
[Localité 3]
- Maître [W] [X] ES QUALITE D'AMINISTRATEUR ET COMMISSAIRE A L EXECUTION DU PLAN DES SOCIETES SIRIUS ET PBTH
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentés par Maître Fabienne FOURNIER-LATOURAILLE de la SELARL CABINET FOURNIER LA TOURAILLE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 506 - N° du dossier 12.837
- SAS PARIS BORDEAUX TOULOUSE HOTEL Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 3]
[Localité 4]
- SARL SIRIUS
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentées par Maître Claire RICARD, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2014337 et par Maître G.SARFATI, avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIMES
****************
SAS SOCIETE D'ETUDES PROMOTIONS ET REALISATIONS IMMOBI LIERES SEPRIM prise en la personne de son Président en exercice domicilié de droit en cette qualité audit siège
N° SIRET : 622 01 4 5 46
[Adresse 6]
[Localité 2]
Représenté(e) par Maître Pierre GUTTIN, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 14000409 et par Maître DUPRE de PUGET, avocat plaidant au barreau de PARIS
PARTIE INTERVENANTE
VISA DU MINISTERE PUBLIC LE : 29 AOÛT 2014
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Janvier 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne BEAUVOIS et Madame Annie VAISSETTE, conseillers chargés du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente,
Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller,
Madame Annie VAISSETTE, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,
La société Paris Bordeaux Toulouse hôtel (PBTH) exploitait un fonds de commerce d'hôtel restaurant [Établissement 1] sous l'enseigne 'Le relais de Courlande'. La société Sirius, holding de PBTH, a acquis l'ensemble des parts sociales de PBTH le 10 janvier 2007.
Par jugements du tribunal de commerce de Versailles du 2 juin 2009, les sociétés PBTH et Sirius ont été mises en redressement judiciaire , leurs plans de continuation ont été arrêtés le 11 janvier 2011 puis résolus par jugements du 7 janvier 2014 qui ont également prononcé leur liquidation judiciaire, Me [B] étant désigné liquidateur, avec autorisation de poursuivre l'activité de PBTH jusqu'au 7 avril 2014, la selarl AJ associés, en la personne de Me [X], étant désignée administrateur pour la poursuite d'activité.
Par jugement du 25 mars 2014, le tribunal de commerce de Versailles a :
-arrêté conformément aux dispositions de l'article L. 631-22 du code de commerce la cession du fonds de commerce de PBTH et de la société Sirius,
-ordonné la cession au profit de Mme [A] [D] et de M. [C] [M] ou toute société qu'ils voudraient substituer, aux conditions prévues dans l'offre de reprise initiale, complétée par les avenants adressés au mandataire judiciaire et les déclarations faites en chambre du conseil le 25 février 2014, à savoir :
pour la SAS P.B.T.H
- 100.000 € pour les éléments incorporels tels que décrits dans l'offre,
- 68.000 € pour les éléments corporels tels que décrits dans l'offre,
- 2.000 € pour le stock (valorisé de façon forfaitaire),
Pour la SARL Sirius
- 30.000 € pour l'immobilier,
Contrats repris : la liste des contrats repris est annexée à l'offre d'origine,
-dit qu'il appartient à Mme [D] et M. [M] de faire leur affaire personnelle de la solidarité au titre des loyers impayés du cessionnaire avec le cédant, clause stipulée dans le bail et portée à leur connaissance,
- fixé le prix total de cession hors frais, hors taxes à la somme de 200.000 € (paiement du prix de cession par chèque de banque le jour de l'entrée en jouissance),
-pris acte de la remise par le cessionnaire du paiement couvrant la totalité du prix,
-dit que le prix de cession a été versé entre les mains de l'administrateur judiciaire.
