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18/06/2015 | FRANCE | N°13/01669

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 18 juin 2015, 13/01669


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80C



11e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 18 JUIN 2015



R.G. N° 13/01669



AFFAIRE :



[B] [D]





C/

SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILES









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Mars 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Versailles



N° RG : F12/00324





Copies exécutoir

es délivrées à :



Me Abdelaziz MIMOUN

la SELARL LEFOL ASSOCIES





Copies certifiées conformes délivrées à :



[B] [D]



SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILES







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX HUIT JUIN DEUX MILLE QUINZE,

La co...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 18 JUIN 2015

R.G. N° 13/01669

AFFAIRE :

[B] [D]

C/

SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Mars 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Versailles

N° RG : F12/00324

Copies exécutoires délivrées à :

Me Abdelaziz MIMOUN

la SELARL LEFOL ASSOCIES

Copies certifiées conformes délivrées à :

[B] [D]

SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT JUIN DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [B] [D]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 89

APPELANT

****************

SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Nicolas CAPILLON de la SELARL LEFOL ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1308

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 28 Janvier 2015, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Sylvie BOSI, Président,

Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

L'accord national professionnel de la métallurgie du 26 juillet 1999 relatif à la cessation d'activité des salariés âgés (CASA) est adossé au dispositif issu du décret n°2000-105 du 9 février 2000 relatif à la cessation d'activité de certains travailleurs salariés.

Suivant cet accord, sur la base du volontariat, le salarié d'une société figurant sur une liste et qui répond lui-même à des conditions d'éligibilité peut d'être dispensé de son activité professionnelle et bénéficier d'un départ en pré-retraite à compter de l'âge de 55 ans au moins. L'adhésion du salarié au dispositif CASA, entraîne la suspension de son contrat de travail. Il perçoit une allocation correspondant à 65% du salaire de référence pour la part n'excédant pas le plafond prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, auxquels s'ajoutent 50% du salaire de référence pour la part de ce salaire comprise entre une et deux fois ce même plafond. Cette allocation est versée par l'entreprise jusqu'au premier jour du mois qui suit son 57ème anniversaire puis ensuite par l'ASSEDIC. Par ailleurs, lors de son adhésion au dispositif CASA, le salarié reçoit un acompte correspondant au minimum à 60% de l'indemnité de mise à la retraite, déduction faite de tout acompte déjà versé au titre d'une future indemnité de départ. Lorsqu'il justifie du nombre de trimestres nécessaires validés par l'assurance vieillesse pour bénéficier d'une retraite à taux plein, l'employeur procède à sa 'mise à la retraite'.

Par avenant du 19 décembre 2003, certaines règles ont été modifiées. Ainsi, l'article 6.6 de l'accord CASA dans sa nouvelle rédaction exclut expressément l'obligation d'embauche dans le cadre de la sortie du dispositif par 'mise à la retraite'.

Par ailleurs, le décret du 9 février 2000 prévoit que pendant la durée de suspension du contrat de travail du salarié, l'entreprise lui assure le versement d'une allocation dont le montant minimum est déterminé par l'accord professionnel et qui cesse d'être versée lorsque, à partir de son soixantième anniversaire, le bénéficiaire remplit les conditions nécessaires à la validation de sa retraite à taux plein au sens de l'article R. 351-27 du code de la sécurité sociale ou de l'article R.351-45 du même code.

Le 18 mai 2000, l'Etat, l'entreprise Peugeot et l'Unedic ont signé une convention dite de 'cessation d'activité de certains travailleurs salariés' (CATS n°09900001) qui précise les règles applicables pour la mise en oeuvre du dispositif CASA.

*

En l'espèce, Monsieur [B] [D] a été engagé par la SA PEUGEOT CITROËN AUTOMOBILE (ci-après la société PCA) le 17 juillet 1972 par contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'ouvrier spécialisé.

L'entreprise compte plus de 10 salariés et est assujettie à la convention collective des industries métallurgiques (OETAM) de la région parisienne.

Le 1er novembre 2004, le salarié est entré dans le dispositif CASA ce qui lui a permis de partir en pré-retraite et de percevoir :

- à son adhésion, une somme représentant 90% de son indemnité de mise à la retraite,

- jusqu'à sa retraite, une allocation représentant 75% environ de son salaire net,

- au terme de son contrat de travail, le solde de son indemnité de mise à la retraite.

