COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 07 MAI 2015
R.G. N° 13/01538
MCP/CA
AFFAIRE :
[Q] [U]
C/
Association LE GROUPEMENT D'INTERET PUBLIC MISSION LOCALE DU DROUAIS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 05 Mars 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DREUX
N° RG : 12/00221
Copies exécutoires délivrées à :
la AARPI BEZARD GALY COUZINET CONDON
la SCP [P] - [G] - [X]
Copies certifiées conformes délivrées à :
[Q] [U]
Association LE GROUPEMENT D'INTERET PUBLIC MISSION LOCALE DU DROUAIS
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SEPT MAI DEUX MILLE QUINZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [Q] [U]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représenté par Me Déborah CONDON de l'AARPI BEZARD GALY COUZINET CONDON, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000002
APPELANT
****************
Association LE GROUPEMENT D'INTERET PUBLIC MISSION LOCALE DU DROUAIS
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Isabelle AIDAT ROUAULT de la SCP VERNAZ - AIDAT ROUAULT - GAILLARD, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000001
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame BOSI, Président et Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseillers chargés d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie BOSI, Président,
Monsieur Jean-Michel AUBAC, Conseiller,
Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
Vu le jugement du Conseil de prud'hommes de Dreux en date du 5 mars 2013 qui a :
- dit les parties recevables en leurs demandes
- dit que le licenciement de Monsieur [Q] [U] est fondé sur des fautes graves et en conséquence, a rejeté l'intégralité des prétentions formées par l'intéressé
- rejeté les demandes plus amples et contraires
- partagé les dépens,
Vu l'appel interjeté par Monsieur [U] par déclaration au greffe de la Cour le 22 mars 2013,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 11 mars 2015 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens de Monsieur [U] qui demande :
- l'infirmation du jugement déféré
- la condamnation du Groupement d'Intérêt Public Mission locale (ci-après GIP) à lui verser les sommes suivantes :
. 13276 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis
. 1327 € au titre des congés payés y afférents
. 26553 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement
. 110000 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
. 20000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral
. 5000 € à titre de dommages-intérêts pour absence d'information au titre du droit individuel à la formation
- sous astreinte de 100 € par jour de retard passé un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir la remise d'une attestation Pôle Emploi, d'un certificat de travail et de bulletins de salaire rectifiés selon l'arrêt
- la condamnation du GIP au versement de la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et sa condamnation aux dépens,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 11 mars 2015 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens du GIP qui demande :
- la confirmation du jugement déféré
- la condamnation de Monsieur [U] à verser au GIP la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts
- la condamnation de Monsieur [U] au versement de la somme de 3500 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en cause d'appel et à supporter les dépens,
LA COUR
Considérant que la Mission Locale du Drouais est un Groupement d'Intérêt Public dont l'objet est l'insertion sociale et professionnelle des jeunes de l'arrondissement de Dreux ; que par contrat à durée déterminée en date du 10 juin 1996, elle a embauché Monsieur [U] en qualité de Directeur jusqu'au 12 avril 1997 ; que par la suite, l'intéressé a été confirmé dans ses fonctions dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée ; que le 30 mars 2011, Monsieur [U] a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave ;
Sur les motifs du licenciement
Considérant que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et justifie la cessation immédiate du contrat de travail ; que la preuve de la faute grave incombe exclusivement à l'employeur et si un doute subsiste il doit profiter au salarié ;
Considérant que la lettre de licenciement adressée à l'appelant le 30 mars 2011 et qui fixe les limites du litige mentionnait quatre types de griefs :
- manquements au devoir de neutralité en qualité de délégataire d'une mission de service public
- détérioration du lien de confiance avec l'Etat
- management inapproprié à l'égard du personnel de la mission locale notamment féminin
- perte de confiance du conseil d'administration à l'égard du directeur ;
Considérant s'agissant des manquements au devoir de neutralité en qualité de délégataire d'une mission de service public que Monsieur [U] fait observer que ce grief était prescrit lorsqu'il lui a été imputé et en tout état de cause, il fait valoir que les faits examinés à ce propos ne constituent pas une faute ;
Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L 1332-4 du Code du travail qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ;
Considérant que l'appelant observe que les messages qui lui sont reprochés ont été adressés les 18 et 19 octobre 2010 soit plus de deux mois avant qu'ils ne soient évoqués par la lettre de licenciement du 30 mars 2011 et que, dès lors, ces faits sont prescrits ;
Considérant toutefois qu'il est établi que le GIP a eu connaissance des messages considérés par la lettre lui ayant été adressée le 7 février 2011 par le Directeur de l'unité territoriale d'Eure et Loir de telle sorte que la prescription des faits considérés n'était pas acquise le 30 mars suivant et il convient, ainsi, d'écarter le moyen d'irrecevabilité invoqué par l'appelant ;
Considérant sur les faits eux-mêmes que les messages électroniques incriminés portaient à la connaissance des destinataires des articles de presse et des informations obtenues en ligne portant sur la réforme des retraites accompagnées des commentaires suivants ' à transférer à tout votre carnet d'adresses pour l'édification des consciences malmenées par la propagande éhontée des membres du gouvernement et de leurs alliés... Retraite encore une couche C'est une couche en plus scandaleux mais malheureusement pas étonnant!!!!!!! Alors qu'ils ne cessent d'expliquer l'importance de réformer rapidement un régime de retraite en déficit, les parlementaires refusent donc d'être soumis au régime de retraite de la majorité des français. C'est ce qu'ils appellent une réforme 'juste' paraît-il. A faire suivre. Les français ont le droit de savoir... Allez un courriel pour vous mettre le moral à 0 ou vous donner l'énergie afin qu'en terme démocratique soit mis à ces 'immondes' injustices' ;
Considérant, à ce propos, que Monsieur [U] réfute toute idée de faute en soulignant qu'il évoquait un sujet d'intérêt général et ne procédait à aucune attaque contre son employeur ;
Considérant que cette argumentation est inopérante dès lors qu'il est manifeste que les commentaires opérés sont exempts de toute nuance et au surplus invitent les destinataires des messages à sortir de leur propre neutralité ce qui témoigne d'une volonté de convaincre en violation, en toute hypothèse, du droit de réserve ;
Considérant, au regard de ce qui précède, que la matérialité du manquement au devoir de neutralité est caractérisée et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs évoqués par le GIP ce manquement est constitutif d'une faute grave ayant rendu impossible le maintien de Monsieur [U] au sein de la mission locale ; que le jugement dont appel qui a retenu le bien fondé du licenciement pour faute grave et, en conséquence, a rejeté l'intégralité des demandes formées par Monsieur [U] doit être confirmé ;
Sur la demande de dommages-intérêts formée par le GIP
Considérant que le montant du préjudice en lien causal direct avec le comportement du salarié n'étant pas justifié, la demande de dommages-intérêts devait être rejetée ; que le jugement, de ce chef, doit être confirmé ;
Sur les dépens et l'indemnité de procédure
Considérant que Monsieur [U], qui succombe pour l'essentiel dans la présente instance, doit supporter les dépens et qu'il y a lieu de le débouter de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant qu'au regard de la situation respective des parties, il apparaît équitable de laisser à la charge du GIP Mission locale du Drouais les frais irrépétibles par lui exposés ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement du Conseil de prud'hommes de Dreux en date du 5 mars 2013 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Rejette les demandes formées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Monsieur [Q] [U] aux dépens,
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Mme Sylvie BOSI, président, et Mme Claudine AUBERT, greffier.
Le GREFFIERLe PRESIDENT