-pris acte que Mme [D] et M. [M] reprennent conformément à l'article L 642-12 alinéa 4 du Code de Commerce, les emprunts souscrits par PBTH dont le solde s'élève à 50.000 € et par Sirius dont le solde s'élève à 451.000 €,
-pris acte de l'engagement de Mme [D] et M. [M] de prendre à leur charge les travaux de mise aux normes « incendie » pour 200.000 €, les travaux de réfection de la toiture pour 400.000 €,
-pris acte de l'engagement de Mme [D] et M. [M] de rembourser le dépôt de garantie,
-ordonné le transfert de vingt-cinq contrats de travail conformément aux dispositions de l'article L642-1 du code de commerce selon la liste fournie par le candidat repreneur, avec prise en charge des congés payés et l'ensemble des droits acquis au jour de la cession,
-pris acte de l'indépendance du repreneur conformément aux dispositions de l'article L 642-3 du code de commerce,
-ordonné la levée de l'inscription d'inaliénabilité prise sur les fonds de commerce des sociétés P.B.T.H et Sirius suivant jugement du 11 janvier 2011,
-prononcé pour une durée de deux ans l'inaliénabilité du fonds de commerce de P.B.T.H
et de Sirius (pour celle-ci constitué d'un terrain à usage de parking non couvert et cadastré
Section ZA n° 63 La porte des Loges 00ha 10a 97ca),
-autorisé l'administrateur judiciaire à passer les actes nécessaires à la réalisation de la cession conformément aux dispositions de l'article L 642-8 du code de commerce ,
-maintenu Maître [W] [X], dans sa fonction de mandataire judiciaire avec les pouvoirs nécessaires à la mise en oeuvre de la cession jusqu'au dépôt au greffe du tribunal de son rapport sur l'accomplissement des actes de cession,
-dit que les frais de rédaction d'actes et de mutation seront à la charge du cessionnaire,
-désigné Mme [D] et M. [M] conjointement comme personnellement tenus à l'exécution de la cession,
-ordonné les mesures de publicité prescrites par le code de commerce,
-ordonné l'exécution provisoire du jugement nonobstant opposition ou appel .
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 4 avril 2014, M. [M], Mme [D] et la société [A] ont relevé appel de ce jugement et l'instance a été enregistrée sous le numéro RG 14/2599.
Autorisés par une ordonnance du 6 mai 2014, ils ont assigné à jour fixe devant la cour les sociétés PBTH, Sirius, Me [B] et Me [X], ès qualités, par actes des 13 et 14 mai suivant. Cette procédure a été enrôlée sous le numéro 14/3274.
Par dernières conclusions signifiées le 12 décembre 2014, M. [M], Mme [D] et la société [A] demandent à la cour de :
-vu les dispositions de l'article L.661-6 III du code de commerce , les déclarer recevables en leur appel,
-vu le bail commercial du 1er février 1995 prévoyant un engagement à consentir par le cessionnaire et vu les dispositions de l'article L.642-7 du code de commerce, déclarer Mme [D] et M. [M] bien fondés en leur appel,
-infirmer le jugement en ce qu'il a 'réputé écrite' la clause X alinéa 3 du bail commercial du 1er février 1995 disposant que le cessionnaire devra s'obliger solidairement avec le preneur au paiement des loyers et à l'exécution des conditions du bail et en ce qu'il a dit qu'il appartient à Mme [D] et M. [M] de faire leur affaire personnelle de la solidarité avec le cédant au titre des loyers impayés,
-'le' condamner aux dépens d'appel.
Ils font valoir en substance :
-qu'ils ont acquitté un prix de cession de 170 000 euros et ont en outre repris les droits à congés payés pour 50 000 euros, un prêt souscrit à la Société générale pour 50 000 euros, des travaux de remise aux normes pour 200 000 euros , la réfection de la toiture pour 400 000 euros et le remboursement du dépôt de garantie du bail commercial pour 90 000 euros , outre la reprise du terrain à usage de parking de la société Sirius pour 30 000 euros , soit un coût global d'acquisition de 1 441 000 euros, sans compter la reprise de l'ensemble des salariés,
-que postérieurement au dépôt de leur offre, ils ont appris l'existence d'un important contentieux entre la PBTH et son bailleur Seprim et la délivrance d'un commandement visant la clause résolutoire aux fins de réalisation de travaux de mise aux normes le 3 février 2014,
-que lors des débats en chambre du conseil le 25 février 2014, ils ont fait état d'une note du bailleur communiquée par Me [X] qui prétendait faire jouer la clause X alinéa III du bail selon laquelle 'le cessionnaire devra s'obliger solidairement avec le preneur au paiement des loyers et à l'exécution des conditions du bail',
-que le bailleur a déclaré entre les mains de Me [B] une créance de 610 124, 09 euros,
-qu'ils ont vainement sollicité du tribunal qu'il répute non écrite la clause précitée,
-que leur appel est recevable puisque le jugement arrêtant le plan de cession leur a imposé des charges non souscrites lors du dépôt de leur offre,
-que la reprise de la créance du bailleur ne pouvait faire partie du périmètre de la reprise puisqu'ils en ignoraient l'existence lorsqu'ils ont déposé leur offre,
-que la cession judiciaire des contrats nécessaires au maintien de l'activité n'emporte pas automatiquement transfert de toutes les clauses, plus particulièrement de celles qui interdisent ou limitent la cession du droit au bail qui doivent être considérés non écrites, comme les clauses d'agrément, d'incessibilité, de préférence ou de solidarité,