A compter du 20 juillet 2008, les modalités de calcul de l'indemnité légale de licenciement ayant été modifiées dans un sens plus favorable, la société a payé au salarié un complément sur son indemnité de mise à la retraite en application de l'article L. 1237-7 du code du travail.

Le salarié, qui s'est plaint des difficultés rencontrées pour obtenir la médaille d'honneur du travail et une prime liée à son attribution ainsi que de son indemnisation a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles de sa contestation.

Par jugement du 26 mars 2013, le conseil de prud'hommes a :

- dit que le travail réalisé par les salariés éligibles au dispositif CASA était un travail pénible,

- débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société PCA de sa demande reconventionnelle,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné le salarié aux dépens.

Le salarié a relevé appel de la décision par déclaration au greffe du 19 avril 2013.

*

Dans ses conclusions et conclusions additionnelles déposées et soutenues oralement à l'audience, le salarié, assisté de son avocat, demande à la cour de :

- dire qu'ayant adhéré au dispositif CASA, il a occupé des postes de travail pénibles,

- ordonner à la société PCA de lui remettre un certificat de travail portant la mention de ses postes, leurs coefficients, échelons, dates et pénibilité ainsi qu'un historique de carrière, et ce, dans les 15 jours de la notification de la décision à intervenir puis sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé ce délai,

- condamner la société PCA à lui verser les sommes suivantes :

* 3.000 euros à titre des dommages et intérêts pour retard dans le paiement de l'indemnité de mise à la retraite,

* 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information relatif aux droits à la retraite,

* 5.158,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 515,85 euros à titre de congés payés y afférents,

subsidiairement, à défaut de paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents, condamner la société PCA à lui verser ces deux sommes à titre de dommages et intérêts pour perte du droit à ces deux sommes,

- requalifier la mise à la retraite en licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société PCA à lui verser les sommes suivantes :

* 80.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

*17.255,32 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement ou subsidiairement de mise à la retraite,

* 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de formation professionnelle pendant 37 ans et 11 mois,

* 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

*

Dans ses dernières conclusions déposées et soutenues oralement, la société PCA, assistée de son avocat, demande à la cour de :

confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

en conséquence,

débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes,

le condamner à lui verser la somme de 1.500 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles de procédure.

*

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément aux dispositions prévues à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ainsi qu'aux prétentions orales telles qu'elles sont rappelées ci-dessous.

SUR CE,

1. Sur les demandes en lien avec la médaille du travail

Sur la pénibilité de l'emploi occupé

Considérant que le salarié indique qu'il sollicite une médaille d'honneur du travail à l'autorité administrative compétente pour décider de son attribution et qu'il lui est fait obligation de justifier du caractère pénible de toute sa carrière professionnelle ; que le certificat de travail portant mention du dernier poste qu'il a occupé n'est donc pas suffisant ;

Considérant que la société PCA réplique que la pénibilité découle de la seule adhésion au dispositif CASA ;

Considérant que le jugement retient avec pertinence que le caractère pénible du travail des salariés éligibles au dispositif CASA découle de l'article 4 de l'accord national professionnel du 26 juillet 1999 relatif à la cessation d'activité des salariés âgés, qui dispose que «chaque entreprise ou établissement concerné détermine, chaque année, après avis du comité central d'entreprise ou à défaut du comité d'entreprise, en fonction de l'emploi, les âges et catégories éligibles aux conditions fixées par le présent accord. Dans les catégories éligibles, une attention particulière sera portée aux salariés ayant travaillé dans des conditions spécifiques, telles que travail posté, travail continu ... ou rencontrant des difficultés particulières d'adaptation aux nouvelles technologies » ;

Qu'il résulte de la position commune des parties et des dispositions de l'article 4 précité que les bénéficiaires du régime CASA exécutaient leurs travaux dans des conditions pénibles ; que dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a reconnu la pénibilité ;

Sur la remise d'un certificat de travail faisant état du caractère pénible de chacun des postes occupés

Considérant qu'en application des articles L. 1234-19 et D. 1234-6 du code du travail, le certificat de travail contient exclusivement les mentions relatives à :

1° la date d'entrée du salarié et celle de sa sortie ;

2° la nature de l'emploi ou des emplois successivement occupés et les périodes pendant lesquelles ces emplois ont été tenus ;

Considérant en conséquence, que le salarié ne saurait obtenir un certificat de travail mentionnant la pénibilité de son emploi ; que sa demande n'est pas fondée en ce qu'elle tend à ajouter aux textes applicables une appréciation sur la pénibilité de chacun des postes occupés dans l'entreprise ; qu'elle sera rejetée ;

Sur la remise d'un historique de carrière

Considérant que le salarié se prévaut des dispositions de l'article 39-4 de la loi Informatique et Liberté du 6 janvier 1978 pour obtenir la remise d'un historique de sa carrière ;

Considérant qu'en application de l'article 5 de la convention précitée du 18 mai 2000, la société PCA doit tenir à la disposition du directeur départemental du travail de l'emploi et de la formation professionnelle outre le bulletin d'adhésion les justificatifs suivants :

- pour chaque salarié ayant adhéré au système CASA et percevant une prime ou une indemnité spécifique au travail en équipe, de nuit ou à la chaîne :

* soit un bulletin de paie par trimestre pour chaque année concernée sur 15 ans ;

* soit un listing informatique reprenant les mêmes informations ;

- pour chaque salarié bénéficiant de l'aide de l'État parce qu'il a travaillé à la chaîne sans qu'aucune prime ou indemnité spécifique ne figure sur son bulletin de salaire :

* un historique individuel de carrière comportant pour chaque année la classification et le métier de l'intéressé ainsi que le (ou les secteurs) où il a été affecté ;

Considérant que la société PCA affirme qu'elle n'est pas tenue d'établir un historique de carrière et que les primes versées au salarié figurent sur ses bulletins de salaire ;

Considérant que tous les bulletins de paie n'étant pas communiqués, cette affirmation ne peut être vérifiée ; qu'il sera ajouté au jugement entrepris, que l'employeur devra remettre au salarié ayant adhéré au système CASA, dans le trimestre suivant la notification du présent arrêt, soit l'historique individuel de sa carrière, soit à défaut un double de ses bulletins de paie mentionnant les primes ou indemnités spécifiques au travail en équipe, de nuit ou à la chaîne ou un relevé informatique reprenant les mêmes informations ;

Considérant que l'astreinte sollicitée n'est pas nécessaire ;

Sur la prime afférente à l'attribution de la médaille d'honneur du travail

Considérant que le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes y compris de sa demande en paiement par la société PCA de la prime liée à l'attribution de la médaille d'honneur du travail ;

Considérant que le salarié bien qu'ayant interjeté appel de l'ensemble des dispositions du jugement, n'a pas réitéré sa demande devant la cour ni critiqué cette disposition du jugement ;

Considérant en tout état de cause que la demande en paiement n'est pas quantifiée et que la réclamation est subordonnée à la réalisation d'une condition qui n'est pas réalisée à savoir la décision de l'autorité administrative d'attribuer au salarié la médaille d'honneur du travail ;

Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef ;

2. Sur l'indemnisation du retard de paiement de l'indemnité de mise à la retraite

Considérant que les règles de calcul de l'indemnité légale de licenciement telles que définies par les articles L. 1234-9 et R. 1234-2 du code du travail modifiés par la loi du 25 juin 2008 et le décret du 18 juillet 2008 ont conduit l'employeur à revoir le calcul de l'indemnité de mise à la retraite et à verser au salarié un complément ;

Considérant que le salarié réclame le paiement de la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts estimant que l'employeur lui a versé avec retard son indemnité de mise à la retraite ;

Considérant que conformément aux dispositions de l'article 1153 du code civil, le retard d'exécution des obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme d'argent, est réparé par la condamnation au paiement des intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement ; que ces intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte ; qu'ils courent à compter de la mise en demeure de payer ou à défaut de la demande en justice ;

Considérant qu'en l'espèce, le litige n'est pas de nature commerciale et ne relève pas davantage du cautionnement ;