-que les clauses restrictives de cession doivent être neutralisées pour assurer les objectifs de maintien de l'emploi et de poursuite de l'activité,
-que l'article L. 641-12 du code de commerce visé par les premiers juges n'est pas applicable à la cession d'entreprise mais seulement à la cession d'actifs isolés, de sorte que son interprétation a contrario ne peut être suivie en l'espèce,
-que la clause X litigieuse est restrictive de cession car elle conditionne l'opposabilité de la cession du bail au bailleur à un engagement futur du cessionnaire auquel le jugement ne peut se substituer et finalement à l'approbation du bailleur,
-que la clause conduit en outre à permettre le paiement au profit du bailleur d'une dette antérieure à l'ouverture de la procédure collective ce que la loi prohibe et a également pour effet de bouleverser l'ordre des privilèges,
-que donner efficacité à une telle clause risque de conduire à des cessions d'entreprises en liquidation judiciaire au prix de un euro ou même à les faire échouer ce qui entraînerait alors le licenciement de tous les salariés,
-qu'en l'espèce, le montant susceptible d'être mis à la charge des cessionnaires correspond à deux fois et demie le prix de cession et à plus de deux fois la valeur du fonds de commerce , qu'il s'agit donc d'une charge excessive.
Les sociétés Sirirus et PBTH , par dernières conclusions du 12 décembre 2014, demandent à la cour de constater que l'article X, alinéa 3, du contrat de bail constitue une clause restrictive de cession et en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a réputé écrite cette clause. Elles développent des moyens et arguments largement similaires à ceux invoqués par les appelants principaux et soulignent que, dans le cadre de l'article L.642-7 du code de commerce, seul applicable en plan de cession, le tribunal a la possibilité de réputer non écrite toute clause limitant la cession , ajoutant encore que la clause litigieuse est générique et équivoque et ne peut que précipiter le repreneur au dépôt de bilan. Elles se réfèrent enfin au principe général selon lequel le tribunal ne peut subordonner la cession à l'obligation pour le repreneur de payer les dettes nées du chef du débiteur.
Me [B] et la selarl AJ associés, ès qualités, par conclusions du 22 juillet 2014, demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la cession et requièrent de la cour qu'elle se prononce sur la clause 10, alinéa 3, du bail commercial, le débouté des appelants de toutes autres demandes et la condamnation solidaire des appelants à leur payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils observent que la clause litigieuse, si elle devient de style à l'avenir, risque de paralyser les cessions.
La société Seprim, par dernières conclusions signifiées le 2 janvier 2015, demande à la cour de :
-déclarer l'appel irrecevable pour défaut d'intérêt à agir,
-débouter les appelants et les autres intimés de toutes leurs demandes,
-confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
subsidiairement,
-dire que la clause X cession du bail n'est pas restrictive de cession et la juger valable,
-débouter les appelants et les autres intimés de toutes leurs demandes,
en toute hypothèse,
-condamner solidairement Mme [D], M. [M], la société [A], Me [B] et la selarl AJ associés, ès qualités, les sociétés PBTH et Sirius à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
La société bailleresse soutient pour l'essentiel :
-qu'antérieurement à la liquidation judiciaire des sociétés PBTH et Sirius, du fait de leur expérience et de leur proximité avec les cédants, les consorts [D] [M] ont pu prendre connaissance de manière approfondie des éléments d'actif et de passif du fonds de commerce des sociétés PBTH et Sirius et des obligations contractuelles afférentes, de sorte qu'ils ont déposé leur offre de reprise en étant parfaitement informés,
-que l'offre librement déposée le 30 janvier 2014 est irrévocable à compter de son dépôt jusqu'au jugement arrêtant le plan et qu'elle sollicitait le transfert du bail commercial et ne formulait aucune réserve quant aux dispositions du contrat,
-que la dénonciation signifiée par Seprim à Me [X] ès qualités le 3 février 2014 rappelant les termes de l'article X du contrat de bail est dépourvue de conséquence puisque les repreneurs avaient déjà eu accès au contrat de bail,
-que le jugement déféré n'avait même pas à mentionner que les cessionnaires devaient faire leur affaire personnelle de la clause querellée et qu'ils ne peuvent se prévaloir d'aucune charge supplémentaire,
-que les clauses de garantie solidaire inversée ne sont pas restrictives de cession, que ces dernières doivent s'interpréter strictement,
-que sont applicables les articles L. 641-12, alinéa 4, du code de commerce et L. 642-7 du même code, de sorte que l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 27 septembre 2011 n° 1023539) constitue une référence pertinente,
-que la clause de solidarité litigieuse ne dresse nul obstacle à la cession du bail mais conduit seulement à renforcer les obligations du cessionnaire,
-qu'en demandant le transfert du bail à leur profit, les repreneurs ont librement accepté les obligations conventionnelles en résultant,
-que le candidat-repreneur doit accepter l'ensemble des clauses du contrat transféré ou refuser le transfert du contrat mais ne peut pas demander à la cour de réécrire les dispositions du bail qui lui seraient défavorables.