Considérant par ailleurs que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant du retard de paiement, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ;

Considérant toutefois que le salarié ne justifie ni d'un préjudice indépendant du retard de paiement ni de la mauvaise foi de l'employeur ;

Qu'en conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts du chef du retard de paiement ;

3. Sur l'obligation de formation

Considérant que le salarié soutient pour la première fois en cause d'appel que la société PCA a manqué à l'obligation de formation qui lui incombe ;

Considérant que la société PCA fournit une fiche de synthèse des formations suivies dont il résulte que le salarié n'a bénéficié que d'un nombre dérisoire de formations au regard de son ancienneté ;

Considérant que l'employeur au travers de l'obligation de formation, qui pèse sur lui, doit veiller à l'employabilité et à l'adaptation du salarié aux évolutions de son poste peu important que ce dernier ne présente pas de demande de formation ;

Considérant que les formations organisées pendant toute la période d'emploi du salarié sont manifestement insuffisantes ; que par conséquent l'employeur a manqué à son obligation de formation ; que son abstention cause nécessairement un préjudice au salarié que la cour est en mesure d'évaluer à 7.200 euros au regard de son ancienneté ;

Que la condamnation de la société PCA au paiement de cette somme sera ajoutée au jugement entrepris ;

4. Sur la demande de requalification de la mise en retraite en licenciement

Sur la décision de mise à la retraite

Considérant qu'il convient de relever que ne constitue pas une mise à la retraite la rupture du contrat de travail d'un salarié qui, ayant adhéré à un dispositif conventionnel de cessation progressive d'activité, part à la retraite à l'issue de la période de pré-retraite définie par l'accord collectif ;

Qu'il importe peu à cet égard que l'accord prévoit le versement d'une indemnité de 'mise à la retraite' ; qu'il s'agit en réalité d'un départ en retraite ;

Qu'il s'ensuit que les griefs du salarié qui sont relatifs à la détermination de la personne ayant pris la décision de 'sa mise à la retraite', à l'absence de notification par lettre recommandée avec avis de réception de la décision de 'mise en retraite' et à l'absence de délai de préavis sont inopérants ;

Sur l'absence des 160 trimestres requis à la date de la rupture du contrat de travail

Considérant que l'accord national professionnel du 26 juillet 1999 modifié par son avenant du 19 décembre 2003 ne vise pas un nombre de trimestres précis ; qu'il suffit que le salarié ayant adhéré au régime CASA bénéficie du nombre de trimestres nécessaires validés par l'Assurance Vieillesse pour percevoir une retraite à taux plein à la date de fin de son contrat de travail ;

Qu'en conséquence le moyen tiré de l'absence de 160 trimestres est inopérant ;

Sur l'abattement subi lors de la liquidation de la retraite complémentaire

Considérant que, s'agissant des retraites complémentaires, il n'est pas prévu que la sortie du dispositif CASA soit subordonnée à l'absence d'abattement sur le montant de ces retraites ;

Qu'en outre, l'article 6.5 de la convention CASA du 26 juillet 1999 prévoit des taux de cotisation différents suivant l'âge des salariés ; que jusqu'au premier jour du mois suivant le 57ème anniversaire du salarié, l'employeur verse les cotisations ARRCO et AGIRC conformément à l'accord et sur la base des taux et systèmes en vigueur dans l'entreprise ; qu'au-delà, l'UNEDIC se substitue à l'employeur mais seulement sur la base des taux et systèmes de cotisations obligatoires ; qu'il est expressément prévu que les entreprises peuvent cotiser à des taux supplémentaires si un accord d'entreprise a été conclu ce qui n'est pas établi en l'espèce ;

Sur l'absence d'embauche pour compenser les départs en retraite

Considérant que l'obligation des embauches compensatrices ne figure pas dans l'accord CASA du 26 juillet 1999 lequel n'a pas été modifié par l'avenant du 19 décembre 2003 sur ce point ;