Le ministère public a conclu le 29 août 2014 pour s'en rapporter à justice.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DÉCISION
Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il y a lieu de joindre les instances numéros14/2599 et 14/3274 qui concernent l'appel du même jugement.
L'article L. 641-12 du code de commerce, relatif sort du bail des immeubles utilisés pour l'activité de l'entreprise en liquidation judiciaire, prévoit, pour ce qui intéresse le présent litige, que le liquidateur peut céder le bail dans les conditions prévues au contrat conclu avec le bailleur avec tous les droits et obligations qui s'y rattachent. En ce cas, toute clause imposant au cédant des dispositions solidaires avec le cessionnaire est réputée non écrite.
Selon l'article L.642-7, alinéa 3, du code de commerce, les contrats cédés par l'effet du jugement arrêtant le plan doivent être exécutés aux conditions en vigueur au jour de l'ouverture de la procédure, nonobstant toute clause contraire.
Il est établi et non discuté que le bail des locaux d'exploitation de PBTH a été cédé à Mme [D] et à M. [M] par l'effet du jugement déféré arrêtant le plan, conformément à l'offre de reprise qu'ils avaient déposée le 30 janvier 2014 et qui précisait que le doit au bail des locaux d'exploitation serait repris en indiquant en outre que la faible valorisation de cet élément du fonds de commerce s'expliquait par l'aléa judiciaire existant sur le renouvellement du bail et sur le montant des loyers, ainsi que par la prise en charge d'importants travaux de mise aux normes et de toiture incombant au preneur.
Le contrat de bail cédé avait été signé le 1er février 1995 et avait fait l'objet de 3 avenants, le dernier en date du 22 novembre 2005.
Son article X-cession stipule, en son alinéa 3 seul litigieux, que le cessionnaire devra s'obliger solidairement avec le preneur au paiement des loyers et à l'exécution des conditions du bail.
Les cessionnaires ont expressément admis, au cours de l'audience du tribunal du 25 février 2014, avoir eu communication du bail avant de déposer leur offre , comme le relate le jugement, et il leur appartenait d'en examiner les clauses et conditions avec précision puisqu'ils en prévoyaient la reprise. L'offre qu'ils ont déposée le 30 janvier 2014, pourtant détaillée sur les charges inhérentes à la cession du bail , particulièrement sur les travaux à effectuer et le dépôt de garantie, ne contient aucune allusion à la clause de solidarité précitée et ne formule aucune réserve à son sujet.
Mme [D] et M. [M] soutiennent avoir découvert l'intention du bailleur de se prévaloir de la clause de solidarité, de même que le montant des loyers arriérés par une note du bailleur du 14 février 2014 portée à leur connaissance par l'administrateur judiciaire.
Les déclarations de créances de la société Seprim entre les mains de Me [B], ès qualités, produites au dossier sont en dates des 19 février 2014 à concurrence de 807 093, 10 euros à titre privilégié et 17 mars 2014 pour 620 397 euros à titre chirographaire.
Par une lettre de leur conseil du 20 février 2014 adressée à l'administrateur judiciaire, puis au cours des débats devant le tribunal, Mme [D] et M. [M] ont maintenu leur offre, mais ont demandé que la clause de solidarité précitée soit réputée non écrite au regard des dispositions de l'article L.642-7 du code de commerce, en ce qu'elle empêcherait la cession judiciaire du bail et donc tout plan de cession de PBTH.
L'article L.642-2 V du code de commerce dispose que l'offre de reprise ne peut être ni modifiée, sauf dans un sens plus favorable aux objectifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 642-1, ni retirée et qu'elle lie son auteur jusqu'à la décision du tribunal arrêtant le plan.
A supposer, comme ils le soutiennent, qu'ils n'aient pas eu connaissance avant de déposer leur offre des sommes arriérées dues au bailleur par PBTH, il appartenait à Mme [D] et à M. [M] , eu égard à la clause de solidarité du cessionnaire avec le preneur résultant de l'article X du bail dont ils avaient connaissance, de se renseigner sur l'existence éventuelle d'obligations résultant du bail inexécutées par PBTH avant sa mise en liquidation judiciaire, auprès du cédant, des mandataires judiciaires ou du bailleur, ou à tout le moins d'émettre des réserves à ce sujet dans leur offre.
A défaut, puisqu'ils indiquaient reprendre le bail, et en application de l'article L. 642-7, alinéa 3, du code de commerce, ils sont tenus par les clauses du contrat repris, parmi lesquelles celle litigieuse.
Cette clause de solidarité du cessionnaire avec le preneur pour le paiement des loyers et l'exécution des conditions du bail, au titre de la période précédant la cession, est certes dérogatoire au principe suivant lequel le cessionnaire désigné par le plan de cession de l'entreprise n'est pas l'ayant cause à titre universel du débiteur et ne peut donc en principe être tenu du passif du débiteur antérieur à la cession, mais elle ne constitue néanmoins pas une clause restrictive de cession qu'il y aurait lieu de déclarer non écrite, comme contraire aux objectifs d'ordre public de la cession de l'entreprise tels que définis à l'article L.642-1 du code de commerce.
En effet, la solidarité litigieuse, si elle alourdit les charges financières du repreneur, ne crée pas d'obstacle juridique à la cession et ne donne au bailleur aucune possibilité de s'y opposer. Elle ne contrevient pas davantage à l'interdiction de payer les créances antérieures qui ne pèse que sur le débiteur et non sur un tiers, la même observation valant pour l'ordre des privilèges.
En outre, et surabondamment, eu égard à son insertion au sein du livre VI, titre IV, chapitre I intitulé 'du jugement de liquidation judiciaire', et à la généralité de ses termes, l'article L. 641-12 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 applicable en la cause, a vocation à régir toute cession du droit au bail, qu'elle soit incluse dans un plan de cession de l'entreprise arrêté par le tribunal ou ordonnée par le juge-commissaire en application de l'article L. 642-19.
En conséquence, dès lors que ce texte se borne à prévoir qu'en cas de cession du bail dans les conditions prévues au contrat conclu avec le bailleur avec tous les droits et obligations qui s'y rattachent, toute clause imposant au cédant des dispositions solidaires avec le cessionnaire est
réputée non écrite, il en résulte, conformément au principe général édicté par l'article L.642-7, alinéa 3, qu'est valable la clause prévoyant la solidarité du cessionnaire avec le preneur pour le paiement des loyers et l'exécution des conditions du bail, au titre de la période précédant la cession.
Ainsi, en l'absence de tout texte ou principe d'ordre public commandant de la réputer non écrite, la clause X litigieuse du bail que Mme [D] et M. [M] se sont irrévocablement engagés à reprendre leur est opposable.
Il en résulte qu'en refusant de déclarer non écrite la clause de solidarité critiquée par les cessionnaires et en disant qu'il leur appartenait de faire leur affaire personnelle de la solidarité au titre des loyers impayés du cessionnaire avec le cédant, le tribunal n'a pas imposé aux cessionnaires des charges autres que les engagements qu'ils avaient souscrits au cours de la préparation du plan de cession.
En conséquence, par application de l'article L. 661-6 III du code de commerce , leur appel est irrecevable.
Formé au-delà du délai de dix jours imparti pour interjeter appel du jugement, l'appel incident des sociétés PBTH et Sirus est également irrecevable par application des dispositions de l'article 550 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Ordonne la jonction des instances numéros14/2599 et 14/3274,
Déclare irrecevable l'appel formé par Mme [D] , M. [M] et la société [A],
Déclare irrecevable l'appel incident des sociétés PBTH et Sirius,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et rejette les demandes fondées sur ce texte,
Condamne solidairement Mme [D] , M. [M] et la société [A] aux dépens et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,La présidente,