Considérant toutefois que l'examen des bilans sociaux montre que la société a embauché plus d'un salarié pour trois départs dans le régime CASA ; qu'en effet, l'effectif moyen mensuel est en augmentation sur la période 2001-2005 passant de 84 996 à 87 412 salariés ; que sur la même période, la société a embauché 53 809 personnes dont 22 381 personnes en contrat à durée indéterminée (CDI), soit 4 476 embauches en CDI en moyenne par an, étant précisé que les embauches en contrat autre qu'à durée indéterminée représentent environ pour la moitié des 'stagiaires vacances' ; qu'enfin les bilans sociaux font apparaître que la population des ouvriers âgés de 45 ans et plus est en diminution, puisqu'ils représentaient 24 098 personnes en 2001 et 21 393 personnes en 2005, soit une baisse de 11,2 % ; que l'analyse de l'ensemble des tableaux et chiffres communiqués démontre des embauches et un rajeunissement de l'effectif des ouvriers, contrairement à ce qu'affirme le salarié qui fait une analyse partielle des chiffres des bilans sociaux ;

Sur le caractère discriminatoire de la mise à la retraite avant l'âge légal

Considérant qu'aux termes de l'article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, des différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment de politique de l'emploi et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; que tel est le cas des dispositions subordonnant la mise à la retraite à la condition que le salarié bénéficie d'une retraite à taux plein et qu'une convention ou un accord collectif étendu conclu avant le 1er janvier 2008 fixe des contreparties en termes d'emploi ou de formation professionnelle ; que dès lors, ces dispositions de portée générale satisfont aux exigences de la directive ; qu'il ne peut être imposé à l'employeur de justifier de leur mise en oeuvre à l'égard d'un salarié qui remplit les conditions légales d'une mise à la retraite qui répond aux objectifs poursuivis ;

Considérant que le dispositif CASA est réservé à des salariés âgés de 55 ans et exerçant des fonctions dans des conditions pénibles ; qu'il s'adresse à une population fragilisée ;

Qu'il se révèle être également un outil de politique de l'emploi et de gestion de la pyramide des âges ; que l'objectif visé consiste à trouver une adéquation satisfaisante entre les aptitudes du personnel concerné - dont la moyenne d'âge est élevée - et l'évolution des postes dans un contexte concurrentiel ;

Qu'après avoir choisi d'adhérer au dispositif, le salarié a perçu un revenu pendant la période de suspension de son contrat de travail, et ce, jusqu'à ce qu'il perçoive sa retraite à taux plein;

Que parallèlement, l'employeur a procédé à des embauches ;

Considérant dès lors que la différence de traitement n'est pas discriminatoire ; que le départ en retraite du salarié ne peut être considéré comme un licenciement ;

Sur l'inégalité de traitement par rapport aux ingénieurs et cadres

Considérant que l'accord professionnel du 26 juillet 1999 relatif à la cessation d'activité de salariés âgés est national ; qu'il a été signé par l'Union des industries métallurgiques et minières et plusieurs organisations syndicales représentatives, investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leurs votes ; que les différences de traitement entre catégories sont présumées justifiées de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ;

Considérant que le salarié se contente de demander le bénéfice des dispositions de la catégorie des ingénieurs et cadres à laquelle il n'appartient pas pour obtenir un complément d'indemnité de mise à la retraite équivalent à l'indemnité conventionnelle de licenciement des ingénieurs et cadres ;

Que faute de démontrer une différence de traitement étrangère à une considération professionnelle, sa demande ne saurait prospérer ;

Sur les demandes en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés incidents ainsi que d'indemnisation de la perte d'une chance de percevoir ces sommes,

Considérant que la rupture du contrat de travail résultant du départ en retraite ne s'inscrit pas dans le cadre d'un licenciement ; que le salarié ne saurait prétendre ni à une indemnité compensatrice de préavis ni à fortiori à la perte d'une chance d'obtenir une telle indemnité ;

Sur le licenciement économique

Considérant que l'entrée du salarié dans le dispositif CASA est volontaire de sa part ;

Considérant que la circonstance que l'employeur ait proposé en concertation avec les partenaires sociaux un dispositif servant la politique de l'emploi, organisée dans un cadre légal et soumis à l'adhésion du salarié ne caractérise pas un détournement des règles du licenciement pour motif économique ;

*

Considérant en conséquence au vu de l'ensemble de ces éléments, qu'il n'y a pas lieu de requalifier la mise à la retraite du salarié en licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse ou pour motif économique ;

Que le salarié doit être débouté de sa demande de requalification et de condamnations subséquentes au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse ainsi que de complément d'indemnité conventionelle de licenciement ; que le jugement sera confirmé de ces chefs ; qu'il y sera ajouté le rejet de la demande de complément d'indemnité de mise à la retraite ;

5. Sur l'obligation d'information sur les droits à la retraite

Considérant qu'il est établi par les pièces versées au débat que le dispositif CASA a fait l'objet d'une négociation entre l'Etat, l'Unedic et les organisations syndicales ; que les organisations syndicales représentatives des salariés de la société PCA ont été consultées ; que le comité central d'entreprise a également été consulté ;

Considérant que le dispositif CASA a donné lieu à une présentation générale et collective aux salariés et à plusieurs autres réunions d'information ;

Que les salariés ont été informés de ce que leurs droits à la retraite seraient calculés sur leur salaire de référence ;

Que l'article 6.5 de l'accord national professionnel du 26 juillet 1999 définit des règles spécifiques pour les régimes complémentaires AGIRC et ARRCO ;

Qu'à l'issue d'un délai de réflexion d'un mois, les salariés devaient faire part de leur décision d'entrer ou non dans le dispositif de cessation anticipée d'activité ;

Que pour prendre une décision, ils ont également reçu un dossier d'information sur le dispositif comprenant un mémento, le texte de l' accord national professionnel du 26 juillet 1999 et un modèle d'avenant de suspension au contrat de travail ;

Qu'en outre, ils pouvaient poser leurs questions aux correspondants CASA qui avaient été désignés sur site et dont ils disposaient des coordonnées ; que ceux-ci se tenaient à leur disposition pour répondre à leurs demandes sur le dispositif et sur les modalités de départ ;

Que plus particulièrement chaque salarié a été convié à un entretien individuel avec un correspondant CASA afin de recevoir des informations complètes ;

Qu'il existait donc une information sur le dispositif ainsi que des moyens d'obtenir des informations complémentaires ;

Considérant par ailleurs que compte tenu de l'ancienneté du salarié au sein de PCA, il ne pouvait ni ignorer les modalités d'information mises à sa disposition ni le fait que ses droits à retraite ne pouvaient être calculés que sur sa période d'emploi effectif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le salarié a été dûment informé sur les conséquences de son adhésion sur sa retraite et que la société PCA n'a pas manqué à son obligation de loyauté contractuelle et de bonne foi envers lui ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef ;

6. Sur l'article 700 code de procédure civile et les dépens

Considérant que l'employeur succombe partiellement à l'action ;

Que l'équité commande d'allouer au salarié une indemnité pour frais irrépétibles de procédure à hauteur de 500 euros ;

Que l'employeur sera débouté de la demande qu'il forme sur le même fondement et condamné aux entiers dépens ;

Que le jugement entrepris sera réformé en ce sens ;

PAR CES MOTIFS:

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire,

Reçoit l'appel,

Confirme le jugement entrepris du conseil de prud'hommes de [Localité 1] du 26 mars 2013 en toutes ses dispositions sauf partiellement sur l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [B] [D] de ses demandes :

- d'obtention d'un certificat de travail mentionnant la pénibilité des postes occupés,

- de dommages et intérêts pour perte du droit à indemnité compensatrice de préavis et à congés payés incidents,

- de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement et de mise à la retraite,

Dit que la SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILE devra remettre à Monsieur [B] [D] dans le trimestre suivant la notification du présent arrêt l'historique individuel de la carrière de celui-ci et à défaut un double de ses bulletins de paie mentionnant les primes ou indemnités spécifiques au travail en équipe, de nuit ou à la chaîne ou un relevé informatique reprenant les mêmes informations,

Condamne la SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILE à payer à Monsieur [B] [D] les sommes suivantes :

- 7.200 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de formation,

- 500 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles de procédure,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILE aux entiers dépens.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2 ème alinéa de l'art 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Sylvie BOSI, Président, et par Madame Claudine AUBERT, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 11e chambre
Numéro d'arrêt : 13/01669
Date de la décision : 18/06/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 11, arrêt n°13/01669 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-18;13.01669 ?
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